Une vie, un devoir ...
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Une vie, un devoir ...
Depuis combien de temps marchait-il ? Il n'en savait rien. Trois jours, peut-être quatre. Ses bottes s'enfonçaient légèrement dans la neige dure et la nuit noire l'enveloppait de son long manteau. Un coup de vent balaya les nuages et révéla une lune dorée, unique témoin de son passage. Les rares habitants nocturnes préféraient éviter ce sinistre personnage qui s'avançait dans l'immensité de la plaine. L'homme portait un long manteau ample et un stetson masquait son visage. Seules veinules bleutées rayonnaient d'énergie. Il s'arrêta et releva la tête. Les rares étoiles qui perçaient à travers les épais nuages donnaient l'impression de minuscules flammes mourantes d'une bougie. Mais ce n'était pas pour admirer le ciel qu'il avait stoppé sa marche. Il les sentait. Très proche d'ici. Deux à trois cent mètres, pas plus. En baissant le visage, l'homme murmura:
-Je ne pensais pas qu'ils me retrouveraient aussi vite...
Comme pour accompagner ses paroles, une tache sombre apparue sur le sol. Des flammèches rouges dansaient autour et formaient des inscriptions étranges. Deux triangles, l'un à l'endroit, l'autre à l'envers, dans un cercle. Un brasier jaillit alors, baignant l'endroit d'une lumière torride. La neige avait déjà fondue, révélant une terre sèche et ocre. La chaleur ne fit pas reculer l'homme. Il n'esquissa pas un mouvement pour se protéger. Lorsque le tube incandescent cessa toute activité, une ombre se détacha des ténèbres. Elle se tenait droite, une armure de plaque rouge lui entourant la poitrine et une flamberge pendant sur son côté. Ses yeux rouges rencontrèrent ceux de l'homme et l'ombre esquissa un sourire. Avec une voix d'outre-tombe, elle déclara:
-Alors c'est toi ? Je me demande pourquoi les Omeradiës font tant de vacarme en bas.
L'ombre fut pris d'un spasme violent et tomba à genou. Une autre forme se dessina alors. Plus élancée mais pas moins disgracieuse.
-Tout simplement parce qu'il est dangereux, répondit la forme d'une voix féminine. Évite de parler d'eux comme ça.
La femme porta son attention sur l'homme qui n'avait toujours rien dit. Elle se lécha les lèvres et s'approcha. Pour tout vêtement, elle ne portait qu'une légère armure recouvrant sa poitrine et son bassin. Ses pieds nus faisaient dépérir l'endroit au fur et à mesure qu'elle s'avançait. Arrivé au niveau de l'homme, elle posa une main sur son épaule et releva son chapeau:
-Excuse moi chéri, il ne sait pas se tenir en surface. Tout ce que nous voulons, c'est te ramener pour que tu puisses être jugé et...
L'homme poussa la main de la femme et continua sa route. Il ne posa pas même un regard vers celui qui tenait sa poitrine entre ses mains. Un mur de flamme s'érigea alors, l'empêchant d'aller plus loin.
-Je crois que tu n'as pas très bien compris ce que je t'ai dit, lança la femme menaçante, Tu viens avec nous.
L'homme se tourna vers son interlocuteur. L'autre ombre s'était relevé et s'épousseta. Un sourire d'enfant ravi flottait sur son visage:
-Dis, s'il résiste, on a bien l'autorisation de l'amocher un peu hein ? Juste les jambes de cassées pour plus qu'il courre.
La femme poussa un soupire et hocha de la tête. Son acolyte sortit lentement son arme de son fourreau, les yeux pétillants d'envie.
-Vous n'êtes pas Omeradiës, l'interrompit l'homme, alors je n'ai pas affaire avec vous.
-Tu te crois plus fort que nous ? Seul contre deux c'est pas une bonne idée de nous provoquer.
Le démon bouillonnait de rage. L'aura qu'il dégageait était telle que les quelques papillons de nuit, attirés par la lumière, furent réduit en cendre, provoquant une pluie de particule dorée.
-Mon arme n'a pas à se salir pour des êtres aussi faibles que vous.
-Ho je vois. On est au courant par le petit tour de magie que t'as accompli pendant la guerre. Mais il y une chose que tu as omis de nous cacher...
L'homme cessa de parler et huma l'air. Sa compagne fit de même:
-Je crois qu'on nous a repéré. On les tue?
-Ce n'est pas ce qu'on nous a ordonné. Nous avons été imprudent.
Elle tourna un regard mystérieux vers l'homme.
-Nous nous reverrons, assura-t-elle, et cette fois, ne compte pas sur les Medülijjani pour te sauver.
En une fraction de seconde, les deux démons disparurent, laissant l'homme seul au milieu de la plaine. Ce dernier vacilla, posa un genou à terre et saisit la garde de son épée:
-Calme-toi, susurra-t-il, d'autres arrivent. Tu pourras...
Ces tremblements cessèrent et l'homme se redressa. Un roulement de tonnerre résonna alors et de l'obscurité de détacha un groupe de cinq cavaliers. Leurs chevaux, plus grand que la moyenne, avaient un pelage blanc comme un duvet de coton et les Elfes sur leur dos avait tout aussi fière allure. Les cheveux battant au vent, les lances d'argents reflétant la pâle lumière de la lune et la rapidité de leur course, un spectacle magnifique pour les yeux. En l'espace de quelques instants, les cavaliers atteignirent l'homme. Ils tournèrent en rond plusieurs fois autour de lui, remuant la tête dans tout les sens. Puis, ils baissèrent la tête et l'un d'eux interpella l'homme:
-Hé toi ! Nous avons senti des démons ! Les as-tu vu ?
-Non.
Un cavalier descendit de selle et tâta le sol de sa main:
-La terre a brulé. Elle souffre encore. Que s'est-il passé ici?
-Je ne sais pas. Je viens d'arriver.
-Nous devrions le ramener au camps, suggéra un autre. C'est histoire est louche et je ne le crois pas.
Le premier elfe acquiesça et fit un geste aux autres. Ils s'approchèrent lentement, lance pointée en avant. Celui qui était au sol avait ses mains devant lui, paume ouverte. Il était visiblement prêt à se servir de la magie si nécessaire. Des convulsions légères reprirent l'homme qui tenta malgré tout de ne pas tomber.
-Je suis désolé..., grinça-t-il entre ses dents.
Les chevaux renâclèrent et l'un d'entre eux se cabra. L'homme posa sa main sur son épée. Les Elfes réagirent au quart de tour. L'un d'entre eux envoya sa lance, visant la poitrine de l'humain tandis que l'autre préparait une incantation. L'homme sortit légèrement son épée de son fourreau avant de répéter:
-Je suis désolé...
Une aura sombre comme la nuit enveloppa l'endroit et le silence nocturne se déchira sous les hennissements des chevaux paniqués et les cris des Elfes.
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-Je ne pensais pas qu'ils me retrouveraient aussi vite...
Comme pour accompagner ses paroles, une tache sombre apparue sur le sol. Des flammèches rouges dansaient autour et formaient des inscriptions étranges. Deux triangles, l'un à l'endroit, l'autre à l'envers, dans un cercle. Un brasier jaillit alors, baignant l'endroit d'une lumière torride. La neige avait déjà fondue, révélant une terre sèche et ocre. La chaleur ne fit pas reculer l'homme. Il n'esquissa pas un mouvement pour se protéger. Lorsque le tube incandescent cessa toute activité, une ombre se détacha des ténèbres. Elle se tenait droite, une armure de plaque rouge lui entourant la poitrine et une flamberge pendant sur son côté. Ses yeux rouges rencontrèrent ceux de l'homme et l'ombre esquissa un sourire. Avec une voix d'outre-tombe, elle déclara:
-Alors c'est toi ? Je me demande pourquoi les Omeradiës font tant de vacarme en bas.
L'ombre fut pris d'un spasme violent et tomba à genou. Une autre forme se dessina alors. Plus élancée mais pas moins disgracieuse.
-Tout simplement parce qu'il est dangereux, répondit la forme d'une voix féminine. Évite de parler d'eux comme ça.
La femme porta son attention sur l'homme qui n'avait toujours rien dit. Elle se lécha les lèvres et s'approcha. Pour tout vêtement, elle ne portait qu'une légère armure recouvrant sa poitrine et son bassin. Ses pieds nus faisaient dépérir l'endroit au fur et à mesure qu'elle s'avançait. Arrivé au niveau de l'homme, elle posa une main sur son épaule et releva son chapeau:
-Excuse moi chéri, il ne sait pas se tenir en surface. Tout ce que nous voulons, c'est te ramener pour que tu puisses être jugé et...
L'homme poussa la main de la femme et continua sa route. Il ne posa pas même un regard vers celui qui tenait sa poitrine entre ses mains. Un mur de flamme s'érigea alors, l'empêchant d'aller plus loin.
-Je crois que tu n'as pas très bien compris ce que je t'ai dit, lança la femme menaçante, Tu viens avec nous.
L'homme se tourna vers son interlocuteur. L'autre ombre s'était relevé et s'épousseta. Un sourire d'enfant ravi flottait sur son visage:
-Dis, s'il résiste, on a bien l'autorisation de l'amocher un peu hein ? Juste les jambes de cassées pour plus qu'il courre.
La femme poussa un soupire et hocha de la tête. Son acolyte sortit lentement son arme de son fourreau, les yeux pétillants d'envie.
-Vous n'êtes pas Omeradiës, l'interrompit l'homme, alors je n'ai pas affaire avec vous.
-Tu te crois plus fort que nous ? Seul contre deux c'est pas une bonne idée de nous provoquer.
Le démon bouillonnait de rage. L'aura qu'il dégageait était telle que les quelques papillons de nuit, attirés par la lumière, furent réduit en cendre, provoquant une pluie de particule dorée.
-Mon arme n'a pas à se salir pour des êtres aussi faibles que vous.
-Ho je vois. On est au courant par le petit tour de magie que t'as accompli pendant la guerre. Mais il y une chose que tu as omis de nous cacher...
L'homme cessa de parler et huma l'air. Sa compagne fit de même:
-Je crois qu'on nous a repéré. On les tue?
-Ce n'est pas ce qu'on nous a ordonné. Nous avons été imprudent.
Elle tourna un regard mystérieux vers l'homme.
-Nous nous reverrons, assura-t-elle, et cette fois, ne compte pas sur les Medülijjani pour te sauver.
En une fraction de seconde, les deux démons disparurent, laissant l'homme seul au milieu de la plaine. Ce dernier vacilla, posa un genou à terre et saisit la garde de son épée:
-Calme-toi, susurra-t-il, d'autres arrivent. Tu pourras...
Ces tremblements cessèrent et l'homme se redressa. Un roulement de tonnerre résonna alors et de l'obscurité de détacha un groupe de cinq cavaliers. Leurs chevaux, plus grand que la moyenne, avaient un pelage blanc comme un duvet de coton et les Elfes sur leur dos avait tout aussi fière allure. Les cheveux battant au vent, les lances d'argents reflétant la pâle lumière de la lune et la rapidité de leur course, un spectacle magnifique pour les yeux. En l'espace de quelques instants, les cavaliers atteignirent l'homme. Ils tournèrent en rond plusieurs fois autour de lui, remuant la tête dans tout les sens. Puis, ils baissèrent la tête et l'un d'eux interpella l'homme:
-Hé toi ! Nous avons senti des démons ! Les as-tu vu ?
-Non.
Un cavalier descendit de selle et tâta le sol de sa main:
-La terre a brulé. Elle souffre encore. Que s'est-il passé ici?
-Je ne sais pas. Je viens d'arriver.
-Nous devrions le ramener au camps, suggéra un autre. C'est histoire est louche et je ne le crois pas.
Le premier elfe acquiesça et fit un geste aux autres. Ils s'approchèrent lentement, lance pointée en avant. Celui qui était au sol avait ses mains devant lui, paume ouverte. Il était visiblement prêt à se servir de la magie si nécessaire. Des convulsions légères reprirent l'homme qui tenta malgré tout de ne pas tomber.
-Je suis désolé..., grinça-t-il entre ses dents.
Les chevaux renâclèrent et l'un d'entre eux se cabra. L'homme posa sa main sur son épée. Les Elfes réagirent au quart de tour. L'un d'entre eux envoya sa lance, visant la poitrine de l'humain tandis que l'autre préparait une incantation. L'homme sortit légèrement son épée de son fourreau avant de répéter:
-Je suis désolé...
Une aura sombre comme la nuit enveloppa l'endroit et le silence nocturne se déchira sous les hennissements des chevaux paniqués et les cris des Elfes.
- Spoiler:
- Augmentation en puissance svp
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Dernière édition par Itrenog le Ven 14 Mai 2010 - 19:23, édité 2 fois
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Re: Une vie, un devoir ...
Après quatre jours de marche harassants, l'homme aperçut les premiers faubourgs de Munduce. Les bâtisses constituées d'un toit de paille et de mur en torchis semblaient s'amonceler sans ordre préétabli, gravitant seulement autour d'un point central où se dressait une cathédrale aux murs de pierres et aux vitraux multicolores. La partie est du village était recouverte par une épaisse forêt tandis que tout le reste n'était que champs de céréales en tout genre. Blé, orge, millet, froment, tout était cultivé. L'essentiel de la population vivant de l'autosuffisance, une terre mal entretenue signifiait une famine durant l'hiver. L'homme entreprit de descendre du plateau surélevé sur lequel il se trouvait afin de se mêler le plus rapidement possible à la foule. L'accident qui avait eu lieu quelques jours auparavant l'avait forcé à se diriger vers cette l'immense ville portuaire afin d'y trouver refuge pendant quelques temps. Dans les champs, les paysans étaient occupés à couper les épis à grands mouvements de hanche, s'arrêtant parfois pour boire une outre d'eau qui passait d'homme en homme et profiter d'un moment de répit. Les ruelles de terre du village étaient lieu ou animaux et humains se confondaient. Les enfants se roulaient dans la terre et jouaient avec un chien, les vendeurs tentaient de proposer un cochon plus gros que celui du voisin, et les femmes les plus rustres tranchaient la tête des poulets qui terminaient déplumés et ébouillantés quelques instants plus tard. Une telle cacophonie masquerait sans problème un inconnu qui s'aventurerait dans le village. L'homme se fraya tant bien que mal un chemin à travers la foule dense pour atterrir devant la cathédrale qu'il n'avait qu'entrevu de loin. Sur la façade frontale, trois portails centrés sur le bas de l'édifice en ouvraient l'accès, formés de voûtes profondes en arcs brisés, surmontées d'un fronton triangulaire. Les arcs brisés étaient formés de deux portions de cercle qui se butaient à leur sommet et conféraient à la cathédrale une architecture particulière. Plusieurs sculptures ornaient le portail central dont une qui représentait le couronnement d'un homme par une créature ailée et plus haut, dans un vitrail en forme de cercle, s'inscrivait une rose qui renvoyait un rouge nacré presque irréel. Au dessus du vitrail se trouvait diverses statues de pierre symbolisant un combat contre les démons. Deux tours à bases carrées entourant le pignon de la nef venaient clore l'édifice, véritable trait d'union entre le ciel et la terre.
-Une pièce pour un nécessiteux !
Une main agrippa le manteau de l'homme et tirait vigoureusement dessus. Le mendiant ne portait qu'un bout de tissu pour tout vêtement et aucune chausse. Une longue barbe grisâtre lui mangeait le visage et ses yeux étaient aussi vitreux que ceux d'un mourant.
-Une pièce pour un nécessiteux ! Répéta-t-il en tirant un peu plus.
L'homme posa sa main sur celle du vieillard et l'ôta sans un regard. Alors qu'il s'apprêtait à continuer sa route, le mendiant se releva et cria à plein poumons :
-Que Sigmar te brûle vivant !
Il prit les passants à témoins, agitant les bras comme un possédé et délira :
-Cet homme et le fruit du démon ! Brûlez le avant qu'il n'emporte vos enfants !
Il s'assit dans un coin, joignit ses mains et balbutia des inepties dans une langue inconnue. Les paysans qui s'étaient arrêtés un temps pour suivre le spectacle avairnt reprit leurs activités, comme s'ils avaient l'habitude de ce genre de comportement. Certains cependant, en entendant le nom de Sigmar, s'étaient agenouillés en direction de la chapelle et avaient joint leur main de la même façon que le mendiant avant de continuer leur route.
L'homme partit sans demander son reste. Une cohorte de soldat arriva au moment où il quittait la place et emmenèrent le vieillard loin de le foule. Du reste, la traversée du village se fit sans trop de problèmes, l'essentiel des humains concentrés à leur travail. A la fin de la journée, l'homme décida de faire une halte à une taverne. Lorsqu'il ouvrit la porte, il découvrit que l'endroit miteux ne servait que de lieu de beuverie à un groupe d'hommes armés. Probablement des soldats de Monduce. Leur cuirasse portait une flamme rouge, surligné d'un fil d'or sur fond noir. Dès qu'ils aperçurent l'inconnu, ils se figèrent un temps et reprirent une conversation a voix basse. L'homme s'installa au fond et commanda une pinte. Le groupe de soldat s'avança vers lui et l'un d'eux le toisa un moment avant de déclarer d'une voix forte :
-Est-ce que tu sais te battre ?
L'homme attendit patiemment d'avoir sa pinte et but lentement une gorgée.
-J'ai quelques notions, éluda-t-il.
-Parfait ! Ça te dirait de te joindre à nous ? On a une mission à remplir et on a grand besoin de renforts.
-La garde ne se suffit plus à elle même ?
Un air désapprobateur passa dans l'ensemble des soldats. Les temps étaient dur en effet. La variole avait emporté la moitié de l'armée du Duce et malgré les efforts de ce dernier, la situation était très difficile pour les survivants.
-Disons simplement qu'on veut éviter d'avoir des ennuis, expliqua le garde, Tu vois, le but est d'accompagner la fille d'un noble chez les Elfes. Il semblerait qu'un accord doit de nouveau être signé. Mais comme on est sûr de rien, on préfère prévoir.
-Et pourquoi devrais-je me sentir concerné par vos affaires ?
-Hé bien, tu pourrais toucher un beau paquet si on réussit. C'est pas l'argent qui manque tu sais...
L'homme sirota un moment sa pinte tandis que le soldat triturait nerveusement le pommeau de son épée. L'impatience commença à s'insinuer dans l'esprit des autres et quelques uns retournèrent à leur verre en grognant. L'argent n'était pas intéressante. En revanche, s'éloigner suffisamment des terres humaines serait sûrement une bonne chose.
-Quand partez-vous ? S'enquit l'homme.
Le garde sourit, satisfait de la réponse. Il chuchota à voix basse avec un de ses homme et répondit :
-Disons deux ou trois jours, le temps de préparer le voyage.
L'homme acquiesça légèrement de la tête.
-Heu, reprit-il, on pourrait peut-être savoir ton prénom ?
-Itrenog.
Une goutte de sueur coula le long de l'échine du fantassin qui remercia son interlocuteur. Il s'assit avec ses camarades, aussi blanc qu'un linge. Il tourna les yeux dehors afin de se changer les idées et entrevit une ombre cachée dans le recoin d'une rue qui s'éclipsa en tout juste un battement de cil.
-Une autre pinte pour moi, commanda-t-il au tavernier sous les regards interrogateurs des autres. Je veux profiter de cette soirée tranquille ...
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Valid Yuke: +24 Rés
-Une pièce pour un nécessiteux !
Une main agrippa le manteau de l'homme et tirait vigoureusement dessus. Le mendiant ne portait qu'un bout de tissu pour tout vêtement et aucune chausse. Une longue barbe grisâtre lui mangeait le visage et ses yeux étaient aussi vitreux que ceux d'un mourant.
-Une pièce pour un nécessiteux ! Répéta-t-il en tirant un peu plus.
L'homme posa sa main sur celle du vieillard et l'ôta sans un regard. Alors qu'il s'apprêtait à continuer sa route, le mendiant se releva et cria à plein poumons :
-Que Sigmar te brûle vivant !
Il prit les passants à témoins, agitant les bras comme un possédé et délira :
-Cet homme et le fruit du démon ! Brûlez le avant qu'il n'emporte vos enfants !
Il s'assit dans un coin, joignit ses mains et balbutia des inepties dans une langue inconnue. Les paysans qui s'étaient arrêtés un temps pour suivre le spectacle avairnt reprit leurs activités, comme s'ils avaient l'habitude de ce genre de comportement. Certains cependant, en entendant le nom de Sigmar, s'étaient agenouillés en direction de la chapelle et avaient joint leur main de la même façon que le mendiant avant de continuer leur route.
L'homme partit sans demander son reste. Une cohorte de soldat arriva au moment où il quittait la place et emmenèrent le vieillard loin de le foule. Du reste, la traversée du village se fit sans trop de problèmes, l'essentiel des humains concentrés à leur travail. A la fin de la journée, l'homme décida de faire une halte à une taverne. Lorsqu'il ouvrit la porte, il découvrit que l'endroit miteux ne servait que de lieu de beuverie à un groupe d'hommes armés. Probablement des soldats de Monduce. Leur cuirasse portait une flamme rouge, surligné d'un fil d'or sur fond noir. Dès qu'ils aperçurent l'inconnu, ils se figèrent un temps et reprirent une conversation a voix basse. L'homme s'installa au fond et commanda une pinte. Le groupe de soldat s'avança vers lui et l'un d'eux le toisa un moment avant de déclarer d'une voix forte :
-Est-ce que tu sais te battre ?
L'homme attendit patiemment d'avoir sa pinte et but lentement une gorgée.
-J'ai quelques notions, éluda-t-il.
-Parfait ! Ça te dirait de te joindre à nous ? On a une mission à remplir et on a grand besoin de renforts.
-La garde ne se suffit plus à elle même ?
Un air désapprobateur passa dans l'ensemble des soldats. Les temps étaient dur en effet. La variole avait emporté la moitié de l'armée du Duce et malgré les efforts de ce dernier, la situation était très difficile pour les survivants.
-Disons simplement qu'on veut éviter d'avoir des ennuis, expliqua le garde, Tu vois, le but est d'accompagner la fille d'un noble chez les Elfes. Il semblerait qu'un accord doit de nouveau être signé. Mais comme on est sûr de rien, on préfère prévoir.
-Et pourquoi devrais-je me sentir concerné par vos affaires ?
-Hé bien, tu pourrais toucher un beau paquet si on réussit. C'est pas l'argent qui manque tu sais...
L'homme sirota un moment sa pinte tandis que le soldat triturait nerveusement le pommeau de son épée. L'impatience commença à s'insinuer dans l'esprit des autres et quelques uns retournèrent à leur verre en grognant. L'argent n'était pas intéressante. En revanche, s'éloigner suffisamment des terres humaines serait sûrement une bonne chose.
-Quand partez-vous ? S'enquit l'homme.
Le garde sourit, satisfait de la réponse. Il chuchota à voix basse avec un de ses homme et répondit :
-Disons deux ou trois jours, le temps de préparer le voyage.
L'homme acquiesça légèrement de la tête.
-Heu, reprit-il, on pourrait peut-être savoir ton prénom ?
-Itrenog.
Une goutte de sueur coula le long de l'échine du fantassin qui remercia son interlocuteur. Il s'assit avec ses camarades, aussi blanc qu'un linge. Il tourna les yeux dehors afin de se changer les idées et entrevit une ombre cachée dans le recoin d'une rue qui s'éclipsa en tout juste un battement de cil.
-Une autre pinte pour moi, commanda-t-il au tavernier sous les regards interrogateurs des autres. Je veux profiter de cette soirée tranquille ...
- Spoiler:
- Augmentation en résistance svp
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Valid Yuke: +24 Rés
Dernière édition par Itrenog le Ven 14 Mai 2010 - 19:24, édité 1 fois
Itrenog- Age : 31
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Re: Une vie, un devoir ...
Deux jours après le recrutement d'Itrenog, le groupe de soldats se donna rendez-vous à la sortie nord-est des faubourgs. La matinée était fraiche. Plus que de coutume en tout cas. La fille du noble était dans une calèche au fenêtre recouverte par d'épais rideau pourpre. Les chevaux frappaient le sol du pied, impatient de partir et des trombes de buée jaillissaient de leur naseaux.
-Bon, tout le monde est prêt ?, demanda le capitaine.
D'une seule voix, les soldats répondirent. Trente guerriers et dix mages. Ils formèrent un cercle autour du véhicule et le chef ouvrit la marche. Le voyage devait durer une semaine, la ville Elfe se trouvant au bordure du fleuve Yana. Malgré le Pacte des Cinq, le noble n'avait pas lésiné sur les moyens pour assurer la protection de sa fille. Les brigands étaient légions et on pouvait aisément tirer un bon pactole d'une rançon. Durant le trajet, les gardes échangeaient des plaisanteries tandis que les mages furetaient les moindres recoins. Ils avaient bardé le calèche de protection magique et étaient les plus nerveux. Même si l'éventualité qu'un mage attaque le convoi était mince, il fallait parer à tout événement.
-Jared , ordonna une voix féminine après dix minutes de marche, Viens.
Le capitaine s'avança d'une démarche incertaine a côté d'une fenêtre :
-Pourrais-je savoir qui est cet homme ? Je ne crois pas que mon père t'ait ordonné d'engager des mercenaires.
-Nous pensions que cela améliorerait votre sécurité Madame, se défendit le soldat.
-Tu n'es pas payé pour penser, siffla la femme, mais pour exécuter des ordres. Sais-tu seulement si il est digne de confiance ?
Le reste des soldats s'étaient tu, attendant une réponse de leur supérieur.
-S'il tente quoique ce soit, nous le tuerons, assura-t-il.
-Fais le venir.
Le soldat s'inclina gauchement et se dirigea vers l'homme qui n'avait pas l'air d'avoir prêté oreille à la discution le concernant. Il lui demanda d'aller voir la fille du noble ce à quoi il n'objecta pas. Avec une stoïcité presque mécanique, l'homme se plaça au côté du calèche.
-Comment vous appelez-vous mercenaire ? Questionna la femme.
-Itrenog suffira.
-Ce n'est donc pas votre nom ?
Contrairement au garde, aucune note de peur ou autre sentiment n'émanait de sa voix. Elle semblait plus vivace que la moyenne.
-Je ne pense pas qu'un nom définisse une personne.
La femme n'insista pas. Elle laissa planer un silence avant de reprendre :
-D'où venez-vous ?
-Mon rôle est d'assurer votre protection, pas de satisfaire votre curiosité.
Le capitaine s'avança alors et pointa son doigt vers l'homme :
-Ce n'est pas ainsi que l'on parle à Madame ! , s'emporta-t-il, Elle vous a demandé quelque chose, répondez immédiatement !
-Suffit Jared ! Je ne t'ai pas demandé d'intervenir. Cela ne fait rien, nous aurons les réponses que nous souhaitons plus tard.
L'assurance de la femme laissa perplexe le garde mais il resta silencieux de peur de l'irriter d'avantage. Son père était un homme influent et il aurait pu le rétrograder aussi facilement qu'on balaie la poussière au vent. Le reste de la journée se passa sans encombre. Le convoi avançait plus rapidement que prévu ce qui avait pour effet de gonfler le moral des soldats. Seuls les mages restaient aux aguets.
-Je n'aime pas ça, confia l'un d'entre eux à ses camarades, Je ressens une présence maléfique mais je n'arrive pas à la localiser.
-Probablement les effets délirants de vos pouvoirs, se moqua un soldat, il n'y a rien à craindre ici.
Pour toute réponse, il n'eut droit qu'à un grommellement désapprobateur. Le soir venu, la troupe s'arrêta à l'orée d'un bosquet. Un grand foyer fut allumé et les hommes commencèrent à préparer le repas. Un grand chaudron fut disposé et une odeur agréable d'épice se répandit dans le campement de fortune. Durant la cuisson, des bivouacs furent érigés, le plus grand étant réservé à la fille du noble. Lorsque cette dernière sortit du calèche, elle portait une longue robe noire parée de motifs délicats brodés en fil d'or. Les larges manches recouvraient des mains gantées, de tout aussi belle facture que l'habit. Son visage au port altier était d'une très grande beauté. Sa peau aussi claire et pure qu'un lac, ses cheveux aussi noirs que le plumage d'un corbeau cascadaient le long de ses épaules et deux nattes s'entrelaçaient à l'arrière de sa nuque. On aurait dit à s'y méprendre un coiffure typique elfe. Les soldats s'inclinèrent sur son passage et la femme se dirigea vers sa tente.
-Le repas est servi ! Beugla le cuisinier.
Avec des râles de soulagement, les hommes s'amoncelèrent autour du feu pour se servir. L'ambiance joyeuse allait de paire avec la sensation de se rassasier. Un bon ragout de bœuf et de bons légumes bien chaud était toujours les bienvenues lors d'une mission. C'était un moment privilégié entre soldats. Chacun racontait une partie de sa vie, de son service militaire, et on sentait une véritable fraternité entre les hommes. Le capitaine entra dans la tente de la noble et en ressortit une dizaine de minutes plus tard. Il s'approcha d'Itrenog – ainsi qu'il avait dit s'appeler – se racla la gorge avec force et dit :
-Madame souhaite vous voir.
-Encore ? C'est d'une nourrisse dont elle a besoin, pas d'un garde.
Le garde se crispa mais continua doucement:
-Elle dit que c'est important.
L'homme resta un instant silencieux puis se leva et suivit le garde. Ce dernier semblait nerveux. La présence d'une telle femme lui faisait perdre tous ses moyens. Il souleva le pan de toile qui faisait office d'entrée et s'inclina :
-Le mercenaire est ici Madame.
Pas de réponse. Itrenog se baissa et entra. L'intérieur, rudimentaire, avait pour tout mobilier un lit de fortune en peau de bête et quelques coffres contenant les effets personnels de la dame. Ladite dame était assise en tailleur au sol, les yeux clos et respirait calmement. Ce fut l'homme qui parla le premier :
-Puis-je savoir à quoi rime tout ceci ?
La femme souleva lentement ses paupières. Une étincelle indescriptible brilla un instant dans son regard lorsqu'elle vit l'homme avant de disparaître. Elle répondit néanmoins d'une voix posée :
-J'essaie simplement de savoir si vous êtes quelqu'un en qui je peux me fier.
-Quel intérêt ? Vous n'entendrez plus parler de moi une fois que j'aurais accompli ce que je dois faire.
Sans répondre, elle invita l'homme à s'assoir en face d'elle et lui servit une tasse de thé. L'ambiance était étonnement silencieuse. Les deux personnes se contentaient de s'observer, sans un mot. Seules les joyeusetés des soldats allégeaient l'atmosphère.
-Vous avez dit vous appeler Itrenog. Je suppose que c'est un nom d'emprunt pour ne pas vous démasquer.
-Peut-être.
Silence. La femme jaugea un moment son interlocuteur, comme si elle cherchait à prévoir ses mouvements à l'avance. Mais devant ce visage de marbre, un tel examen était inutile.
-Autrefois j'ai connu quelqu'un qui portait le même nom que vous. Il vous ressemblait en tout point sauf pour ce qui est de ceci.
Avec ses doigts elle dessina les marques que l'homme avait sur son visage puis bu une gorgée de thé. Pas de réaction. C'était comme si rien ne pouvait l'atteindre.
-Sort d'illusion de faible intensité pour le masquer aux soldats, constata la femme, Ne vous inquiétez pas, je ne dirais rien.
L'homme souleva un sourcil. C'était la seule fois que son visage esquissait un semblant de vie. Surement ne s'attendait-il pas à ce que la fille d'un noble perce à travers une illusion magique. Ils terminèrent leur thé en silence et après quelques minutes, l'homme se leva et se dirigea vers la sortie de la tente. La femme l'apostropha :
-Vous êtes gaucher ? Demanda-t-elle mine de rien.
-Pourquoi cela ?
-Simple question …
Lorsque l'homme fut partit, elle siffla et un faucon se matérialisa sur son épaule. Sa consistance était presque fantomatique, nappée d'un brouillard bleuté, et ses yeux d'un rouge profond. Elle lui murmura quelques mots à l'oreille et sous la clarté de la lune blonde, le rapace prit son envol.
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-Bon, tout le monde est prêt ?, demanda le capitaine.
D'une seule voix, les soldats répondirent. Trente guerriers et dix mages. Ils formèrent un cercle autour du véhicule et le chef ouvrit la marche. Le voyage devait durer une semaine, la ville Elfe se trouvant au bordure du fleuve Yana. Malgré le Pacte des Cinq, le noble n'avait pas lésiné sur les moyens pour assurer la protection de sa fille. Les brigands étaient légions et on pouvait aisément tirer un bon pactole d'une rançon. Durant le trajet, les gardes échangeaient des plaisanteries tandis que les mages furetaient les moindres recoins. Ils avaient bardé le calèche de protection magique et étaient les plus nerveux. Même si l'éventualité qu'un mage attaque le convoi était mince, il fallait parer à tout événement.
-Jared , ordonna une voix féminine après dix minutes de marche, Viens.
Le capitaine s'avança d'une démarche incertaine a côté d'une fenêtre :
-Pourrais-je savoir qui est cet homme ? Je ne crois pas que mon père t'ait ordonné d'engager des mercenaires.
-Nous pensions que cela améliorerait votre sécurité Madame, se défendit le soldat.
-Tu n'es pas payé pour penser, siffla la femme, mais pour exécuter des ordres. Sais-tu seulement si il est digne de confiance ?
Le reste des soldats s'étaient tu, attendant une réponse de leur supérieur.
-S'il tente quoique ce soit, nous le tuerons, assura-t-il.
-Fais le venir.
Le soldat s'inclina gauchement et se dirigea vers l'homme qui n'avait pas l'air d'avoir prêté oreille à la discution le concernant. Il lui demanda d'aller voir la fille du noble ce à quoi il n'objecta pas. Avec une stoïcité presque mécanique, l'homme se plaça au côté du calèche.
-Comment vous appelez-vous mercenaire ? Questionna la femme.
-Itrenog suffira.
-Ce n'est donc pas votre nom ?
Contrairement au garde, aucune note de peur ou autre sentiment n'émanait de sa voix. Elle semblait plus vivace que la moyenne.
-Je ne pense pas qu'un nom définisse une personne.
La femme n'insista pas. Elle laissa planer un silence avant de reprendre :
-D'où venez-vous ?
-Mon rôle est d'assurer votre protection, pas de satisfaire votre curiosité.
Le capitaine s'avança alors et pointa son doigt vers l'homme :
-Ce n'est pas ainsi que l'on parle à Madame ! , s'emporta-t-il, Elle vous a demandé quelque chose, répondez immédiatement !
-Suffit Jared ! Je ne t'ai pas demandé d'intervenir. Cela ne fait rien, nous aurons les réponses que nous souhaitons plus tard.
L'assurance de la femme laissa perplexe le garde mais il resta silencieux de peur de l'irriter d'avantage. Son père était un homme influent et il aurait pu le rétrograder aussi facilement qu'on balaie la poussière au vent. Le reste de la journée se passa sans encombre. Le convoi avançait plus rapidement que prévu ce qui avait pour effet de gonfler le moral des soldats. Seuls les mages restaient aux aguets.
-Je n'aime pas ça, confia l'un d'entre eux à ses camarades, Je ressens une présence maléfique mais je n'arrive pas à la localiser.
-Probablement les effets délirants de vos pouvoirs, se moqua un soldat, il n'y a rien à craindre ici.
Pour toute réponse, il n'eut droit qu'à un grommellement désapprobateur. Le soir venu, la troupe s'arrêta à l'orée d'un bosquet. Un grand foyer fut allumé et les hommes commencèrent à préparer le repas. Un grand chaudron fut disposé et une odeur agréable d'épice se répandit dans le campement de fortune. Durant la cuisson, des bivouacs furent érigés, le plus grand étant réservé à la fille du noble. Lorsque cette dernière sortit du calèche, elle portait une longue robe noire parée de motifs délicats brodés en fil d'or. Les larges manches recouvraient des mains gantées, de tout aussi belle facture que l'habit. Son visage au port altier était d'une très grande beauté. Sa peau aussi claire et pure qu'un lac, ses cheveux aussi noirs que le plumage d'un corbeau cascadaient le long de ses épaules et deux nattes s'entrelaçaient à l'arrière de sa nuque. On aurait dit à s'y méprendre un coiffure typique elfe. Les soldats s'inclinèrent sur son passage et la femme se dirigea vers sa tente.
-Le repas est servi ! Beugla le cuisinier.
Avec des râles de soulagement, les hommes s'amoncelèrent autour du feu pour se servir. L'ambiance joyeuse allait de paire avec la sensation de se rassasier. Un bon ragout de bœuf et de bons légumes bien chaud était toujours les bienvenues lors d'une mission. C'était un moment privilégié entre soldats. Chacun racontait une partie de sa vie, de son service militaire, et on sentait une véritable fraternité entre les hommes. Le capitaine entra dans la tente de la noble et en ressortit une dizaine de minutes plus tard. Il s'approcha d'Itrenog – ainsi qu'il avait dit s'appeler – se racla la gorge avec force et dit :
-Madame souhaite vous voir.
-Encore ? C'est d'une nourrisse dont elle a besoin, pas d'un garde.
Le garde se crispa mais continua doucement:
-Elle dit que c'est important.
L'homme resta un instant silencieux puis se leva et suivit le garde. Ce dernier semblait nerveux. La présence d'une telle femme lui faisait perdre tous ses moyens. Il souleva le pan de toile qui faisait office d'entrée et s'inclina :
-Le mercenaire est ici Madame.
Pas de réponse. Itrenog se baissa et entra. L'intérieur, rudimentaire, avait pour tout mobilier un lit de fortune en peau de bête et quelques coffres contenant les effets personnels de la dame. Ladite dame était assise en tailleur au sol, les yeux clos et respirait calmement. Ce fut l'homme qui parla le premier :
-Puis-je savoir à quoi rime tout ceci ?
La femme souleva lentement ses paupières. Une étincelle indescriptible brilla un instant dans son regard lorsqu'elle vit l'homme avant de disparaître. Elle répondit néanmoins d'une voix posée :
-J'essaie simplement de savoir si vous êtes quelqu'un en qui je peux me fier.
-Quel intérêt ? Vous n'entendrez plus parler de moi une fois que j'aurais accompli ce que je dois faire.
Sans répondre, elle invita l'homme à s'assoir en face d'elle et lui servit une tasse de thé. L'ambiance était étonnement silencieuse. Les deux personnes se contentaient de s'observer, sans un mot. Seules les joyeusetés des soldats allégeaient l'atmosphère.
-Vous avez dit vous appeler Itrenog. Je suppose que c'est un nom d'emprunt pour ne pas vous démasquer.
-Peut-être.
Silence. La femme jaugea un moment son interlocuteur, comme si elle cherchait à prévoir ses mouvements à l'avance. Mais devant ce visage de marbre, un tel examen était inutile.
-Autrefois j'ai connu quelqu'un qui portait le même nom que vous. Il vous ressemblait en tout point sauf pour ce qui est de ceci.
Avec ses doigts elle dessina les marques que l'homme avait sur son visage puis bu une gorgée de thé. Pas de réaction. C'était comme si rien ne pouvait l'atteindre.
-Sort d'illusion de faible intensité pour le masquer aux soldats, constata la femme, Ne vous inquiétez pas, je ne dirais rien.
L'homme souleva un sourcil. C'était la seule fois que son visage esquissait un semblant de vie. Surement ne s'attendait-il pas à ce que la fille d'un noble perce à travers une illusion magique. Ils terminèrent leur thé en silence et après quelques minutes, l'homme se leva et se dirigea vers la sortie de la tente. La femme l'apostropha :
-Vous êtes gaucher ? Demanda-t-elle mine de rien.
-Pourquoi cela ?
-Simple question …
Lorsque l'homme fut partit, elle siffla et un faucon se matérialisa sur son épaule. Sa consistance était presque fantomatique, nappée d'un brouillard bleuté, et ses yeux d'un rouge profond. Elle lui murmura quelques mots à l'oreille et sous la clarté de la lune blonde, le rapace prit son envol.
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Re: Une vie, un devoir ...
Le lendemain, le convoi reprit la route dans la matinée. L'air frais revigorait les soldats. Après tout, la température grimpante de la journée les faisaient suffoquer sous leurs lourdes armures de fer. Le capitaine passa de nouveau en tête et la marche continua. La vie s'éveillait petit à petit dans les fourrés. Les lapins, curieux du spectacle, sortaient la tête de leur terrier avant de disparaître rapidement, apeurés par tant de vacarme. Les oiseaux dessinaient des cercles concentriques autour de la roulotte tandis que le vent apportait le doux parfum des fleurs qui bourgeonnaient. A la mi-journée, la troupe arriva à l'entrée d'un bosquet. Le chemin s'y enfonçait et disparaissait dans ses profondeurs.
-C'est bizarre, marmonna le capitaine, je ne me souviens pas devoir passer par une forêt …
Il accorda dix minutes de pause à ses hommes le temps de décider de la marche à suivre avec la noblesse. Les mages restaient silencieux. Toutes leurs craintes semblaient s'être matérialisées dans ce bois. Les chevaux battaient nerveusement du pied. Le chef arriva et ordonna à ses troupes d'avancer. Il n'y avait, selon lui, aucun danger à traverser une quelconque forêt hormis de tomber nez à nez avec un ours. Au quel cas, l'épée résoudrait le problème. Le convoi progressa relativement bien. La route semblait ne pas avoir souffert de ce retour de végétation et ils sortirent du bosquet en une heure à peine. De l'autre côté, une longue plaine s'étendait à perte de vue. Le vent faisait onduler l'herbe verte et on pouvait voir des troupeaux de ce qui ressemblait à des buffles géants courir sur toute la longueur de la steppe. Le soleil à son zénith dardait ses rayons puissants sur le convoi mais personne ne se plaignit. Plus tôt ils auraient quittés cet endroit et plus tôt ils seraient en sécurité. Car un terrain aussi plat était un endroit rêvé pour une embuscade. Toute la journée, ils marchèrent dans l'immensité verte sans jamais voir le bout de leur chemin. La nuit tomba et le moral des soldats en avaient pris un coup. Leur réserve d'eau étaient sérieusement entamée et s'ils ne traversaient pas la plaine le lendemain, c'était la mort assurée. Comme la veille, le marmiton prépara un ragout et l'ambiance joyeuse finit par reprendre le dessus. Le capitaine s'avança vers Itrenog avec un bol à la main :
-Tenez. Ça vous fera du bien de manger un peu.
-Merci mais je n'ai pas faim.
Le soldat considéra un moment son interlocuteur mais n'insista pas. Il déposa son bol à côté du sien et commença à manger.
-Vous savez, je commence à croire que cette mission cache autre chose qu'un simple traité.
-Possible.
-C'est vrai quoi, continua-t-il, pourquoi vouloir signer quelque chose d'autre alors que le Pacte des Cinq est toujours valable ?
Le soldat prit une autre bouchée et grogna quelque chose pour lui. Les soldats devant eux s'amusaient à un jeu de dés et le perdant devait boire sa chopine cul-sec. Le capitaine leur cria de ne pas se souler étant donné que si l'eau venait à manquer, seul la bière resterait.
-Enfin, fit-il de nouveau à Itrenog, je me pose surement trop de questions. Il y a surement une bonne raison à tout ça …
Un bruissement de feuille attira l'attention des deux hommes. Le capitaine posa lentement son bol de terre cuite et posa une main sur la garde de son épée. Il fit signe un l'un des magicien du camps qui éclaira la zone avec un sort de faible ampleur. Un mulot se tenait droit devant eux. Sa respiration était saccadée comme s'il avait couru pour échapper à un prédateur. Le capitaine se détendit ainsi que le mage. Le rongeur tourna la tête sur le côté. Entre ses mains, il tenait un gland qu'il s'apprêtait surement à ramener dans son terrier. Mais dans son regard, c'était la peur que l'on pouvait lire. Itrenog leva la tête. Pas le moindre rapace ou autre oiseau pouvant le menacer. Autre chose le poursuivait, mais quoi ? Le mulot fut alors happé dans l'ombre avec une vitesse surprenante et on n'entendit plus que ses couinements désarticulés ainsi que ses os se broyer. Itrenog posa une main sur l'épaule du capitaine :
-Préparez-vos hommes, ils sont là.
-Qui ça ? Questionna brusquement le soldat, Qui est là ?
-Eux.
Une masse blanchâtre difforme rampait lentement vers eux. Deux yeux globuleux les fixaient et un cri s'échappa d'une bouche torve d'où dépassaient une série de dents baveuses. La queue du rongeur en dépassait et on pouvait voir sans problème son corps se décomposer à travers la fine peau de la créature. Un cercle de flamme l'entoura alors, la consumant entièrement dans des jappements de souffrance. Il ne subsistait qu'un petit tas de cendre encore fumant. Le mage courrut dans leur direction :
-C'était une goule ? C'est impossible nous ne sommes pas près d'une entrée de l'Inferës !
-Préviens les hommes ! Ordonna le capitaine, Nous allons sur...
D'autres cris survenaient d'un peu partout et déjà les premiers morts affluaient. Les hommes, désorganisés, mirent un temps à réagir. Ils se regroupèrent autour de la tente de la noblesse et bataillaient sauvagement contre les goules qui semblaient jaillir de partout. Certaines sortaient du sol, lacérant les pieds des hommes tandis que d'autres semblaient se mouvoir sur l'air, harcelant sans relâche le convoi. La lune était recouverte par des dizaines de tâches s'avançant vers eux. Pendant un temps, les soldats résistèrent mais petit à petit, leurs rangs diminuaient tandis que les êtres des profondeurs venaient toujours plus nombreux. Au milieu de la bataille, une explosion fit jaillir un attroupement de Vanäthies qui se ruèrent dans des cris de joie sur les soldats. Seul Itrenog ne se battait pas. Il n'avait pas dégainé son arme, se contentant d'esquiver les coups qui pleuvait sur lui:
-Qu'est ce que vous faites, beugla le capitaine, Sortez votre épée et battez-vous !
-Je ne peux pas.
-Comment ça vous ne pouvez pas ? Vous voulez vraiment mourir ?
Il n'eut pas de réponse. Itrenog continuait de se dérober au combat tandis que les hommes s'effondraient autour de lui. De nouveaux spasmes le firent tomber à genou. C'en était trop. Les mages et les soldats, tous avaient été massacrés en quelques instants. Seul le capitaine était encore vivant, maintenu fermement par deux démons. Une longue balafre marquait son visage mais il était pleinement conscient de la situation. Un Vanäthies s'avança vers Itrenog qui tentait d'arrêter de trembler :
-Comme c'est pathétique, railla-t-il, Voilà le grand démon qui nous cause tant de soucis …
Il se tourna vers le soldat et posa une main crochue sur son front :
-Et ici, un humain. Dis moi, où se cache la femme et j'abrègerai tes souffrances.
-Jamais, cracha le capitaine, plutôt mourir.
-Comme il vous siéra ...
D'un geste de la main, il décapita le soldat et une gerbe de sang tâcha l'herbe verte. Il inspira à fond, profitant de nouveau de cette âme à absorber. Le tronc du capitaine tomba lourdement au sol et le démon jeta sa tête au loin qui servit de pâture aux goules affamées. Avec un regard mauvais, il toisa Itrenog :
-C'est ton épée n'est-ce pas ? Qui te cause ce mal.
Les autres rirent nerveusement. Eux aussi avaient du mal à se contenir. Après un tel bain de sang, ils en voulaient plus, toujours plus, afin d'augmenter leur pouvoir. Ils s'écartèrent lentement, laissant avancer deux démons qui tiraient la femme jusqu'au reste des leurs. Elle ne semblait cependant nullement impressionnée, ni par les cadavres jonchant le sol, ni par les êtres qui se tenaient autour d'elle.
-Toujours aussi fière et droite, se moqua le démon, Au moins, nous n'aurons pas perdu notre temps, deux pour le prix d'un.
Silence. Un vent violent balaya les cendres laissées par les démons. Celui qui semblait être le chef posa son regard de feu sur la femme avec un sourire vorace :
-C'était très malin d'envoyer un messager pour prévenir les Elfes d'une éventuelle attaque. Malheureusement, il n'est jamais arrivé à destination.
Il tendit sa main qui tenait fermement un parchemin scellé à la cire rouge et ria. Un rire de démence, un rire d'une personne qui pense avoir gagné la partie avant que celle-ci ne soit terminée. Itrenog tourna lentement la tête vers la femme qui était aussi rigide qu'un bloc de glace. Personne ne bougeait, comme si le temps avait décidé de suspendre son cours. Elle frappa le sol du pied et deux blocs de terre heurtèrent ses gardes qui s'effondrèrent avec des cris de douleur. Avant que les autres aient pu faire quoique ce soit, elle se jeta sur Itrenog, passa ses mains autour de son cou et dans un flash aveuglant, disparu avec lui. Le vent hurla, emportant le cri de rage du démon qui maudissait ses ennemis. Il ne les laisserait pas s'en tirer. Pas si près du but. Il rassembla ses troupes et ordonna de ratisser toute la zone dans un large rayon. Ils n'auraient nul part où se cacher, il s'en assurerait. La traque continuait.
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-C'est bizarre, marmonna le capitaine, je ne me souviens pas devoir passer par une forêt …
Il accorda dix minutes de pause à ses hommes le temps de décider de la marche à suivre avec la noblesse. Les mages restaient silencieux. Toutes leurs craintes semblaient s'être matérialisées dans ce bois. Les chevaux battaient nerveusement du pied. Le chef arriva et ordonna à ses troupes d'avancer. Il n'y avait, selon lui, aucun danger à traverser une quelconque forêt hormis de tomber nez à nez avec un ours. Au quel cas, l'épée résoudrait le problème. Le convoi progressa relativement bien. La route semblait ne pas avoir souffert de ce retour de végétation et ils sortirent du bosquet en une heure à peine. De l'autre côté, une longue plaine s'étendait à perte de vue. Le vent faisait onduler l'herbe verte et on pouvait voir des troupeaux de ce qui ressemblait à des buffles géants courir sur toute la longueur de la steppe. Le soleil à son zénith dardait ses rayons puissants sur le convoi mais personne ne se plaignit. Plus tôt ils auraient quittés cet endroit et plus tôt ils seraient en sécurité. Car un terrain aussi plat était un endroit rêvé pour une embuscade. Toute la journée, ils marchèrent dans l'immensité verte sans jamais voir le bout de leur chemin. La nuit tomba et le moral des soldats en avaient pris un coup. Leur réserve d'eau étaient sérieusement entamée et s'ils ne traversaient pas la plaine le lendemain, c'était la mort assurée. Comme la veille, le marmiton prépara un ragout et l'ambiance joyeuse finit par reprendre le dessus. Le capitaine s'avança vers Itrenog avec un bol à la main :
-Tenez. Ça vous fera du bien de manger un peu.
-Merci mais je n'ai pas faim.
Le soldat considéra un moment son interlocuteur mais n'insista pas. Il déposa son bol à côté du sien et commença à manger.
-Vous savez, je commence à croire que cette mission cache autre chose qu'un simple traité.
-Possible.
-C'est vrai quoi, continua-t-il, pourquoi vouloir signer quelque chose d'autre alors que le Pacte des Cinq est toujours valable ?
Le soldat prit une autre bouchée et grogna quelque chose pour lui. Les soldats devant eux s'amusaient à un jeu de dés et le perdant devait boire sa chopine cul-sec. Le capitaine leur cria de ne pas se souler étant donné que si l'eau venait à manquer, seul la bière resterait.
-Enfin, fit-il de nouveau à Itrenog, je me pose surement trop de questions. Il y a surement une bonne raison à tout ça …
Un bruissement de feuille attira l'attention des deux hommes. Le capitaine posa lentement son bol de terre cuite et posa une main sur la garde de son épée. Il fit signe un l'un des magicien du camps qui éclaira la zone avec un sort de faible ampleur. Un mulot se tenait droit devant eux. Sa respiration était saccadée comme s'il avait couru pour échapper à un prédateur. Le capitaine se détendit ainsi que le mage. Le rongeur tourna la tête sur le côté. Entre ses mains, il tenait un gland qu'il s'apprêtait surement à ramener dans son terrier. Mais dans son regard, c'était la peur que l'on pouvait lire. Itrenog leva la tête. Pas le moindre rapace ou autre oiseau pouvant le menacer. Autre chose le poursuivait, mais quoi ? Le mulot fut alors happé dans l'ombre avec une vitesse surprenante et on n'entendit plus que ses couinements désarticulés ainsi que ses os se broyer. Itrenog posa une main sur l'épaule du capitaine :
-Préparez-vos hommes, ils sont là.
-Qui ça ? Questionna brusquement le soldat, Qui est là ?
-Eux.
Une masse blanchâtre difforme rampait lentement vers eux. Deux yeux globuleux les fixaient et un cri s'échappa d'une bouche torve d'où dépassaient une série de dents baveuses. La queue du rongeur en dépassait et on pouvait voir sans problème son corps se décomposer à travers la fine peau de la créature. Un cercle de flamme l'entoura alors, la consumant entièrement dans des jappements de souffrance. Il ne subsistait qu'un petit tas de cendre encore fumant. Le mage courrut dans leur direction :
-C'était une goule ? C'est impossible nous ne sommes pas près d'une entrée de l'Inferës !
-Préviens les hommes ! Ordonna le capitaine, Nous allons sur...
D'autres cris survenaient d'un peu partout et déjà les premiers morts affluaient. Les hommes, désorganisés, mirent un temps à réagir. Ils se regroupèrent autour de la tente de la noblesse et bataillaient sauvagement contre les goules qui semblaient jaillir de partout. Certaines sortaient du sol, lacérant les pieds des hommes tandis que d'autres semblaient se mouvoir sur l'air, harcelant sans relâche le convoi. La lune était recouverte par des dizaines de tâches s'avançant vers eux. Pendant un temps, les soldats résistèrent mais petit à petit, leurs rangs diminuaient tandis que les êtres des profondeurs venaient toujours plus nombreux. Au milieu de la bataille, une explosion fit jaillir un attroupement de Vanäthies qui se ruèrent dans des cris de joie sur les soldats. Seul Itrenog ne se battait pas. Il n'avait pas dégainé son arme, se contentant d'esquiver les coups qui pleuvait sur lui:
-Qu'est ce que vous faites, beugla le capitaine, Sortez votre épée et battez-vous !
-Je ne peux pas.
-Comment ça vous ne pouvez pas ? Vous voulez vraiment mourir ?
Il n'eut pas de réponse. Itrenog continuait de se dérober au combat tandis que les hommes s'effondraient autour de lui. De nouveaux spasmes le firent tomber à genou. C'en était trop. Les mages et les soldats, tous avaient été massacrés en quelques instants. Seul le capitaine était encore vivant, maintenu fermement par deux démons. Une longue balafre marquait son visage mais il était pleinement conscient de la situation. Un Vanäthies s'avança vers Itrenog qui tentait d'arrêter de trembler :
-Comme c'est pathétique, railla-t-il, Voilà le grand démon qui nous cause tant de soucis …
Il se tourna vers le soldat et posa une main crochue sur son front :
-Et ici, un humain. Dis moi, où se cache la femme et j'abrègerai tes souffrances.
-Jamais, cracha le capitaine, plutôt mourir.
-Comme il vous siéra ...
D'un geste de la main, il décapita le soldat et une gerbe de sang tâcha l'herbe verte. Il inspira à fond, profitant de nouveau de cette âme à absorber. Le tronc du capitaine tomba lourdement au sol et le démon jeta sa tête au loin qui servit de pâture aux goules affamées. Avec un regard mauvais, il toisa Itrenog :
-C'est ton épée n'est-ce pas ? Qui te cause ce mal.
Les autres rirent nerveusement. Eux aussi avaient du mal à se contenir. Après un tel bain de sang, ils en voulaient plus, toujours plus, afin d'augmenter leur pouvoir. Ils s'écartèrent lentement, laissant avancer deux démons qui tiraient la femme jusqu'au reste des leurs. Elle ne semblait cependant nullement impressionnée, ni par les cadavres jonchant le sol, ni par les êtres qui se tenaient autour d'elle.
-Toujours aussi fière et droite, se moqua le démon, Au moins, nous n'aurons pas perdu notre temps, deux pour le prix d'un.
Silence. Un vent violent balaya les cendres laissées par les démons. Celui qui semblait être le chef posa son regard de feu sur la femme avec un sourire vorace :
-C'était très malin d'envoyer un messager pour prévenir les Elfes d'une éventuelle attaque. Malheureusement, il n'est jamais arrivé à destination.
Il tendit sa main qui tenait fermement un parchemin scellé à la cire rouge et ria. Un rire de démence, un rire d'une personne qui pense avoir gagné la partie avant que celle-ci ne soit terminée. Itrenog tourna lentement la tête vers la femme qui était aussi rigide qu'un bloc de glace. Personne ne bougeait, comme si le temps avait décidé de suspendre son cours. Elle frappa le sol du pied et deux blocs de terre heurtèrent ses gardes qui s'effondrèrent avec des cris de douleur. Avant que les autres aient pu faire quoique ce soit, elle se jeta sur Itrenog, passa ses mains autour de son cou et dans un flash aveuglant, disparu avec lui. Le vent hurla, emportant le cri de rage du démon qui maudissait ses ennemis. Il ne les laisserait pas s'en tirer. Pas si près du but. Il rassembla ses troupes et ordonna de ratisser toute la zone dans un large rayon. Ils n'auraient nul part où se cacher, il s'en assurerait. La traque continuait.
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Dernière édition par Itrenog le Ven 14 Mai 2010 - 19:25, édité 1 fois
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Re: Une vie, un devoir ...
Une seconde. Ni plus, ni moins. C'est le temps qu'il avait fallu pour se retrouver dans un endroit totalement différent, à l'ombre d'un grand chêne dont les branches remuaient à mesure que le vent s'engouffrait entre ses feuilles. Itrenog regarda autour de lui. Il se trouvait de toute évidence dans une forêt. L'obscurité l'empêchait de voir au-delà des cinq premiers mètres et de nombreux arbres se trouvaient autour de lui. En baissant la tête, il s'aperçut que la femme était allongée à son côté. Sa respiration était laborieuse et des gouttes de sueurs perlaient sur son front. La quantité d'énergie qu'elle avait utilisée pour la téléportation devait être incroyable. Le tout était de savoir s'ils étaient suffisamment éloignés pour ne pas tomber de nouveau nez à nez avec les démons. L'homme rassembla quelques bouts de bois, forma un petit cercle de pierre et prépara un foyer. Il ôta son gant droit, claqua des doigts et une étincelle naquit à l'intérieur des branchages avant de les enflammer totalement. Le feu allumé, il entreprit d'attendre que la femme se réveille afin de lui poser quelques questions. Il recouvrit de nouveau son bras et ferma les yeux. Le silence de la forêt était presque pesant. Seul le hululement d'une chouette venait ponctuer cette attente et le simple fait de ne pas savoir où l'on se trouvait pouvait en déranger plus d'un. Pas Itrenog. Il savait que la femme ne les aurait pas téléporté dans n'importe quel endroit et le fait qu'elle soit encore endormie témoignait de la longue distance qu'ils avaient parcouru. Une quinte de toux lui fit reprendre conscience du monde qui l'entourait. Il tourna la tête. La femme ouvrait péniblement les yeux.
-Où … où sommes-nous ? Articula-t-elle.
-Ce serait plutôt à moi de vous le demander.
Cette fois-ci, ce fut elle qui regarda Itrenog. Elle ne se souvenait probablement pas ce qu'il venait de se passer et venait de se rendre compte qu'elle était encore en vie. Ses yeux reflétaient encore la vision qu'elle avait eue de la veille, et même si elle n'en laissait rien paraître, elle semblait marquée par quelque chose d'inexplicable.
-Je ne sais pas qui vous êtes, continua-t-il, toujours est-il que vous semblez avoir un lien avec les démons qui me pourchassent.
-Et je suppose que vous voulez des explications …
L'homme approuva d'un signe de tête. Cette femme avait surement un lien avec lui puisque le démon les recherchait tous les deux. Le tout était de savoir pourquoi et le moyen le plus efficace d'obtenir des informations étaient d'interroger une personne épuisée, et donc, plus fragile.
-Malheureusement mon histoire est trop liée à celle de d'autres personnes et pour tout comprendre, nous allons devoir nous rendre chez un de mes amis.
-Si cela est nécessaire …
La femme sourit faiblement. Itrenog lui tendit une outre en cuir qu'il avait trouvé accrochée à sa robe et elle but lentement. En temps normal, il l'aurait tuée afin d'éviter tout problème ultérieur, mais quelque chose l'empêchait de le faire. Comme la première fois qu'il l'avait vu. Une sensation dérangeante lui disait de ne pas le faire, qu'elle pouvait l'aider à comprendre qui il était vraiment. Elle n'avait pas répondu ce qui témoignait de sa résistance mentale et lui poser des questions n'aboutirait à rien pour le moment.
-Pour l'heure il faut vous reposer, conclut Itrenog, Je vais inspecter les environs pour dénicher de quoi vous nourrir.
Il se leva et s'enfonça dans la noirceur de la forêt. Rien ne lui assurait qu'il trouverait à manger mais cela lui permettrait de se distraire l'espace de quelques instants. Il ne lui fallut pas dix minutes qu'il tomba sur une parcelle de terre d'où dépassait trois grosses touffes d'herbe. Il s'approcha et tira sur l'une d'entre elle. Un gros tubercule blanc sortit de la terre. C'était comestible jugea-t-il. Son enseignement avec le Khuzûd lui permettait au moins de reconnaître une nourriture mangeable d'une plante empoisonnée. Il récolta l'ensemble des végétaux et revint près du foyer qu'il avait allumé. La femme l'attendait, le regard perdu dans le vide.
-Savez-vous vous servir de la magie ? Demanda-t-il.
Elle secoua la tête comme pour chasser une mouche et regarda l'homme :
-Vous ne pouvez pas ? répliqua-t-elle perplexe.
-Pas suffisamment pour modeler la terre à ma guise. Il faudrait que vous fabriquiez un bol de terre si vous en êtes capable.
La femme se redressa et ferma les yeux. Elle agitait les lèvres presque imperceptiblement et devant elle, la terre semblait mouvoir. Au début, elle bougeait sans véritable but, mais petit à petit, elle se rassembla et une petite cuvette se forma. La terre chassa le surplus et se durcit à vue d'œil. Avec un dernier effort, le bol nouvellement crée sauta en l'air avant de retomber mollement sur le sol. Le femme soupira. Même un si petit exercice semblait la vider de ses forces. Itrenog se saisit du bol et jeta les tubercule à l'intérieur avant de poser le tout sur les braises encore fumantes. Lorsque les légumes furent cuit, il tendit le plat de terre à la femme qu'elle accepta en silence.
-Vous ne mangez pas ? Fit-elle entre deux bouchées.
-Non.
-Vous n'avez pas faim ?
-Ce n'est pas parce que je ne mange pas que je n'ai pas faim. Seulement, je ne me nourris pas d'aliments comme les vôtres.
Elle ne répondit pas, se contentant de manger. Dès qu'elle eut finit, elle étira ses bras et posa le bol à côté d'elle. Le silence s'insinua de nouveau. La femme regardait les veines bleutées palpiter d'énergie à chacune des respirations d'Itrenog. C'était comme si elles étaient alimentées par sa propre énergie.
-Comment vous êtes vous fait ces marques ? S'enquit-elle.
-Surexposition au lyrium, prétendit l'homme en détournant le regard.
-Le lyrium ? Mais on n'en trouve que dans les montagnes naines.
En effet le lyrium était une minéral précieux uniquement présent dans les Chaines des Naug. Mais sa surexploitation par les Nains en avait fait un métal presque introuvable. Certains prétendaient qu'ils permettaient de renforcer les capacités magiques. Seulement, une erreur de manipulation ou une trop grande quantité utilisée pouvaient avoir des conséquences désastreuses sur son utilisateur. L'ermite nain avait conseillé à Itrenog d'utiliser cette explication si jamais on venait à trop lui poser de questions.
-Je n'ai jamais dit le contraire.
-Donc, vous avez fait un voyage chez les nains ?
Étrangement, ses mains serrèrent plus fort sa robe mais rien ne se transcrivait sur son visage. Elle semblait simplement dérangée par une telle possibilité. Itrenog opina :
-J'y ai appris de nombreuses choses qui ont contribuées à faire ce que je suis aujourd'hui. Estimez-vous heureuse que j'y ai passé du temps.
-Je comprends …
Elle se détendit, comme si une de ses crainte s'était envolée. Itrenog nota son air fatigué et lui conseilla de se coucher. Au fond de lui, il espérait simplement partir au plus vite rencontrer ce mystérieux ami afin d'avoir les réponses à ses interrogations. Alors que la femme s'apprêtait à fermer les yeux, elle se retourna et dit :
-Au fait, je m'appelle Iberiel.
-Enchanté.
Elle sourit et ferma les yeux. Ce prénom résonna dans la tête d'Itrenog, murmure d'une période oubliée. Il lui était familier mais impossible de savoir quand et où l'avait-il entendu. Il se posa contre un arbre et croisa les bras. Ce monde qui n'était pas le sien recelait bien plus de secrets qu'il n'aurait pu l'imaginer. Il ferma les yeux et se laissa bercer par le souffle du vent.
**************
Valid Yuke: +26 Pui
-Où … où sommes-nous ? Articula-t-elle.
-Ce serait plutôt à moi de vous le demander.
Cette fois-ci, ce fut elle qui regarda Itrenog. Elle ne se souvenait probablement pas ce qu'il venait de se passer et venait de se rendre compte qu'elle était encore en vie. Ses yeux reflétaient encore la vision qu'elle avait eue de la veille, et même si elle n'en laissait rien paraître, elle semblait marquée par quelque chose d'inexplicable.
-Je ne sais pas qui vous êtes, continua-t-il, toujours est-il que vous semblez avoir un lien avec les démons qui me pourchassent.
-Et je suppose que vous voulez des explications …
L'homme approuva d'un signe de tête. Cette femme avait surement un lien avec lui puisque le démon les recherchait tous les deux. Le tout était de savoir pourquoi et le moyen le plus efficace d'obtenir des informations étaient d'interroger une personne épuisée, et donc, plus fragile.
-Malheureusement mon histoire est trop liée à celle de d'autres personnes et pour tout comprendre, nous allons devoir nous rendre chez un de mes amis.
-Si cela est nécessaire …
La femme sourit faiblement. Itrenog lui tendit une outre en cuir qu'il avait trouvé accrochée à sa robe et elle but lentement. En temps normal, il l'aurait tuée afin d'éviter tout problème ultérieur, mais quelque chose l'empêchait de le faire. Comme la première fois qu'il l'avait vu. Une sensation dérangeante lui disait de ne pas le faire, qu'elle pouvait l'aider à comprendre qui il était vraiment. Elle n'avait pas répondu ce qui témoignait de sa résistance mentale et lui poser des questions n'aboutirait à rien pour le moment.
-Pour l'heure il faut vous reposer, conclut Itrenog, Je vais inspecter les environs pour dénicher de quoi vous nourrir.
Il se leva et s'enfonça dans la noirceur de la forêt. Rien ne lui assurait qu'il trouverait à manger mais cela lui permettrait de se distraire l'espace de quelques instants. Il ne lui fallut pas dix minutes qu'il tomba sur une parcelle de terre d'où dépassait trois grosses touffes d'herbe. Il s'approcha et tira sur l'une d'entre elle. Un gros tubercule blanc sortit de la terre. C'était comestible jugea-t-il. Son enseignement avec le Khuzûd lui permettait au moins de reconnaître une nourriture mangeable d'une plante empoisonnée. Il récolta l'ensemble des végétaux et revint près du foyer qu'il avait allumé. La femme l'attendait, le regard perdu dans le vide.
-Savez-vous vous servir de la magie ? Demanda-t-il.
Elle secoua la tête comme pour chasser une mouche et regarda l'homme :
-Vous ne pouvez pas ? répliqua-t-elle perplexe.
-Pas suffisamment pour modeler la terre à ma guise. Il faudrait que vous fabriquiez un bol de terre si vous en êtes capable.
La femme se redressa et ferma les yeux. Elle agitait les lèvres presque imperceptiblement et devant elle, la terre semblait mouvoir. Au début, elle bougeait sans véritable but, mais petit à petit, elle se rassembla et une petite cuvette se forma. La terre chassa le surplus et se durcit à vue d'œil. Avec un dernier effort, le bol nouvellement crée sauta en l'air avant de retomber mollement sur le sol. Le femme soupira. Même un si petit exercice semblait la vider de ses forces. Itrenog se saisit du bol et jeta les tubercule à l'intérieur avant de poser le tout sur les braises encore fumantes. Lorsque les légumes furent cuit, il tendit le plat de terre à la femme qu'elle accepta en silence.
-Vous ne mangez pas ? Fit-elle entre deux bouchées.
-Non.
-Vous n'avez pas faim ?
-Ce n'est pas parce que je ne mange pas que je n'ai pas faim. Seulement, je ne me nourris pas d'aliments comme les vôtres.
Elle ne répondit pas, se contentant de manger. Dès qu'elle eut finit, elle étira ses bras et posa le bol à côté d'elle. Le silence s'insinua de nouveau. La femme regardait les veines bleutées palpiter d'énergie à chacune des respirations d'Itrenog. C'était comme si elles étaient alimentées par sa propre énergie.
-Comment vous êtes vous fait ces marques ? S'enquit-elle.
-Surexposition au lyrium, prétendit l'homme en détournant le regard.
-Le lyrium ? Mais on n'en trouve que dans les montagnes naines.
En effet le lyrium était une minéral précieux uniquement présent dans les Chaines des Naug. Mais sa surexploitation par les Nains en avait fait un métal presque introuvable. Certains prétendaient qu'ils permettaient de renforcer les capacités magiques. Seulement, une erreur de manipulation ou une trop grande quantité utilisée pouvaient avoir des conséquences désastreuses sur son utilisateur. L'ermite nain avait conseillé à Itrenog d'utiliser cette explication si jamais on venait à trop lui poser de questions.
-Je n'ai jamais dit le contraire.
-Donc, vous avez fait un voyage chez les nains ?
Étrangement, ses mains serrèrent plus fort sa robe mais rien ne se transcrivait sur son visage. Elle semblait simplement dérangée par une telle possibilité. Itrenog opina :
-J'y ai appris de nombreuses choses qui ont contribuées à faire ce que je suis aujourd'hui. Estimez-vous heureuse que j'y ai passé du temps.
-Je comprends …
Elle se détendit, comme si une de ses crainte s'était envolée. Itrenog nota son air fatigué et lui conseilla de se coucher. Au fond de lui, il espérait simplement partir au plus vite rencontrer ce mystérieux ami afin d'avoir les réponses à ses interrogations. Alors que la femme s'apprêtait à fermer les yeux, elle se retourna et dit :
-Au fait, je m'appelle Iberiel.
-Enchanté.
Elle sourit et ferma les yeux. Ce prénom résonna dans la tête d'Itrenog, murmure d'une période oubliée. Il lui était familier mais impossible de savoir quand et où l'avait-il entendu. Il se posa contre un arbre et croisa les bras. Ce monde qui n'était pas le sien recelait bien plus de secrets qu'il n'aurait pu l'imaginer. Il ferma les yeux et se laissa bercer par le souffle du vent.
- Spoiler:
- Augmentation en puissance svp
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Dernière édition par Itrenog le Ven 14 Mai 2010 - 19:26, édité 1 fois
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Re: Une vie, un devoir ...
Itrenog ne dormait pas. Jamais il n'avait souffert de ce que les autres appelait «la fatigue». Il ne se l'expliquait pas, c'était ainsi. Pourtant, des vagues de souvenirs lui revenaient en flash lumineux derrière ses paupières closes. Tantôt avec une netteté incroyable, tantôt nappé d'un brouillard insondable. Il ne pouvait pas tous les enregistrer, mais une image en particulier retenu son attention. Il se trouvait, debout, dans une grotte aux pierres noires. Trois personnes se trouvaient en face de lui. Une femme, mince et droite entourée de deux hommes. L'un d'entre eux avait des cheveux raides et brun et une longue robe semblable à celle que porte les mages. L'autre était camouflé dans l'ombre et une aura sinistre s'en dégageait. Tous trois avaient le visage flou. Il savait que ses bras et ses jambes étaient attachés par de lourdes chaines d'acier. Soudain, ils levèrent la main, comme animés par la même volonté, et une lumière d'une blancheur éclatante le frappa de plein fouet. Avec un sursaut, Itrenog rouvrit les yeux. Les braises du feu étaient presque éteintes et il était seul. Nulle trace d'Iberiel. L'obscurité de la nuit avait laissée place à une clarté presque irréelle. Les bois des arbres étaient d'un marron subtil, leurs feuilles de différentes teintes, passant du vert olive à l'ocre rouge. Leurs troncs étaient larges et ils se balançaient lentement au rythme de la brise matinale. Un mouvement subtil attira le regard d'Itrenog sur sa gauche. Iberiel s'avançait vers lui, mais sans sa robe. Elle ne portait qu'une légère tenue de cuir marron qui moulait parfaitement sa silhouette gracieuse et une cape noire tombait sur ses épaules. Une rapière fine pendait à son côté et quelques dagues étaient disposées ça et là autour de sa taille.
-Ha vous êtes réveillé, nota-t-elle, Je suis allée bruler ma robe un peu plus loin.
L'homme ne répondit pas, encore sous le choc des visions qu'il avait eu. Iberiel nota son air absent et lui demanda :
-Ça ne va pas ? Vous semblez distrait.
-Si … tout va bien, répondit-il en se relevant. Vous êtes prête à partir ?
-Bien sûr ! Je me remets plus vite que vous ne pouvez le penser. Et cessez de me regarder comme ça, je vais me sentir gênée.
Itrenog détourna le regard. Il ne s'était même pas rendu compte que ses yeux s'étaient perdus sur son corps. La femme tendit la main et le reste des flammes qui subsistaient cessèrent de rougeoyer. Elle attrapa un sac de cuir posé à côté d'un tronc d'arbre qu'elle passa sur son épaule.
-Nous devrons passer par un village afin de nous rendre chez mon ami, informa-t-elle.
-Et bien sûr, nous n'avons pas le choix.
-C'est le seul endroit où nous pourrons nous approvisionner jusqu'à chez les Elfes bien que vous ne semblez pas vous plaindre du manque de nourriture.
L'homme ne répondit pas. Iberiel se lança dans la forêt en courant, suivie de près par Itrenog. Il fut presque étonné de la voir s'élancer avec tant d'aisance entres les branchages compte tenu de son état de la veille. Mais sa faculté à utiliser la magie l'avait tout de suite mener à penser qu'un sortilège bien placé pouvait guérir de tous les maux. La première partie de la matinée les avaient mené à déambuler entre les arbres sans en voir le bout. Une telle densité en était presque exagérée et plusieurs fois ils durent contourner des endroits où les arbres formaient de véritables murs vivants. Itrenog avait interrogé Iberiel pour savoir si elle était au courant de sa présence et force était d'admettre qu'elle était tout aussi déboussolée que lui.
-Même si je suis revenue ici il y a longtemps, disait-elle, une telle forêt n'a pas pu pousser sans attirer l'attention.
Vers le milieu de la journée, Iberiel les mena en dehors du bosquet. Le soleil se trouvait pile en face d'eux et ils leur fallut un moment pour que leur vision s'acclimata à ce brusque changement d'intensité lumineuse. Ils se trouvaient en face d'une plaine semblable à celle où ils avaient été pris en embuscade. La différence notable résidait dans une route de pavés gris qui la traversait de long en large et qui passait à quelques mètres d'eux. L'herbe verte ondulait sous les assauts impitoyables du vent mais aucun animal présent.
-Cette route mène à Carcosa d'ici deux kilomètres. Nous n'y resterons pas longtemps.
Ils s'engagèrent sur la route en direction du nord-ouest, conscient que le temps jouait contre eux. Ils croisèrent quelques caravanes marchandes sur le chemin mais aucune patrouille. L'assurance que les convois soient épargnés par des brigands était impressionnante compte tenu de la longueur de la route. Durant une trentaine de minutes, ils marchèrent en silence, saluant parfois les passants, et finirent par apercevoir des drapeaux noirs à l'horizon. Les armoiries du Duce, nota Itrenog. Le village était simplement entouré de deux palissades et lorsqu'ils se présentèrent devant la porte, on les laissa passer sans leur poser de questions. La route continuait plus avant dans le village et les maisons semblaient graviter autour d'un point central. Toute l'organisation interne était liée au chemin et donc, aux revenus potentiels apportés par les marchands. Une activité incroyable avait lieu entre ses murs de bois. Partout on pouvait voir des vendeurs exhiber les collections les plus époustouflantes de soierie pour le plus grand plaisir des dames tandis que les hommes conversaient autour d'une table, une pinte à la main. Les enfants jouaient au ballon ou avec les animaux passant par là. Iberiel s'arrêta devant une auberge miteuse sur le bord de la route et dit :
-Je vais chercher des vivres. Restez-ici le temps que je revienne.
Et elle disparut en quelques secondes dans la foule compacte, laissant Itrenog seul. Il se tourna et ouvrit la lourde porte en bois de la taverne. Une forte odeur de rancis l'assaillit de prime abord mais il entra malgré tout. Le plancher grinça de douleur lorsqu'il posa le pied à l'intérieur. Personne hormis un petit homme qui roupillait sur le comptoir. Une cheminée consumait le reste d'une branche morte dans le fond de la pièce, seule source de lumière, et les tables étaient disposées en bric-à-brac, les chaises pour la plupart renversées. Itrenog s'avança lentement, ramassa l'un des siège et se résolut à attendre. Le serveur se redressa alors brusquement :
-Reaver ? C'est toi ?
Il cligna des yeux plusieurs fois et se frotta la tête :
-Bon sang, grogna-t-il, Je croyais avoir fermé cette fichue porte.
Son regard se posa sur Itrenog qui n'avait pas bougé. Il secoua sa tête et contourna le comptoir :
-Dites, vous n'auriez pas vu un homme, cheveux bruns, yeux noirs, assez sur de lui et bien habillé en venant ici ?
-Non.
L'homme grommela et s'affala sur une chaise qui était encore debout. Il attrapa une bouteille en verre, ôta le bouchon non sans mal et but plusieurs gorgées. Le liquide devait être assez fort puisqu'il eut une grimace de dégoût. Il posa la bouteille au sol et fixa d'un œil vitreux son interlocuteur :
-Pardonnez moi mais mon auberge n'est pas ouverte au public.
-Nous ne resterons pas longtemps, assura Itrenog.
-Nous ? , s'étonna le serveur en observant les environs, Mais vous êtes seul !
Itrenog ne répondit pas. Pour le moment, mieux valait éviter de parler à n'importe qui sur les motivations que les avaient menées jusqu'ici. Le petit homme n'insista pas et se gratta la barbe de plusieurs jours qui lui mangeait le visage.
Un craquement retentit soudain. L'homme se retourna rapidement et il vit la porte de son auberge s'enfoncer sous la pression d'un coup puissant, suivi d'une ombre s'étalant au sol. Sous le monticule de poussière qui s'était dressé, une personne se releva lentement en époussetant ses vêtements.
-Quel manque d'éducation …
Une troupe armée débarqua alors. Des soldats du Duce. L'un deux pointa son arme vers l'inconnu et beugla :
-Le voilà ! On va t'apprendre à courtiser nos femmes !
Il s'élança alors dans un cri de rage, suivit par trois autres hommes. Sa lame siffla en direction de l'homme qui se décala simplement sur le côté pour l'éviter. Il dégaina son épée pour parer un coup qui venait de sa droite et envoya son pied contre le torse de son assaillant qui recula sous l'impact. Les trois autres attaquèrent de concert, jouant d'une incroyable panoplie de coups et bottes en tout genre, mais aucune de leurs attaques ne semblait effrayer le mystérieux coureur de jupon. Son style était quelque peu particulier. Il maintenait toujours son armé pointée vers l'adversaire et ne semblait pas posséder de garde. Pourtant, il bloquait et esquivait tout assaut avec une facilité déconcertante. Parfois son arme passait d'une main à l'autre sans qu'on sache quand s'opérait le changement et il ne semblait nullement gêné par les décombres qui jonchaient le sol. A peine quelques instants après le début du combat, une lueur farouche s'alluma dans son regard et son arme s'insinua entre les plaques de métal de l'un des soldats qui grogna de douleur. Il lui saisit le col, l'envoya rouler au sol et le pauvre homme s'écrasa contre le comptoir. Le second qui avait vu le coup venir avait tenté de profiter de la situation mais s'était retrouvé nez à nez avec la pointe de métal gris et avait simplement gagné une estafilade à l'entre-jambe, l'empêchant de se mouvoir correctement. Il tomba au sol et un craquement horrible résonna dans la pièce quand son nez se retrouva au contact du sol, poussé par le pied de l'homme. Les deux autres, en voyant leurs camarades au sol semblèrent moins sur d'eux mais se ruèrent de nouveau sur l'homme. Ce dernier balança son pied sur une chaise qui déstabilisa l'un des gardes. Il releva légèrement la pointe de son épée et se plaça entre les deux hommes. D'un mouvement rapide, ses coudes heurtèrent l'estomac des soldats qui se plièrent de douleur. Dans un second mouvement presque imperceptible, il taillada leur torse, son épée s'enfonçant dans leur cotte de maille comme dans du beurre. Simplement couverts de plusieurs entailles, ils ne pouvaient plus bouger mais étaient vivants, simplement inconscients, et il s'écroulèrent eux aussi. L'homme s'inclina dans une révérence gracieuse et fit :
-Pardonnez-moi pour vos femmes, mais ce sont elles qui sont venus me voir. Je ne pouvais pas résister à un tel appel.
Il se tourna vers Itrenog et le serveur, tétanisé à la vue de ce qu'il venait de se passer.
-Un bon spectacle n'est-ce pas ?
Ses habits étaient d'une très belle facture. Une chemise pourpre aux bras blancs entourée de couture dorée, une petite cape s'arrêtant au niveau des reins, un pantalon de la même teinte et des bottes hautes couleur terre. Ses gants étaient de la même couleur que ses bottes et un nœud papillon crème terminait en spirale sur le haut de son torse. Une bourse pendait à une ceinture de cuir noir. Un ensemble vraiment très beau à voir. Ses cheveux, soignés mais quelque peu ébouriffés par le combat, étaient aussi noir que ceux d'Iberiel. Son teint pâle faisait ressortir à merveille ses yeux d'une couleur aussi sombre que la nuit. L'homme rangea son arme avec un moulinet du poignet et jeta une pièce au tavernier qui la rattrapa, incrédule :
-R...Reaver ? Balbutia-t-il.
**************
Valid Yuke: +40 Rés
-Ha vous êtes réveillé, nota-t-elle, Je suis allée bruler ma robe un peu plus loin.
L'homme ne répondit pas, encore sous le choc des visions qu'il avait eu. Iberiel nota son air absent et lui demanda :
-Ça ne va pas ? Vous semblez distrait.
-Si … tout va bien, répondit-il en se relevant. Vous êtes prête à partir ?
-Bien sûr ! Je me remets plus vite que vous ne pouvez le penser. Et cessez de me regarder comme ça, je vais me sentir gênée.
Itrenog détourna le regard. Il ne s'était même pas rendu compte que ses yeux s'étaient perdus sur son corps. La femme tendit la main et le reste des flammes qui subsistaient cessèrent de rougeoyer. Elle attrapa un sac de cuir posé à côté d'un tronc d'arbre qu'elle passa sur son épaule.
-Nous devrons passer par un village afin de nous rendre chez mon ami, informa-t-elle.
-Et bien sûr, nous n'avons pas le choix.
-C'est le seul endroit où nous pourrons nous approvisionner jusqu'à chez les Elfes bien que vous ne semblez pas vous plaindre du manque de nourriture.
L'homme ne répondit pas. Iberiel se lança dans la forêt en courant, suivie de près par Itrenog. Il fut presque étonné de la voir s'élancer avec tant d'aisance entres les branchages compte tenu de son état de la veille. Mais sa faculté à utiliser la magie l'avait tout de suite mener à penser qu'un sortilège bien placé pouvait guérir de tous les maux. La première partie de la matinée les avaient mené à déambuler entre les arbres sans en voir le bout. Une telle densité en était presque exagérée et plusieurs fois ils durent contourner des endroits où les arbres formaient de véritables murs vivants. Itrenog avait interrogé Iberiel pour savoir si elle était au courant de sa présence et force était d'admettre qu'elle était tout aussi déboussolée que lui.
-Même si je suis revenue ici il y a longtemps, disait-elle, une telle forêt n'a pas pu pousser sans attirer l'attention.
Vers le milieu de la journée, Iberiel les mena en dehors du bosquet. Le soleil se trouvait pile en face d'eux et ils leur fallut un moment pour que leur vision s'acclimata à ce brusque changement d'intensité lumineuse. Ils se trouvaient en face d'une plaine semblable à celle où ils avaient été pris en embuscade. La différence notable résidait dans une route de pavés gris qui la traversait de long en large et qui passait à quelques mètres d'eux. L'herbe verte ondulait sous les assauts impitoyables du vent mais aucun animal présent.
-Cette route mène à Carcosa d'ici deux kilomètres. Nous n'y resterons pas longtemps.
Ils s'engagèrent sur la route en direction du nord-ouest, conscient que le temps jouait contre eux. Ils croisèrent quelques caravanes marchandes sur le chemin mais aucune patrouille. L'assurance que les convois soient épargnés par des brigands était impressionnante compte tenu de la longueur de la route. Durant une trentaine de minutes, ils marchèrent en silence, saluant parfois les passants, et finirent par apercevoir des drapeaux noirs à l'horizon. Les armoiries du Duce, nota Itrenog. Le village était simplement entouré de deux palissades et lorsqu'ils se présentèrent devant la porte, on les laissa passer sans leur poser de questions. La route continuait plus avant dans le village et les maisons semblaient graviter autour d'un point central. Toute l'organisation interne était liée au chemin et donc, aux revenus potentiels apportés par les marchands. Une activité incroyable avait lieu entre ses murs de bois. Partout on pouvait voir des vendeurs exhiber les collections les plus époustouflantes de soierie pour le plus grand plaisir des dames tandis que les hommes conversaient autour d'une table, une pinte à la main. Les enfants jouaient au ballon ou avec les animaux passant par là. Iberiel s'arrêta devant une auberge miteuse sur le bord de la route et dit :
-Je vais chercher des vivres. Restez-ici le temps que je revienne.
Et elle disparut en quelques secondes dans la foule compacte, laissant Itrenog seul. Il se tourna et ouvrit la lourde porte en bois de la taverne. Une forte odeur de rancis l'assaillit de prime abord mais il entra malgré tout. Le plancher grinça de douleur lorsqu'il posa le pied à l'intérieur. Personne hormis un petit homme qui roupillait sur le comptoir. Une cheminée consumait le reste d'une branche morte dans le fond de la pièce, seule source de lumière, et les tables étaient disposées en bric-à-brac, les chaises pour la plupart renversées. Itrenog s'avança lentement, ramassa l'un des siège et se résolut à attendre. Le serveur se redressa alors brusquement :
-Reaver ? C'est toi ?
Il cligna des yeux plusieurs fois et se frotta la tête :
-Bon sang, grogna-t-il, Je croyais avoir fermé cette fichue porte.
Son regard se posa sur Itrenog qui n'avait pas bougé. Il secoua sa tête et contourna le comptoir :
-Dites, vous n'auriez pas vu un homme, cheveux bruns, yeux noirs, assez sur de lui et bien habillé en venant ici ?
-Non.
L'homme grommela et s'affala sur une chaise qui était encore debout. Il attrapa une bouteille en verre, ôta le bouchon non sans mal et but plusieurs gorgées. Le liquide devait être assez fort puisqu'il eut une grimace de dégoût. Il posa la bouteille au sol et fixa d'un œil vitreux son interlocuteur :
-Pardonnez moi mais mon auberge n'est pas ouverte au public.
-Nous ne resterons pas longtemps, assura Itrenog.
-Nous ? , s'étonna le serveur en observant les environs, Mais vous êtes seul !
Itrenog ne répondit pas. Pour le moment, mieux valait éviter de parler à n'importe qui sur les motivations que les avaient menées jusqu'ici. Le petit homme n'insista pas et se gratta la barbe de plusieurs jours qui lui mangeait le visage.
Un craquement retentit soudain. L'homme se retourna rapidement et il vit la porte de son auberge s'enfoncer sous la pression d'un coup puissant, suivi d'une ombre s'étalant au sol. Sous le monticule de poussière qui s'était dressé, une personne se releva lentement en époussetant ses vêtements.
-Quel manque d'éducation …
Une troupe armée débarqua alors. Des soldats du Duce. L'un deux pointa son arme vers l'inconnu et beugla :
-Le voilà ! On va t'apprendre à courtiser nos femmes !
Il s'élança alors dans un cri de rage, suivit par trois autres hommes. Sa lame siffla en direction de l'homme qui se décala simplement sur le côté pour l'éviter. Il dégaina son épée pour parer un coup qui venait de sa droite et envoya son pied contre le torse de son assaillant qui recula sous l'impact. Les trois autres attaquèrent de concert, jouant d'une incroyable panoplie de coups et bottes en tout genre, mais aucune de leurs attaques ne semblait effrayer le mystérieux coureur de jupon. Son style était quelque peu particulier. Il maintenait toujours son armé pointée vers l'adversaire et ne semblait pas posséder de garde. Pourtant, il bloquait et esquivait tout assaut avec une facilité déconcertante. Parfois son arme passait d'une main à l'autre sans qu'on sache quand s'opérait le changement et il ne semblait nullement gêné par les décombres qui jonchaient le sol. A peine quelques instants après le début du combat, une lueur farouche s'alluma dans son regard et son arme s'insinua entre les plaques de métal de l'un des soldats qui grogna de douleur. Il lui saisit le col, l'envoya rouler au sol et le pauvre homme s'écrasa contre le comptoir. Le second qui avait vu le coup venir avait tenté de profiter de la situation mais s'était retrouvé nez à nez avec la pointe de métal gris et avait simplement gagné une estafilade à l'entre-jambe, l'empêchant de se mouvoir correctement. Il tomba au sol et un craquement horrible résonna dans la pièce quand son nez se retrouva au contact du sol, poussé par le pied de l'homme. Les deux autres, en voyant leurs camarades au sol semblèrent moins sur d'eux mais se ruèrent de nouveau sur l'homme. Ce dernier balança son pied sur une chaise qui déstabilisa l'un des gardes. Il releva légèrement la pointe de son épée et se plaça entre les deux hommes. D'un mouvement rapide, ses coudes heurtèrent l'estomac des soldats qui se plièrent de douleur. Dans un second mouvement presque imperceptible, il taillada leur torse, son épée s'enfonçant dans leur cotte de maille comme dans du beurre. Simplement couverts de plusieurs entailles, ils ne pouvaient plus bouger mais étaient vivants, simplement inconscients, et il s'écroulèrent eux aussi. L'homme s'inclina dans une révérence gracieuse et fit :
-Pardonnez-moi pour vos femmes, mais ce sont elles qui sont venus me voir. Je ne pouvais pas résister à un tel appel.
Il se tourna vers Itrenog et le serveur, tétanisé à la vue de ce qu'il venait de se passer.
-Un bon spectacle n'est-ce pas ?
Ses habits étaient d'une très belle facture. Une chemise pourpre aux bras blancs entourée de couture dorée, une petite cape s'arrêtant au niveau des reins, un pantalon de la même teinte et des bottes hautes couleur terre. Ses gants étaient de la même couleur que ses bottes et un nœud papillon crème terminait en spirale sur le haut de son torse. Une bourse pendait à une ceinture de cuir noir. Un ensemble vraiment très beau à voir. Ses cheveux, soignés mais quelque peu ébouriffés par le combat, étaient aussi noir que ceux d'Iberiel. Son teint pâle faisait ressortir à merveille ses yeux d'une couleur aussi sombre que la nuit. L'homme rangea son arme avec un moulinet du poignet et jeta une pièce au tavernier qui la rattrapa, incrédule :
-R...Reaver ? Balbutia-t-il.
- Spoiler:
- Augmentation en résistance svp[/color][/b]
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Re: Une vie, un devoir ...
-Pour les réparations, précisa Reaver.
Il s'avança vers le serveur et l'aida à se relever. Ce dernier n'en revenait toujours pas. C'était comme s'il avait aperçut un revenant. Il tâta la pièce de ses mains moites. Couleur d'or, frappée d'un sceau inconnu et polie d'une main de maître. Reaver porta son attention sur Itrenog :
-Si j'en juge votre apparence étranger, je dirais que vous êtes soit mercenaire, soit déserteur.
-C'est p'tetre un brigand, susurra le tavernier.
-Non. Je ne pense pas. Les brigands ne sont pas aussi bien vêtus et agissent en groupe.
Il s'avança et saisit la bouteille de verre qui trainait par terre. Il renifla l'intérieur et la jeta négligemment sur les gardes, rependant le liquide nauséabond sur leurs corps endoloris. Le vendeur soupira en voyant sa dernière réserve d'alcool s'envoler entre les planches de son parquet usé. Reaver prit une chaise en état, se posa et fixa la porte comme s'il attendait quelqu'un d'autre. Le temps passa ainsi quelques instants, lentement. Des bruits de pas se firent entendre au bout d'un moment et Reaver se redressa sur sa chaise. Un autre groupe d'hommes armés jaillirent de l'embrasure défoncée et leurs regards médusés se posèrent sur les soldats au sol. Ils mirent un temps avant de réagir. Certains se ployaient sur leurs jambes, perplexes, tandis que d'autres glissaient discrètement leurs mains vers leurs fourreaux.
-Qu'est-ce qu'il s'est passé ici ? Demanda finalement l'un des garde.
-Vous tombez bien messieurs, répondit Reaver avec un sourire qui révéla une rangée de dents parfaites, ces hommes ont débarqué ici et ont tenté d'agresser mes amis. Ils étaient sous le coup de l'alcool je le crains et j'ai été obligé de les appréhender.
L'homme s'approcha de ses compagnons d'armes, immobiles et étendus sur le sol, tâta leur cou et sentit sa main. Son expression faciale suffit à faire comprendre que ses hommes sentaient fortement l'alcool.
-Très bien on les embarque, fit le soldat, Prévenez-nous la prochaine fois, on ne sera pas aussi tolérant.
Il fit signe à ses hommes de ramasser les autres et ils s'éclipsèrent, non sans jeter un dernier regard suspicieux à l'intérieur de l'auberge. Lorsqu'ils furent suffisamment loin, le tavernier qui n'avait rien dit s'exclama :
-Tu es malade ! Ils sauront que tu as menti !
-Je n'ai pas dit le contraire, se défendit Reaver sans hausser le ton, mais je ne serais plus là quand ils me rechercheront. Ne perdons-pas plus de temps, mon père t'a-t-il envoyé une missive ?
Le tavernier se calma momentanément et tourna en rond. Il triturait nerveusement la chemise tachée qu'il portait et répondit :
-Oui. Il y a deux mois.
Il conduisit Reaver derrière son comptoir et sortit un petit coffre de bois, taillé grossièrement et les finitions étaient plus que douteuses. Il fit jouer une grosse clé dans la serrure jusqu'à ce qu'un déclic se fasse entendre et il ouvrit délicatement la boîte. L'intérieur poussiéreux contenait en effet une lettre craquelée dont le sceau rouge témoignait qu'elle n'avait pas encore été ouverte. Le petit homme la saisit et la tendit à Reaver qui brisa le cachet d'un geste sec de la main. Il déplia la lettre et il la parcourut rapidement des yeux. A la fin de son inspection succinte, il déchira la lettre et la donna en pâture aux flammes mourantes du foyer.
-C'est bien ce qu'il me semblait, fit-il pensif, les Faucons Blancs sont de nouveau en activité et mon père craint qu'ils complotent avec les démons.
Il souffla et laissa échapper entre ses dents :
-Enfin, étaient désormais...
Itrenog était resté coi devant un tel spectacle. Il avait suffit à cet homme de verser le contenu de la bouteille sur les gardes pour convaincre les autres qu'ils étaient soûl. Et son habileté au combat était exemplaire, pour un humain. Son attitude désinvolte couplée avec son apparence noble le rendait presque irritant.
-Je vais partir maintenant, reprit Reaver, Merci pour ce que tu as fait mais je crains que j'ai trop trainé par ici.
-Quoi ? Je t'ai cru mort depuis cinq ans et tu disparais de nouveau ?
-Je suis désolé, les choses ne se sont pas passées comme prévues.
Le tavernier recula, comme piqué par un insecte. Son air désabusé laissait penser qu'il refusait de croire à ce qu'il avait entendu. Il voulut dire quelque chose mais Reaver leva la main pour l'interrompre :
-Je sais ce que tu penses, mais je n'ai pas pu prévoir l'ampleur des évènements.
Il se tourna vers Itrenog et ajouta :
-Au revoir étranger, j'ai comme le sentiment que nous nous reverrons.
Avec une agilité de félin, il bondit par dessus les débris de bois et sortit de la taverne en courant. Le petit homme passa une main dans le reste de cheveux qui ornait son front et soupira :
-Un sacré bonhomme ce Reaver hein ?
-Peut-être, je ne le connais pas.
Le vendeur ricana et commença à ranger distraitement son auberge. Il avait perdu ce petit quelque chose qui faisait qu'une personne était de bonne humeur. Son regard était vide, ses actions mécaniques comme dictées par une force supérieure sans qu'il en prenne conscience, et il remuait les lèvres de temps à autre, signe qu'il était troublé par les récents évènements. Il s'approcha de la porte et regarda à l'extérieur.
-Par les feux de l'Inferës, cette taverne a connut plus de clients en trente minutes qu'en dix ans de service !
Il se décala pour laisser entrer une autre personne. Iberiel cette fois-ci. Elle passa un rapide coup d'œil à l'intérieur, non sans cacher sa désapprobation, et croisa les bras :
-Hé bien, entre les soldats qui trainent leurs compagnons ivres morts et un homme qui m'accoste de la plus étrange des manières, cette ville est quelque peu … exotique.
Le vendeur toussota mais ne répondit pas.
-J'ai tout ce qu'il nous faut, poursuivit-elle, Nous pouvons partir.
-Ah voici donc le «nous» …, comprit l'homme.
-Le «nous» ?
-Hum, ce n'est rien. Bon courage pour vos aventures et que Sigmar guide vos pas.
Le tavernier trottina derrière Itrenog et le pressa à sortir. Il alla même jusqu'à le pousser dehors en voyant qu'il ne réagissait pas. Iberiel haussa les épaules et de nouveau, il se remirent en route. Cette fois-ci, il n'y aurait plus d'escale. Un unique chemin menant aux réponses sur la vie d'Itrenog.
Plus loin dans la ville, une ombre furtive passa à côté d'un homme vêtu d'une ample tunique rouge sang. Ils se trouvaient dans une ruelle sombre, cachés à l'abri des vieux tonneaux et des charrettes abandonnées, et l'homme se tourna vers celui qui venait d'arriver :
-Ce sont bien eux ?
-Oui, répondit l'inconnu, je les ai pisté depuis Munduce. Il n'y a aucun doute possible.
L'homme inspira fortement et leva sa main. Il tenait un parchemin roulé, comme s'il avait été préparé dans le but d'être transporté par un messager.
-Tu fais vraiment de l'excellent travail. Tu ne m'en veux pas si je la tue ?
-Je ne crois pas que ce soient les ordres, se renfrogna l'ombre. Attaquerez-vous dans la ville ?
-Non, c'est trop risqué. J'attendrais qu'ils se soient éloignés. Quant à toi, oublie-la, tu n'es plus comme elle.
L'inconnu disparu en une fraction de seconde et l'homme s'avança sous la lumière du jour. Son visage était d'une pâleur cadavérique mais ses yeux étaient ceux de quelqu'un qui voulait du sang. Beaucoup de sang. Trop peut-être pour la mission qu'on lui avait confiée. Peu importe, se disait-il, je dirais qu'ils se sont débattus un peu. Il s'avança avec un rictus de plaisir, savourant le moment où il pourrait se déchainer.
-Me voici mes petits ...
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Il s'avança vers le serveur et l'aida à se relever. Ce dernier n'en revenait toujours pas. C'était comme s'il avait aperçut un revenant. Il tâta la pièce de ses mains moites. Couleur d'or, frappée d'un sceau inconnu et polie d'une main de maître. Reaver porta son attention sur Itrenog :
-Si j'en juge votre apparence étranger, je dirais que vous êtes soit mercenaire, soit déserteur.
-C'est p'tetre un brigand, susurra le tavernier.
-Non. Je ne pense pas. Les brigands ne sont pas aussi bien vêtus et agissent en groupe.
Il s'avança et saisit la bouteille de verre qui trainait par terre. Il renifla l'intérieur et la jeta négligemment sur les gardes, rependant le liquide nauséabond sur leurs corps endoloris. Le vendeur soupira en voyant sa dernière réserve d'alcool s'envoler entre les planches de son parquet usé. Reaver prit une chaise en état, se posa et fixa la porte comme s'il attendait quelqu'un d'autre. Le temps passa ainsi quelques instants, lentement. Des bruits de pas se firent entendre au bout d'un moment et Reaver se redressa sur sa chaise. Un autre groupe d'hommes armés jaillirent de l'embrasure défoncée et leurs regards médusés se posèrent sur les soldats au sol. Ils mirent un temps avant de réagir. Certains se ployaient sur leurs jambes, perplexes, tandis que d'autres glissaient discrètement leurs mains vers leurs fourreaux.
-Qu'est-ce qu'il s'est passé ici ? Demanda finalement l'un des garde.
-Vous tombez bien messieurs, répondit Reaver avec un sourire qui révéla une rangée de dents parfaites, ces hommes ont débarqué ici et ont tenté d'agresser mes amis. Ils étaient sous le coup de l'alcool je le crains et j'ai été obligé de les appréhender.
L'homme s'approcha de ses compagnons d'armes, immobiles et étendus sur le sol, tâta leur cou et sentit sa main. Son expression faciale suffit à faire comprendre que ses hommes sentaient fortement l'alcool.
-Très bien on les embarque, fit le soldat, Prévenez-nous la prochaine fois, on ne sera pas aussi tolérant.
Il fit signe à ses hommes de ramasser les autres et ils s'éclipsèrent, non sans jeter un dernier regard suspicieux à l'intérieur de l'auberge. Lorsqu'ils furent suffisamment loin, le tavernier qui n'avait rien dit s'exclama :
-Tu es malade ! Ils sauront que tu as menti !
-Je n'ai pas dit le contraire, se défendit Reaver sans hausser le ton, mais je ne serais plus là quand ils me rechercheront. Ne perdons-pas plus de temps, mon père t'a-t-il envoyé une missive ?
Le tavernier se calma momentanément et tourna en rond. Il triturait nerveusement la chemise tachée qu'il portait et répondit :
-Oui. Il y a deux mois.
Il conduisit Reaver derrière son comptoir et sortit un petit coffre de bois, taillé grossièrement et les finitions étaient plus que douteuses. Il fit jouer une grosse clé dans la serrure jusqu'à ce qu'un déclic se fasse entendre et il ouvrit délicatement la boîte. L'intérieur poussiéreux contenait en effet une lettre craquelée dont le sceau rouge témoignait qu'elle n'avait pas encore été ouverte. Le petit homme la saisit et la tendit à Reaver qui brisa le cachet d'un geste sec de la main. Il déplia la lettre et il la parcourut rapidement des yeux. A la fin de son inspection succinte, il déchira la lettre et la donna en pâture aux flammes mourantes du foyer.
-C'est bien ce qu'il me semblait, fit-il pensif, les Faucons Blancs sont de nouveau en activité et mon père craint qu'ils complotent avec les démons.
Il souffla et laissa échapper entre ses dents :
-Enfin, étaient désormais...
Itrenog était resté coi devant un tel spectacle. Il avait suffit à cet homme de verser le contenu de la bouteille sur les gardes pour convaincre les autres qu'ils étaient soûl. Et son habileté au combat était exemplaire, pour un humain. Son attitude désinvolte couplée avec son apparence noble le rendait presque irritant.
-Je vais partir maintenant, reprit Reaver, Merci pour ce que tu as fait mais je crains que j'ai trop trainé par ici.
-Quoi ? Je t'ai cru mort depuis cinq ans et tu disparais de nouveau ?
-Je suis désolé, les choses ne se sont pas passées comme prévues.
Le tavernier recula, comme piqué par un insecte. Son air désabusé laissait penser qu'il refusait de croire à ce qu'il avait entendu. Il voulut dire quelque chose mais Reaver leva la main pour l'interrompre :
-Je sais ce que tu penses, mais je n'ai pas pu prévoir l'ampleur des évènements.
Il se tourna vers Itrenog et ajouta :
-Au revoir étranger, j'ai comme le sentiment que nous nous reverrons.
Avec une agilité de félin, il bondit par dessus les débris de bois et sortit de la taverne en courant. Le petit homme passa une main dans le reste de cheveux qui ornait son front et soupira :
-Un sacré bonhomme ce Reaver hein ?
-Peut-être, je ne le connais pas.
Le vendeur ricana et commença à ranger distraitement son auberge. Il avait perdu ce petit quelque chose qui faisait qu'une personne était de bonne humeur. Son regard était vide, ses actions mécaniques comme dictées par une force supérieure sans qu'il en prenne conscience, et il remuait les lèvres de temps à autre, signe qu'il était troublé par les récents évènements. Il s'approcha de la porte et regarda à l'extérieur.
-Par les feux de l'Inferës, cette taverne a connut plus de clients en trente minutes qu'en dix ans de service !
Il se décala pour laisser entrer une autre personne. Iberiel cette fois-ci. Elle passa un rapide coup d'œil à l'intérieur, non sans cacher sa désapprobation, et croisa les bras :
-Hé bien, entre les soldats qui trainent leurs compagnons ivres morts et un homme qui m'accoste de la plus étrange des manières, cette ville est quelque peu … exotique.
Le vendeur toussota mais ne répondit pas.
-J'ai tout ce qu'il nous faut, poursuivit-elle, Nous pouvons partir.
-Ah voici donc le «nous» …, comprit l'homme.
-Le «nous» ?
-Hum, ce n'est rien. Bon courage pour vos aventures et que Sigmar guide vos pas.
Le tavernier trottina derrière Itrenog et le pressa à sortir. Il alla même jusqu'à le pousser dehors en voyant qu'il ne réagissait pas. Iberiel haussa les épaules et de nouveau, il se remirent en route. Cette fois-ci, il n'y aurait plus d'escale. Un unique chemin menant aux réponses sur la vie d'Itrenog.
Plus loin dans la ville, une ombre furtive passa à côté d'un homme vêtu d'une ample tunique rouge sang. Ils se trouvaient dans une ruelle sombre, cachés à l'abri des vieux tonneaux et des charrettes abandonnées, et l'homme se tourna vers celui qui venait d'arriver :
-Ce sont bien eux ?
-Oui, répondit l'inconnu, je les ai pisté depuis Munduce. Il n'y a aucun doute possible.
L'homme inspira fortement et leva sa main. Il tenait un parchemin roulé, comme s'il avait été préparé dans le but d'être transporté par un messager.
-Tu fais vraiment de l'excellent travail. Tu ne m'en veux pas si je la tue ?
-Je ne crois pas que ce soient les ordres, se renfrogna l'ombre. Attaquerez-vous dans la ville ?
-Non, c'est trop risqué. J'attendrais qu'ils se soient éloignés. Quant à toi, oublie-la, tu n'es plus comme elle.
L'inconnu disparu en une fraction de seconde et l'homme s'avança sous la lumière du jour. Son visage était d'une pâleur cadavérique mais ses yeux étaient ceux de quelqu'un qui voulait du sang. Beaucoup de sang. Trop peut-être pour la mission qu'on lui avait confiée. Peu importe, se disait-il, je dirais qu'ils se sont débattus un peu. Il s'avança avec un rictus de plaisir, savourant le moment où il pourrait se déchainer.
-Me voici mes petits ...
- Spoiler:
- Augmentation en intelligence svp
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Re: Une vie, un devoir ...
L'après-midi était déjà presque entamée lorsqu'Iberiel et Itrenog sortirent de l'auberge. L'empressement de l'homme à les faire sortir les avaient quelque peu étonné mais ni l'un ni l'autre n'abordèrent le sujet. Ils se contentèrent de se diriger vers la porte nord du village. L'agitation perceptible en début de matinée n'avait pas décru et il était difficile de circuler tant les rues étaient bondées. Les hommes jouaient du coude et de l'épaule pour conduire leurs femmes à l'étal qui les intéressaient et ne gagnaient qu'un «merci» évasif, avalé par la cacophonie ambiante. En plus des habitants du village, des marchands tentaient de faire affaire dans des ruelles peu fréquentées à l'abri des regards indiscrets tandis que d'autre tentaient de se faire une place parmi les rares espaces inoccupés. Il n'y avait parfois qu'un petit mètre séparant deux étals dans les rues étroites. Les caravanes qui n'étaient que de passage créaient des flaques de boue au sol, ajoutant encore à l'inconfort des deux voyageurs. Le centre de la ville était constitué d'un puits central autour duquel s'articulait toutes les routes partant à l'est, au nord, au sud-est et au sud-ouest et d'où s'organisait toutes les maisons. Nulle trace d'église rendant culte à Sigmar, uniquement un homme portant une longue robe blanche qui prêchait sa bonne parole en agitant un bol d'encens devant les passants.
A mesure qu'ils s'éloignaient du centre, la foule était de moins en moins compacte jusqu'à n'avoir presque plus personne arrivé devant la porte. Itrenog stoppa sa marche. Sa nuque le picotait et un sentiment désagréable se répandit en lui. Iberiel se retourna vers lui et lui demanda :
-Que se passe-t-il ?
-Vous ne sentez pas ?
La femme ferma les yeux. Une présence se démarquait très nettement de celles des humains vaquant à leurs occupations. Elle pulsait par vague successive, la rendant impossible à localiser. Iberiel comprit alors que les faucheurs de la nuit étaient revenus réclamer leur dû.
-Nous devrions sortir au plus vite pour éviter des dégâts sur le village, suggéra-t-elle.
Itrenog ne répondit pas et se dirigea tout de même vers la porte de bois qu'il apercevait déjà. Une simple barricade de bois faisait office de porte et deux tours de guet surplombaient les palissades. Quelques soldats observaient distraitement les alentours mais pas de trace de mages à première vue. Lorsqu'ils arrivèrent devant le portail, le garde se renseigna sur la direction qu'ils comptaient prendre, et s'en retourna à sa sieste.
-Vous pensez qu'ils nous ont déjà retrouvé ? S'enquit Iberiel une fois à bonne distance de la porte.
-Il semblerait.
Ils continuèrent à s'éloigner de Carcosa dans le silence le plus total, redoutant le moment où le démon se déciderait à passer à l'attaque. Même à deux contre un, il était possible qu'il puisse gagner l'affrontement. Surtout si Itrenog ne se résignait toujours pas à sortir son épée. Iberiel jeta un rapide coup d'œil sur ladite arme. Elle semblait en tout point ordinaire à celle que pouvait porter les soldats de Munduce. Deux quillons perpendiculaires au corps de l'épée, fourreau de cuir noir, pommeau argenté, rien de spécial. La femme tourna dans sa tête plusieurs fois la formulation de sa phrase avant de parler :
-Dites-moi, si vous êtes mercenaire, vous servirez-vous de votre épée si le démon nous attaque ?
-Uniquement si la situation le permet.
Elle n'insista pas, préférant couper court à la discution. Itrenog avait le don de mettre mal à l'aise n'importe qui parlait avec lui, et Iberiel ne serait pas une exception. Sa répartie et sa rigidité apparente était à ce point déroutante qu'il était impossible de percevoir le moindre de ces faits à venir. Iberiel pointa du doigt en direction du nord-ouest et dit :
-Il y a un petit bosquet à environ deux jours de marche. C'est ici qu'habite mon ami. Espérons simplement ne pas tomber sur d'autres démons d'ici là.
Itrenog aquiesca et ils poursuivirent en silence. Le soleil amorçait déjà depuis longtemps sa descente et il fallait progresser au plus vite. Un combat de nuit donnerait très largement un avantage aux démons, Itrenog n'étant plus habitué à voir dans le noir. Mais peut-être qu'une confrontation avec un de ceux qui le pourchassent l'éclairerait-il sur des événements qui l'ont mené à son enfermement dans les Mines Hurlantes.
Alors qu'ils attaquaient la montée d'un plateau légèrement surélevé par rapport au reste de la plaine, un craquement sinistre retentit, faisant vibrer l'air. Iberiel s'arrêta, imitée par son compagnon. Le vrombissement reprit de plus belle, plus proche cette fois-ci. Rien dans le ciel ne présageait la présence d'un orage et aucune bête sauvage connue ne pouvait être à l'origine d'un tel bruit. L'air s'alourdit sensiblement. D'abord imperceptiblement, puis de plus en plus, comme chargé d'une énergie maléfique. Les pulses reprirent plus rapidement et cessèrent subitement. Pas un bruit hormis la caresse du vent ou les cris joyeux des hirondelles virevoltant dans les airs. Un dépression violente condensa l'énergie de l'air en un point et, avec un claquement terrible, explosa littéralement. Itrenog fut secoué par ce choc puissant et fut contraint de reculer. Ses tympans lui faisaient mal et il lui fallut plusieurs minutes avant de reprendre constance. Il leva les yeux et il le vit. Le démon qui les poursuivait. Une veste rouge sang tombait sur le sol, de longs cheveux de la même couleur battaient furieusement au vent et une longue flamberge pendait sur son côté droit, fermement tenue par une main dont la teinte était aussi pâle que celle d'un mourant. L'homme lâcha avec un rictus de joie :
-Vous n'aviez tout de même pas prévu de me fausser compagnie cette fois ?
Iberiel se redressa à son tour, le regard franc et droit. Elle posa une main sur le pommeau de sa rapière et fit :
-J'espère que la situation vous permet de vous battre.
Itrenog se contenta seulement de la regarder avant de reposer son attention sur celui qui ce tenait en face d'eux. Large d'épaule, le corps d'humain qu'il avait utilisé était de toute évidence celui d'un soldat aguerri. La sensation qu'il en émanait était purement bestiale. Une soif irrassasiable de combat, une volonté de dévoiler son pouvoir à la face du monde, de crier au meurtre et au carnage. L'archétype même du Vanathiës en mission.
-Tu sais, reprit le démon en s'adressant à Itrenog, qu'ils ont envoyé des traqueurs à ta poursuite ? Ils te tueront si tu ne me suis pas.
-Ma fin ne sera pas différente si je décidais de t'accompagner.
-Détrompe toi …
Le démon enfonça son épée dans le sol, faisant pourrir à vue d'œil la végétation alentour. Un large cercle de plante morte se dessina autour de lui et il se frotta les mains. Des étincelles naquirent petit à petit et un tapis de flamme recouvrit son bras sans lui faire le moindre mal. Il retira son arme du sol et les flammes s'agrippèrent à l'épée, faisant d'elle un véritable serpent enflammé.
-Je n'ai malheureusement pas le temps de vous expliquer. Mais comme je sais que vous ne m'accompagnerez pas de gré et de cœur, je vais vous forcer la main.
Avec un moulinet ample de la main, il envoya une boule de feu visant Iberiel. Cette dernière psalmodia dans une langue inconnue avec une vitesse effarante et un mur de terre érigea entre elle et son agresseur. Le projectile s'écrasa contre la roche avant de disparaître progressivement, laissant l'air s'emplir d'une odeur âcre. Itrenog n'avait toujours pas bougé, il n'avait pas sortit son arme tout comme la fois où ils étaient tous tombés en embuscade. Sa raison l'empêchait de se battre pour deux faits primordiaux et pourtant, il n'avait pas d'autre choix. Mais au lieu de dégainer son épée comme Iberiel s'y attendait, il ôta rapidement son gant droit et releva sa manche, laissant à l'air libre ce qu'il cachait la plupart du temps. Des doigts griffus irradiaient d'une clarté aussi forte que les veines palpitant sur la surface de sa peau, et l'extérieur de sa main était recouvert sur un pouce et demi d'une sorte de carapace rouge qui s'étendait aussi jusqu'à la première phalange. Sur la partie non recouverte, une peau bleutée remontait le long de son bras en formant des strilles épaisses et symétriques, délimitée par l'envellope dure et pourpre. L'intérieur de sa main était uniquement composé de cette couleur si spéciale, le reste du bras couvert par un assemblement de ce qui s'apparentait à des écailles noires. Sur le début de son avant-bras cependant, nul trace de cette coquille, uniquement une peau violacée qui grimpait jusqu'à la base de l'épaule. Toutes les veinules semblaient prendre leur source dans cette partie et se ramifiaient comme les branchages d'un arbre s'étendant pour toucher le ciel. La densité de l'air sembla s'épaissir, et pesa sur la respiration d'Iberiel. Elle ne dit rien, se contentant d'observer en silence, autant tenue par la peur que par la perplexité devant un tel spectacle. De l'autre côté, le démon n'avait pas bougé, un sourire étirant simplement son visage tordu par l'excitation du combat. Le silence s'insinua quelques instants avant que le mur de terre se fendille et explose sous une pression incroyable. Une main géante jaillit des décombres et se précipita pour l'attraper. Le démon évita de justesse en se déportant sur la droite. Il observa plus attentivement son adversaire. Son bras droit était tout sauf naturel et, comme flottant à côté, une matérialisation fantomatique de son membre pulsait d'énergie. Plus grand et plus imposant, il était aussi entièrement bleu et les mêmes doigts griffus terminaient ses extrémités.
-Alors c'est donc ça ce dont ils m'ont parlé, fit le démon en se redressant, Je suppose que tu te ménages étant donné la faibl...
Une fine lame le perça alors de part en part, l'empêchant de terminer sa phrase. Iberiel retira rapidement sa rapière de son et l'envoya s'étaler au sol d'un revers de la main. Le démon se releva péniblement et tâta sa blessure. Son sourire démentiel l'avait quitté pour une expression de dégoût mêlée à l'amertume de la défaite. Du sang chaud coula sur son doigt et tâcha l'herbe verte des grande plaines humaines:
-Pathétique corps d'humain, cracha-t-il, Aussi faible qu'une branche de vigne en pleine tempête…
La femme ne lui laissa pas plus de temps pour se remettre puisqu'elle l'assaillit de nouveau. Elle se ploya sur ses jambes et en une fraction de seconde, se retrouva sur le flanc de son adversaire. Son attitude était aux antipodes de celle qu'elle avait pu avoir dans la première partie du combat. Une détermination sans faille brillait dans ses yeux et elle ne semblait éprouver nulle réticence à l'idée de transpercer le corps d'un homme. Elle attaqua de taille mais, malgré la lenteur de réaction du démon, son coup n'atteignit pas sa cible. Une autre épée s'était interposée. Courbe et fine, l'acier la composant était d'une brillance inégalable pour n'importe lequel des forgerons humains. L'inconnu portait une ample cape noire ainsi qu'un capuchon voilant son visage et ne faisant qu'apparaître deux yeux aussi rouges que ceux du démon. Sans un mot, ni même un geste, il projeta une onde de choc sur Iberiel qui fut rattrapée par l'étrange bras d'Itrenog. Ce dernier attaque derechef mais un écran invisible paralysa totalement son membre, comme serré dans un étau. L'inconnu leva son bras et disparu avec le démon dans un roulement de tonnerre. Désormais, ils ne pourraient pas les rattraper. Itrenog ne ressentait même plus la présence du démon. En revanche, son sauveur opportun dégageait quelque chose de particulier. Lourd et sinistre comme un fils de l'Inferës, mais plus mesuré et plus calme, comme un fleuve tumultueux qui attend patiemment son heure. Itrenog rompit l'afflux d'énergie de son bras et remit sa manche, ainsi que son gant.
-Très bien, soupira-t-il, je préfère anticiper …
Il se tourna vers Iberiel qui était assise au sol, essoufflée et perturbée, et dit calmement:
-Je suis un démon.
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A mesure qu'ils s'éloignaient du centre, la foule était de moins en moins compacte jusqu'à n'avoir presque plus personne arrivé devant la porte. Itrenog stoppa sa marche. Sa nuque le picotait et un sentiment désagréable se répandit en lui. Iberiel se retourna vers lui et lui demanda :
-Que se passe-t-il ?
-Vous ne sentez pas ?
La femme ferma les yeux. Une présence se démarquait très nettement de celles des humains vaquant à leurs occupations. Elle pulsait par vague successive, la rendant impossible à localiser. Iberiel comprit alors que les faucheurs de la nuit étaient revenus réclamer leur dû.
-Nous devrions sortir au plus vite pour éviter des dégâts sur le village, suggéra-t-elle.
Itrenog ne répondit pas et se dirigea tout de même vers la porte de bois qu'il apercevait déjà. Une simple barricade de bois faisait office de porte et deux tours de guet surplombaient les palissades. Quelques soldats observaient distraitement les alentours mais pas de trace de mages à première vue. Lorsqu'ils arrivèrent devant le portail, le garde se renseigna sur la direction qu'ils comptaient prendre, et s'en retourna à sa sieste.
-Vous pensez qu'ils nous ont déjà retrouvé ? S'enquit Iberiel une fois à bonne distance de la porte.
-Il semblerait.
Ils continuèrent à s'éloigner de Carcosa dans le silence le plus total, redoutant le moment où le démon se déciderait à passer à l'attaque. Même à deux contre un, il était possible qu'il puisse gagner l'affrontement. Surtout si Itrenog ne se résignait toujours pas à sortir son épée. Iberiel jeta un rapide coup d'œil sur ladite arme. Elle semblait en tout point ordinaire à celle que pouvait porter les soldats de Munduce. Deux quillons perpendiculaires au corps de l'épée, fourreau de cuir noir, pommeau argenté, rien de spécial. La femme tourna dans sa tête plusieurs fois la formulation de sa phrase avant de parler :
-Dites-moi, si vous êtes mercenaire, vous servirez-vous de votre épée si le démon nous attaque ?
-Uniquement si la situation le permet.
Elle n'insista pas, préférant couper court à la discution. Itrenog avait le don de mettre mal à l'aise n'importe qui parlait avec lui, et Iberiel ne serait pas une exception. Sa répartie et sa rigidité apparente était à ce point déroutante qu'il était impossible de percevoir le moindre de ces faits à venir. Iberiel pointa du doigt en direction du nord-ouest et dit :
-Il y a un petit bosquet à environ deux jours de marche. C'est ici qu'habite mon ami. Espérons simplement ne pas tomber sur d'autres démons d'ici là.
Itrenog aquiesca et ils poursuivirent en silence. Le soleil amorçait déjà depuis longtemps sa descente et il fallait progresser au plus vite. Un combat de nuit donnerait très largement un avantage aux démons, Itrenog n'étant plus habitué à voir dans le noir. Mais peut-être qu'une confrontation avec un de ceux qui le pourchassent l'éclairerait-il sur des événements qui l'ont mené à son enfermement dans les Mines Hurlantes.
Alors qu'ils attaquaient la montée d'un plateau légèrement surélevé par rapport au reste de la plaine, un craquement sinistre retentit, faisant vibrer l'air. Iberiel s'arrêta, imitée par son compagnon. Le vrombissement reprit de plus belle, plus proche cette fois-ci. Rien dans le ciel ne présageait la présence d'un orage et aucune bête sauvage connue ne pouvait être à l'origine d'un tel bruit. L'air s'alourdit sensiblement. D'abord imperceptiblement, puis de plus en plus, comme chargé d'une énergie maléfique. Les pulses reprirent plus rapidement et cessèrent subitement. Pas un bruit hormis la caresse du vent ou les cris joyeux des hirondelles virevoltant dans les airs. Un dépression violente condensa l'énergie de l'air en un point et, avec un claquement terrible, explosa littéralement. Itrenog fut secoué par ce choc puissant et fut contraint de reculer. Ses tympans lui faisaient mal et il lui fallut plusieurs minutes avant de reprendre constance. Il leva les yeux et il le vit. Le démon qui les poursuivait. Une veste rouge sang tombait sur le sol, de longs cheveux de la même couleur battaient furieusement au vent et une longue flamberge pendait sur son côté droit, fermement tenue par une main dont la teinte était aussi pâle que celle d'un mourant. L'homme lâcha avec un rictus de joie :
-Vous n'aviez tout de même pas prévu de me fausser compagnie cette fois ?
Iberiel se redressa à son tour, le regard franc et droit. Elle posa une main sur le pommeau de sa rapière et fit :
-J'espère que la situation vous permet de vous battre.
Itrenog se contenta seulement de la regarder avant de reposer son attention sur celui qui ce tenait en face d'eux. Large d'épaule, le corps d'humain qu'il avait utilisé était de toute évidence celui d'un soldat aguerri. La sensation qu'il en émanait était purement bestiale. Une soif irrassasiable de combat, une volonté de dévoiler son pouvoir à la face du monde, de crier au meurtre et au carnage. L'archétype même du Vanathiës en mission.
-Tu sais, reprit le démon en s'adressant à Itrenog, qu'ils ont envoyé des traqueurs à ta poursuite ? Ils te tueront si tu ne me suis pas.
-Ma fin ne sera pas différente si je décidais de t'accompagner.
-Détrompe toi …
Le démon enfonça son épée dans le sol, faisant pourrir à vue d'œil la végétation alentour. Un large cercle de plante morte se dessina autour de lui et il se frotta les mains. Des étincelles naquirent petit à petit et un tapis de flamme recouvrit son bras sans lui faire le moindre mal. Il retira son arme du sol et les flammes s'agrippèrent à l'épée, faisant d'elle un véritable serpent enflammé.
-Je n'ai malheureusement pas le temps de vous expliquer. Mais comme je sais que vous ne m'accompagnerez pas de gré et de cœur, je vais vous forcer la main.
Avec un moulinet ample de la main, il envoya une boule de feu visant Iberiel. Cette dernière psalmodia dans une langue inconnue avec une vitesse effarante et un mur de terre érigea entre elle et son agresseur. Le projectile s'écrasa contre la roche avant de disparaître progressivement, laissant l'air s'emplir d'une odeur âcre. Itrenog n'avait toujours pas bougé, il n'avait pas sortit son arme tout comme la fois où ils étaient tous tombés en embuscade. Sa raison l'empêchait de se battre pour deux faits primordiaux et pourtant, il n'avait pas d'autre choix. Mais au lieu de dégainer son épée comme Iberiel s'y attendait, il ôta rapidement son gant droit et releva sa manche, laissant à l'air libre ce qu'il cachait la plupart du temps. Des doigts griffus irradiaient d'une clarté aussi forte que les veines palpitant sur la surface de sa peau, et l'extérieur de sa main était recouvert sur un pouce et demi d'une sorte de carapace rouge qui s'étendait aussi jusqu'à la première phalange. Sur la partie non recouverte, une peau bleutée remontait le long de son bras en formant des strilles épaisses et symétriques, délimitée par l'envellope dure et pourpre. L'intérieur de sa main était uniquement composé de cette couleur si spéciale, le reste du bras couvert par un assemblement de ce qui s'apparentait à des écailles noires. Sur le début de son avant-bras cependant, nul trace de cette coquille, uniquement une peau violacée qui grimpait jusqu'à la base de l'épaule. Toutes les veinules semblaient prendre leur source dans cette partie et se ramifiaient comme les branchages d'un arbre s'étendant pour toucher le ciel. La densité de l'air sembla s'épaissir, et pesa sur la respiration d'Iberiel. Elle ne dit rien, se contentant d'observer en silence, autant tenue par la peur que par la perplexité devant un tel spectacle. De l'autre côté, le démon n'avait pas bougé, un sourire étirant simplement son visage tordu par l'excitation du combat. Le silence s'insinua quelques instants avant que le mur de terre se fendille et explose sous une pression incroyable. Une main géante jaillit des décombres et se précipita pour l'attraper. Le démon évita de justesse en se déportant sur la droite. Il observa plus attentivement son adversaire. Son bras droit était tout sauf naturel et, comme flottant à côté, une matérialisation fantomatique de son membre pulsait d'énergie. Plus grand et plus imposant, il était aussi entièrement bleu et les mêmes doigts griffus terminaient ses extrémités.
-Alors c'est donc ça ce dont ils m'ont parlé, fit le démon en se redressant, Je suppose que tu te ménages étant donné la faibl...
Une fine lame le perça alors de part en part, l'empêchant de terminer sa phrase. Iberiel retira rapidement sa rapière de son et l'envoya s'étaler au sol d'un revers de la main. Le démon se releva péniblement et tâta sa blessure. Son sourire démentiel l'avait quitté pour une expression de dégoût mêlée à l'amertume de la défaite. Du sang chaud coula sur son doigt et tâcha l'herbe verte des grande plaines humaines:
-Pathétique corps d'humain, cracha-t-il, Aussi faible qu'une branche de vigne en pleine tempête…
La femme ne lui laissa pas plus de temps pour se remettre puisqu'elle l'assaillit de nouveau. Elle se ploya sur ses jambes et en une fraction de seconde, se retrouva sur le flanc de son adversaire. Son attitude était aux antipodes de celle qu'elle avait pu avoir dans la première partie du combat. Une détermination sans faille brillait dans ses yeux et elle ne semblait éprouver nulle réticence à l'idée de transpercer le corps d'un homme. Elle attaqua de taille mais, malgré la lenteur de réaction du démon, son coup n'atteignit pas sa cible. Une autre épée s'était interposée. Courbe et fine, l'acier la composant était d'une brillance inégalable pour n'importe lequel des forgerons humains. L'inconnu portait une ample cape noire ainsi qu'un capuchon voilant son visage et ne faisant qu'apparaître deux yeux aussi rouges que ceux du démon. Sans un mot, ni même un geste, il projeta une onde de choc sur Iberiel qui fut rattrapée par l'étrange bras d'Itrenog. Ce dernier attaque derechef mais un écran invisible paralysa totalement son membre, comme serré dans un étau. L'inconnu leva son bras et disparu avec le démon dans un roulement de tonnerre. Désormais, ils ne pourraient pas les rattraper. Itrenog ne ressentait même plus la présence du démon. En revanche, son sauveur opportun dégageait quelque chose de particulier. Lourd et sinistre comme un fils de l'Inferës, mais plus mesuré et plus calme, comme un fleuve tumultueux qui attend patiemment son heure. Itrenog rompit l'afflux d'énergie de son bras et remit sa manche, ainsi que son gant.
-Très bien, soupira-t-il, je préfère anticiper …
Il se tourna vers Iberiel qui était assise au sol, essoufflée et perturbée, et dit calmement:
-Je suis un démon.
- Spoiler:
- Augmentation en concentration svp (si il en a trop, répartir le reste en puissance)
******************
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Dernière édition par Itrenog le Ven 14 Mai 2010 - 19:27, édité 1 fois
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Re: Une vie, un devoir ...
[Hé bé ! J'en ai eu du mal à poursuivre le rp ...]
Iberiel resta un moment silencieuse après cette révélation. Une foule de questions se croisaient et se choquaient dans son esprit au point qu'elle n'arrivait plus à penser clairement. Elle posa un bref regard sur le bras droit d'Itrenog. Rien. Rien ne s'en émanait. Pourtant, après un tel déchainement d'énergie, il devait y avoir quelque chose, une once d'aura traversant le tissu. Malgré toute sa volonté, Iberiel fut incapable de percevoir la moindre pulse d'énergie. Comme si quelque chose l'empêchait de passer. Elle inspira profondément afin de vider sa tête de toutes les interrogations superflues. Avant qu'elle n'ait eu le temps de dire quoique ce soit, Itrenog prit la parole :
-Les démons me pourchassent pour un acte que j'ai commis lorsque j'étais en Inferës.
-Qu'avez-vous fait ?
Malgré sa curiosité sur l'évènement qui avait pu poussé la traque d'un seul démon par tous les Omeradiës, elle redoutait la réponse.
-Il n'est pire ennemi qu'un esprit faible, éluda-t-il, vous le savez sans doute.
-Comment ça esprit faible ?
-Je vous ai vu utiliser la magie. Peu d'humains peuvent se vanter de pouvoir en faire autant. Votre volonté doit être infaillible.
Iberiel accepta ce qu'elle prit pour un compliment en silence. Il était difficile de déchiffrer ce que disait Itrenog. Même en posant une question directe, il trouvait sans cesse le moyen de contourner la réponse.
-Et donc, voulez-vous répondre à ma question ? Reprit-elle.
-Je l'ai fait.
Sans plus chercher à débattre des évènements qui l'avaient laissée épuisée, elle soupira en haussant des épaules. Elle savait qu'elle ne tirerait rien de plus. Aussi se contenta-t-elle d'essayer de préparer la suite des évènements.
-Comptez-vous toujours m'accompagner chez les Elfes ?
-Je devrais plutôt vous retourner la question, répondit Itrenog d'une voix lente et mesurée, Acceptez-vous de m'avoir pour garde sachant ce que je suis réellement ?
-Pourquoi pas ?, laissa-t-elle échapper avec un faible sourire.
Elle se redressa et décida qu'il était temps de se remettre en route. Le soleil avait amorcé sa descente dans le ciel et seuls quelques rares troupeaux de Lorzis s'aventuraient encore dans l'immensité des plaines humaines. Un vent d'ouest battait furieusement la steppe qui ondulait comme un voile. Un terrain plat et vague à perte de vue et nulle trace de forêt. Itrenog en était presque venu à se demander s'il y avait vraiment un «ami» qui demeurait ici. Il avait cependant choisi de ne pas faire part de ses impressions, préférant de loin le souffle du vent à une conversation terne avec quelqu'un.
Les deux compagnons marchèrent donc jusqu'à ce que le soleil cède sa place à la lune dans le firmament et jusqu'à ce que l'obscurité étende son long manteau noir sur la terre de Naravel. La nuit était relativement calme en comparaison avec la journée. Une légère brise, un ciel laissant apparaître les constellations d'étoiles sous forme de minuscules paillettes blanche et le silence quasiment total donnait presque l'impression qu'il n'y avait aucune vie dans ces plaines. Iberiel proposa de monter le camps et installa son bivouac sur une sorte de talus légèrement surélevé. Elle pointa son doigt sur le sol et une étincelle en jaillit, allumant un petit foyer sur l'herbe rase. Le feu semblait contenu dans un petit cercle et une douce chaleur s'en dégageait. Iberiel s'apprêta à sortir les quelques provisions de son sac mais se ravisa. Elle n'avait nullement faim et son compagnon ne semblait pas se plaindre du manque de nourriture. Elle le regarda s'assoir et décida de l'interroger :
-Dites-moi, vous ne mangez jamais ?
-Pas de nourriture commune.
-C'est un trait commun à tous les démons ?
Itrenog déboucla la sangle sur son torse pour laisser tomber son épée. Instinctivement, Iberiel ramena sa main sur la garde de sa rapière, mais se détendit quand elle le vit poser son arme sur ses genoux. Le silence s'installa, interrompu de temps à autre par le doux sifflement de la bise nocturne.
-Les démons ne se nourrissent que d'une chose : l'essence d'autrui. Nous devons absorber cette énergie lorsque nous tuons quelqu'un sans quoi nous sommes condamnés.
-Vous mangez des âmes ...
-Je n'ai rien vu qui ressemble à ce que vous appelez «âme», rectifia-t-il, La seule chose que je sais, c'est que nous ingérons de l'énergie vitale. La plupart d'entre nous le font dans le seul but d'évoluer vers la Caste Supérieure.
-Et vous ?
Cette fois-ci, Itrenog plaça sa paume sur la garde de son arme. Il caressa lentement le cuir noir mais ne sortit pas son arme. Pendant un instant, Iberiel crut qu'il était parti ailleurs et que son épée vibrait légèrement. Un ronronnement sourd avait empli l'air. Très léger, à peine perceptible, mais bien présent. Elle cligna des yeux et l'impression disparut.
-Je le fais parce que sinon, elle deviendrait incontrôlable et risquerait de tuer n'importe qui.
-Votre épée ? S'étonna Iberiel.
-C'est … compliqué.
Il posa son épée à côté de lui et croisa les bras :
-En revanche, vous, vous pouvez manger.
-Disons … que je n'ai pas faim, fit-elle en souriant.
Iberiel discerna ce qu'elle prit pour un haussement de sourcils et sourit. Elle n'en était pas sûre, et s'était d'autant plus difficile de déchiffrer ce visage de marbre qu'il était en grande partie masqué par le stetson qu'il portait et par le col qui remontait juste au niveau du nez, mais si c'était le cas, elle trouva ce détail amusant.
-Vous n'avez pas chaud sous ce manteau ?, plaisanta-t-elle.
Au lieu d'une réponse, Itrenog ouvrit le haut de son manteau, révélant un visage fin et marqué par les étranges strates bleutées. Iberiel eut un mouvement de recul. Premièrement parce qu'une chose dont elle se doutait depuis leur première rencontre venait d'être confirmé, mais surtout parce que l'air s'était alourdi. Il lui pesait comme si elle revivait une deuxième fois l'attaque du démon. Elle se força à fixer le visage d'Itrenog. Malgré les veinules qui striaient son visage, il était parfaitement reconnaissable. Le même nez long et fin, la forme légèrement allongée de son visage. La seule chose qui changeait était ses yeux. Des yeux rouges comme la braise luisaient sous l'ombre de son chapeau au lieu d'être aussi blanc que le pelage d'un Lorzi. Itrenog referma alors son manteau :
-… Et ce n'est rien en comparaison avec la chaleur qui bout en moi. Je fais ça pour me prémunir des démons qui peuvent ressentir ma présence et surtout, pour me garder des autres.
Il baissa la tête comme s'il s'excusait d'avoir eut recours à cette nécessité pour être sur de se faire comprendre. Lorsqu'il releva la tête, Iberiel n'avait pas bougée, ses yeux grands ouvert et ses lèvres agitée par de légers tremblements. Il se déplaça sur le côté pour s'assurer que ce n'était pas lui qu'elle regardait ainsi, et fut soulagé de voir qu'elle continuait de fixer un seul endroit.
-Vous êtes résistante, reprit-il en claquait des doigts devant ses yeux, Rares sont ceux qui ne s'effondrent pas après ça.
-Je … Pardon, j'étais absente. Pas à cause de … enfin désolée. Je vais me coucher.
Et elle se retourna pour s'étendre sous sa couette sans un mot. Itrenog remit son épée dans son dos comme s'il n'avait pas prêté attention à l'attitude étrange d'Iberiel et ferma les yeux, à l'affut du moindre bruit pour monter la garde.
Le lendemain, ils repartirent sans un mot, sans manger non plus, profitant du temps clément qui s'annonçait à eux. Quelques nuages tachaient le ciel de leur présence cotonneuse, mais les rayons du soleil perçaient à travers eux, répandant une odeur agréable d'herbe séchant la bruine matinale. Itrenog n'avait pas fait cas de ce qu'il s'était passé la veille, et Iberiel ne semblait pas prête à discuter non plus. Elle paraissait plus distante depuis qu'il lui avait montré un aperçu de ce qu'il était. Il ne se demandait pas si ce fut une bonne ou une mauvaise chose que d'avoir entre-ouvert son manteau, car il s'attendait à cette réaction au vu des antécédents démoniaques, mais il savait qu'il y avait quelque chose d'autre. Une raison qui lui échappait et pourtant, qu'il lui semblait connaître. Au fond de lui, il avait l'impression d'avoir déjà vu Iberiel quelque part et de connaître ce qui la perturbait, mais il était incapable de mettre des mots dessus, et encore moins de donner une forme concrète à ses pensées.
-Nous y sommes bientôt.
La voix claire d'Iberiel le ramena à la réalité. Devant eux, un petit bosquet se détachait de l'horizon. Il n'y en avait eu aucune trace la veille, ou peut-être n'avait-il pas été assez vigilant, mais ce devait être là que se trouvait le mystérieux ami qu'ils devaient voir.
Ils marchèrent alors en direction de ce boqueteau qui semblait se rapprocher plus vite que le rythme de leur marche. En quelques minutes à peine, ils se retrouvèrent devant des hêtres et des chênes. A vue d'œil, le diamètre n'excédait pas la vingtaine de mètres.
-Illusion, commenta Iberiel, Il préfère la discrétion.
Elle s'enfonça dans le petit bois, suivie de près par Itrenog. Et en effet, l'intérieur était beaucoup plus dense que ce qu'il paraissait. Sur la gauche, il y avait une sorte de petit lopin de terre où poussait toutes sortes de légumes. De l'aubergine en passant par le melon ou les carottes. A droite, un enclos fait de barrière de vieux bois où s'étendait un vieux cheval au pelage terne. Des oiseaux voletaient entre les troncs et on pouvait aussi apercevoir des terriers creusés par des rongeurs, parfois avec un animal posté en embuscade devant. Un véritable écosystème. Droit devant eux, on devinait une petite chaumière fait de paille pourrie et de chaux usée par le temps. La porte avant était trouée et un vieux loquet rouillé pendait inutilement sur une des rares planches intactes. Iberiel s'approcha de la porte et frappa.
-Ne vous offusquez pas de ses manières, fit-elle d'une voix froide, il est un peu … spécial.
Pas de réponse. Elle poussa la porte qui grogna de douleur et posa un pied sur le parquais qui lui aussi émit des protestations bruyantes. Itrenog la suivit. La pièce dans laquelle ils se trouvaient était carrée, avec une vieille table au centre. Dans le fond, de multiples étagères avec des parchemins, des livres et des fioles en tout genre. Un atelier était disposé au milieu de ce capharnaüm, rempli d'ustensiles improbables. Des outils de verres, des marteaux, des pinces et autres outils de charpentier. Le mobilier était rudimentaire, pour la plupart fait de bois couvert par la poussière et rongé par les insectes. On aurait dit un taudis miteux et à l'abandon. Le tout était éclairé par une unique bougie accrochée au mur, mais qui étrangement, baignait l'endroit d'une lumière blanche et claire. Un grincement retentit et une ombre se détacha d'un couloir dans le fond à droite. Un vieil homme en sortit, en écrivant des deux mains sur deux carnets qui flottaient devant lui et qui avançaient à sa vitesse. Il portait une lourde robe grise qui trainait au sol, soulevant des monticules de poussières et ses cheveux argentés étaient plaqués en arrière sur son crâne. Il marmonnait des paroles incompréhensibles tout en avançant lorsque son pied heurta un objet lourd sur le sol.
-Ça y est ! J'ai trouvé la formule pour mon engrais à tomates !
Il ne prêta pas attention à son pied endolori et posa ses deux carnets sur la table centrale.
-Athos ? Risqua Iberiel.
-Oui oui, je vous ai vu. Attendez juste …
Il griffonna rapidement sur le carnet de droite et le referma avant de la glisser habilement dans sa large manche. Son habit ressemblait à ceux des anciens mages humains, à ceci près que celui du vieil homme était terni par les ans. Il releva la tête et Itrenog le reconnut immédiatement.
-Coucou !
Il n'y avait plus de barbe graisseuse, plus de cheveux sales, plus d'yeux vitreux et pourtant, c'était bien lui. Le mendiant de Munduce se tenait devant Itrenog avec un sourire d'enfant ravi sur les lèvres en agitant ses mains en guise de salut.
[J'arrive pour mettre à jour ma prez' etc ...]
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Iberiel resta un moment silencieuse après cette révélation. Une foule de questions se croisaient et se choquaient dans son esprit au point qu'elle n'arrivait plus à penser clairement. Elle posa un bref regard sur le bras droit d'Itrenog. Rien. Rien ne s'en émanait. Pourtant, après un tel déchainement d'énergie, il devait y avoir quelque chose, une once d'aura traversant le tissu. Malgré toute sa volonté, Iberiel fut incapable de percevoir la moindre pulse d'énergie. Comme si quelque chose l'empêchait de passer. Elle inspira profondément afin de vider sa tête de toutes les interrogations superflues. Avant qu'elle n'ait eu le temps de dire quoique ce soit, Itrenog prit la parole :
-Les démons me pourchassent pour un acte que j'ai commis lorsque j'étais en Inferës.
-Qu'avez-vous fait ?
Malgré sa curiosité sur l'évènement qui avait pu poussé la traque d'un seul démon par tous les Omeradiës, elle redoutait la réponse.
-Il n'est pire ennemi qu'un esprit faible, éluda-t-il, vous le savez sans doute.
-Comment ça esprit faible ?
-Je vous ai vu utiliser la magie. Peu d'humains peuvent se vanter de pouvoir en faire autant. Votre volonté doit être infaillible.
Iberiel accepta ce qu'elle prit pour un compliment en silence. Il était difficile de déchiffrer ce que disait Itrenog. Même en posant une question directe, il trouvait sans cesse le moyen de contourner la réponse.
-Et donc, voulez-vous répondre à ma question ? Reprit-elle.
-Je l'ai fait.
Sans plus chercher à débattre des évènements qui l'avaient laissée épuisée, elle soupira en haussant des épaules. Elle savait qu'elle ne tirerait rien de plus. Aussi se contenta-t-elle d'essayer de préparer la suite des évènements.
-Comptez-vous toujours m'accompagner chez les Elfes ?
-Je devrais plutôt vous retourner la question, répondit Itrenog d'une voix lente et mesurée, Acceptez-vous de m'avoir pour garde sachant ce que je suis réellement ?
-Pourquoi pas ?, laissa-t-elle échapper avec un faible sourire.
Elle se redressa et décida qu'il était temps de se remettre en route. Le soleil avait amorcé sa descente dans le ciel et seuls quelques rares troupeaux de Lorzis s'aventuraient encore dans l'immensité des plaines humaines. Un vent d'ouest battait furieusement la steppe qui ondulait comme un voile. Un terrain plat et vague à perte de vue et nulle trace de forêt. Itrenog en était presque venu à se demander s'il y avait vraiment un «ami» qui demeurait ici. Il avait cependant choisi de ne pas faire part de ses impressions, préférant de loin le souffle du vent à une conversation terne avec quelqu'un.
Les deux compagnons marchèrent donc jusqu'à ce que le soleil cède sa place à la lune dans le firmament et jusqu'à ce que l'obscurité étende son long manteau noir sur la terre de Naravel. La nuit était relativement calme en comparaison avec la journée. Une légère brise, un ciel laissant apparaître les constellations d'étoiles sous forme de minuscules paillettes blanche et le silence quasiment total donnait presque l'impression qu'il n'y avait aucune vie dans ces plaines. Iberiel proposa de monter le camps et installa son bivouac sur une sorte de talus légèrement surélevé. Elle pointa son doigt sur le sol et une étincelle en jaillit, allumant un petit foyer sur l'herbe rase. Le feu semblait contenu dans un petit cercle et une douce chaleur s'en dégageait. Iberiel s'apprêta à sortir les quelques provisions de son sac mais se ravisa. Elle n'avait nullement faim et son compagnon ne semblait pas se plaindre du manque de nourriture. Elle le regarda s'assoir et décida de l'interroger :
-Dites-moi, vous ne mangez jamais ?
-Pas de nourriture commune.
-C'est un trait commun à tous les démons ?
Itrenog déboucla la sangle sur son torse pour laisser tomber son épée. Instinctivement, Iberiel ramena sa main sur la garde de sa rapière, mais se détendit quand elle le vit poser son arme sur ses genoux. Le silence s'installa, interrompu de temps à autre par le doux sifflement de la bise nocturne.
-Les démons ne se nourrissent que d'une chose : l'essence d'autrui. Nous devons absorber cette énergie lorsque nous tuons quelqu'un sans quoi nous sommes condamnés.
-Vous mangez des âmes ...
-Je n'ai rien vu qui ressemble à ce que vous appelez «âme», rectifia-t-il, La seule chose que je sais, c'est que nous ingérons de l'énergie vitale. La plupart d'entre nous le font dans le seul but d'évoluer vers la Caste Supérieure.
-Et vous ?
Cette fois-ci, Itrenog plaça sa paume sur la garde de son arme. Il caressa lentement le cuir noir mais ne sortit pas son arme. Pendant un instant, Iberiel crut qu'il était parti ailleurs et que son épée vibrait légèrement. Un ronronnement sourd avait empli l'air. Très léger, à peine perceptible, mais bien présent. Elle cligna des yeux et l'impression disparut.
-Je le fais parce que sinon, elle deviendrait incontrôlable et risquerait de tuer n'importe qui.
-Votre épée ? S'étonna Iberiel.
-C'est … compliqué.
Il posa son épée à côté de lui et croisa les bras :
-En revanche, vous, vous pouvez manger.
-Disons … que je n'ai pas faim, fit-elle en souriant.
Iberiel discerna ce qu'elle prit pour un haussement de sourcils et sourit. Elle n'en était pas sûre, et s'était d'autant plus difficile de déchiffrer ce visage de marbre qu'il était en grande partie masqué par le stetson qu'il portait et par le col qui remontait juste au niveau du nez, mais si c'était le cas, elle trouva ce détail amusant.
-Vous n'avez pas chaud sous ce manteau ?, plaisanta-t-elle.
Au lieu d'une réponse, Itrenog ouvrit le haut de son manteau, révélant un visage fin et marqué par les étranges strates bleutées. Iberiel eut un mouvement de recul. Premièrement parce qu'une chose dont elle se doutait depuis leur première rencontre venait d'être confirmé, mais surtout parce que l'air s'était alourdi. Il lui pesait comme si elle revivait une deuxième fois l'attaque du démon. Elle se força à fixer le visage d'Itrenog. Malgré les veinules qui striaient son visage, il était parfaitement reconnaissable. Le même nez long et fin, la forme légèrement allongée de son visage. La seule chose qui changeait était ses yeux. Des yeux rouges comme la braise luisaient sous l'ombre de son chapeau au lieu d'être aussi blanc que le pelage d'un Lorzi. Itrenog referma alors son manteau :
-… Et ce n'est rien en comparaison avec la chaleur qui bout en moi. Je fais ça pour me prémunir des démons qui peuvent ressentir ma présence et surtout, pour me garder des autres.
Il baissa la tête comme s'il s'excusait d'avoir eut recours à cette nécessité pour être sur de se faire comprendre. Lorsqu'il releva la tête, Iberiel n'avait pas bougée, ses yeux grands ouvert et ses lèvres agitée par de légers tremblements. Il se déplaça sur le côté pour s'assurer que ce n'était pas lui qu'elle regardait ainsi, et fut soulagé de voir qu'elle continuait de fixer un seul endroit.
-Vous êtes résistante, reprit-il en claquait des doigts devant ses yeux, Rares sont ceux qui ne s'effondrent pas après ça.
-Je … Pardon, j'étais absente. Pas à cause de … enfin désolée. Je vais me coucher.
Et elle se retourna pour s'étendre sous sa couette sans un mot. Itrenog remit son épée dans son dos comme s'il n'avait pas prêté attention à l'attitude étrange d'Iberiel et ferma les yeux, à l'affut du moindre bruit pour monter la garde.
Le lendemain, ils repartirent sans un mot, sans manger non plus, profitant du temps clément qui s'annonçait à eux. Quelques nuages tachaient le ciel de leur présence cotonneuse, mais les rayons du soleil perçaient à travers eux, répandant une odeur agréable d'herbe séchant la bruine matinale. Itrenog n'avait pas fait cas de ce qu'il s'était passé la veille, et Iberiel ne semblait pas prête à discuter non plus. Elle paraissait plus distante depuis qu'il lui avait montré un aperçu de ce qu'il était. Il ne se demandait pas si ce fut une bonne ou une mauvaise chose que d'avoir entre-ouvert son manteau, car il s'attendait à cette réaction au vu des antécédents démoniaques, mais il savait qu'il y avait quelque chose d'autre. Une raison qui lui échappait et pourtant, qu'il lui semblait connaître. Au fond de lui, il avait l'impression d'avoir déjà vu Iberiel quelque part et de connaître ce qui la perturbait, mais il était incapable de mettre des mots dessus, et encore moins de donner une forme concrète à ses pensées.
-Nous y sommes bientôt.
La voix claire d'Iberiel le ramena à la réalité. Devant eux, un petit bosquet se détachait de l'horizon. Il n'y en avait eu aucune trace la veille, ou peut-être n'avait-il pas été assez vigilant, mais ce devait être là que se trouvait le mystérieux ami qu'ils devaient voir.
Ils marchèrent alors en direction de ce boqueteau qui semblait se rapprocher plus vite que le rythme de leur marche. En quelques minutes à peine, ils se retrouvèrent devant des hêtres et des chênes. A vue d'œil, le diamètre n'excédait pas la vingtaine de mètres.
-Illusion, commenta Iberiel, Il préfère la discrétion.
Elle s'enfonça dans le petit bois, suivie de près par Itrenog. Et en effet, l'intérieur était beaucoup plus dense que ce qu'il paraissait. Sur la gauche, il y avait une sorte de petit lopin de terre où poussait toutes sortes de légumes. De l'aubergine en passant par le melon ou les carottes. A droite, un enclos fait de barrière de vieux bois où s'étendait un vieux cheval au pelage terne. Des oiseaux voletaient entre les troncs et on pouvait aussi apercevoir des terriers creusés par des rongeurs, parfois avec un animal posté en embuscade devant. Un véritable écosystème. Droit devant eux, on devinait une petite chaumière fait de paille pourrie et de chaux usée par le temps. La porte avant était trouée et un vieux loquet rouillé pendait inutilement sur une des rares planches intactes. Iberiel s'approcha de la porte et frappa.
-Ne vous offusquez pas de ses manières, fit-elle d'une voix froide, il est un peu … spécial.
Pas de réponse. Elle poussa la porte qui grogna de douleur et posa un pied sur le parquais qui lui aussi émit des protestations bruyantes. Itrenog la suivit. La pièce dans laquelle ils se trouvaient était carrée, avec une vieille table au centre. Dans le fond, de multiples étagères avec des parchemins, des livres et des fioles en tout genre. Un atelier était disposé au milieu de ce capharnaüm, rempli d'ustensiles improbables. Des outils de verres, des marteaux, des pinces et autres outils de charpentier. Le mobilier était rudimentaire, pour la plupart fait de bois couvert par la poussière et rongé par les insectes. On aurait dit un taudis miteux et à l'abandon. Le tout était éclairé par une unique bougie accrochée au mur, mais qui étrangement, baignait l'endroit d'une lumière blanche et claire. Un grincement retentit et une ombre se détacha d'un couloir dans le fond à droite. Un vieil homme en sortit, en écrivant des deux mains sur deux carnets qui flottaient devant lui et qui avançaient à sa vitesse. Il portait une lourde robe grise qui trainait au sol, soulevant des monticules de poussières et ses cheveux argentés étaient plaqués en arrière sur son crâne. Il marmonnait des paroles incompréhensibles tout en avançant lorsque son pied heurta un objet lourd sur le sol.
-Ça y est ! J'ai trouvé la formule pour mon engrais à tomates !
Il ne prêta pas attention à son pied endolori et posa ses deux carnets sur la table centrale.
-Athos ? Risqua Iberiel.
-Oui oui, je vous ai vu. Attendez juste …
Il griffonna rapidement sur le carnet de droite et le referma avant de la glisser habilement dans sa large manche. Son habit ressemblait à ceux des anciens mages humains, à ceci près que celui du vieil homme était terni par les ans. Il releva la tête et Itrenog le reconnut immédiatement.
-Coucou !
Il n'y avait plus de barbe graisseuse, plus de cheveux sales, plus d'yeux vitreux et pourtant, c'était bien lui. Le mendiant de Munduce se tenait devant Itrenog avec un sourire d'enfant ravi sur les lèvres en agitant ses mains en guise de salut.
[J'arrive pour mettre à jour ma prez' etc ...]
- Spoiler:
- Augmentation en Puissance-Résistance svp (fifty-fifty si c'est possible. Sinon, le point en trop sera pour la puissance)
**************
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Re: Une vie, un devoir ...
-Hé bien, ironisa le vieil homme, vous êtes aussi expressif que la première fois que l'on s'est vu ! Pire qu'un Apaisé !
Itrenog n'avait aucune idée de la signification d'un tel terme. Il était trop occupé à tenter de comprendre comment le vieux mendiant s'était retrouvé ici. Son teint n'était plus aussi cireux que lorsqu'il l'avait croisé mais surtout, ce sont ses yeux qu'il remarqua le plus. Au lieu d'être vitreux, ils étaient sans pupille. On distinguait à peine la couleur de l'iris, qui formait un cercle légèrement plus foncé sur le fond blanc. Ses cheveux blancs plaqués en arrière sur son crâne, de la même couleur que sa barbe qui lui tombait juste au dessus du torse renforçait ce contraste. Même si on ne distinguait pas avec exactitude où il regardait, le mouvement incessant de ses paupières indiquait qu'il bougeait ses yeux à peu près partout où il le pouvait, comme pour ne rater aucun détail de la scène qui se jouait devant lui. Son nez en bec d'aigle renforçait les traits de son visage anguleux, donnant l'impression qu'il avait été taillé dans une roche dure sans avoir pu ajouter de finitions. Après quelques instants de silence, Iberiel se tourna vers Itrenog avec un air interrogateur :
-Vous vous êtes déjà rencontré ? Demanda-t-elle.
-Succinctement à Munduce, répondit Athos, Et j'ai bien cru que jamais les gardes ne me lâcheraient ! J'ai réussi de justesse à leur filer entre les doigts avant d'avoir atteint ma cellule.
-Et puis-je savoir ce que vous faisiez à Munduce ?
-Deux-trois bricoles. Je devais me rendre compte par moi-même de l'évolution de la population humaine. Ils poussent comme des champignons ces temps-ci !
Iberiel secoua la tête d'un air résigné. Visiblement, elle était habituée à ce genre de comportement.
-Mais j'en oublie les bonnes manières, reprit Athos en frappant dans ses mains, Asseyez-vous donc !
Il fit un geste vif des mains et deux tabourets sortir de sous la table, mû par une force extérieure, et se déplièrent rapidement afin de former une chaise de bois à l'allure à peu près convenable. Le vieil homme s'approcha d'une commode et saisit une bouilloire. Il attrapa aussi trois tasses qu'il posa en équilibre sur sa main gauche, et distribua le tout sur la table miteuse. Après s'être assuré que la théière contenait encore de l'eau, il posa une main dessous et s'inclina gauchement :
-Vous prendrez bien du thé ?
-Bien sûr Athos.
Satisfait de la réponse, il sortit trois sachets d'une des poches situées sur sa ceinture et les disposa dans les tasses. Il invita Iberiel et Itrenog à s'installer et leur servit l'eau qui contre tout attente, était déjà brûlante. Avec un clin d'œil malicieux il ajouta :
-Ne laissez pas trop infuser surtout !
Après avoir rempli son verre, il s'assit aussi et trempa ses lèvres pour goûter à son thé. Il fit une moue de dégoût et secoua le petit sachet d'herbe. Ses yeux regardèrent alternativement les deux personnes qui se trouvaient en face de lui et il ne put réprimer un petit sourire en coin.
-Alors dites-moi, fit-il en posant son regard sur Iberiel, que me vaut l'honneur de votre visite ?
-Nous avons besoin de votre aide.
-De mon aide ?, S'étonna-t-il, Après ce temps ? Et qu'est-ce qu'un vieillard pourrait faire pour vous ? Il me semble que vous avez déjà prévenu Dolza de la suite des évènements non ?
Iberiel s'agita, mal à l'aise. Itrenog ne posa aucune question. Il préférait observer patiemment la tournure des évènements.
-Alors vous l'avez bien reçu ?, demanda-t-elle.
Athos claqua des doigts et un faucon bleuté apparut sur son épaule. Ses contours étaient flous, comme perdu dans un rêve lointain, et ses yeux rougeoyaient d'un éclat pourpre. Il émit un couinement aigu avant de sautiller jusqu'à Iberiel. Cette-dernière lui caressa la tête et lui murmura quelques mots à l'oreille. L'animal disparut aussitôt dans un nuage de poussière.
-Je me disais bien que ce parchemin que le démon avait récupéré n'était pas le mien, souffla Iberiel soulagée, Finalement, quelqu'un d'autre s'inquiète de notre arrivée chez les Elfes.
Sur sa dernière phrase, elle posa un regard perçant au vieil homme qui baissa la tête si bas que son nez trempait presque dans sa tasse de thé.
-Il fallait quand même qu'ils soient au courant si jamais vous veniez à être capturée, se défendit-il, Imaginez leur tête si celle qu'ils attendent depuis si longtemps ne leur revenait pas ...
-Capturée ?, Intervint soudainement Itrenog, Vous saviez donc que des démons la pourchassaient et qu'ils ne voulaient pas la tuer ?
La promptitude de sa remarque fit aussitôt redresser Athos qui souriait malgré lui. Quant à Iberiel, elle but une gorgée de thé pour se donner constance et tourna la tête sur la droite. Itrenog savait depuis la première rencontre avec le démon qu'Iberiel les intéressait aussi. Elle n'avait pas voulu lui dire pourquoi. Peut-être le temps des réponses était-il arrivé.
-Je vous croyais changé en pierre depuis ce temps, railla le vieil homme avec bonne humeur, Et pour répondre à votre question, oui j'étais déjà au courant que des démons pourchassaient Iberiel.
-Et vous n'avez pas pensé à venir lui prêter main forte ? Drôle de conception de l'amitié.
-La raison de ma passivité dépasse le concept de l'amitié, souligna Athos en reprenant un air sérieux, Croyez le ou non, mais j'ai moi aussi des soucis. Pourquoi me cacherais-je dans ce bosquet sinon ? Et puis d'accord j'avais reçu le message, mais de là à sillonner les Plaines en espérant vous tomber dessus par hasard, il y a un monde. La seule chose que je pouvais faire était de prévenir les Elfes d'une éventuelle attaque, même si au final ça n'a pas été d'un grand secours.
Le silence s'insinua alors. Athos termina sa tasse de thé et s'étira en grognant. Un éclair passa dans ses yeux et il fourra sa main dans sa manche droite, sortant un autre calepin. Un petit livret de cuir rouge aux pages usées et jaunies par l'usage, et à la reliure terne. Il feuilleta durant quelques instants et pointa un doigt sur une des pages. Il posa à plat le carnet et la page qu'il indiquait était en réalité une carte des territoires humains. Les plaines y étaient détaillées avec précision ainsi que le nom des villes et des cours d'eau. Il gribouilla quelques lignes sur le côté et resta courbé comme un bossu pour observer avec attention ce qu'il avait écrit. A la vue de la carte, Iberiel se souvint d'un détail :
-Athos, il y avait des bosquets sur le chemin là où ils n'auraient pas dû être. Non loin de Munduce, et un autre juste avant Carcosa.
-Ha ça, lâcha Athos sans lever les yeux de sa carte, ce sont les anciens lieux où j'étais situé. J'ai pensé que les laisser à l'état sauvage serait une garantie supplémentaire de ma survie.
-C'est donc vous qui avez fait pousser ces forêts ?
Pour toute réponse, elle n'eut droit qu'à un bref grognement. Itrenog ne sut s'il devait prendre ça pour un oui ou pour un non. Il nota cependant que le vieil homme avait barré d'une croix les endroits où avait dû se situer les forêts avec une certaine appréhension. Athos ferma son carnet après y avoir inscrit quelques détails obscurs et sortit une pipe de vieux bois de sa ceinture. Il posa un doigt sur le tabac et tira une bouffarde, son visage retrouvant ce sourire qu'il arborait sans cesse :
-Quand je vous vois tous les deux devant moi, fit-il les yeux pétillants, je ne peux pas m'empêcher de me moquer de la situation.
-Il est vrai que se faire poursuivre par les démons est tout ce qu'il y a de plus drôle.
-Je ne parlais pas de ça voyons, ria Athos, C'est juste que j'ai l'impression de retourner quelques décennies en arrière. J'avais quelques cheveux blancs en moins … et vous étiez …
Il se tut sous le regard assassin d'Iberiel et sa bouche forma un «o» d'étonnement. Il se venait surement de se rendre compte qu'il allait commettre un lapsus gênant. Il tira de nouveau sur sa pipe et dit à l'adresse d'Itrenog :
-Pourriez-vous entre-ouvrir votre manteau ?
Itrenog jeta un regard en coin sur Iberiel qui n'avait pas esquissé un seul mouvement. La dernière fois qu'il avait montré son visage, elle s'était aussitôt braquée soit à cause de l'aura qui s'en dégageait, soit pour une autre raison qu'il ignorait. Avant qu'il n'ai eut le temps de bouger, elle se leva précipitamment et quitta la maison. Athos ne fut nullement surpris de cette réaction. Au contraire, il semblait que c'était exactement ce qu'il voulait ou du moins, qu'il s'y attendait. Il posa un regard appuyé sur Itrenog qui ouvrit le col de son manteau sans poser de question. Malgré l'air qui s'alourdissait, le vieil homme ne semblait pas s'en préoccuper. Son sourire s'élargit au moment où le visage d'Itrenog lui apparut en entier. Il ne prêta aucune attention à l'atmosphère pesante et tira une ou deux fois sur sa pipe en signe de contentement.
-Voilà qui explique beaucoup de chose, murmura-t-il.
Il cligna des yeux plusieurs fois comme pour chasser une mauvaise poussière et porta de nouveau son attention sur Itrenog qui n'avait pas bougé :
-Ne vous inquiétez pas, sa réaction est tout à fait légitime.
-En quoi le fait de quitter une pièce sans l'ombre d'une explication est-il légitime ?, demanda Itrenog avec un air inquisiteur.
-Mais elle a une explication. Seulement, elle refuse surement de vous en parler de peur de trahir des secrets qui ne sont pas les siens. Croyez-moi, la situation est loin d'être facile pour elle aussi. Vous voir de nouveau embarqué dans cette affaire avec les sacrifices qu'elle a consenti à faire et surtout, votre incapacité à vous souvenir de quoique ce soit rendent les choses extrêmement complexes.
Malgré lui, la curiosité d'Itrenog fut piquée au vif. Peut-être avait-il vu juste en supposant qu'Iberiel et lui s'était déjà rencontré auparavant. Cependant, sa volonté à ne rien vouloir lui dire n'arrangeait pas les choses. Il n'était pas venu ici de bonne grâce, mais uniquement parce qu'il le devait. Autant pour lui que pour elle.
-Voyons, reprit Athos, par où commencer …
-Le début serait surement le mieux, proposa Itrenog avec une pointe d'ironie.
-Si je devais tout vous raconter depuis le début, je serais mort et enterré avant d'avoir pu finir. Et puis, je n'ai jamais eu la vocation de conteur. Savez-vous ce que sont les catalyseurs ?
Itrenog rassembla ses souvenirs pour tenter de se rappeler si le Khûzud chez qui il avait suivi son enseignement lui avait parlé de «catalyseurs». Force était de reconnaître que non et il laissa un silence afin de montrer qu'il ignorait la réponses. Athos semblait s'attendre à cette réaction puisqu'il dit avec un sourire :
-Bien entendu. C'est un terme très peu usité. En fait, un catalyseur est un espèce qui accélère momentanément une réaction sans interagir avec celle-ci et qui se retrouve à l'identique à la fin de cette réaction. La plupart du temps, on emploie ce mot dans le domaine de la science, mais je pense pouvoir aussi l'appliquer ici.
Il répandit un panache de fumée grisâtre avant de continuer :
-Imaginez qu'un sortilège est une réaction qui fait intervenir deux éléments : la magie bien sûr, et le magicien ou le sorcier. Le résultat est l'accomplissement du sort comme allumer une chandelle ou bien attirer un objet à soi. Dans ce cas précis, un catalyseur serait un élément extérieur qui agirait sur la vitesse de cette réaction, produisant de ce fait un sort plus rapidement exécuté et dans de rare cas, plus puissant.
-Et sur quoi agirait ce catalyseur ?, s'enquit Itrenog, Le mage ou la magie ?
-La situation est un peu plus complexe que cela, répondit lentement Athos, La plupart du temps il y a de nombreux paramètres qui influencent le lancer d'un sort, ce qui rend la magie extrêmement difficile à appliquer. Il faut que vous compreniez que la magie existe d'elle-même, indépendamment de l'existence de ceux qui ont la faculté de l'utiliser. Elle agit sur Geadrâs car elle vit à travers elle. Alors prétendre agir sur la magie est légèrement … prétentieux justement.
Athos laissa un léger silence s'installer, le temps que ces paroles ne soit assimilées par Itrenog. Il se massa la tempe, visiblement satisfait d'avoir à ce point captivé l'attention de la seule personne qui est la moins disposer à discuter. Le simple fait de répondre à des questions qu'on lui posait lui procurait un étrange sentiment de bien être.
-Cependant, poursuivit-il, il est aussi absurde qu'un catalyseur puisse agir sur une personne en augmentant ses capacités au moment même où il lance un sort. Pour être juste, il faut considérer que la magie ne se manifeste que lorsque des évènements particuliers se produisent. Le mage peut provoquer de tels évènements et ainsi appeler la magie à lui.
-Vous voulez dire que la magie nous entoure mais qu'elle n'intervient que lorsque nous la forçons à agir ?
-En quelque sorte, répondit Athos d'une voix enjoué, Elle imprègne la terre, l'air, les montagnes, les arbres, tout ce qui forme Geadrâs. Et lorsqu'un mage veut lancer un sort, il perturbe une sorte d'équilibre naturel que la magie va tenter de combler. Elle a horreur du vide après tout !
Il pouffa à sa propre plaisanterie mais reprit un air à peu près sérieux en s'appercevant qu'il était le seul à la trouver drôle et continua :
-Le mage va profiter de ce flux pour alimenter son sort et le modeler pour obtenir le résultat voulu. Un catalyseur aurait alors soit la capacité d'accélérer de déséquilibre, soit la capacité d'augmenter la vitesse du flux de magie, rendant le lancer d'un sort plus simple à effectuer.
-Et quelle forme prendrait un catalyseur ?
Le sourire d'Athos s'étira d'avantage. C'était précisément ou il voulait en venir.
-La plupart du temps, ce sont des lieux, des objets, et très rarement des êtres vivants. Il arrive cependant que certaine personne soit dotée de la faculté d'accélérer la flux de magie les entourant avec plus ou moins de force. Selon mes observations, les rares catalyseurs vivants sont des démons à cause de leur affinité avec la magie. Mais il arrive qu'ils soient de d'autres races aussi …
-Et Iberiel en est un, comprit Itrenog.
Athos approuva d'un signe de tête. Itrenog se tut, tournant et retournant ce qu'il venait d'apprendre. Dans tous ce que le vieillard lui avait dit cependant, il n'y avait nulle trace d'explications concernant l'étrange comportement qu'Iberiel avait eu en voyant son visage, seulement un début d'explication long et probablement inutile. Il s'apprêta à demander à Athos de poursuivre ce qu'il avait à lui dire, mais sa vue se troubla. Les contours de la table qu'il fixait se floutèrent, rendant de plus en plus difficile la distinction entre son bois, et celui du plancher Il secoua légèrement sa tête mais la sensation s'en trouva augmentée. Sa tête bourdonnait désagréablement et il se sentit lourd et fatigué, comme après avoir parcouru plusieurs lieues à pied. Son bras droit le démangea et il se redressa vers Athos qui remuait les lèvres sans qu'aucun son ne lui parvienne. Il le vit s'approcher et poser une main sur son front puis, dans craquement terrible, il eut l'impression que la terre s'ouvrait sous ses pieds, et il sombra dans l'inconscience.
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Itrenog n'avait aucune idée de la signification d'un tel terme. Il était trop occupé à tenter de comprendre comment le vieux mendiant s'était retrouvé ici. Son teint n'était plus aussi cireux que lorsqu'il l'avait croisé mais surtout, ce sont ses yeux qu'il remarqua le plus. Au lieu d'être vitreux, ils étaient sans pupille. On distinguait à peine la couleur de l'iris, qui formait un cercle légèrement plus foncé sur le fond blanc. Ses cheveux blancs plaqués en arrière sur son crâne, de la même couleur que sa barbe qui lui tombait juste au dessus du torse renforçait ce contraste. Même si on ne distinguait pas avec exactitude où il regardait, le mouvement incessant de ses paupières indiquait qu'il bougeait ses yeux à peu près partout où il le pouvait, comme pour ne rater aucun détail de la scène qui se jouait devant lui. Son nez en bec d'aigle renforçait les traits de son visage anguleux, donnant l'impression qu'il avait été taillé dans une roche dure sans avoir pu ajouter de finitions. Après quelques instants de silence, Iberiel se tourna vers Itrenog avec un air interrogateur :
-Vous vous êtes déjà rencontré ? Demanda-t-elle.
-Succinctement à Munduce, répondit Athos, Et j'ai bien cru que jamais les gardes ne me lâcheraient ! J'ai réussi de justesse à leur filer entre les doigts avant d'avoir atteint ma cellule.
-Et puis-je savoir ce que vous faisiez à Munduce ?
-Deux-trois bricoles. Je devais me rendre compte par moi-même de l'évolution de la population humaine. Ils poussent comme des champignons ces temps-ci !
Iberiel secoua la tête d'un air résigné. Visiblement, elle était habituée à ce genre de comportement.
-Mais j'en oublie les bonnes manières, reprit Athos en frappant dans ses mains, Asseyez-vous donc !
Il fit un geste vif des mains et deux tabourets sortir de sous la table, mû par une force extérieure, et se déplièrent rapidement afin de former une chaise de bois à l'allure à peu près convenable. Le vieil homme s'approcha d'une commode et saisit une bouilloire. Il attrapa aussi trois tasses qu'il posa en équilibre sur sa main gauche, et distribua le tout sur la table miteuse. Après s'être assuré que la théière contenait encore de l'eau, il posa une main dessous et s'inclina gauchement :
-Vous prendrez bien du thé ?
-Bien sûr Athos.
Satisfait de la réponse, il sortit trois sachets d'une des poches situées sur sa ceinture et les disposa dans les tasses. Il invita Iberiel et Itrenog à s'installer et leur servit l'eau qui contre tout attente, était déjà brûlante. Avec un clin d'œil malicieux il ajouta :
-Ne laissez pas trop infuser surtout !
Après avoir rempli son verre, il s'assit aussi et trempa ses lèvres pour goûter à son thé. Il fit une moue de dégoût et secoua le petit sachet d'herbe. Ses yeux regardèrent alternativement les deux personnes qui se trouvaient en face de lui et il ne put réprimer un petit sourire en coin.
-Alors dites-moi, fit-il en posant son regard sur Iberiel, que me vaut l'honneur de votre visite ?
-Nous avons besoin de votre aide.
-De mon aide ?, S'étonna-t-il, Après ce temps ? Et qu'est-ce qu'un vieillard pourrait faire pour vous ? Il me semble que vous avez déjà prévenu Dolza de la suite des évènements non ?
Iberiel s'agita, mal à l'aise. Itrenog ne posa aucune question. Il préférait observer patiemment la tournure des évènements.
-Alors vous l'avez bien reçu ?, demanda-t-elle.
Athos claqua des doigts et un faucon bleuté apparut sur son épaule. Ses contours étaient flous, comme perdu dans un rêve lointain, et ses yeux rougeoyaient d'un éclat pourpre. Il émit un couinement aigu avant de sautiller jusqu'à Iberiel. Cette-dernière lui caressa la tête et lui murmura quelques mots à l'oreille. L'animal disparut aussitôt dans un nuage de poussière.
-Je me disais bien que ce parchemin que le démon avait récupéré n'était pas le mien, souffla Iberiel soulagée, Finalement, quelqu'un d'autre s'inquiète de notre arrivée chez les Elfes.
Sur sa dernière phrase, elle posa un regard perçant au vieil homme qui baissa la tête si bas que son nez trempait presque dans sa tasse de thé.
-Il fallait quand même qu'ils soient au courant si jamais vous veniez à être capturée, se défendit-il, Imaginez leur tête si celle qu'ils attendent depuis si longtemps ne leur revenait pas ...
-Capturée ?, Intervint soudainement Itrenog, Vous saviez donc que des démons la pourchassaient et qu'ils ne voulaient pas la tuer ?
La promptitude de sa remarque fit aussitôt redresser Athos qui souriait malgré lui. Quant à Iberiel, elle but une gorgée de thé pour se donner constance et tourna la tête sur la droite. Itrenog savait depuis la première rencontre avec le démon qu'Iberiel les intéressait aussi. Elle n'avait pas voulu lui dire pourquoi. Peut-être le temps des réponses était-il arrivé.
-Je vous croyais changé en pierre depuis ce temps, railla le vieil homme avec bonne humeur, Et pour répondre à votre question, oui j'étais déjà au courant que des démons pourchassaient Iberiel.
-Et vous n'avez pas pensé à venir lui prêter main forte ? Drôle de conception de l'amitié.
-La raison de ma passivité dépasse le concept de l'amitié, souligna Athos en reprenant un air sérieux, Croyez le ou non, mais j'ai moi aussi des soucis. Pourquoi me cacherais-je dans ce bosquet sinon ? Et puis d'accord j'avais reçu le message, mais de là à sillonner les Plaines en espérant vous tomber dessus par hasard, il y a un monde. La seule chose que je pouvais faire était de prévenir les Elfes d'une éventuelle attaque, même si au final ça n'a pas été d'un grand secours.
Le silence s'insinua alors. Athos termina sa tasse de thé et s'étira en grognant. Un éclair passa dans ses yeux et il fourra sa main dans sa manche droite, sortant un autre calepin. Un petit livret de cuir rouge aux pages usées et jaunies par l'usage, et à la reliure terne. Il feuilleta durant quelques instants et pointa un doigt sur une des pages. Il posa à plat le carnet et la page qu'il indiquait était en réalité une carte des territoires humains. Les plaines y étaient détaillées avec précision ainsi que le nom des villes et des cours d'eau. Il gribouilla quelques lignes sur le côté et resta courbé comme un bossu pour observer avec attention ce qu'il avait écrit. A la vue de la carte, Iberiel se souvint d'un détail :
-Athos, il y avait des bosquets sur le chemin là où ils n'auraient pas dû être. Non loin de Munduce, et un autre juste avant Carcosa.
-Ha ça, lâcha Athos sans lever les yeux de sa carte, ce sont les anciens lieux où j'étais situé. J'ai pensé que les laisser à l'état sauvage serait une garantie supplémentaire de ma survie.
-C'est donc vous qui avez fait pousser ces forêts ?
Pour toute réponse, elle n'eut droit qu'à un bref grognement. Itrenog ne sut s'il devait prendre ça pour un oui ou pour un non. Il nota cependant que le vieil homme avait barré d'une croix les endroits où avait dû se situer les forêts avec une certaine appréhension. Athos ferma son carnet après y avoir inscrit quelques détails obscurs et sortit une pipe de vieux bois de sa ceinture. Il posa un doigt sur le tabac et tira une bouffarde, son visage retrouvant ce sourire qu'il arborait sans cesse :
-Quand je vous vois tous les deux devant moi, fit-il les yeux pétillants, je ne peux pas m'empêcher de me moquer de la situation.
-Il est vrai que se faire poursuivre par les démons est tout ce qu'il y a de plus drôle.
-Je ne parlais pas de ça voyons, ria Athos, C'est juste que j'ai l'impression de retourner quelques décennies en arrière. J'avais quelques cheveux blancs en moins … et vous étiez …
Il se tut sous le regard assassin d'Iberiel et sa bouche forma un «o» d'étonnement. Il se venait surement de se rendre compte qu'il allait commettre un lapsus gênant. Il tira de nouveau sur sa pipe et dit à l'adresse d'Itrenog :
-Pourriez-vous entre-ouvrir votre manteau ?
Itrenog jeta un regard en coin sur Iberiel qui n'avait pas esquissé un seul mouvement. La dernière fois qu'il avait montré son visage, elle s'était aussitôt braquée soit à cause de l'aura qui s'en dégageait, soit pour une autre raison qu'il ignorait. Avant qu'il n'ai eut le temps de bouger, elle se leva précipitamment et quitta la maison. Athos ne fut nullement surpris de cette réaction. Au contraire, il semblait que c'était exactement ce qu'il voulait ou du moins, qu'il s'y attendait. Il posa un regard appuyé sur Itrenog qui ouvrit le col de son manteau sans poser de question. Malgré l'air qui s'alourdissait, le vieil homme ne semblait pas s'en préoccuper. Son sourire s'élargit au moment où le visage d'Itrenog lui apparut en entier. Il ne prêta aucune attention à l'atmosphère pesante et tira une ou deux fois sur sa pipe en signe de contentement.
-Voilà qui explique beaucoup de chose, murmura-t-il.
Il cligna des yeux plusieurs fois comme pour chasser une mauvaise poussière et porta de nouveau son attention sur Itrenog qui n'avait pas bougé :
-Ne vous inquiétez pas, sa réaction est tout à fait légitime.
-En quoi le fait de quitter une pièce sans l'ombre d'une explication est-il légitime ?, demanda Itrenog avec un air inquisiteur.
-Mais elle a une explication. Seulement, elle refuse surement de vous en parler de peur de trahir des secrets qui ne sont pas les siens. Croyez-moi, la situation est loin d'être facile pour elle aussi. Vous voir de nouveau embarqué dans cette affaire avec les sacrifices qu'elle a consenti à faire et surtout, votre incapacité à vous souvenir de quoique ce soit rendent les choses extrêmement complexes.
Malgré lui, la curiosité d'Itrenog fut piquée au vif. Peut-être avait-il vu juste en supposant qu'Iberiel et lui s'était déjà rencontré auparavant. Cependant, sa volonté à ne rien vouloir lui dire n'arrangeait pas les choses. Il n'était pas venu ici de bonne grâce, mais uniquement parce qu'il le devait. Autant pour lui que pour elle.
-Voyons, reprit Athos, par où commencer …
-Le début serait surement le mieux, proposa Itrenog avec une pointe d'ironie.
-Si je devais tout vous raconter depuis le début, je serais mort et enterré avant d'avoir pu finir. Et puis, je n'ai jamais eu la vocation de conteur. Savez-vous ce que sont les catalyseurs ?
Itrenog rassembla ses souvenirs pour tenter de se rappeler si le Khûzud chez qui il avait suivi son enseignement lui avait parlé de «catalyseurs». Force était de reconnaître que non et il laissa un silence afin de montrer qu'il ignorait la réponses. Athos semblait s'attendre à cette réaction puisqu'il dit avec un sourire :
-Bien entendu. C'est un terme très peu usité. En fait, un catalyseur est un espèce qui accélère momentanément une réaction sans interagir avec celle-ci et qui se retrouve à l'identique à la fin de cette réaction. La plupart du temps, on emploie ce mot dans le domaine de la science, mais je pense pouvoir aussi l'appliquer ici.
Il répandit un panache de fumée grisâtre avant de continuer :
-Imaginez qu'un sortilège est une réaction qui fait intervenir deux éléments : la magie bien sûr, et le magicien ou le sorcier. Le résultat est l'accomplissement du sort comme allumer une chandelle ou bien attirer un objet à soi. Dans ce cas précis, un catalyseur serait un élément extérieur qui agirait sur la vitesse de cette réaction, produisant de ce fait un sort plus rapidement exécuté et dans de rare cas, plus puissant.
-Et sur quoi agirait ce catalyseur ?, s'enquit Itrenog, Le mage ou la magie ?
-La situation est un peu plus complexe que cela, répondit lentement Athos, La plupart du temps il y a de nombreux paramètres qui influencent le lancer d'un sort, ce qui rend la magie extrêmement difficile à appliquer. Il faut que vous compreniez que la magie existe d'elle-même, indépendamment de l'existence de ceux qui ont la faculté de l'utiliser. Elle agit sur Geadrâs car elle vit à travers elle. Alors prétendre agir sur la magie est légèrement … prétentieux justement.
Athos laissa un léger silence s'installer, le temps que ces paroles ne soit assimilées par Itrenog. Il se massa la tempe, visiblement satisfait d'avoir à ce point captivé l'attention de la seule personne qui est la moins disposer à discuter. Le simple fait de répondre à des questions qu'on lui posait lui procurait un étrange sentiment de bien être.
-Cependant, poursuivit-il, il est aussi absurde qu'un catalyseur puisse agir sur une personne en augmentant ses capacités au moment même où il lance un sort. Pour être juste, il faut considérer que la magie ne se manifeste que lorsque des évènements particuliers se produisent. Le mage peut provoquer de tels évènements et ainsi appeler la magie à lui.
-Vous voulez dire que la magie nous entoure mais qu'elle n'intervient que lorsque nous la forçons à agir ?
-En quelque sorte, répondit Athos d'une voix enjoué, Elle imprègne la terre, l'air, les montagnes, les arbres, tout ce qui forme Geadrâs. Et lorsqu'un mage veut lancer un sort, il perturbe une sorte d'équilibre naturel que la magie va tenter de combler. Elle a horreur du vide après tout !
Il pouffa à sa propre plaisanterie mais reprit un air à peu près sérieux en s'appercevant qu'il était le seul à la trouver drôle et continua :
-Le mage va profiter de ce flux pour alimenter son sort et le modeler pour obtenir le résultat voulu. Un catalyseur aurait alors soit la capacité d'accélérer de déséquilibre, soit la capacité d'augmenter la vitesse du flux de magie, rendant le lancer d'un sort plus simple à effectuer.
-Et quelle forme prendrait un catalyseur ?
Le sourire d'Athos s'étira d'avantage. C'était précisément ou il voulait en venir.
-La plupart du temps, ce sont des lieux, des objets, et très rarement des êtres vivants. Il arrive cependant que certaine personne soit dotée de la faculté d'accélérer la flux de magie les entourant avec plus ou moins de force. Selon mes observations, les rares catalyseurs vivants sont des démons à cause de leur affinité avec la magie. Mais il arrive qu'ils soient de d'autres races aussi …
-Et Iberiel en est un, comprit Itrenog.
Athos approuva d'un signe de tête. Itrenog se tut, tournant et retournant ce qu'il venait d'apprendre. Dans tous ce que le vieillard lui avait dit cependant, il n'y avait nulle trace d'explications concernant l'étrange comportement qu'Iberiel avait eu en voyant son visage, seulement un début d'explication long et probablement inutile. Il s'apprêta à demander à Athos de poursuivre ce qu'il avait à lui dire, mais sa vue se troubla. Les contours de la table qu'il fixait se floutèrent, rendant de plus en plus difficile la distinction entre son bois, et celui du plancher Il secoua légèrement sa tête mais la sensation s'en trouva augmentée. Sa tête bourdonnait désagréablement et il se sentit lourd et fatigué, comme après avoir parcouru plusieurs lieues à pied. Son bras droit le démangea et il se redressa vers Athos qui remuait les lèvres sans qu'aucun son ne lui parvienne. Il le vit s'approcher et poser une main sur son front puis, dans craquement terrible, il eut l'impression que la terre s'ouvrait sous ses pieds, et il sombra dans l'inconscience.
- Spoiler:
- Augmentation en Intelligence svp
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Dernière édition par Itrenog le Ven 14 Déc 2012 - 17:24, édité 1 fois
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Re: Une vie, un devoir ...
L'esprit d'Itrenog bouillonnait. Une multitudes de pensées, de souvenirs, de sentiments qui n'étaient pas les siens l'assaillaient, le forçaient à se replier dans son esprit jusqu'à la limite de sa résistance avant de disparaître subitement, le laissant dans le noir le plus complet. Des flashs de lumière aveuglants précédaient ces évènements inexplicables et une douleur cuisante se faisait ressentir dans son bras droit, avant de remonter jusqu'à sa tête et exploser en un kaléidoscope de couleurs. Désarçonné, Itrenog se laissait porter par ce flux constant qui émergeait de son esprit, ne cherchant pas à le refréner, seulement à le laisser filer. Il n'avait aucune prise sur ce qu'il voyait ou entendait. La plupart du temps, ce n'était que des bribes de mémoires, tout juste un murmure ou une caresse, qu'il avait à peine le temps de graver dans sa mémoire qu'elles étaient remplacées par d'autres, plus rapides ou plus mesurées. Des voix extérieures lui parvinrent. Il ne savait pas si elles étaient le fruit de son imagination enfiévrée ou bien si des personnes parlaient vraiment autour de lui. «... lui dire … doit savoir … trop tôt … vivre assez longtemps …» Le reste n'était qu'un grouillement incompréhensible et le silence tomba. Le seul souvenir qu'il pouvait conserver clairement, c'était celui qu'il avait vu la nuit suivant son opportune fuite face aux démons. Il se trouvait debout, ses pieds et ses mains enchainés par de lourdes chaines d'acier, dans une grande caverne aux murs sombres et huileux. Il tentait de bouger mais n'y parvenait pas. Il avait l'impression de se trouver dans un corps qui n'était pas le sien mais une chaleur qu'il reconnaissait battait en lui. Sa tête se baissa lentement, d'elle-même, et vit son torse couvert de flammes rouges et constellé de particules sombres, sans doute de la cendre, et par moments, des nappes d'ombres se mouvaient comme des nuages sur son corps inerte. Puis, il se redressa, et aperçut trois silhouettes devant lui. Deux d'entre elles avaient le visage embrumé, simplement vêtu de longue robe blanche. Une aura particulièrement sinistre se dégageait de celle la plus à droite. Mais ce qui marqua d'avantage Itrenog, c'était que celui qui se trouvait à l'autre extrémité avait le visage parfaitement visible, contrairement à ce qu'il avait été par le passé. Ses cheveux étaient raides et d'une couleur brune, avec quelques cheveux blancs par endroits. Son visage était lisse et jeune mais ses yeux blancs étaient marqués par de longues années de souffrance. L'homme arborait une expression sereine, presque détendue, et leva sa main droite, aussitôt imité par les deux autres. Ses lèvres bougèrent mais aucun son n'en sorti. Un rai de lumière blanche jaillit soudain, frappant Itrenog de plein fouet et le réveillant brutalement. Il se redressa, couvert de sueur et la respiration saccadée. Son bras le lançait douloureusement et les veines bleutées de son corps brillaient fortement. C'est à ce moment qu'il se rendit compte qu'il était torse-nu. Son crâne lui semblait être enserré dans un étau qui s'ouvrait et se fermait par vague, embuant sa vue et assourdissant son ouïe. La douleur s'estompa quelques instants après qu'il ait ouvert les yeux. Ses oreilles bourdonnaient avec moins d'intensité et ses yeux s'habituèrent à la pénombre ambiante. Il se redressa à moitié et observa l'endroit où il se trouvait avec un peu plus d'attention. Il se trouvait dans une pièce carrée dont les murs de bois ternes étaient parés de tableaux et de cartes anciennes. Devant son lit se trouvait un secrétaire couvert de parchemins et d'où une bougie à moitié fondue répandait une faible lumière dans la pièce. Plus au fond, calées contre le mur, deux bibliothèques remplies de livres se tenaient droites malgré la courbure dangereuse de leur pieds. Sur sa gauche, un vieux coffre rouillé sur lequel se trouvait ses effets personnels. Son manteau, son stetson, sa tunique de cuir et son épée. Une petite table de chevet se trouvait juste à côté éclairant quelqu'un assis sur une chaise :
-Vous …
-Moi, confirma Athos avec un sourire.
Il était assis, tenant le même carnet qu'il avait rempli quelques instants auparavant, et attendait certainement le réveil d'Itrenog.
-Il n'y a personne d'autre ?
-A part les meubles et les livres vous voulez dire ? Répondit Athos en regardant nonchalamment la pièce. Non je ne crois pas.
Ignorant la boutade du vieil homme, Itrenog s'assit complètement, contemplant ses mains d'un regard vide. Il ne comprenait pas ce qu'il se passait autour de lui. Il avait simplement l'impression que son esprit vagabondait entre la pièce où il était et un autre endroit inconnu et pourtant vaguement familier, qui lui envoyait des échos venu d'un autre âge, tandis que ses sens tentaient de le maintenir ancré dans la réalité. La sensation était d'autant plus bizarre que ce n'était pas la première fois qu'il la ressentait, sans pour autant pouvoir l'expliquer.
-Vous ne devez pas vous sentir très bien j'imagine, fit Athos en se penchant d'avantage en avant, J'ai dû vous enlever vos vêtements de peur de vous voir vous étouffer avec même si vous n'êtes pas resté évanoui très longtemps. C'est fou ce qu'il fait chaud ici depuis !
D'un geste de la main, il ouvrit la fenêtre qui se trouvait juste à côté du lit où était allongé Itrenog et apprécia un moment l'air frais qui s'engouffrait dans la pièce avec un soupir satisfait.
-Vous n'auriez pas dû m'enlever mes vêtements … Ils vont le sentir et me retrouver.
-Je peux vous assurer qu'aucun démon ne sentira quoique ce soit tant que je n'en aurais pas décidé autrement, répliqua Athos, Me croyez-vous à ce point fou pour prendre des risques inutiles ?
Itrenog aurait eu envie de répondre mais son bras le lança de nouveau. C'était comme si de multiples couteaux rouillés le transperçaient de par en par, lentement, déchirant le moindre lambeau de chair et pourrissant la moindre substance sur leur passage. Il grinça des dents, incapable d'empêcher ou d'atténuer sa souffrance, et se résolut à attendre. La douleur s'estompa alors lentement, le laissant encore tremblant. Les fois où son bras lui faisait ainsi mal était celles ou elle devait se nourrir. Il posa son regard sur son épée et décida qu'il devait quitter cet endroit le plus tôt possible, avec où sans Iberiel. Athos dû remarquer son air absent car il demanda :
-Vous êtes un démon vous aussi n'est-ce pas ?
-Force est de le reconnaître.
-Et vous avez besoin de vous nourrir ce qui explique la douleur dans votre bras.
Itrenog se tourna vers Athos qui semblait rayonner de joie. Il avait un air ébahi comme celui d'un enfant qui venait de retrouver un jeu après l'avoir désespérément cherché durant plusieurs heures. Il fouilla dans une poche de sa robe en en sorti un flacon qui contenait non pas une boisson, mais une sorte de filament argenté qui flottait lentement en tourbillonnant. Un doux éclat lumineux battait autour de la fiole au rythme des battements d'un cœur. Athos tendit le flacon à Itrenog :
-Pour vous nourrir, expliqua-t-il, J'en garde toujours à portée dès fois qu'un démon viendrait prendre le thé chez moi.
-Vous paraissez bien informé sur les démons pour un vieil ermite, rétorqua Itrenog avec un regard suspicieux à la fiole.
-Sur vous plutôt. Allez, prenez ! Vous vous sentirez mieux après.
Itrenog tendit sa main et attrapa la fiole qui était tiède au toucher. A son contact, il ne put réprimer un frisson. Il avait la certitude que le vieillard ne se moquait pas de lui désormais. Il pointa son épée et, à sa grande surprise, Athos comprit immédiatement et la lui apporta sans lui poser de question. Itrenog attendit une réaction quelconque de la part du vieil homme mais, voyant qu'elle ne venait pas, il tendit à son tour son bras :
-Vous devriez regarder ailleurs, conseilla-t-il en attrapant son arme.
-Mais vous êtes dérangé ! J'attends ce moment depuis que vous êtes arrivé ! J'aimerais mieux être en Inferës avec une meute de goule à ma poursuite plutôt que de rater ça !
Il se pencha encore un peu plus sur sa chaise avec un regard avide et saisit une plume d'oie cendrée de son ceinturon, prêt à prendre un maximum de note. Itrenog détourna son regard d'Athos qui l'observait avec envie, et porta son attention sur son épée, posée à plat sur ses genoux. Elle était parcourue de légers tremblements qui s'accentuèrent lorsqu'il approcha la fiole du fourreau. Itrenog saisit la garde de l'arme et dégaina lentement son épée. Les frissons reprirent de plus belle et l'air s'alourdit d'avantage. Athos n'y prêta aucune attention et griffonna quelques mots sur son carnet avant de lancer un regard encourageant à Itrenog. Celui-ci sortit complètement la lame du fourreau qui s'agitait toujours autant. Une sorte de grondement sourd retentit dans la pièce et fut aussitôt étouffé par les grattements de la plume contre le papier. Toujours en maintenant fermement son arme, Itrenog déboucha avec ses dents le flacon et versa son contenu sur la lame nue. La filament sembla rester en suspension dans le vide pendant quelques instants avant de se décrocher de l'embouchure de la fiole. Il tomba avec grâce en direction de l'épée et, en l'espace d'un éclair, fut happé par le métal. Un cri terrible retentit, canalisant toute la souffrance et l'horreur vécue par un être vivant avant de s'éteindre dans le néant, servant de repas à un démon affamé. Le son se répercuta dans la pièce alors qu'Itrenog rebouchait le flacon. Les tremblements de l'épée diminuèrent progressivement avant de disparaître et l'atmosphère redevint à peu près respirable. Le hurlement n'était plus qu'un murmure et s'éteignit lui aussi. Tout en soupirant, Itrenog remit son épée dans le fourreau et s'affaissa contre le mur.
-Vous n'avez rien senti ? Demanda-t-il perplexe. En touchant l'épée ?
Athos était encore en pleine réflexion. Il ne cessait de marmonner «Fascinant» sans prendre de note, le regard voilé, le dos vouté penché en avant sur sa chaise. Il se ressaisit néanmoins comme s'il n'avait nullement été absent :
-Un léger frisson, rien de plus. Vous savez, j'avais l'habitude de ce genre de chose avant … enfin, il y a longtemps.
Itrenog plaqua son crâne contre le mur froid en soupirant. Il voulait plutôt poursuivre sa conversation avec le vieillard, conscient qu'elle lui apporterait les réponses qu'il cherchait, et le seul moyen était de discuter avec lui. Il balaya la salle du regard en quête d'un objet susceptible de lui fournir l'inspiration nécessaire et son attention fut happée par un lourd bâton de bois, posé entre les deux bibliothèques. On aurait dit qu'il était formé de racines noueuses qui s'entrelaçaient les unes sur les autres en s'élargissant au fur et à mesure que l'on s'approchait de son extrémité et une pierre bleue scintillait au creux de la boule de bois de son sommet.
-Vous êtes mage ? Demanda-t-il.
-Et qu'est-ce qui vous fait dire ça ?
-La plupart des mages sont assez cultivé sur Geadrâs.
-Je pourrais être aussi un érudit qui s'est retiré dans la forêt afin de mieux étudier la nature, non ?
-Ce qui n'explique ni le bâton, rétorqua Itrenog d'un ton neutre en avisant le bout de bois au fond de la pièce, ni votre faculté à ne pas être dérangé par les auras d'un démon.
Les yeux d'Athos s'élargirent légèrement mais aucune expression de surprise ne passa sur son visage. Il se laissa aller sur sa chaise et rangea son carnet et sa plume d'oie dans une des poche de sa ceinture.
-Vous savez, avec un peu d'entrainement, n'importe qui pourrait se servir de ce vieux bout de bois, remarqua-t-il avec une pointe d'amusement dans la voix, En réalité je suis à la fois mage et érudit. J'ai été élève à Alcantare aussitôt que mes prédispositions pour la magie ont été découvertes et j'ai passé tout mon temps là-bas dans les fins fonds des grandes bibliothèques.
Il marqua un silence, attendant certainement une question, mais Itrenog restant silencieux, il poursuivit :
-Mais j'étais un peu trop autonome pour eux. J'aimais avoir mon indépendance et cela était «contraire aux décrets de la communauté des arcanistes». Ils ont fini par me taxer d'apostat et j'ai dû quitter la ville pour éviter le fer des templiers.
Il baissa les yeux avec un air résigné en soupirant et secoua la tête de gauche à droite plusieurs fois avant de reprendre :
-Quand vous m'avez appris avoir vu des forêts encore debout, j'ai tout de suite compris qu'ils ne tarderaient pas à fouiller l'endroit. Ils sont plutôt doués pour retrouver des traces de magie dans l'environnement mais faciles à berner avec des illusions. Il n'y a que les Elfes qui sont capables de voir au travers ...
A ce moment précis, Itrenog eut une sorte de flash. L'arrière de son crâne le lança furieusement comme si un bélier tentait de passer en force dans son esprit et y déverser une foule de souvenirs. La douleur s'intensifia lorsqu'il essaya de remettre ses idées en place pour réfléchir convenablement. Des flashs rouges et jaunes dansaient devant ses yeux et sa respiration devint laborieuse. Quelque chose essayait de jaillir de son esprit sans y parvenir et soudain, tout s'imbriqua merveilleusement bien. C'était à ce point normal qu'il faillit exploser de rire face à sa propre stupidité. Comment ne s'en était-il pas rendu compte avant ? Sur ses genoux, son épée tremblait avec plus de force et le lien qui l'unissait avec Itrenog s'épaissit d'avantage. Athos intervint alors et posa une main sur le bras droit d'Itrenog. Sa vue se brouilla avant de redevenir nette et le bélier quitta les portes de son esprit. Le vieil homme attrapa l'arme et la jeta au loin dans la pièce avec une rapidité surprenante pour quelqu'un de son âge et il allongea lentement Itrenog tout en lui murmurant :
-Il était temps. Reposez-vous pour l'heure, nous reprendrons notre conversation plus tard lorsque certaines pièces du puzzle se seront imbriquées d'elles-même ...
Itrenog nota l'air heureux d'Athos ainsi que son sourire d'enfant ravi avant de s'endormir. Sa dernière pensée cohérente avant de s'enfoncer dans le monde des rêves et des esprits fut que jamais il ne s'était senti autant vulnérable.
-Vous …
-Moi, confirma Athos avec un sourire.
Il était assis, tenant le même carnet qu'il avait rempli quelques instants auparavant, et attendait certainement le réveil d'Itrenog.
-Il n'y a personne d'autre ?
-A part les meubles et les livres vous voulez dire ? Répondit Athos en regardant nonchalamment la pièce. Non je ne crois pas.
Ignorant la boutade du vieil homme, Itrenog s'assit complètement, contemplant ses mains d'un regard vide. Il ne comprenait pas ce qu'il se passait autour de lui. Il avait simplement l'impression que son esprit vagabondait entre la pièce où il était et un autre endroit inconnu et pourtant vaguement familier, qui lui envoyait des échos venu d'un autre âge, tandis que ses sens tentaient de le maintenir ancré dans la réalité. La sensation était d'autant plus bizarre que ce n'était pas la première fois qu'il la ressentait, sans pour autant pouvoir l'expliquer.
-Vous ne devez pas vous sentir très bien j'imagine, fit Athos en se penchant d'avantage en avant, J'ai dû vous enlever vos vêtements de peur de vous voir vous étouffer avec même si vous n'êtes pas resté évanoui très longtemps. C'est fou ce qu'il fait chaud ici depuis !
D'un geste de la main, il ouvrit la fenêtre qui se trouvait juste à côté du lit où était allongé Itrenog et apprécia un moment l'air frais qui s'engouffrait dans la pièce avec un soupir satisfait.
-Vous n'auriez pas dû m'enlever mes vêtements … Ils vont le sentir et me retrouver.
-Je peux vous assurer qu'aucun démon ne sentira quoique ce soit tant que je n'en aurais pas décidé autrement, répliqua Athos, Me croyez-vous à ce point fou pour prendre des risques inutiles ?
Itrenog aurait eu envie de répondre mais son bras le lança de nouveau. C'était comme si de multiples couteaux rouillés le transperçaient de par en par, lentement, déchirant le moindre lambeau de chair et pourrissant la moindre substance sur leur passage. Il grinça des dents, incapable d'empêcher ou d'atténuer sa souffrance, et se résolut à attendre. La douleur s'estompa alors lentement, le laissant encore tremblant. Les fois où son bras lui faisait ainsi mal était celles ou elle devait se nourrir. Il posa son regard sur son épée et décida qu'il devait quitter cet endroit le plus tôt possible, avec où sans Iberiel. Athos dû remarquer son air absent car il demanda :
-Vous êtes un démon vous aussi n'est-ce pas ?
-Force est de le reconnaître.
-Et vous avez besoin de vous nourrir ce qui explique la douleur dans votre bras.
Itrenog se tourna vers Athos qui semblait rayonner de joie. Il avait un air ébahi comme celui d'un enfant qui venait de retrouver un jeu après l'avoir désespérément cherché durant plusieurs heures. Il fouilla dans une poche de sa robe en en sorti un flacon qui contenait non pas une boisson, mais une sorte de filament argenté qui flottait lentement en tourbillonnant. Un doux éclat lumineux battait autour de la fiole au rythme des battements d'un cœur. Athos tendit le flacon à Itrenog :
-Pour vous nourrir, expliqua-t-il, J'en garde toujours à portée dès fois qu'un démon viendrait prendre le thé chez moi.
-Vous paraissez bien informé sur les démons pour un vieil ermite, rétorqua Itrenog avec un regard suspicieux à la fiole.
-Sur vous plutôt. Allez, prenez ! Vous vous sentirez mieux après.
Itrenog tendit sa main et attrapa la fiole qui était tiède au toucher. A son contact, il ne put réprimer un frisson. Il avait la certitude que le vieillard ne se moquait pas de lui désormais. Il pointa son épée et, à sa grande surprise, Athos comprit immédiatement et la lui apporta sans lui poser de question. Itrenog attendit une réaction quelconque de la part du vieil homme mais, voyant qu'elle ne venait pas, il tendit à son tour son bras :
-Vous devriez regarder ailleurs, conseilla-t-il en attrapant son arme.
-Mais vous êtes dérangé ! J'attends ce moment depuis que vous êtes arrivé ! J'aimerais mieux être en Inferës avec une meute de goule à ma poursuite plutôt que de rater ça !
Il se pencha encore un peu plus sur sa chaise avec un regard avide et saisit une plume d'oie cendrée de son ceinturon, prêt à prendre un maximum de note. Itrenog détourna son regard d'Athos qui l'observait avec envie, et porta son attention sur son épée, posée à plat sur ses genoux. Elle était parcourue de légers tremblements qui s'accentuèrent lorsqu'il approcha la fiole du fourreau. Itrenog saisit la garde de l'arme et dégaina lentement son épée. Les frissons reprirent de plus belle et l'air s'alourdit d'avantage. Athos n'y prêta aucune attention et griffonna quelques mots sur son carnet avant de lancer un regard encourageant à Itrenog. Celui-ci sortit complètement la lame du fourreau qui s'agitait toujours autant. Une sorte de grondement sourd retentit dans la pièce et fut aussitôt étouffé par les grattements de la plume contre le papier. Toujours en maintenant fermement son arme, Itrenog déboucha avec ses dents le flacon et versa son contenu sur la lame nue. La filament sembla rester en suspension dans le vide pendant quelques instants avant de se décrocher de l'embouchure de la fiole. Il tomba avec grâce en direction de l'épée et, en l'espace d'un éclair, fut happé par le métal. Un cri terrible retentit, canalisant toute la souffrance et l'horreur vécue par un être vivant avant de s'éteindre dans le néant, servant de repas à un démon affamé. Le son se répercuta dans la pièce alors qu'Itrenog rebouchait le flacon. Les tremblements de l'épée diminuèrent progressivement avant de disparaître et l'atmosphère redevint à peu près respirable. Le hurlement n'était plus qu'un murmure et s'éteignit lui aussi. Tout en soupirant, Itrenog remit son épée dans le fourreau et s'affaissa contre le mur.
-Vous n'avez rien senti ? Demanda-t-il perplexe. En touchant l'épée ?
Athos était encore en pleine réflexion. Il ne cessait de marmonner «Fascinant» sans prendre de note, le regard voilé, le dos vouté penché en avant sur sa chaise. Il se ressaisit néanmoins comme s'il n'avait nullement été absent :
-Un léger frisson, rien de plus. Vous savez, j'avais l'habitude de ce genre de chose avant … enfin, il y a longtemps.
Itrenog plaqua son crâne contre le mur froid en soupirant. Il voulait plutôt poursuivre sa conversation avec le vieillard, conscient qu'elle lui apporterait les réponses qu'il cherchait, et le seul moyen était de discuter avec lui. Il balaya la salle du regard en quête d'un objet susceptible de lui fournir l'inspiration nécessaire et son attention fut happée par un lourd bâton de bois, posé entre les deux bibliothèques. On aurait dit qu'il était formé de racines noueuses qui s'entrelaçaient les unes sur les autres en s'élargissant au fur et à mesure que l'on s'approchait de son extrémité et une pierre bleue scintillait au creux de la boule de bois de son sommet.
-Vous êtes mage ? Demanda-t-il.
-Et qu'est-ce qui vous fait dire ça ?
-La plupart des mages sont assez cultivé sur Geadrâs.
-Je pourrais être aussi un érudit qui s'est retiré dans la forêt afin de mieux étudier la nature, non ?
-Ce qui n'explique ni le bâton, rétorqua Itrenog d'un ton neutre en avisant le bout de bois au fond de la pièce, ni votre faculté à ne pas être dérangé par les auras d'un démon.
Les yeux d'Athos s'élargirent légèrement mais aucune expression de surprise ne passa sur son visage. Il se laissa aller sur sa chaise et rangea son carnet et sa plume d'oie dans une des poche de sa ceinture.
-Vous savez, avec un peu d'entrainement, n'importe qui pourrait se servir de ce vieux bout de bois, remarqua-t-il avec une pointe d'amusement dans la voix, En réalité je suis à la fois mage et érudit. J'ai été élève à Alcantare aussitôt que mes prédispositions pour la magie ont été découvertes et j'ai passé tout mon temps là-bas dans les fins fonds des grandes bibliothèques.
Il marqua un silence, attendant certainement une question, mais Itrenog restant silencieux, il poursuivit :
-Mais j'étais un peu trop autonome pour eux. J'aimais avoir mon indépendance et cela était «contraire aux décrets de la communauté des arcanistes». Ils ont fini par me taxer d'apostat et j'ai dû quitter la ville pour éviter le fer des templiers.
Il baissa les yeux avec un air résigné en soupirant et secoua la tête de gauche à droite plusieurs fois avant de reprendre :
-Quand vous m'avez appris avoir vu des forêts encore debout, j'ai tout de suite compris qu'ils ne tarderaient pas à fouiller l'endroit. Ils sont plutôt doués pour retrouver des traces de magie dans l'environnement mais faciles à berner avec des illusions. Il n'y a que les Elfes qui sont capables de voir au travers ...
A ce moment précis, Itrenog eut une sorte de flash. L'arrière de son crâne le lança furieusement comme si un bélier tentait de passer en force dans son esprit et y déverser une foule de souvenirs. La douleur s'intensifia lorsqu'il essaya de remettre ses idées en place pour réfléchir convenablement. Des flashs rouges et jaunes dansaient devant ses yeux et sa respiration devint laborieuse. Quelque chose essayait de jaillir de son esprit sans y parvenir et soudain, tout s'imbriqua merveilleusement bien. C'était à ce point normal qu'il faillit exploser de rire face à sa propre stupidité. Comment ne s'en était-il pas rendu compte avant ? Sur ses genoux, son épée tremblait avec plus de force et le lien qui l'unissait avec Itrenog s'épaissit d'avantage. Athos intervint alors et posa une main sur le bras droit d'Itrenog. Sa vue se brouilla avant de redevenir nette et le bélier quitta les portes de son esprit. Le vieil homme attrapa l'arme et la jeta au loin dans la pièce avec une rapidité surprenante pour quelqu'un de son âge et il allongea lentement Itrenog tout en lui murmurant :
-Il était temps. Reposez-vous pour l'heure, nous reprendrons notre conversation plus tard lorsque certaines pièces du puzzle se seront imbriquées d'elles-même ...
Itrenog nota l'air heureux d'Athos ainsi que son sourire d'enfant ravi avant de s'endormir. Sa dernière pensée cohérente avant de s'enfoncer dans le monde des rêves et des esprits fut que jamais il ne s'était senti autant vulnérable.
- Spoiler:
- HowMyGawch ! Je vais bientôt plus pouvoir augmenter mes capaz' ! Pour l'heure, augmentation en puissance et si ia pas assez de place, le reste en résistance svp.
Itrenog- Age : 31
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Re: Une vie, un devoir ...
L'immensité des plaines humaines était balayée par de puissantes rafales de vents. On distinguait à peine deux ombres, de tailles humaines, qui avançaient sans destination précise apparente. L'une d'entre-elles était un homme d'un teint cadavérique portant une tunique rouge sang, ses cheveux et ses yeux de la même couleur. Une flamberge pendait inutilement à son côté et il pressait ses cottes avec une de ses mains. Un mince filet de sang s'écoulait entre ses doigts et tachait l'herbe verte avec un «ploc» régulier. Il grimaçait par moment mais ses yeux flambaient de haine. On ne voyait presque rien de son compagnon. Une longue cape noire le recouvrait presque entièrement et son visage était masqué par un capuchon. Il se semblait pas se soucier du mal de son camarade et ne se privait pas d'accélérer la marche de temps à autre pour prolonger le calvaire du blessé. Ils marchèrent ainsi, durant plusieurs minutes, et arrivèrent sur un talus surélevé où ils s'arrêtèrent. L'homme aux cheveux rouges s'assit brutalement sur le sol, pourrissant l'herbe alentour. Le soleil reflétait sur son visage des traits tirés et fatigués. Ses yeux étaient d'un rouge terne, entourés par des cernes profondes et par endroits, des plaques violacées tâchaient sa peau blanche.
-Il ne reste plus beaucoup de temps à ce corps là, commenta-t-il à l'attention de son camarade.
Ce dernier ne lui répondit pas et continua de regarder l'horizon. Lui aussi avait les yeux rouges qui luisaient à travers la pénombre de son capuchon, et il se tenait droit, tendu comme la corde d'un arc bandé.
-Alors, reprit l'homme, pourquoi tu es venu ? Je t'avais pourtant dit que je pouvais m'en charger seul.
-Ce n'est pourtant pas l'impression que j'en ai eu.
L'homme ricana, ce qui provoqua un accès de douleur dans ses côtes. Il se plia en deux en grimaçant et cracha un peu de sang
-Elle m'a eu par surprise, se justifia-t-il en se redressant lentement, Ce corps n'était pas assez …
-Ou alors tu ne sais pas t'en servir, coupa calmement l'autre. Je sais ce que tu vas me dire, et je sais aussi que tu aurais échoué si je n'étais pas intervenu. Notre Maître nous avait intimé de les amener vivant, et tu voulais simplement les tuer.
En écoutant ses paroles, son compagnon ne put réprimer une grimace de colère.
-Alors ça y est ? Tu abandonnes tes faux-semblants ? Ou alors ne m'as-tu jamais considéré comme ton supérieur ?
-La seule personne qui m'est supérieure, répondit l'ombre, c'est notre Maître. La donne a changé avec ce qu'il s'est passé. Mais, je suppose que c'est dans la nature des démons d'être aussi crédule.
L'homme se redressa alors brutalement, ignorant le sang qui gouttait avec plus de force de sa poitrine, et s'approcha en trainant du pied de l'autre qui n'avait toujours pas bougé. L'air s'alourdit d'avantage avec sa colère qui augmentait. Il le saisit par le col et le força à le regarder dans les yeux.
-Depuis tout ce temps, je rêve de plonger mes crocs dans ta faible chair, grinça-t-il, Insulte moi encore une fois, et je me ferais un plaisir de dévorer ton âme, peu importe ton statut !
-Tu oses me menacer dans la position dans laquelle tu te trouves ?, rétorqua l'autre sans chercher à se libérer, Très audacieux. Je reconnais bien là la sottise des Vanäthies. Peut-être même suffisamment pour ne pas te laisser une seconde chance ...
-Et ça t'arrange je suppose !, s'emporta l'homme, Ce doit être fatiguant de faire semblant d'être à ma botte lorsque l'on voit la place de choix que tu as auprès de ...
Il n'eut pas le temps de terminer sa phrase. Une onde de choc l'avait propulsé au sol et lui avait coupé la respiration. Il s'essuya la lèvre d'un revers de manche et posa sur son compagnon un regard mêlé de haine et de mépris. Ce dernier s'avança lentement vers le blessé :
-Là n'est pas la question. J'obéissais aux ordres. Notre maître voulait que je juge tes capacités. Il ne peut se permettre de s'entourer de faibles au vu de la grandeur de ses projets et force est de reconnaître que tu n'es pas fait pour le servir ...
Avec un geste sec de la main, le démon propulsa une boule de feu sur son compagnon, qui s'écrasa avec un craquement sinistre. Lorsqu'elle se dissipa, l'ombre avançait toujours, un écran invisible maintenant les flammes à l'écart. Le démon savait que toute attaque était inutile. Leurs visages étaient à présent à quelques centimètres l'un de l'autre et pour la première fois, on voyait une once de peur dans le regard du démon allongé par terre. Il savait ce qui l'attendait.
-Il t'a offert tout ce que tu voulais, fit l'ombre d'une voix douce, Et pourtant, tu as lamentablement échoué. Il est temps de laisser d'autres s'occuper d'eux.
-Alors quoi ? Tu vas me tuer ? Tu n'as aucun droit sur moi !
-Ce n'est pas à toi de décider ce que j'ai le droit ou non de faire. Tu sembles oublier l'insignifiance de ton rang. Moi qui pensais pouvoir obtenir quelque chose de toi. Quel gâchis, quelle perte de temps ...
Accompagnant ses paroles, il ôta son capuchon et plongea son regard dans celui du démon. Ce dernier enflamma sa main et s'apprêta à frapper mais un étau invisible lui brisa le poignet. Il gémit sous le choc mais continua de fusiller son compagnon du regard. L'ombre sortit une dague noire de sa ceinture et la plongea dans le corps de son compagnon. Celui-ci hurla de douleur et petit à petit, son corps se flétrit à vue d'œil. La lumière de vie de ces yeux se dissipa, virant du rouge au marron foncé, ses cheveux perdirent leur couleur de feu avant de tomber du crâne et bientôt, son visage sembla fondre comme de la cire. Sa corpulence s'amincit drastiquement jusqu'à ce qu'il ne lui reste plus que la peau sur les os. Lorsque l'ombre retira sa lame, elle était non plus noire, mais blanche, un filament dorée flottant à l'intérieur de la lame. Il se détacha du corps inerte et disparut avec un claquement sourd, laissant les corbeaux s'occuper de la carcasse en décomposition.
+2 Pièces d'Argent (mouhahaha t'as pas de capaz, vile créature =P)[/spoiler
-Il ne reste plus beaucoup de temps à ce corps là, commenta-t-il à l'attention de son camarade.
Ce dernier ne lui répondit pas et continua de regarder l'horizon. Lui aussi avait les yeux rouges qui luisaient à travers la pénombre de son capuchon, et il se tenait droit, tendu comme la corde d'un arc bandé.
-Alors, reprit l'homme, pourquoi tu es venu ? Je t'avais pourtant dit que je pouvais m'en charger seul.
-Ce n'est pourtant pas l'impression que j'en ai eu.
L'homme ricana, ce qui provoqua un accès de douleur dans ses côtes. Il se plia en deux en grimaçant et cracha un peu de sang
-Elle m'a eu par surprise, se justifia-t-il en se redressant lentement, Ce corps n'était pas assez …
-Ou alors tu ne sais pas t'en servir, coupa calmement l'autre. Je sais ce que tu vas me dire, et je sais aussi que tu aurais échoué si je n'étais pas intervenu. Notre Maître nous avait intimé de les amener vivant, et tu voulais simplement les tuer.
En écoutant ses paroles, son compagnon ne put réprimer une grimace de colère.
-Alors ça y est ? Tu abandonnes tes faux-semblants ? Ou alors ne m'as-tu jamais considéré comme ton supérieur ?
-La seule personne qui m'est supérieure, répondit l'ombre, c'est notre Maître. La donne a changé avec ce qu'il s'est passé. Mais, je suppose que c'est dans la nature des démons d'être aussi crédule.
L'homme se redressa alors brutalement, ignorant le sang qui gouttait avec plus de force de sa poitrine, et s'approcha en trainant du pied de l'autre qui n'avait toujours pas bougé. L'air s'alourdit d'avantage avec sa colère qui augmentait. Il le saisit par le col et le força à le regarder dans les yeux.
-Depuis tout ce temps, je rêve de plonger mes crocs dans ta faible chair, grinça-t-il, Insulte moi encore une fois, et je me ferais un plaisir de dévorer ton âme, peu importe ton statut !
-Tu oses me menacer dans la position dans laquelle tu te trouves ?, rétorqua l'autre sans chercher à se libérer, Très audacieux. Je reconnais bien là la sottise des Vanäthies. Peut-être même suffisamment pour ne pas te laisser une seconde chance ...
-Et ça t'arrange je suppose !, s'emporta l'homme, Ce doit être fatiguant de faire semblant d'être à ma botte lorsque l'on voit la place de choix que tu as auprès de ...
Il n'eut pas le temps de terminer sa phrase. Une onde de choc l'avait propulsé au sol et lui avait coupé la respiration. Il s'essuya la lèvre d'un revers de manche et posa sur son compagnon un regard mêlé de haine et de mépris. Ce dernier s'avança lentement vers le blessé :
-Là n'est pas la question. J'obéissais aux ordres. Notre maître voulait que je juge tes capacités. Il ne peut se permettre de s'entourer de faibles au vu de la grandeur de ses projets et force est de reconnaître que tu n'es pas fait pour le servir ...
Avec un geste sec de la main, le démon propulsa une boule de feu sur son compagnon, qui s'écrasa avec un craquement sinistre. Lorsqu'elle se dissipa, l'ombre avançait toujours, un écran invisible maintenant les flammes à l'écart. Le démon savait que toute attaque était inutile. Leurs visages étaient à présent à quelques centimètres l'un de l'autre et pour la première fois, on voyait une once de peur dans le regard du démon allongé par terre. Il savait ce qui l'attendait.
-Il t'a offert tout ce que tu voulais, fit l'ombre d'une voix douce, Et pourtant, tu as lamentablement échoué. Il est temps de laisser d'autres s'occuper d'eux.
-Alors quoi ? Tu vas me tuer ? Tu n'as aucun droit sur moi !
-Ce n'est pas à toi de décider ce que j'ai le droit ou non de faire. Tu sembles oublier l'insignifiance de ton rang. Moi qui pensais pouvoir obtenir quelque chose de toi. Quel gâchis, quelle perte de temps ...
Accompagnant ses paroles, il ôta son capuchon et plongea son regard dans celui du démon. Ce dernier enflamma sa main et s'apprêta à frapper mais un étau invisible lui brisa le poignet. Il gémit sous le choc mais continua de fusiller son compagnon du regard. L'ombre sortit une dague noire de sa ceinture et la plongea dans le corps de son compagnon. Celui-ci hurla de douleur et petit à petit, son corps se flétrit à vue d'œil. La lumière de vie de ces yeux se dissipa, virant du rouge au marron foncé, ses cheveux perdirent leur couleur de feu avant de tomber du crâne et bientôt, son visage sembla fondre comme de la cire. Sa corpulence s'amincit drastiquement jusqu'à ce qu'il ne lui reste plus que la peau sur les os. Lorsque l'ombre retira sa lame, elle était non plus noire, mais blanche, un filament dorée flottant à l'intérieur de la lame. Il se détacha du corps inerte et disparut avec un claquement sourd, laissant les corbeaux s'occuper de la carcasse en décomposition.
- Spoiler:
- Nan sérieux, je mérite que dal pour ce ... truc que j'ai pondu. Je savais pas quoi faire et puis, vu qu'il faut que je prépare mon entrainement, j'ai fait un p'tit post minable pour meubler l'ensemble. Sow, pas la peine d'avoir des capaz' pour cette fois ... Après, pour les réclamations, on peut s'arranger ... Voyez ça avec mon agent tiens !
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Itrenog- Age : 31
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Date d'inscription : 09/12/2009
Points de Progression : 61
Re: Une vie, un devoir ...
Lorsqu'Itrenog ouvrit les yeux, il était seul. La bougie presque entièrement fondue baignait la pièce d'une douce pénombre. Il s'assit lentement sur le bord de son lit en se prenant la tête. Toutes ses pensées qui remuaient en lui le rendait malade. Il ne comprenait pas et doutait vouloir comprendre. Comment pouvait-il être sûr de ce qu'il avait vu ? A peine quelques instants auparavant, sa détermination de quitter ce lieu était au plus haut. Désormais, il ne savait plus que faire. Il redressa son visage. Depuis combien de temps était-il ici ? Quelques heures ? Plusieurs jours ? Il n'en savait rien. Il avait perdu la notion du temps au moment même où il était entré dans ce bosquet. Abandonnant toute question superflue, il chercha du regard ses affaires. Au fond de la pièce, son épée était étendue au sol dans son fourreau de cuir et semblait l'attendre. Itrenog se leva et marcha pour aller la prendre et en face de lui, accroché à gauche de la bibliothèque, il aperçut un petit miroir ovale. Il s'approcha et ne put résister à la tentation d'observer le visage de l'humain qu'il contrôlait. Il ne l'avait vu que deux fois depuis qu'il avait quitté la caverne qui lui avait servi de refuge face aux Omerädies. La première était de ses propres yeux juste avant de le posséder, et la seconde grâce à un petit miroir gravé que portait l'humain. C'était ce miroir qui lui avait fait voir les veines bleues qui jalonnaient son visage, la couleurs rouges de ses yeux et la nécessité de les cacher grâce à des illusions de faible intensité. Itrenog ne gardait que de très vagues souvenirs de ce qu'il avait été. Des cheveux châtains foncé attachés en queue de cheval, un visage allongé et fin, un long nez pointu et des yeux gris clairs. Lorsqu'il se contempla dans le miroir, la vision qu'il avait eu de l'humain tenta de s'accoler avec celle qu'il avait devant lui. Les yeux flamboyaient toujours avec la même intensité, les pupilles en deux fentes minces comme deux tâches d'encre étirées et ses cheveux étaient toujours maintenus en arrière. Ils étaient toutefois plus sombres que le souvenir que s'en faisait Itrenog. Les veinules sillonnant son visage suivaient un parcours presque ordonné et se poursuivaient jusqu'à son cou et sur le reste de son corps. On aurait dit qu'elles étaient symétriques par rapport à une ligne médiane à son corps et qu'elles représentaient de nombreux symboles qui se mélangeaient pour au final, ne ressembler en rien à ce que connaissait Itrenog. Puis, il observa son bras. La peau noircie qui séparait son étrange membre de l'avant bras semblait avoir gagné du terrain et attaquait à présent l'épaule. C'était la seule chose qu'il avait pu noter sur le comportement de ce bras. Plus le temps passait, et plus cette peau s'étalait sur le corps de l'humain. Il ne savait ni pourquoi, ni comment inverser le processus. Lui même ignorait tout des conséquences que le contrôle d'un démon sur un corps étranger pouvait avoir et le peu de temps passé parmi les siens ne lui avait guère laissé le loisir de l'étudier plus avant. Il soupira et ramassa son arme, non sans réprimer un frisson à son contact. Il s'habilla rapidement, enfila le pantalon et la chemise de cuir noir, et passa son long manteau avant de serrer son épée contre son dos. Juste avant de sortir, il remarqua que plusieurs livres étaient ouverts en vrac sur le bureau. Leurs pages étaient jaunies par le temps et ne nombreuses ratures sillonnaient les paragraphes complets et agrémentés d'images en tout genre. Itrenog se saisit de l'un d'entre eux. Il lui fallut un certain temps pour comprendre l'écriture qui était pourtant très nette, stylisée de quelques enluminures à l'or fin. Les caractères humains qu'il avait très vaguement étudié lui paraissaient étranges et abscons, et la grande majorité du temps, le sens de ce qu'il lisait lui échappait, mais il put toutefois déchiffrer : «Préparation et Décoction en Alchimie, Livre III : Les essences démoniaques». Ce ne fut pas tant l'étrangeté d'un tel livre en ce lieu qui le marqua, mais plutôt le nom de son auteur : «Athos Perceval Lucos, Haut Dignitaire des Magies Anciennes et Archimage hors-classe». Il reposa le livre et en observa un autre. Il s'y trouvait de nombreuses biographies de jeunes mages et l'une d'elles était entourée au crayon rouge. Un certain Lucius qui aurait été taxé de mage renégat et traqué pour usage de magie noire un mois après son entrée à Alcantare. Il y avait aussi un portrait de lui, un jeune homme aux cheveux châtains et au visage noble, deux yeux bleus luisant derrière des lunettes rondes. Itrenog remit l'ouvrage en place et ouvrit la porte. Elle donnait sur un petit couloir dont les murs étaient ornés de tableaux en tout genre. Plus loin, il entendait Athos qui parlait à voix basse. Quant à savoir s'il était seul ou non, Itrenog ne sut dire. Mais le vieil homme était bien seul, griffonnant encore et toujours son calepin le dos recourbé sur la table.. Il se redressa alors :
-Ah ! Vous êtes réveillé ! Tant mieux, tant mieux ! Nous avons des choses à nous dire mon ami. Du thé peut-être ?
Itrenog refusa d'un bref signe de la tête et s'assit en face d'Athos :
-Vous avez raison. Après tout, Iberiel et vous n'avez même pas touché à l'autre que j'avais fait avant.
Au lieu de préparer une autre tasse, il saisit les deux verres de terre cuite, l'un en face d'Itrenog, l'autre à la place où était Iberiel, et posa sa paume dessus. Après quelques instants, une volute de fumée s'en échappa et il trempa un doigt à l'intérieur avant de le retirer vivement en grognant :
-C'est chaud !
-Quel sens de l'observation ...
Athos ne répondit pas, comme s'il eut été sourd, et but une gorgée dans une des deux tasses. Avec un râle satisfait, il se cala plus au fond de sa chaise. Itrenog nota l'air rêveur du vieil ermite bien avant que celui-ci ait pu le cacher derrière un sourire amical. Il lui sembla revoir en lui une personne qui lui était familière. Sans doute des vestiges d'une mémoire oubliée.
-Vous savez donc ce qu'est un catalyseur, reprit le vieil homme, qu'Iberiel en est un et qu'elle est poursuivie par les démons … voyons ...
Il leva un doigt pour s'interrompre et sortit de nouveau sa pipe de bois usé. Après l'avoir remplie de tabac et l'avoir allumée, il répandit un panache de fumée en tentant de reproduire une forme quelconque, sans succès. A travers la nappe grise qui lui voilait le visage, il dit :
-En fait il serait plus simple de partir de ce que vous ne savez pas et ce que vous voudriez savoir. Par exemple … ?
-La seule chose digne d'intérêt, répondit Itrenog, c'est le lien qu'elle a avec les démons. Je me moque bien du reste.
Athos tira sur sa pipe, se creusant d'avantage les joues et les rides de son visage :
-Une demande on peut plus pragmatique. Problème, j'ignore la réponse. J'ai bien sûr quelques idées, mais ce ne sont que des idées justement, et loin de moi l'envie de vous encombrer d'avantage l'esprit avec mes hypothèses farfelues. Par contre, si vous voulez, je peux vous expliquer pourquoi elle réagit brusquement dès qu'elle voit votre visage. Ce serait un bon début pour la conversation que vous aurez tout à l'heure, pas vrai ?
Une toux grasse le saisit alors, expulsant une trombe de fumée grisâtre par ses narines, répandant une odeur de brûlé dans la pièce, et le fit basculer sur la table où il resta la tête collée le temps que le malaise passe. Itrenog ne voyait que ses cheveux étalés sur la table, ses épaules se secouant à chaque quinte qui prenait le vieillard et se résolut à attendre. Athos se releva lentement après quelques minutes de calme et posa sa pipe loin de lui.
-Bon sang, marmonna-t-il en s'essuyant ses yeux rougis d'un revers de manche, je suis trop vieux pour ce genre de choses.
Il s'éclaircit de nouveau la gorge bruyamment pour ôter toutes les particules y trainant et continua :
-Ce qu'il faut que vous sachiez, c'est qu'avant qu'Iberiel ne se fasse traquer par les démons, elle vivait relativement paisiblement dans un petit village dans les terres humaines. Là-bas, elle avait plusieurs amis, dont moi et l'humain dont vous contrôlez actuellement le corps.
-Et à quand remonte cette période ? Demanda Itrenog, perplexe.
-Au bas mot … trop loin pour que je m'en souvienne avec précision. Je dirais il y a de cela mille ans voire davantage.
Itrenog aurait été surpris si un détail qu'il avait compris quelques instant auparavant ne trainait pas constamment dans sa tête. Mais ce détail ne concernait qu'une seule et unique personne, et non celle qui se trouvait assise face à lui. Croisant les bras, il dit :
-Et pourtant, vous vous n'êtes qu'un humain.
-Vous savez, à force de manger les herbes de son jardin par temps de disette, on finit par s'endurcir, c'est une évidence. Et détrompez-vous, je suis bien un humain. Sinon, pourquoi cette mine fatiguée et ces cheveux blancs ?
Il haussa des épaules et avala une gorgée de thé avant de poursuivre :
-Or donc où en étais-je … Ha oui, la période tranquille. Une belle époque croyez moi. Pas de course-poursuite et un bon repas chaud le soir en rentrant à la maison. Mais je m'égare. Après ce calme plat sans importance, les démons ont commencé à montrer un certain intérêt à Iberiel. Comme je vous l'ai dit, je ne sais pas pourquoi, mais faute de vouloir le découvrir, je l'ai aidée à se cacher du mieux possible et nous avons tenu assez longtemps jusqu'à ce Pacte des Cinq soit signé. Dès lors, aussi étrange que cela puisse paraître, elle a cessé d'être poursuivie et en a profité pour se cacher à Munduce sous diverses apparences pour plus de précautions.
-Je ne vois pas mon rôle dans tout cela.
-Un peu de tout je le crains. Tandis qu'elle se cachait pour ne pas se faire capturer, son ami s'est volatilisée de la surface de Geadrâs. Il lui avait dit qu'il avait une affaire importante à régler et qu'il viendrait l'aider quand il le faudra, mais ne l'a jamais fait. Quand elle vous a parlé la première fois, elle m'a raconté que vous vous êtes présenté sous un certain pseudonyme. Quel était-il déjà ?
-Itrenog.
Athos resta contemplatif un instant dès le moment où se nom lui avait effleuré l'esprit.
-Exactement, souffla-t-il dans un murmure, Itrenog.
Ses lèvres furent parcourues de tremblement mais son visage restait impassible. Même ses yeux qui flirtaient avec tout ce qu'il était possible de voir s'étaient arrêtés, bloqués dans une vision d'un autre âge et d'un autre endroit. Il secoua la tête et masqua sa gêne par un sourire peiné :
-Elle a du se douter que vous n'étiez pas lui dès ce moment, que quelque chose clochait, et ses soupçons se sont confirmés dès qu'elle a vu votre visage. Un ami disparu qui refait surface sous des traits démoniaques ? Normal qu'elle se sente aussi blessée.
-Elle ne m'a rien dit de tout cela.
Athos reprit son air jovial et pouffa :
-Vous êtes mal placé pour donner des leçons de discussions, vous savez. Mais que voulez-vous, je ne suis pas dans sa tête, je ne peux pas savoir pourquoi elle ne vous l'a pas dit. Vous verrez avec le temps qu'elle est d'une nature assez compliquée.
Il termina sa tasse, absorba d'une traite le contenu de la seconde et, étira son dos endolori dans une grimace de douleur tandis qu'un craquement sonore retentissait dans la pièce. Il roula des épaules, joua des poignets et se leva guilleret :
-Bon, je vais préparer le repas pour ce soir. Les tomates m'attendent et vous avez matière à réfléchir je pense.
Il passa à côté d'Itrenog en lui posant une main sur l'épaule et sortit en sifflotant un air joyeux, sa longue robe trainant les feuilles mortes qui parsemaient l'entrée de sa maison, sans se donner la peine de s'expliquer. Itrenog se leva à sa suite sans hésitations et apprécia l'air frais sur sa peau brûlante. Il leva la tête pour tenter d'apercevoir le soleil, mais derrière cette masse touffue de feuilles, il était impossible de voir ne serait-ce qu'une parcelle du ciel. Rien ne semblait agir ici comme il serait naturel ailleurs. C'était comme si Athos s'était coupé littéralement du monde et que personne, à moins de savoir qu'il était ici, ne pouvait le déranger. Il tourna la tête et aperçut Iberiel derrière un arbre, assise, figée comme une statue de marbre dans ce décor irréel. Son regard sur elle avait changé. Il voyait quelque chose de plus, quelque chose qui altérait son jugement et qui lui faisait revoir une foule de choses sur lesquelles il ne put mettre de mots. Un frisson lui parcourut l'échine et il se dirigea vers elle avec la certitude qu'elle en savait plus qu'elle ne voulait l'avouer, la phrase d'Athos résonnant encore dans sa tête «Ce serait un bon début pour la conversation que vous aurez tout à l'heure, pas vrai ?»
-Ah ! Vous êtes réveillé ! Tant mieux, tant mieux ! Nous avons des choses à nous dire mon ami. Du thé peut-être ?
Itrenog refusa d'un bref signe de la tête et s'assit en face d'Athos :
-Vous avez raison. Après tout, Iberiel et vous n'avez même pas touché à l'autre que j'avais fait avant.
Au lieu de préparer une autre tasse, il saisit les deux verres de terre cuite, l'un en face d'Itrenog, l'autre à la place où était Iberiel, et posa sa paume dessus. Après quelques instants, une volute de fumée s'en échappa et il trempa un doigt à l'intérieur avant de le retirer vivement en grognant :
-C'est chaud !
-Quel sens de l'observation ...
Athos ne répondit pas, comme s'il eut été sourd, et but une gorgée dans une des deux tasses. Avec un râle satisfait, il se cala plus au fond de sa chaise. Itrenog nota l'air rêveur du vieil ermite bien avant que celui-ci ait pu le cacher derrière un sourire amical. Il lui sembla revoir en lui une personne qui lui était familière. Sans doute des vestiges d'une mémoire oubliée.
-Vous savez donc ce qu'est un catalyseur, reprit le vieil homme, qu'Iberiel en est un et qu'elle est poursuivie par les démons … voyons ...
Il leva un doigt pour s'interrompre et sortit de nouveau sa pipe de bois usé. Après l'avoir remplie de tabac et l'avoir allumée, il répandit un panache de fumée en tentant de reproduire une forme quelconque, sans succès. A travers la nappe grise qui lui voilait le visage, il dit :
-En fait il serait plus simple de partir de ce que vous ne savez pas et ce que vous voudriez savoir. Par exemple … ?
-La seule chose digne d'intérêt, répondit Itrenog, c'est le lien qu'elle a avec les démons. Je me moque bien du reste.
Athos tira sur sa pipe, se creusant d'avantage les joues et les rides de son visage :
-Une demande on peut plus pragmatique. Problème, j'ignore la réponse. J'ai bien sûr quelques idées, mais ce ne sont que des idées justement, et loin de moi l'envie de vous encombrer d'avantage l'esprit avec mes hypothèses farfelues. Par contre, si vous voulez, je peux vous expliquer pourquoi elle réagit brusquement dès qu'elle voit votre visage. Ce serait un bon début pour la conversation que vous aurez tout à l'heure, pas vrai ?
Une toux grasse le saisit alors, expulsant une trombe de fumée grisâtre par ses narines, répandant une odeur de brûlé dans la pièce, et le fit basculer sur la table où il resta la tête collée le temps que le malaise passe. Itrenog ne voyait que ses cheveux étalés sur la table, ses épaules se secouant à chaque quinte qui prenait le vieillard et se résolut à attendre. Athos se releva lentement après quelques minutes de calme et posa sa pipe loin de lui.
-Bon sang, marmonna-t-il en s'essuyant ses yeux rougis d'un revers de manche, je suis trop vieux pour ce genre de choses.
Il s'éclaircit de nouveau la gorge bruyamment pour ôter toutes les particules y trainant et continua :
-Ce qu'il faut que vous sachiez, c'est qu'avant qu'Iberiel ne se fasse traquer par les démons, elle vivait relativement paisiblement dans un petit village dans les terres humaines. Là-bas, elle avait plusieurs amis, dont moi et l'humain dont vous contrôlez actuellement le corps.
-Et à quand remonte cette période ? Demanda Itrenog, perplexe.
-Au bas mot … trop loin pour que je m'en souvienne avec précision. Je dirais il y a de cela mille ans voire davantage.
Itrenog aurait été surpris si un détail qu'il avait compris quelques instant auparavant ne trainait pas constamment dans sa tête. Mais ce détail ne concernait qu'une seule et unique personne, et non celle qui se trouvait assise face à lui. Croisant les bras, il dit :
-Et pourtant, vous vous n'êtes qu'un humain.
-Vous savez, à force de manger les herbes de son jardin par temps de disette, on finit par s'endurcir, c'est une évidence. Et détrompez-vous, je suis bien un humain. Sinon, pourquoi cette mine fatiguée et ces cheveux blancs ?
Il haussa des épaules et avala une gorgée de thé avant de poursuivre :
-Or donc où en étais-je … Ha oui, la période tranquille. Une belle époque croyez moi. Pas de course-poursuite et un bon repas chaud le soir en rentrant à la maison. Mais je m'égare. Après ce calme plat sans importance, les démons ont commencé à montrer un certain intérêt à Iberiel. Comme je vous l'ai dit, je ne sais pas pourquoi, mais faute de vouloir le découvrir, je l'ai aidée à se cacher du mieux possible et nous avons tenu assez longtemps jusqu'à ce Pacte des Cinq soit signé. Dès lors, aussi étrange que cela puisse paraître, elle a cessé d'être poursuivie et en a profité pour se cacher à Munduce sous diverses apparences pour plus de précautions.
-Je ne vois pas mon rôle dans tout cela.
-Un peu de tout je le crains. Tandis qu'elle se cachait pour ne pas se faire capturer, son ami s'est volatilisée de la surface de Geadrâs. Il lui avait dit qu'il avait une affaire importante à régler et qu'il viendrait l'aider quand il le faudra, mais ne l'a jamais fait. Quand elle vous a parlé la première fois, elle m'a raconté que vous vous êtes présenté sous un certain pseudonyme. Quel était-il déjà ?
-Itrenog.
Athos resta contemplatif un instant dès le moment où se nom lui avait effleuré l'esprit.
-Exactement, souffla-t-il dans un murmure, Itrenog.
Ses lèvres furent parcourues de tremblement mais son visage restait impassible. Même ses yeux qui flirtaient avec tout ce qu'il était possible de voir s'étaient arrêtés, bloqués dans une vision d'un autre âge et d'un autre endroit. Il secoua la tête et masqua sa gêne par un sourire peiné :
-Elle a du se douter que vous n'étiez pas lui dès ce moment, que quelque chose clochait, et ses soupçons se sont confirmés dès qu'elle a vu votre visage. Un ami disparu qui refait surface sous des traits démoniaques ? Normal qu'elle se sente aussi blessée.
-Elle ne m'a rien dit de tout cela.
Athos reprit son air jovial et pouffa :
-Vous êtes mal placé pour donner des leçons de discussions, vous savez. Mais que voulez-vous, je ne suis pas dans sa tête, je ne peux pas savoir pourquoi elle ne vous l'a pas dit. Vous verrez avec le temps qu'elle est d'une nature assez compliquée.
Il termina sa tasse, absorba d'une traite le contenu de la seconde et, étira son dos endolori dans une grimace de douleur tandis qu'un craquement sonore retentissait dans la pièce. Il roula des épaules, joua des poignets et se leva guilleret :
-Bon, je vais préparer le repas pour ce soir. Les tomates m'attendent et vous avez matière à réfléchir je pense.
Il passa à côté d'Itrenog en lui posant une main sur l'épaule et sortit en sifflotant un air joyeux, sa longue robe trainant les feuilles mortes qui parsemaient l'entrée de sa maison, sans se donner la peine de s'expliquer. Itrenog se leva à sa suite sans hésitations et apprécia l'air frais sur sa peau brûlante. Il leva la tête pour tenter d'apercevoir le soleil, mais derrière cette masse touffue de feuilles, il était impossible de voir ne serait-ce qu'une parcelle du ciel. Rien ne semblait agir ici comme il serait naturel ailleurs. C'était comme si Athos s'était coupé littéralement du monde et que personne, à moins de savoir qu'il était ici, ne pouvait le déranger. Il tourna la tête et aperçut Iberiel derrière un arbre, assise, figée comme une statue de marbre dans ce décor irréel. Son regard sur elle avait changé. Il voyait quelque chose de plus, quelque chose qui altérait son jugement et qui lui faisait revoir une foule de choses sur lesquelles il ne put mettre de mots. Un frisson lui parcourut l'échine et il se dirigea vers elle avec la certitude qu'elle en savait plus qu'elle ne voulait l'avouer, la phrase d'Athos résonnant encore dans sa tête «Ce serait un bon début pour la conversation que vous aurez tout à l'heure, pas vrai ?»
- Spoiler:
- Et oui ! C'est repartit ! J'ai eu du mal, mais je l'ai fait ! Sow, répartition ... terminer, si c'est possible, la résistance et puis, s'il en reste, dans l'intelligence. Merchi !
- validation:
- Edit Yuke: +24Rés, +19Int
Itrenog- Age : 31
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Re: Une vie, un devoir ...
-Je suis désolé.
Tels sont les mots prononcés par Itrenog, sans la profonde conviction nécessaire à rendre ses paroles crédibles, tandis qu'il s'asseyait aux côtés d'Iberiel. Cette dernière avait à peine esquissée un mouvement, comme si elle n'avait rien entendu ou que rien ne s'était passé. Dans ses mains, une feuille froissée et devant elle, un dessin abstrait tracé d'un doigt léger. Sa respiration n'était plus qu'un infime filet d'air presque inaudible et elle semblait aussi immobile que les arbres les entourant. Elle finit toutefois par répondre :
-Ce n'est pas à vous de vous excuser. J'aurais du être plus avenante et mieux gérer mes émotions. Chaque pas qui nous rapproche des Elfes me rend plus nerveuse.
Préférant éloigner le sujet, Itrenog saisit la mouche au vol :
-Vous les connaissez plutôt bien pourtant.
Iberiel baissa la tête :
-Vous avez compris.
-Il m'a fallut un certain temps pour y arriver.
Plus loin, Athos s'échinait à arracher une mauvaise herbe particulièrement coriace et ne récolta qu'un tour de rein, ce qui l'obligea à patienter le temps que la douleur ne passe. Itrenog porta de nouveau son attention sur son interlocutrice mais ce fut elle qui prit la parole en désignant le vieillard d'un geste de la tête :
-Vous avez donc du comprendre pourquoi je vous ai amené le voir.
-Vous auriez tout aussi bien pu tout me dire sans venir ici.
-Peut-être, admit Iberiel, mais Athos, bien qu'il s'en défende, est plus doué que moi pour raconter ce genre de chose. Et je pense que c'était une nécessité d'aller le rencontrer.
-Pour moi ? Ou bien pour vous ?
Court silence avant une réponse :
-Seuls les dires d'une autre personne pouvait m'assurer de ce que je voyais. Une partie de moi devait surement encore s'y refuser malgré tout …
Elle s'agita, mal à l'aise par ce qu'elle venait de dire, et se mura dans un mutisme empreint de doutes et d'un certain stress face à la situation. Itrenog lui, tentait de faire le ménage. A travers le nuage d'inconnues qui se dressait devant lui, une nécessité se détachait très nettement. Il devait conduire Iberiel auprès des Elfes et s'en éloigner le plus possible. Peu lui importait ce qu'elle était ou encore le lien que l'humain pouvait avoir avec elle, si elle était chassée par les démons, ces-derniers finiraient fatalement par lui tomber dessus et le conduire auprès des Omerädies.
-Racontez moi comment cela est arrivé.
La voix claire d'Iberiel le sortit de ses songes.
-Pardon ?
-Comment vous êtes vous procuré son corps ?
-Je ne suis pas …
-Vous me devez bien ça, coupa Iberiel.
Son ton était dénué de toute animosité mais sa détermination transparaissait clairement. Itrenog ne se pressa pas pour répondre. Non seulement parce que ses souvenirs lui venaient d'une époque qu'il avait presque oubliée mais aussi et surtout parce qu'il n'avait aucune envie de parler de cette histoire. Néanmoins, pour ne pas la contrarier d'avantage et sentant qu'elle ne laisserait rien passer tant qu'elle n'aurait pas sa réponse, il raconta d'une voix morne :
-Cela s'est passé dans une caverne, dans les Grandes Plaines. J'y suis arrivé bien longtemps avant que les humains ne naissent et lorsque cela se produisit, ils se répandirent extrêmement rapidement jusqu'à atteindre l'endroit où je me trouvai.
Il revit la scène se recomposer lentement dans son esprit, les détails s'accolant parfaitement entre eux et les images s'imbriquant d'elle-mêmes dans sa tête.
-J'ai alors réussi à attirer l'un d'eux à l'intérieur en usant du peu de magie que je connaissais et j'ai tenté d'entrer en lui.
-Mais cela n'a pas fonctionné.
-Non. Le corps a été broyé par l'écrasante énergie qui me composait à cette époque. Il m'a fallut attendre encore dans les ténèbres grandissantes de la grotte jusqu'à ce qu'un second Samäthies ne vienne. Il était entré volontairement et … je pense qu'il cherchait quelque chose.
Iberiel frissonna, et ce n'était pas tant à cause de la température que des relents d'anxiété qui s'insinuait en elle.
-Je ne me souviens plus des détails, continua Itrenog, mais je crois que c'est lui qui m'a trouvé. Il n'a pas cherché à se défendre quand je me suis approché. Il a simplement attendu et … j'ai pu le posséder.
Un silence s'installa alors. Le sujet était délicat pour eux deux, révélant une période révolue mais chargée en évènements plus ou moins agréables, et la gêne était palpable. Néanmoins, Itrenog demanda :
-L'humain, avait-il ce …
Il s'interrompit, préférant de loin montrer ce qu'il voulait dire plutôt que se lancer dans des descriptions fastidieuses, et déganta sa main droite sans aller plus loin, réfrénant ses pulsions à une seule portion de son corps. Iberiel se tourna pour mieux voir ce dont il était question :
-Non, répondit-elle après un bref regard, Il n'a jamais eu de bras comme celui-ci. Pourquoi ?
-J'ignore tout des conséquences que peut avoir une possession démoniaque sur un corps qui n'est pas apte à recevoir tant d'énergie, répondit évasivement Itrenog dans un soupir, J'ai pensé que ce n'était probablement pas de mon fait, mais de … Qu'y-a-t-il de drôle ?
Le sourire figé sur le visage d'Iberiel demeura lorsqu'elle répondit :
-C'est juste que … Vous lui ressemblez à bien des égards. Lui aussi avait du mal avec les discours. On pouvait même aller jusqu'à penser que parler le fatiguait plus qu'agir. C'est assez ironique, n'est-ce pas ?
-Je ne comprends pas.
-Ce n'est pas grave. Venez, Athos doit nous attendre.
Elle se leva et il fallut un certain temps à Itrenog pour la suivre. Il restait dubitatif face à cette remarque mais décida de ne pas en faire cas et l'accompagna finalement jusqu'à la bâtisse de bois centrale. A l'intérieur, le vieil homme était assis, et surveillait d'un œil distrait la cuisson de tomates gratinées dans un four en lisant un ouvrage à la couverture ocre. Il ne leva pas même pas les yeux quand Itrenog et Iberiel entrèrent dans la maison et s'installèrent autour de la table, accompagnés des gémissements plaintifs du plancher usé. Il cessa simplement sa lecture et servit des assiettes de bois ainsi que trois cuillères avant de se raviser :
-Ha ! J'oubliais que nous avions un invité à régime particulier.
Il ne plaça que deux couverts et servit le plat en déclarant joyeusement :
-Et bon appétit bien sûr !
Il s'installa et attendit qu'Iberiel ne commence à manger. Il l'observa mettre la première cuillerée dans sa bouche et lorsqu'elle le gratifia d'un regard interrogateur, il haussa des épaules et attaqua à son tour son assiette. Le repas se termina presque en silence. A peine quelques mots furent échangés, et ce fut Athos qui les prononça pour lui-même en gribouillant sur un calepin. Il sortit quelques gâteaux au miel et aux framboises pour le dessert, qu'il mangea rapidement, et avec un bâillement non feint souhaita la bonne nuit à tout le monde en allant se coucher. Alors qu'il quittait tout juste la pièce, Itrenog demanda à Iberiel :
-Quand partons-nous ?
-Demain, répondit-elle en se levant.
-Il n'y a plus aucune raison de rester ici.
-Nous attendons quelqu'un. Une personne qui nous aidera jusque chez les Elfes.
Il croisa les bras en fronçant très légèrement des sourcils :
-J'espère que cela en vaut la peine.
-Vous comprendrez quand vous la verrez.
Et elle quitta à son tour la pièce. Itrenog se dirigea vers sa chambre, là où, quelques heures ou quelques minutes plus tôt – il ne sut dire avec précision – il était, avec Athos, en train de nourrir son arme. Les choses se compliquaient sensiblement, mais rien qui n'était insurmontable. Il fallait juste qu'il agisse le plus rapidement possible et en cela, sa mission en tant qu'escorte de ce qu'il avait prit pour la fille d'un riche marchand de Munduce devait terminer au plus vite. Et après ... Après, il se refusa à penser à ce qu'il pouvait arriver. Ce ne serait que questionnements absurdes qui empliraient son esprit déjà bien encombré. Il s'assit sur le lit qui craqua doucement, détacha son fourreau et le posa sur ses genoux en caressant lentement le cuir le composant, attendant simplement le moment du départ.
Tels sont les mots prononcés par Itrenog, sans la profonde conviction nécessaire à rendre ses paroles crédibles, tandis qu'il s'asseyait aux côtés d'Iberiel. Cette dernière avait à peine esquissée un mouvement, comme si elle n'avait rien entendu ou que rien ne s'était passé. Dans ses mains, une feuille froissée et devant elle, un dessin abstrait tracé d'un doigt léger. Sa respiration n'était plus qu'un infime filet d'air presque inaudible et elle semblait aussi immobile que les arbres les entourant. Elle finit toutefois par répondre :
-Ce n'est pas à vous de vous excuser. J'aurais du être plus avenante et mieux gérer mes émotions. Chaque pas qui nous rapproche des Elfes me rend plus nerveuse.
Préférant éloigner le sujet, Itrenog saisit la mouche au vol :
-Vous les connaissez plutôt bien pourtant.
Iberiel baissa la tête :
-Vous avez compris.
-Il m'a fallut un certain temps pour y arriver.
Plus loin, Athos s'échinait à arracher une mauvaise herbe particulièrement coriace et ne récolta qu'un tour de rein, ce qui l'obligea à patienter le temps que la douleur ne passe. Itrenog porta de nouveau son attention sur son interlocutrice mais ce fut elle qui prit la parole en désignant le vieillard d'un geste de la tête :
-Vous avez donc du comprendre pourquoi je vous ai amené le voir.
-Vous auriez tout aussi bien pu tout me dire sans venir ici.
-Peut-être, admit Iberiel, mais Athos, bien qu'il s'en défende, est plus doué que moi pour raconter ce genre de chose. Et je pense que c'était une nécessité d'aller le rencontrer.
-Pour moi ? Ou bien pour vous ?
Court silence avant une réponse :
-Seuls les dires d'une autre personne pouvait m'assurer de ce que je voyais. Une partie de moi devait surement encore s'y refuser malgré tout …
Elle s'agita, mal à l'aise par ce qu'elle venait de dire, et se mura dans un mutisme empreint de doutes et d'un certain stress face à la situation. Itrenog lui, tentait de faire le ménage. A travers le nuage d'inconnues qui se dressait devant lui, une nécessité se détachait très nettement. Il devait conduire Iberiel auprès des Elfes et s'en éloigner le plus possible. Peu lui importait ce qu'elle était ou encore le lien que l'humain pouvait avoir avec elle, si elle était chassée par les démons, ces-derniers finiraient fatalement par lui tomber dessus et le conduire auprès des Omerädies.
-Racontez moi comment cela est arrivé.
La voix claire d'Iberiel le sortit de ses songes.
-Pardon ?
-Comment vous êtes vous procuré son corps ?
-Je ne suis pas …
-Vous me devez bien ça, coupa Iberiel.
Son ton était dénué de toute animosité mais sa détermination transparaissait clairement. Itrenog ne se pressa pas pour répondre. Non seulement parce que ses souvenirs lui venaient d'une époque qu'il avait presque oubliée mais aussi et surtout parce qu'il n'avait aucune envie de parler de cette histoire. Néanmoins, pour ne pas la contrarier d'avantage et sentant qu'elle ne laisserait rien passer tant qu'elle n'aurait pas sa réponse, il raconta d'une voix morne :
-Cela s'est passé dans une caverne, dans les Grandes Plaines. J'y suis arrivé bien longtemps avant que les humains ne naissent et lorsque cela se produisit, ils se répandirent extrêmement rapidement jusqu'à atteindre l'endroit où je me trouvai.
Il revit la scène se recomposer lentement dans son esprit, les détails s'accolant parfaitement entre eux et les images s'imbriquant d'elle-mêmes dans sa tête.
-J'ai alors réussi à attirer l'un d'eux à l'intérieur en usant du peu de magie que je connaissais et j'ai tenté d'entrer en lui.
-Mais cela n'a pas fonctionné.
-Non. Le corps a été broyé par l'écrasante énergie qui me composait à cette époque. Il m'a fallut attendre encore dans les ténèbres grandissantes de la grotte jusqu'à ce qu'un second Samäthies ne vienne. Il était entré volontairement et … je pense qu'il cherchait quelque chose.
Iberiel frissonna, et ce n'était pas tant à cause de la température que des relents d'anxiété qui s'insinuait en elle.
-Je ne me souviens plus des détails, continua Itrenog, mais je crois que c'est lui qui m'a trouvé. Il n'a pas cherché à se défendre quand je me suis approché. Il a simplement attendu et … j'ai pu le posséder.
Un silence s'installa alors. Le sujet était délicat pour eux deux, révélant une période révolue mais chargée en évènements plus ou moins agréables, et la gêne était palpable. Néanmoins, Itrenog demanda :
-L'humain, avait-il ce …
Il s'interrompit, préférant de loin montrer ce qu'il voulait dire plutôt que se lancer dans des descriptions fastidieuses, et déganta sa main droite sans aller plus loin, réfrénant ses pulsions à une seule portion de son corps. Iberiel se tourna pour mieux voir ce dont il était question :
-Non, répondit-elle après un bref regard, Il n'a jamais eu de bras comme celui-ci. Pourquoi ?
-J'ignore tout des conséquences que peut avoir une possession démoniaque sur un corps qui n'est pas apte à recevoir tant d'énergie, répondit évasivement Itrenog dans un soupir, J'ai pensé que ce n'était probablement pas de mon fait, mais de … Qu'y-a-t-il de drôle ?
Le sourire figé sur le visage d'Iberiel demeura lorsqu'elle répondit :
-C'est juste que … Vous lui ressemblez à bien des égards. Lui aussi avait du mal avec les discours. On pouvait même aller jusqu'à penser que parler le fatiguait plus qu'agir. C'est assez ironique, n'est-ce pas ?
-Je ne comprends pas.
-Ce n'est pas grave. Venez, Athos doit nous attendre.
Elle se leva et il fallut un certain temps à Itrenog pour la suivre. Il restait dubitatif face à cette remarque mais décida de ne pas en faire cas et l'accompagna finalement jusqu'à la bâtisse de bois centrale. A l'intérieur, le vieil homme était assis, et surveillait d'un œil distrait la cuisson de tomates gratinées dans un four en lisant un ouvrage à la couverture ocre. Il ne leva pas même pas les yeux quand Itrenog et Iberiel entrèrent dans la maison et s'installèrent autour de la table, accompagnés des gémissements plaintifs du plancher usé. Il cessa simplement sa lecture et servit des assiettes de bois ainsi que trois cuillères avant de se raviser :
-Ha ! J'oubliais que nous avions un invité à régime particulier.
Il ne plaça que deux couverts et servit le plat en déclarant joyeusement :
-Et bon appétit bien sûr !
Il s'installa et attendit qu'Iberiel ne commence à manger. Il l'observa mettre la première cuillerée dans sa bouche et lorsqu'elle le gratifia d'un regard interrogateur, il haussa des épaules et attaqua à son tour son assiette. Le repas se termina presque en silence. A peine quelques mots furent échangés, et ce fut Athos qui les prononça pour lui-même en gribouillant sur un calepin. Il sortit quelques gâteaux au miel et aux framboises pour le dessert, qu'il mangea rapidement, et avec un bâillement non feint souhaita la bonne nuit à tout le monde en allant se coucher. Alors qu'il quittait tout juste la pièce, Itrenog demanda à Iberiel :
-Quand partons-nous ?
-Demain, répondit-elle en se levant.
-Il n'y a plus aucune raison de rester ici.
-Nous attendons quelqu'un. Une personne qui nous aidera jusque chez les Elfes.
Il croisa les bras en fronçant très légèrement des sourcils :
-J'espère que cela en vaut la peine.
-Vous comprendrez quand vous la verrez.
Et elle quitta à son tour la pièce. Itrenog se dirigea vers sa chambre, là où, quelques heures ou quelques minutes plus tôt – il ne sut dire avec précision – il était, avec Athos, en train de nourrir son arme. Les choses se compliquaient sensiblement, mais rien qui n'était insurmontable. Il fallait juste qu'il agisse le plus rapidement possible et en cela, sa mission en tant qu'escorte de ce qu'il avait prit pour la fille d'un riche marchand de Munduce devait terminer au plus vite. Et après ... Après, il se refusa à penser à ce qu'il pouvait arriver. Ce ne serait que questionnements absurdes qui empliraient son esprit déjà bien encombré. Il s'assit sur le lit qui craqua doucement, détacha son fourreau et le posa sur ses genoux en caressant lentement le cuir le composant, attendant simplement le moment du départ.
- Spoiler:
- Rattrapons-nous sur le prochain post ! Niveau capaz', je sais plus où je suis rendu alors pour pas prendre de risque, je vais dire des sous-sous Je vais être riche si ça continue !
- Spoiler:
- Edit Yuke: en accord avec l'auteur, +27Int =)
Itrenog- Age : 31
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Date d'inscription : 09/12/2009
Points de Progression : 61
Re: Une vie, un devoir ...
Lorsque le premier rai de lumière se décomposa à travers la vitre de sa chambre, Itrenog se sentait d'attaque. La nuit – où ce qu'il prenait comme étant la nuit – avait été tranquille et la perspective du départ l'électrisait. Durant son repos, il avait planifié ce qu'il ferait après être allé chez les Elfes. Il avait quelqu'un à voir, quelqu'un en qui il avait totalement confiance et qui l'aiderait pour la suite. Il se leva donc prestement et quitta la maison, la cuisine étant vide. Iberiel était arnachée comme le jour de son arrivée, plastron de cuir oblige et quelques sacs de provisions en plus. Ce fut la tenue d'Athos qui était la plus surprenante. Il avait troqué sa lourde robe grise par un ensemble plus léger et plus apte au voyage. Une longue chemise blanche, tombant jusqu'à l'arrière de ses chevilles et possédant une ouverture dès l'entre-jambe pour ne pas entraver la mobilité des jambes, recouvrait un pantalon d'un violacé sombre et des bottes de marche marrons. Une sorte d'armure de cérémonie violette et aux finitions dorées lui protégeait le centre du torse et descendait jusqu'aux genoux. Des épaulières de la même couleur maintenaient en place une cape d'une très belle facture, au tissu bleu et aux contours eux aussi dorés. Pour terminer le tout, une ceinture à boucle sur laquelle pendait des dizaines de sacoches de cuir, sa longue pipe de bois, et divers instruments de mesures, lui tenait fermement le bassin. Quand Itrenog arriva à leur niveau, le vieillard était en train serrer des pièces de cuir à ses poignets en grognant.
-Vous venez avec nous, nota-t-il sans une certaine appréhension.
Athos remua ses mains et passa une tiare d'acier pour maintenir les cheveux blancs qui lui tombait sur le visage :
-J'ai quelques affaires à régler avec les Elfes et je compte profiter du fait que vous vous y rendiez aussi pour venir avec vous. Il ne fait pas bon voyager seul ces temps-ci.
-Votre tenue va surement nous aider à passer inaperçu.
-Que voulez-vous, c'était la seule qui était encore en état. Et puis je dois bien me faire voir des oreilles pointues. Ce n'est pas tous les jours que je leur rends visite.
Itrenog se tourna vers Iberiel :
-Combien de temps nous faudra-t-il pour arriver ?
-Trois jours, peut-être quatre. Traverser la plaine sera surement le plus long mais une fois la frontière passée, nous n'aurons plus grand chose à craindre.
-Vous l'espérez du moins, railla Athos de bonne humeur, Allez, partons tant que nos jambes nous soutiennent encore. Il me tarde de voir du grand air.
Ils se dirigèrent donc vers la lisière du bosquet, laissant derrière eux le confort relatif de la maisonnée. Quelques pas parcourus entre les arbres, et l'habitation de l'ermite avait disparue, emportée par la verdure des lieux. Devant eux, on apercevait déjà les éclats du soleil entre les troncs et le feuillage et quand il furent sortis, ce furent de puissants rayons qui les accueillirent, les obligeant à plisser les paupières le temps qu'ils s'acclimatent à ce brusque changement de luminosité. L'immensité des plaines s'étendaient désormais à perte de vue, offrant un spectacle magnifique à celui qui savait passer outre sa superficie et sa monotonie. Le premier carré d'herbe foulé, Athos écarta largement les bras et soupira de contentement :
-Ah. Voilà. Quoi de mieux que la chaleur écrasante et assommante du soleil pour se remettre d'aplomb. Quand arrive-t-il ?
-Il ne devrait pas tarder, répondit Iberiel en s'asseyant.
Et ils attendirent en silence que celui qui devait les accompagner arriva. Pour tuer le temps, le vieil homme jouait à déterminer la forme des nuages quand ceux-ci n'étaient pas effilochés par les coups de vent capricieux des hauteurs, et sortait parfois un long tube de bois en le pointant vers le ciel avec des exclamations étouffées. Au loin, une forme indistincte pas plus grosse qu'une tête d'épingle venait dans leur direction. Il fallut attendre un certain temps pour se rendre compte de qui il s'agissait vraiment, mais à peine une heure plus tard, l'inconnu n'était éloigné de que d'un petit dixième de lieu et on pouvait sans peine entendre le claquement continu d'ustensiles en métal contre le flanc d'un cheval bai à son côté. Lorsqu'enfin tous deux furent arrivés, Itrenog fronça des sourcils, pensant que sa vue lui jouait des tours. Ce qu'il avait en face de lui avait tout du croisement parfait entre un Orc et un Nain. Haut de sept pieds et trapu comme un rocher, l'humain avait une épaisse barbe blonde ainsi que de longs cheveux de la même couleur. Dans son dos, deux haches proportionnelles à sa taille et une chopine qui devait pouvoir contenir une bonne quantité de boisson. Pour tout vêtement, il ne portait qu'une tunique avec de la fourrure, des bottes, et deux bracelets autour de ses poignets. Ses bras étaient nus, de même que le bas de ses cuisses et le haut de son tibia. L'équidé à son côté paraissait bien frêle et on comprenait aisément pourquoi son maître n'était pas sur son dos. Son immense carcasse aurait été capable de le faire s'effondrer sur place. A peine arrivé, et sans prendre le temps de se présenter, l'humain jeta sur Iberiel en lâchant la bride de son cheval, et la serra vigoureusement entre ses bras musclés :
-Madame ! Comme je suis heureux de vous voir ! J'aurais du rester près de vous pour vous protéger. Pardonnez le maladroit que je suis et ...
Il continua à se répandre en excuse, presque pris de sanglots, et à bénir ce jour de toutes les façons possibles et imaginables jusqu'à ce que la femme se détache de lui, quelque peu essoufflée :
-Heureuse de te voir aussi Dozla. Tu as été retardé ?
Le géant s'essuya les yeux rougis par l'émotion :
-Il a fallut que je prenne des provisions. Mais je n'aurais pas du... Lord Athos !
Suite à son calme relatif, ce fut la surprise qui peignit son visage de toutes ses nuances. Il se décala sur la droite et attrapa l'ermite par les épaules, les recouvrant presque entièrement de ses deux mains. Le spectacle était totalement décalé compte tenu de la différence de carrure qui séparait les deux hommes. On aurait dit que le vieillard était face à une montagne vivante et qu'il aurait fallut d'un rien pour le briser.
-Eh bien, pouffa Athos, je ne pensais pas que le temps allait autant vous affecter. Voyez-dans quel état vous êtes.
L'homme eut un rire bourru et porta son attention sur Itrenog qui état resté silencieux :
-Et vous êtes ?
-Un mercenaire, se précipita Iberiel, Il est là pour assurer ma protection.
Dozla s'approcha et lui serra la main avec un sourire amical. Itrenog nota alors qu'il ne pouvait voir à travers les illusions, ce qui le rassura plus que la promptitude qu'avait eue Iberiel à ne pas le laisser se présenter de lui-même. Elle avait surement ses raisons mais cela lui ne importait guère.
-Je pense que nous pouvons y aller à présent.
Ils commencèrent alors le voyage qui devait durer quelques jours et les mener chez les Elfes, là où Itrenog devrait les laisser pour faire ce qu'il avait prévu de faire. Le vent semblait se calmer au fur et à mesure que la journée avançait et quand le soleil commença à disparaître derrière la ligne de l'horizon, il n'y avait qu'une très légère brise. Un troupeau de Lorzi les suivi à bonne distance durant plusieurs minutes avec des hennissements sauvages avant de les dépasser au gallo et de disparaître dans les replis des vallées avoisinantes. La nuit tombée, le groupe établit un campement dans un petit creux entre deux pentes et Dozla déchargea plusieurs sacs de son cheval. Il prépara un feu et y installa une casserole remplie d'eau tandis qu'Athos fouillait les bâts à la recherche de nourriture. Ils préparèrent tous deux un bouillon de viande relevé aux épices et servirent quatre assiettes mais Itrenog refusa la sienne.
-Vous êtes malade ?, s'enquit Dozla en observant son interlocuteur avec un œil inquiet, Ou peut-être n'aimez-vous pas le sanglier ?
-Il ne mange pas beaucoup, répondit Athos à la place de l'intéressé, Je me charge de sa part.
Il planta sa cuillère de bois dans le plat et mangea la première bouchée avant d'enchaîner :
-Dites moi vieil ami, par où êtes-vous passé pour venir jusqu'ici ?
Un air sombre passa à travers la barbe du colosse.
-Par Carcosa. La ville a été réduite en cendre par un incendie la nuit où je l'ai quittée. Apparemment, l'origine serait accidentelle mais je n'y crois pas.
-Ah ?
-Les flammes se sont répandues très vite. C'était surnaturel. A chaque brassée d'eau que nous envoyions, un tapis de feu jaillissait et nous faisait battre en retraite. Avec les multiples foyers qu'il y avait, c'était un combat perdu d'avance.
Il baissa la tête et continua de manger en silence. Pour Itrenog, que Carcosa ait été brûlée rapidement était tout à fait normal. Les habitations de la ville étaient constituées pour la plupart de bois et de paille et la moindre étincelle pouvait aisément se transformer en brasier et passer d'une maison à l'autre sans problème.
-Je suis sûr que tu as fait tout ton possible pour les aider, le rassura Iberiel, Cesses donc de te torturer, tu ne peux pas être partout.
-Je sais madame, soupira-t-il sans conviction, Je sais.
Ils vidèrent leurs écuelles et prirent du fromage sur une bonne tranche de pain pour dessert. Alors qu'Athos recevait la sienne, le visage bouffit par un morceau de viande à peine avalé, il s'écria :
-Encore ? Mais vous avez prévu pour un régiment d'Orc entier ma parole !
Il accepta finalement avec un sourire entendu, termina avec difficulté et renonça même à fumer tellement il avait mal au ventre. Tandis qu'il préparait sa couche, Itrenog informa qu'il prenait les tours de garde, tant parce qu'il n'avait pas besoin de dormir qu'il voulait profiter du calme paisible de la nuit. Le lendemain, après un petit déjeuner aussi copieux que la veille pour les deux seuls qui mangèrent, la traversée des plaines continua. Il faisait nettement plus frais et cela alla en s'accentuant le reste du voyage. Même lorsqu'ils passèrent la frontière Elfe et qu'Iberiel se détendit enfin, la température ne monta pas plus haut que quelques degrés au dessus de celle nécessaire à la cristallisation de l'eau. Le troisième jour, un nuage noir les accompagna toute la matinée et quelques flocons tombèrent du ciel pour fondre immédiatement sur l'herbe du terrain.
-Ce n'est pas normal, commenta Dozla, les paysans ont à peine commencé à récolter les semences qu'il neige déjà.
-Le temps est très capricieux, s'amusa Athos en éloignant une poussière de son visage, Je me rappelle qu'il y a à peine quelques semaines, un épisode neigeux particulièrement intense à eu lieu au sud de Munduce. Le plus drôle, c'est que cela ne s'est cantonné qu'à une petite zone et que personne ne s'en est rendu compte.
Itrenog approuva en silence. Juste avant son arrivée à la grande ville humaine, il était passé par une steppe entièrement gelée tandis que deux démons l'avaient accosté. La seule chose qu'il avait pu remarquer, c'était qu'effectivement il n'y avait eu aucune perturbation dans les champs où étaient ramassés le blé et autres céréales. Droit devant eux, une couronne d'arbre était visible et les encercla quand ils s'avancèrent encore. Un redoux significatif balaya toute trace du froid en après-midi alors qu'ils atteignaient l'orée de la forêt et apaisa les tensions. Ils y étaient. Le Royaume des Elfes était à leurs pieds et venait de s'ouvrir à eux.
-Vous venez avec nous, nota-t-il sans une certaine appréhension.
Athos remua ses mains et passa une tiare d'acier pour maintenir les cheveux blancs qui lui tombait sur le visage :
-J'ai quelques affaires à régler avec les Elfes et je compte profiter du fait que vous vous y rendiez aussi pour venir avec vous. Il ne fait pas bon voyager seul ces temps-ci.
-Votre tenue va surement nous aider à passer inaperçu.
-Que voulez-vous, c'était la seule qui était encore en état. Et puis je dois bien me faire voir des oreilles pointues. Ce n'est pas tous les jours que je leur rends visite.
Itrenog se tourna vers Iberiel :
-Combien de temps nous faudra-t-il pour arriver ?
-Trois jours, peut-être quatre. Traverser la plaine sera surement le plus long mais une fois la frontière passée, nous n'aurons plus grand chose à craindre.
-Vous l'espérez du moins, railla Athos de bonne humeur, Allez, partons tant que nos jambes nous soutiennent encore. Il me tarde de voir du grand air.
Ils se dirigèrent donc vers la lisière du bosquet, laissant derrière eux le confort relatif de la maisonnée. Quelques pas parcourus entre les arbres, et l'habitation de l'ermite avait disparue, emportée par la verdure des lieux. Devant eux, on apercevait déjà les éclats du soleil entre les troncs et le feuillage et quand il furent sortis, ce furent de puissants rayons qui les accueillirent, les obligeant à plisser les paupières le temps qu'ils s'acclimatent à ce brusque changement de luminosité. L'immensité des plaines s'étendaient désormais à perte de vue, offrant un spectacle magnifique à celui qui savait passer outre sa superficie et sa monotonie. Le premier carré d'herbe foulé, Athos écarta largement les bras et soupira de contentement :
-Ah. Voilà. Quoi de mieux que la chaleur écrasante et assommante du soleil pour se remettre d'aplomb. Quand arrive-t-il ?
-Il ne devrait pas tarder, répondit Iberiel en s'asseyant.
Et ils attendirent en silence que celui qui devait les accompagner arriva. Pour tuer le temps, le vieil homme jouait à déterminer la forme des nuages quand ceux-ci n'étaient pas effilochés par les coups de vent capricieux des hauteurs, et sortait parfois un long tube de bois en le pointant vers le ciel avec des exclamations étouffées. Au loin, une forme indistincte pas plus grosse qu'une tête d'épingle venait dans leur direction. Il fallut attendre un certain temps pour se rendre compte de qui il s'agissait vraiment, mais à peine une heure plus tard, l'inconnu n'était éloigné de que d'un petit dixième de lieu et on pouvait sans peine entendre le claquement continu d'ustensiles en métal contre le flanc d'un cheval bai à son côté. Lorsqu'enfin tous deux furent arrivés, Itrenog fronça des sourcils, pensant que sa vue lui jouait des tours. Ce qu'il avait en face de lui avait tout du croisement parfait entre un Orc et un Nain. Haut de sept pieds et trapu comme un rocher, l'humain avait une épaisse barbe blonde ainsi que de longs cheveux de la même couleur. Dans son dos, deux haches proportionnelles à sa taille et une chopine qui devait pouvoir contenir une bonne quantité de boisson. Pour tout vêtement, il ne portait qu'une tunique avec de la fourrure, des bottes, et deux bracelets autour de ses poignets. Ses bras étaient nus, de même que le bas de ses cuisses et le haut de son tibia. L'équidé à son côté paraissait bien frêle et on comprenait aisément pourquoi son maître n'était pas sur son dos. Son immense carcasse aurait été capable de le faire s'effondrer sur place. A peine arrivé, et sans prendre le temps de se présenter, l'humain jeta sur Iberiel en lâchant la bride de son cheval, et la serra vigoureusement entre ses bras musclés :
-Madame ! Comme je suis heureux de vous voir ! J'aurais du rester près de vous pour vous protéger. Pardonnez le maladroit que je suis et ...
Il continua à se répandre en excuse, presque pris de sanglots, et à bénir ce jour de toutes les façons possibles et imaginables jusqu'à ce que la femme se détache de lui, quelque peu essoufflée :
-Heureuse de te voir aussi Dozla. Tu as été retardé ?
Le géant s'essuya les yeux rougis par l'émotion :
-Il a fallut que je prenne des provisions. Mais je n'aurais pas du... Lord Athos !
Suite à son calme relatif, ce fut la surprise qui peignit son visage de toutes ses nuances. Il se décala sur la droite et attrapa l'ermite par les épaules, les recouvrant presque entièrement de ses deux mains. Le spectacle était totalement décalé compte tenu de la différence de carrure qui séparait les deux hommes. On aurait dit que le vieillard était face à une montagne vivante et qu'il aurait fallut d'un rien pour le briser.
-Eh bien, pouffa Athos, je ne pensais pas que le temps allait autant vous affecter. Voyez-dans quel état vous êtes.
L'homme eut un rire bourru et porta son attention sur Itrenog qui état resté silencieux :
-Et vous êtes ?
-Un mercenaire, se précipita Iberiel, Il est là pour assurer ma protection.
Dozla s'approcha et lui serra la main avec un sourire amical. Itrenog nota alors qu'il ne pouvait voir à travers les illusions, ce qui le rassura plus que la promptitude qu'avait eue Iberiel à ne pas le laisser se présenter de lui-même. Elle avait surement ses raisons mais cela lui ne importait guère.
-Je pense que nous pouvons y aller à présent.
Ils commencèrent alors le voyage qui devait durer quelques jours et les mener chez les Elfes, là où Itrenog devrait les laisser pour faire ce qu'il avait prévu de faire. Le vent semblait se calmer au fur et à mesure que la journée avançait et quand le soleil commença à disparaître derrière la ligne de l'horizon, il n'y avait qu'une très légère brise. Un troupeau de Lorzi les suivi à bonne distance durant plusieurs minutes avec des hennissements sauvages avant de les dépasser au gallo et de disparaître dans les replis des vallées avoisinantes. La nuit tombée, le groupe établit un campement dans un petit creux entre deux pentes et Dozla déchargea plusieurs sacs de son cheval. Il prépara un feu et y installa une casserole remplie d'eau tandis qu'Athos fouillait les bâts à la recherche de nourriture. Ils préparèrent tous deux un bouillon de viande relevé aux épices et servirent quatre assiettes mais Itrenog refusa la sienne.
-Vous êtes malade ?, s'enquit Dozla en observant son interlocuteur avec un œil inquiet, Ou peut-être n'aimez-vous pas le sanglier ?
-Il ne mange pas beaucoup, répondit Athos à la place de l'intéressé, Je me charge de sa part.
Il planta sa cuillère de bois dans le plat et mangea la première bouchée avant d'enchaîner :
-Dites moi vieil ami, par où êtes-vous passé pour venir jusqu'ici ?
Un air sombre passa à travers la barbe du colosse.
-Par Carcosa. La ville a été réduite en cendre par un incendie la nuit où je l'ai quittée. Apparemment, l'origine serait accidentelle mais je n'y crois pas.
-Ah ?
-Les flammes se sont répandues très vite. C'était surnaturel. A chaque brassée d'eau que nous envoyions, un tapis de feu jaillissait et nous faisait battre en retraite. Avec les multiples foyers qu'il y avait, c'était un combat perdu d'avance.
Il baissa la tête et continua de manger en silence. Pour Itrenog, que Carcosa ait été brûlée rapidement était tout à fait normal. Les habitations de la ville étaient constituées pour la plupart de bois et de paille et la moindre étincelle pouvait aisément se transformer en brasier et passer d'une maison à l'autre sans problème.
-Je suis sûr que tu as fait tout ton possible pour les aider, le rassura Iberiel, Cesses donc de te torturer, tu ne peux pas être partout.
-Je sais madame, soupira-t-il sans conviction, Je sais.
Ils vidèrent leurs écuelles et prirent du fromage sur une bonne tranche de pain pour dessert. Alors qu'Athos recevait la sienne, le visage bouffit par un morceau de viande à peine avalé, il s'écria :
-Encore ? Mais vous avez prévu pour un régiment d'Orc entier ma parole !
Il accepta finalement avec un sourire entendu, termina avec difficulté et renonça même à fumer tellement il avait mal au ventre. Tandis qu'il préparait sa couche, Itrenog informa qu'il prenait les tours de garde, tant parce qu'il n'avait pas besoin de dormir qu'il voulait profiter du calme paisible de la nuit. Le lendemain, après un petit déjeuner aussi copieux que la veille pour les deux seuls qui mangèrent, la traversée des plaines continua. Il faisait nettement plus frais et cela alla en s'accentuant le reste du voyage. Même lorsqu'ils passèrent la frontière Elfe et qu'Iberiel se détendit enfin, la température ne monta pas plus haut que quelques degrés au dessus de celle nécessaire à la cristallisation de l'eau. Le troisième jour, un nuage noir les accompagna toute la matinée et quelques flocons tombèrent du ciel pour fondre immédiatement sur l'herbe du terrain.
-Ce n'est pas normal, commenta Dozla, les paysans ont à peine commencé à récolter les semences qu'il neige déjà.
-Le temps est très capricieux, s'amusa Athos en éloignant une poussière de son visage, Je me rappelle qu'il y a à peine quelques semaines, un épisode neigeux particulièrement intense à eu lieu au sud de Munduce. Le plus drôle, c'est que cela ne s'est cantonné qu'à une petite zone et que personne ne s'en est rendu compte.
Itrenog approuva en silence. Juste avant son arrivée à la grande ville humaine, il était passé par une steppe entièrement gelée tandis que deux démons l'avaient accosté. La seule chose qu'il avait pu remarquer, c'était qu'effectivement il n'y avait eu aucune perturbation dans les champs où étaient ramassés le blé et autres céréales. Droit devant eux, une couronne d'arbre était visible et les encercla quand ils s'avancèrent encore. Un redoux significatif balaya toute trace du froid en après-midi alors qu'ils atteignaient l'orée de la forêt et apaisa les tensions. Ils y étaient. Le Royaume des Elfes était à leurs pieds et venait de s'ouvrir à eux.
- Spoiler:
- Et voilà un vieux RP qui trainait dans les bas-fonds de mes documents. Récompense en argent svp.
- Spoiler:
- Premier RP de la semaine => Une pièce d'argent Auto-validé
- Validation:
- Edit Yuke: +4Pièces d'Argent
Dernière édition par Itrenog le Mar 29 Jan 2013 - 20:10, édité 2 fois
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Re: Une vie, un devoir ...
Itrenog perdit une nouvelle fois la notion de l'espace dans ce lieu empli de végétation. Il n'y avait que des arbres autour de lui, aux troncs longs, mais pas nécessairement larges, aux feuilles d'un vert soutenu et aux branchages épais. Des frênes, des saules, des chênes, qui ressemblaient à des géants aux racines tentaculaires s'enfonçant dans le sol à la recherche d'eau et de minéraux essentiels à leur survie, servaient de lieu de résidence à des rongeurs, des oiseaux et autres créatures vivant en ces lieux. On trouvait aussi énormément de petits arbres plus recourbés et secs, et des buissons qui tentaient de se faire une place parmi les colosses sans âges. Le sol était meuble, tapissé de mousse et chargé d'humidité, formant un humus fertile propice à l'épanouissement de la vie la plus simple. Parfois, de légers murmures s'élevaient entre les ombres et disparaissaient subitement quand on essayait de comprendre ce qu'elle disait. Les animaux n'avaient pas peur de s'aventurer autour d'eux et Athos s'émerveillait à chaque détour comme un enfant qui découvrait un nouveau jeu. Il courrait vers ses deux amis en leur présentant la forêt comme s'il désignait un vieil ami, et riait de bon cœur avec eux. Dozla lui rendait volontiers la pareille, accompagné par les hennissement de son cheval, et Iberiel s'autorisa un sourire face à l'enthousiasme du vieil homme. En approchant d'un frêne particulièrement imposant, il en mesura la circonférence à l'aide de ses bras et nota le résultat dans un de ses nombreux carnets avec un air satisfait.
-C'est intéressant ça, commenta-t-il à l'intention d'Iberiel, Si je ne m'abuse, les arbres ont cessé de pousser par ici.
-La magie des Elfes n'est pas assez forte pour leur permettre de se développer pleinement, répondit-elle, Attendez d'être arrivé et vous verrez.
Le vieil homme leva un doigt sentencieux :
-Non, non, non. C'est à cause de la configuration de la forêt elle-même. Les arbres occupent tellement d'espace qu'ils ne peuvent plus se développer en largeur. Trop entourés de d'autres arbres, ils ne poussent qu'en hauteur pour gagner le soleil. C'est une guerre fratricide à laquelle nous assistons.
-Comment ça ? , demanda Dozla en se baissant pour éviter une branche, Les arbres n'ont pas l'instinct de tuer, ça me parait évident.
-Observe bien, mon ami, et tu verras que les plus grands privent les plus petits de lumière. Sans que j'en comprenne les mécanismes, l'absence de soleil est fatal à une plante. De ce fait, ces arbres qui nous entourent tuent les autres pour vivre. La mort est la quintessence de la vie si je puis dire.
-Alors quoi ?, s'exclaffa le géant, Les arbres pensent à faire la guerre maintenant ?
-Oh je n'ai pas dit qu'ils étaient conscients de ce qu'ils faisaient. Néanmoins, c'est un constat basique. Plus grand tu es, mieux tu vivras, nous diraient-ils. Même si je doute que les nains approuvent cette vision des choses. La magie n'a rien à ...
Il s'arrêta de parler quand une flèche lui frôla la joue et se planta dans le sol avec un bruit sourd. Une mèche de ses cheveux blancs tomba à terre et une voix claire raisonna :
-Í badé ennas ?!
Iberiel s'avança et sembla s'adresser aux arbres :
-Ultwë ed Iberiel, Gëllor Athos, Dozla eùn mieldir e …
Elle hésita et se reprit rapidement :
-Itrenog eùn daüg.
Un bruissement dans l'air fut sa seule réponse. Dozla passa une main dans son dos, prêt à faire usage de la force si nécessaire. De derrière un tronc, un elfe se montra, pointant un arc courbe dans leur direction. Il portait une élégante tenue de cuir souple et une cape vert feuille qui ondulait comme un voile derrière lui. De longues mèches brunes encadraient un visage noble que les ans ne semblaient pas avoir affectés. Il ne relâcha toutefois sa vigilance que quand il fut sûr que ses yeux ne le trompèrent pas. Il baissa son arme et s'autorisa un sourire :
-Ultwë ed Iberiel. Gèliro' cendarath.
Il porta une main à son cœur et s'inclina :
-Tuíras padâm at rill Demeth ët Erä.
-Tuíras padâm at rill Demeth ët Erä, répéta à son tour Iberiel.
L'elfe s'approcha d'eux et posa ses mains sur les épaules de la femme sans cesser de la contempler. Ni l'un ni l'autre ne cillèrent et, d'un accord tacite, ils se mirent en route.
-Ils me paraissaient plus polis la dernière fois que je suis venu, grogna Athos en reprenant la marche.
Dozla pouffa silencieusement et le suivit, accompagné par Itrenog. Les deux compagnons de tête restèrent aussi silencieux que s'ils avaient été muets. L'elfe les entraina sans prendre le temps de savoir s'il était bien suivi, et la lumière se fit de moins en moins présente au fur et à mesure de leur avancée. Les arbres de plus en plus nombreux semblaient s'ériger en véritable muraille vivante pour leur barrer le passage, mais rien ne fit ralentir leur guide. Ils débouchèrent enfin sur une très vaste zone dépourvue d'arbre et un choc sourd leur indiqua qu'il venait d'activer des protections invisibles. Comme si on enlevait un voile devant leurs yeux, une élégante arche de bois se dessinait entre les branches de deux hêtres séculaires et laissa apparaître une véritable ville :
-Moerlanev, présenta l'elfe en les laissant passer.
Des troncs se découpaient des maisons taillées à même le bois, flanquées de colonne majestueuses qui se perdaient dans les hauteurs, des escaliers sans fin zigzaguaient au dessus de leurs têtes, empruntés par des Elfes aux allures princières dans des atours à faire pâlir les plus riches marchands humains et d'immenses salles aux voutes stylisées par des arabesques mystérieuses étaient présentes un peu partout, à même le sol où présentes à des endroits où la pesanteur ne semblait pas avoir de prise sur elles. Les constructions étaient en parfaite harmonie avec la nature et il était difficile, voire impossible, de savoir où commençait les unes et ou s'arrêtait l'autre. Quelques passants les regardèrent mais aucun ne leur adressa la parole, trop occupé à leurs activités respectives. Une douce mélopée emplissait l'air et un parfum agréable de fleur en éclosion éveillait les sens des visiteurs. C'était un endroit où il faisait bon vivre, loin de toutes les agitations qui pesaient sur le monde extérieur. Mais ces apparences étaient trompeuses, car sur les visages fins des Elfes, on pouvait lire une profonde lassitude et parfois, une tristesse qui ne connaissait pas d'âge. Alors que le groupe s'engageait tout juste sur un parterre d'herbe fraîche, une femme portant une lourde cape blanche trainant sur le sol se planta devant eux, accompagnés par deux gardes. Ses yeux noirs les fixaient avec une intensité croissante et ses sourcils arqués ne suffisait pas à cacher la surprise de son regard. Une natte sombre lui tombait sur les épaules, donnant un caractère particulier à son visage anguleux. Elle s'approcha et, à la manière du guide qui les avait mené ici, prit Iberiel par les épaules :
-Tuíras padâm at rill Demeth ët Erä, Ultwë ed Iberiel.
-Tuíras padâm at rill Demeth ed Erä, Ilmarë.
La femme porta alors son attention sur le reste du groupe et son expression se durcit l'espace d'un instant, sans que rien n'en pâtisse sur le ton accueillant de sa voix.
-Sinnarn cuin Athos. Cela fait bien longtemps que je ne vous avais vu. Vos choix vous ont-ils finalement rattrapés ?
Le vieil homme se fendit en une révérence exagérée pour répondre :
-Je crains qu'il ne s'agisse pas de la raison de notre venue, Dame Ilmarë. Savez-vous quel jour sommes-nous ?
La dame Elfe releva le menton et éluda la question en parlant à Dozla :
-Vous revoir me fait chaud au cœur Dozla. Nous avons beaucoup compté sur vous pour protéger Iberiel.
-Et j'en suis ravi ! J'espère que les années vous on fait revoir votre jugement, Dame Elfe.
L'Elfe frémit. Visiblement, les deux hommes faisaient référence à la même chose sans oser l'énoncer à voix haute. Itrenog fut le dernier à subir son inspection. Sans ciller, il soutint son regard jusqu'à ce qu'elle reprenne la parole :
-Serill m'a annoncé que des démons rôdaient proche de Carcosa. Peut-être en avez-vous rencontrés ?
Même si la question était posée à tous, elle visait très clairement Itrenog. Ce dernier n'en fut nullement surpris. Comment aurait-il pu se soustraire aux Feuilles Souples avec ses faibles illusions ?
-Carcosa ? S'exclama Dozla, Serait-il possible que …
-Paix, tempéra Ilmarë qui avait saisit l'allusion, J'ai envoyé quelques mages pour étudier les lieux, mais il semblerait que le feu soit d'origine accidentelle.
-Sauf votre respect, ce feu n'avait rien de naturel. Il semblait guidé par quelques funestes magies et la présence de démons dans les parages ne plaide pas en la faveur d'un simple accident.
-Nous verrons …
La femme porta de nouveau son attention sur Iberiel et échangea avec elle quelques mots dans leur langue natale.
-La cérémonie aura très surement lieu ce soir, annonça-t-elle, mais pour l'heure, vous êtes nos invités. Nous nous chargeons des préparatifs et nous discuterons ensuite des détails … pratiques.
Toutes deux s'en furent sans un bruit. Elles entrèrent dans un vaste porche et disparurent à travers la pénombre des lieux
-Que signifie tout ceci ?, demanda Dozla inquiet.
-Que les Elfes sont et resteront maîtres dans l'art de prendre un minimum de décision en un maximum de temps. Mais nous pouvons nous en féliciter car sans ça, nous serions très probablement des pelotes d'épingles à l'heure qu'il est.
Le colosse secoua ses épaules massives pour chasser l'engourdissement qui se répandait dans ses muscles et bailla à s'en décrocher la mâchoire.
-Eh bien puisque nous sommes toujours vivants, je pense que je vais aller manger et roupiller un peu. Il va falloir être en forme pour ce soir.
Il salua brièvement les deux homes et suivit un garde, qui attendait visiblement que les invités se soient décidés, avant de se perdre dans les méandres de la végétation luxuriante de la ville elfique. Un autre saisit la bride du cheval et l'emmena à son tour dans une de leurs écuries pour s'en occuper. Athos s'approcha alors d'Itrenog qui n'avait pas pipé mot et le fixa de ses yeux blancs :
-Alors ? Qu'allez-vous faire maintenant qu'Iberiel est arrivée à destination ? Repartir en silence ?
-Je l'ignore.
Le vieillard sourit comme s'il s'attendait à cette réponse. Il était vrai qu'Itrenog aurait pu repartir dès l'instant où ils étaient entrés dans la forêt. Son «contrat», était terminé et en temps normal, il se serait éclipsé. Mais il y avait autre chose. Une sensation dérangeante depuis qu'il avait hésité à tuer Iberiel la nuit de l'attaque. Il ne se l'expliquait pas, mais cela le travaillait trop pour être occulté. Athos lui tapa doucement dans les cotes pour le ramener à la réalité.
-Allez, venez. D'ici à ce que vous trouviez la réponse, je vous conseille de rester. Si vous êtes un peu curieux, ce qui va suivre devrait vous intéresser au plus au point.
-C'est intéressant ça, commenta-t-il à l'intention d'Iberiel, Si je ne m'abuse, les arbres ont cessé de pousser par ici.
-La magie des Elfes n'est pas assez forte pour leur permettre de se développer pleinement, répondit-elle, Attendez d'être arrivé et vous verrez.
Le vieil homme leva un doigt sentencieux :
-Non, non, non. C'est à cause de la configuration de la forêt elle-même. Les arbres occupent tellement d'espace qu'ils ne peuvent plus se développer en largeur. Trop entourés de d'autres arbres, ils ne poussent qu'en hauteur pour gagner le soleil. C'est une guerre fratricide à laquelle nous assistons.
-Comment ça ? , demanda Dozla en se baissant pour éviter une branche, Les arbres n'ont pas l'instinct de tuer, ça me parait évident.
-Observe bien, mon ami, et tu verras que les plus grands privent les plus petits de lumière. Sans que j'en comprenne les mécanismes, l'absence de soleil est fatal à une plante. De ce fait, ces arbres qui nous entourent tuent les autres pour vivre. La mort est la quintessence de la vie si je puis dire.
-Alors quoi ?, s'exclaffa le géant, Les arbres pensent à faire la guerre maintenant ?
-Oh je n'ai pas dit qu'ils étaient conscients de ce qu'ils faisaient. Néanmoins, c'est un constat basique. Plus grand tu es, mieux tu vivras, nous diraient-ils. Même si je doute que les nains approuvent cette vision des choses. La magie n'a rien à ...
Il s'arrêta de parler quand une flèche lui frôla la joue et se planta dans le sol avec un bruit sourd. Une mèche de ses cheveux blancs tomba à terre et une voix claire raisonna :
-Í badé ennas ?!
Iberiel s'avança et sembla s'adresser aux arbres :
-Ultwë ed Iberiel, Gëllor Athos, Dozla eùn mieldir e …
Elle hésita et se reprit rapidement :
-Itrenog eùn daüg.
Un bruissement dans l'air fut sa seule réponse. Dozla passa une main dans son dos, prêt à faire usage de la force si nécessaire. De derrière un tronc, un elfe se montra, pointant un arc courbe dans leur direction. Il portait une élégante tenue de cuir souple et une cape vert feuille qui ondulait comme un voile derrière lui. De longues mèches brunes encadraient un visage noble que les ans ne semblaient pas avoir affectés. Il ne relâcha toutefois sa vigilance que quand il fut sûr que ses yeux ne le trompèrent pas. Il baissa son arme et s'autorisa un sourire :
-Ultwë ed Iberiel. Gèliro' cendarath.
Il porta une main à son cœur et s'inclina :
-Tuíras padâm at rill Demeth ët Erä.
-Tuíras padâm at rill Demeth ët Erä, répéta à son tour Iberiel.
L'elfe s'approcha d'eux et posa ses mains sur les épaules de la femme sans cesser de la contempler. Ni l'un ni l'autre ne cillèrent et, d'un accord tacite, ils se mirent en route.
-Ils me paraissaient plus polis la dernière fois que je suis venu, grogna Athos en reprenant la marche.
Dozla pouffa silencieusement et le suivit, accompagné par Itrenog. Les deux compagnons de tête restèrent aussi silencieux que s'ils avaient été muets. L'elfe les entraina sans prendre le temps de savoir s'il était bien suivi, et la lumière se fit de moins en moins présente au fur et à mesure de leur avancée. Les arbres de plus en plus nombreux semblaient s'ériger en véritable muraille vivante pour leur barrer le passage, mais rien ne fit ralentir leur guide. Ils débouchèrent enfin sur une très vaste zone dépourvue d'arbre et un choc sourd leur indiqua qu'il venait d'activer des protections invisibles. Comme si on enlevait un voile devant leurs yeux, une élégante arche de bois se dessinait entre les branches de deux hêtres séculaires et laissa apparaître une véritable ville :
-Moerlanev, présenta l'elfe en les laissant passer.
Des troncs se découpaient des maisons taillées à même le bois, flanquées de colonne majestueuses qui se perdaient dans les hauteurs, des escaliers sans fin zigzaguaient au dessus de leurs têtes, empruntés par des Elfes aux allures princières dans des atours à faire pâlir les plus riches marchands humains et d'immenses salles aux voutes stylisées par des arabesques mystérieuses étaient présentes un peu partout, à même le sol où présentes à des endroits où la pesanteur ne semblait pas avoir de prise sur elles. Les constructions étaient en parfaite harmonie avec la nature et il était difficile, voire impossible, de savoir où commençait les unes et ou s'arrêtait l'autre. Quelques passants les regardèrent mais aucun ne leur adressa la parole, trop occupé à leurs activités respectives. Une douce mélopée emplissait l'air et un parfum agréable de fleur en éclosion éveillait les sens des visiteurs. C'était un endroit où il faisait bon vivre, loin de toutes les agitations qui pesaient sur le monde extérieur. Mais ces apparences étaient trompeuses, car sur les visages fins des Elfes, on pouvait lire une profonde lassitude et parfois, une tristesse qui ne connaissait pas d'âge. Alors que le groupe s'engageait tout juste sur un parterre d'herbe fraîche, une femme portant une lourde cape blanche trainant sur le sol se planta devant eux, accompagnés par deux gardes. Ses yeux noirs les fixaient avec une intensité croissante et ses sourcils arqués ne suffisait pas à cacher la surprise de son regard. Une natte sombre lui tombait sur les épaules, donnant un caractère particulier à son visage anguleux. Elle s'approcha et, à la manière du guide qui les avait mené ici, prit Iberiel par les épaules :
-Tuíras padâm at rill Demeth ët Erä, Ultwë ed Iberiel.
-Tuíras padâm at rill Demeth ed Erä, Ilmarë.
La femme porta alors son attention sur le reste du groupe et son expression se durcit l'espace d'un instant, sans que rien n'en pâtisse sur le ton accueillant de sa voix.
-Sinnarn cuin Athos. Cela fait bien longtemps que je ne vous avais vu. Vos choix vous ont-ils finalement rattrapés ?
Le vieil homme se fendit en une révérence exagérée pour répondre :
-Je crains qu'il ne s'agisse pas de la raison de notre venue, Dame Ilmarë. Savez-vous quel jour sommes-nous ?
La dame Elfe releva le menton et éluda la question en parlant à Dozla :
-Vous revoir me fait chaud au cœur Dozla. Nous avons beaucoup compté sur vous pour protéger Iberiel.
-Et j'en suis ravi ! J'espère que les années vous on fait revoir votre jugement, Dame Elfe.
L'Elfe frémit. Visiblement, les deux hommes faisaient référence à la même chose sans oser l'énoncer à voix haute. Itrenog fut le dernier à subir son inspection. Sans ciller, il soutint son regard jusqu'à ce qu'elle reprenne la parole :
-Serill m'a annoncé que des démons rôdaient proche de Carcosa. Peut-être en avez-vous rencontrés ?
Même si la question était posée à tous, elle visait très clairement Itrenog. Ce dernier n'en fut nullement surpris. Comment aurait-il pu se soustraire aux Feuilles Souples avec ses faibles illusions ?
-Carcosa ? S'exclama Dozla, Serait-il possible que …
-Paix, tempéra Ilmarë qui avait saisit l'allusion, J'ai envoyé quelques mages pour étudier les lieux, mais il semblerait que le feu soit d'origine accidentelle.
-Sauf votre respect, ce feu n'avait rien de naturel. Il semblait guidé par quelques funestes magies et la présence de démons dans les parages ne plaide pas en la faveur d'un simple accident.
-Nous verrons …
La femme porta de nouveau son attention sur Iberiel et échangea avec elle quelques mots dans leur langue natale.
-La cérémonie aura très surement lieu ce soir, annonça-t-elle, mais pour l'heure, vous êtes nos invités. Nous nous chargeons des préparatifs et nous discuterons ensuite des détails … pratiques.
Toutes deux s'en furent sans un bruit. Elles entrèrent dans un vaste porche et disparurent à travers la pénombre des lieux
-Que signifie tout ceci ?, demanda Dozla inquiet.
-Que les Elfes sont et resteront maîtres dans l'art de prendre un minimum de décision en un maximum de temps. Mais nous pouvons nous en féliciter car sans ça, nous serions très probablement des pelotes d'épingles à l'heure qu'il est.
Le colosse secoua ses épaules massives pour chasser l'engourdissement qui se répandait dans ses muscles et bailla à s'en décrocher la mâchoire.
-Eh bien puisque nous sommes toujours vivants, je pense que je vais aller manger et roupiller un peu. Il va falloir être en forme pour ce soir.
Il salua brièvement les deux homes et suivit un garde, qui attendait visiblement que les invités se soient décidés, avant de se perdre dans les méandres de la végétation luxuriante de la ville elfique. Un autre saisit la bride du cheval et l'emmena à son tour dans une de leurs écuries pour s'en occuper. Athos s'approcha alors d'Itrenog qui n'avait pas pipé mot et le fixa de ses yeux blancs :
-Alors ? Qu'allez-vous faire maintenant qu'Iberiel est arrivée à destination ? Repartir en silence ?
-Je l'ignore.
Le vieillard sourit comme s'il s'attendait à cette réponse. Il était vrai qu'Itrenog aurait pu repartir dès l'instant où ils étaient entrés dans la forêt. Son «contrat», était terminé et en temps normal, il se serait éclipsé. Mais il y avait autre chose. Une sensation dérangeante depuis qu'il avait hésité à tuer Iberiel la nuit de l'attaque. Il ne se l'expliquait pas, mais cela le travaillait trop pour être occulté. Athos lui tapa doucement dans les cotes pour le ramener à la réalité.
-Allez, venez. D'ici à ce que vous trouviez la réponse, je vous conseille de rester. Si vous êtes un peu curieux, ce qui va suivre devrait vous intéresser au plus au point.
- Spoiler:
- Comment j'me la pète avec mes phrases en pot de yaourt. Même que la trad', ben c'est pas pour maintenant tellement j'suis dark side. Et pis comment j'en ... je dis crotte au reglèment. Mais j'm'en fous, ma maman a dit que je peux. Donc, phase 2, begin et phase 3, loaded. J'entends déjà mes oreilles siffler et la terre trembler, mais c'est pas rave, j'suis un fou. Ah et première piècette pour le premier rp de la semaine. Auto-validé.
- Spoiler:
- Validation en ... le truc qu'il me reste à remplir, svp
- validation:
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Re: Une vie, un devoir ...
L'agitation d'abord à peine perceptible commença à gagner en intensité. La forêt sembla sortir d'un long sommeil et ses habitants s'éveiller avec elle. Tous les Elfes, des plus vieux aux plus jeunes, allaient et venaient dans une apparente confusion qui ne laissait rien supposer de l'avancée des préparatifs. Car depuis l'arrivée d'Iberiel, tous n'avaient qu'un seul mot à la bouche : «Merethäl». Itrenog avait pu le traduire approximativement en «Cérémonie». Assis sur un siège élégant taillé à même une souche de bouleau, il observait ce va-et-vient incessant avec la profonde certitude qu'il n'avait pas sa place ici. Si certains Elfes se contentaient de l'ignorer, d'autres lui jetaient des regards peu amènes avec parfois des murmures étouffés échangés au détour d'une table dressée pour l'occasion. Il y en avait aussi qui ne participaient pas à cette activité. Pour la plupart plus anciens que leurs homologues, ils restaient stoïquement penchés sur une balustrade sans esquisser le moindre geste. Ils restaient minoritaires mais au milieu des autres, leur immobilisme était aussi visible que l'aurait été un phare en pleine nuit.
Alors qu'Itrenog suivait du regard un énième passant, il avisa sur sa droite qu'Athos approchait avec un nombre assez conséquent de tubes de verre empli d'une substance laiteuse et miroitante. Nul besoin d'être devin pour savoir de quoi il s'agissait. Le vieil homme esquiva maladroitement une branche noueuse à terre, lâcha une flopée de jurons colorés, et posa son chargement aux pieds d'Itrenog.
-Voilà qui devrait faire l'affaire, affirma-t-il en se redressant fièrement, Avec ça, plus de problèmes pour un bon moment. Non, non, ne me remerciez pas, c'est moi qui offre.
-Je n'ai pas besoin de vos potions.
-Vraiment ? Moi qui pensait rendre service ...
-En quel honneur ?
-Vous devenez blessant, là. Depuis quand a-t-on besoin d'une raison pour aider autrui ?
Face au silence de son interlocuteur, Athos plissa les yeux :
-Bon, d'accord. Je me suis dit que vous auriez peut-être besoin d'un petit remontant après tout ce temps sans vous nourrir. Considérez ça comme votre paiement pour avoir escorté Iberiel jusqu'ici sans encombres. Enfin presque sans encombres.
Itrenog ne sut comment réagir. La récompense n'avait pas été sa motivation principale, seulement s'éloigner de Munduce à cause de ce qu'il s'était passé dans les Grandes Plaines. Au final, cela n'avait pas été d'un grand secours, mais pour l'heure, il était en sécurité. Athos s'avança en sortant sa pipe de sa ceinture, la fourra de tabac, et l'alluma d'une simple pression du doigt. Assis à côté d'Itrenog, il inspira plusieurs bouffées avant de lui tendre son instrument :
-Un petit coup ?
-Non.
-Allez. Vous verrez, c'est fou comme ça fait du bien. Moi en tout cas, ça m'aide à réfléchir.
-Vous avez besoin d'un objet pour réfléchir ? Je comprends maintenant.
-Très aimable à vous.
Il approcha d'avantage la main et Itrenog, face à une telle insistance, finit par céder. Peut-être aurait-il la paix ensuite.
-On inspire bien jusqu'au bout surtout, conseilla Athos en levant un doigt, Et pas de gâchis. Vous ne crachez pas tout sans avoir pris le temps de savourer.
Itrenog porta le bec jusqu'à sa bouche et aspira une quantité d'air relativement importante. La fumée lui parut froide et étonnement lourde. Il ne sentit rien dans un premier temps, mais les cinq premières secondes passées, il se détendit considérablement. C'était comme si on venait de lui ôter des poids invisibles sur les jambes et sur les bras. Il aurait pu s'élancer à travers la forêt entière simplement pour tester jusqu'où sa légèreté pouvait aller. Ensuite, une boule de froid se nicha dans le creux de son ventre. La fumée sembla s'enrouler sur elle même et se répandre doucement dans tous ses membres, sans que cela ne fut désagréable. Ses muscles semblèrent se délier progressivement de leur attache et s'enfoncer dans le sol. Une sorte de transe légère et grisante. Enfin, pris d'une surprenante lucidité, il se surprit à démêler sans effort les variables qu'il peinait à percevoir auparavant. Tout s'imbriqua naturellement dans un ordre logique, son esprit occupé à trier les informations avec une redoutable efficacité. La boule de froid se disloqua alors lentement, ses sens lui revinrent, et sa torpeur le quitta tandis qu'Itrenog soufflait le contenu de ses poumons pour revenir à une réalité qui lui parut encore plus froide et plus austère si c'était possible.
-C'était bien, pas vrai ? Demanda Athos qui avait repris sa pipe, Imaginez, moi, qui fait ça tout le temps. J'ai trouvé cette plante ici même, à Moerlanev. Je l'ai appelé Aleg'Moerlanev. La «Paresse de Moerlanev» en l'honneur des forestiers trop fainéants pour se pencher et cueillir ce don de la nature. Original je trouve, pour de l'elfique.
Il pouffa à sa propre boutade et soupira d'aise. Itrenog croyait avoir tenu la réponse à sa question il y avait quelques instants et maintenant, plus rien. Un vide qui remplaçait une quasi-certitude. Il avait approché du but, mais s'était aussi senti vulnérable, comme si son esprit avait échappé à son contrôle l'espace de quelques secondes. C'était une expérience particulière qu'il n'était pas prêt de retenter.
-Bien, reprit Athos, maintenant que nous sommes entre hommes, que diriez-vous de parler un peu de vous ?
-Je croyais que vous me connaissiez déjà.
-Vous faites référence à notre conversation chez moi, c'est ça ? Ce que je voulais dire, c'est que je le connaissais lui. Pas vous, vous, mais vous, lui, vous saisissez ? Faire la différence entre vous deux est relativement délicat, je l'avoue.
-Et je suppose que cela n'a rien avoir avec votre connaissance sur les démons.
-Ah, ça. Eh bien mon savoir dans ce domaine se limite malheureusement à ce que les livres peuvent me fournir. Imiter une substance ressemblant à ce que vous ingurgitez en est un exemple et bon sang, c'est surement une des rares choses sur laquelle je peux me targuer de …
Il releva lentement la tête, les yeux pétillants :
-Eh ! Mais vous êtes en train de détourner la conversation ! Vous ne m'aurez pas à ce petit jeu là, mon petit.
Itrenog soupira. Plus la conversation avançait, et plus il regrettait de ne pas être déjà parti. Athos se creusa d'avantage les joues en tirant sur sa pipe et dit avec un sourire :
-En fait, si je suis curieux, c'est votre faute. Vous faites beaucoup trop de mystères et ça m'intrigue.
-Je suis un démon. Quel mystère y a-t-il à cela ?
Le vieil homme observa un temps les environs comme s'il craignait que quelqu'un les eu entendu et baissa le ton :
-Vous devriez le crier encore plus fort. Je crois qu'ils n'ont pas bien compris.
-Ce sont des Elfes. Ils savent déjà.
Athos fourragea dans sa barbe et répondit :
-Soit. Vous êtes un démon. Alors pourquoi diable fuyez-vous les membres de votre propre espèce ?
-Pour survivre, quelle question.
-Bigre ! Vos réponses sont d'un précis.
Itrenog ne poursuivit pas. Il n'avait nulle envie de conter ce qu'il lui était arrivé en Inferës simplement pour satisfaire une curiosité infantile. Au lieu de cela, il se leva avec l'intention de faire un tour pour se changer les idées.
-Où est votre ami ?,demanda-t-il.
-Qui donc ? Dozla ?
-Oui.
-Surement quelque part entre ici …
Il pointa une direction vague sur sa droite et balaya la forêt de son bras avant de s'arrêter en face d'un arbre quelconque :
-... Et là. Sincèrement, je n'en ai aucune fichue idée. Faites un tour vers les quartiers des invités et si vous entendez ronfler, c'est que vous y êtes. Pourquoi ? Il y a un problème ?
Itrenog éluda la question en se dirigeant vers ce qui semblait être là où les non-elfes résidaient. S'il y avait bien une chose qui devait pouvoir l'aiguiller sur ce qu'il devait faire par la suite, c'était bien ce qu'il avait en tête. Athos ne chercha pas à le rattraper. Et d'ailleurs, peu lui importait. A travers les quelques rayons de soleil qui peinaient à traverser le feuillage épais des arbres, il se faufila entre les elfes occupés aux préparatifs et suivit la direction que le géant blond avait prise avant lui. Il ne lui fallut pas longtemps pour le retrouver tant il distinguait clairement le son typique de la respiration bruyante des humains. Dozla était couché à même le sol moussu d'une élégante cabane de bois et ne semblait pas l'avoir entendu. Itrenog lui tapota l'épaule du bout de ses bottes. Pas de réponse. Il s'y reprit une fois, puis deux, avant que l'homme ne décide enfin d'ouvrir les yeux.
-Qu'est-ce que c'est … , parvint-il à grogner en étouffant un bâillement, L'heure de la cérémonie ?
-Suivez-moi, répondit simplement Itrenog.
Il s'apprêta à sortir et ajouta :
-Avec vos armes.
Sans laisser le temps à son interlocuteur de réagir, il quitta la pièce et se plaça à une distance raisonnable de la maison. Il délimita rapidement un cercle du regard et attendit. L'ambiance était calme malgré l'agitation que provoquaient les allés et venues des Elfes. Un vent léger qui s'insinuait entre les branches, un temps agréable et propice à la méditation, complètement à l'opposé de ce qu'il allait advenir d'ici quelques instants. Dozla sortit enfin, les yeux ensommeillés et le pas lourd. Ses deux haches trainaient par terre en laissant un léger sillon derrière elles, mais il parvint à les redresser à une hauteur plus raisonnable.
-Que voulez-vous, mercenaire ?, Demanda-t-il en se plaçant devant Itrenog, Pourrais-je savoir à quoi rime tout ceci ?
-Je veux savoir si vous êtes fiable.
-Fiable ?, Répéta Dozla de plus en plus déboussolé.
-Fiable, oui. Je veux m'assurer que vous méritez bien votre place auprès d'Iberiel. En garde.
-Quoi ? Attendez une minute. J'ai peur ne pas vous suivre. Que voulez-vous dire par là ?
Itrenog soupira mais se résolut à patienter avant de passer à la suite. C'était toujours ainsi avec les autres races. En particulier les humains.
-Vous prétendez être une sorte de gardien pour Iberiel, mais rien ne me prouve que vous en êtes digne.
-Vous … voulez une preuve ? Et qui êtes vous pour demander une telle chose ? Qui vous dit que je n'ai pas déjà mérité ma place auprès de Madame ?
-Rien. Et je ne suis effectivement personne pour vous demander une telle chose. Mais il n'est pas seulement question de moi ou de vous, mais aussi et surtout de sa survie à elle. En garde. Je ne le répéterais pas.
-Vous plaisantez …
Itrenog plia les jambes et bondit sur Dozla. Lorsque le géant leva ses haches pour se défendre, il attrapa le manche de l'une d'elle et posa sa main gauche sur la garde de son épée.
-Est-ce que j'ai l'air de plaisanter ?
La menace était claire, et Dozla dut réagir. Il passa à l'attaque à l'aide de sa seconde arme en visant l'angle mort de son opposant pour le forcer à se dégager. Avec un cri sauvage, il chargea, toute fatigue envolée. Un merle noir lança une trille aigüe avant de s'envoler à tire d'aile, et le combat débuta.
Alors qu'Itrenog suivait du regard un énième passant, il avisa sur sa droite qu'Athos approchait avec un nombre assez conséquent de tubes de verre empli d'une substance laiteuse et miroitante. Nul besoin d'être devin pour savoir de quoi il s'agissait. Le vieil homme esquiva maladroitement une branche noueuse à terre, lâcha une flopée de jurons colorés, et posa son chargement aux pieds d'Itrenog.
-Voilà qui devrait faire l'affaire, affirma-t-il en se redressant fièrement, Avec ça, plus de problèmes pour un bon moment. Non, non, ne me remerciez pas, c'est moi qui offre.
-Je n'ai pas besoin de vos potions.
-Vraiment ? Moi qui pensait rendre service ...
-En quel honneur ?
-Vous devenez blessant, là. Depuis quand a-t-on besoin d'une raison pour aider autrui ?
Face au silence de son interlocuteur, Athos plissa les yeux :
-Bon, d'accord. Je me suis dit que vous auriez peut-être besoin d'un petit remontant après tout ce temps sans vous nourrir. Considérez ça comme votre paiement pour avoir escorté Iberiel jusqu'ici sans encombres. Enfin presque sans encombres.
Itrenog ne sut comment réagir. La récompense n'avait pas été sa motivation principale, seulement s'éloigner de Munduce à cause de ce qu'il s'était passé dans les Grandes Plaines. Au final, cela n'avait pas été d'un grand secours, mais pour l'heure, il était en sécurité. Athos s'avança en sortant sa pipe de sa ceinture, la fourra de tabac, et l'alluma d'une simple pression du doigt. Assis à côté d'Itrenog, il inspira plusieurs bouffées avant de lui tendre son instrument :
-Un petit coup ?
-Non.
-Allez. Vous verrez, c'est fou comme ça fait du bien. Moi en tout cas, ça m'aide à réfléchir.
-Vous avez besoin d'un objet pour réfléchir ? Je comprends maintenant.
-Très aimable à vous.
Il approcha d'avantage la main et Itrenog, face à une telle insistance, finit par céder. Peut-être aurait-il la paix ensuite.
-On inspire bien jusqu'au bout surtout, conseilla Athos en levant un doigt, Et pas de gâchis. Vous ne crachez pas tout sans avoir pris le temps de savourer.
Itrenog porta le bec jusqu'à sa bouche et aspira une quantité d'air relativement importante. La fumée lui parut froide et étonnement lourde. Il ne sentit rien dans un premier temps, mais les cinq premières secondes passées, il se détendit considérablement. C'était comme si on venait de lui ôter des poids invisibles sur les jambes et sur les bras. Il aurait pu s'élancer à travers la forêt entière simplement pour tester jusqu'où sa légèreté pouvait aller. Ensuite, une boule de froid se nicha dans le creux de son ventre. La fumée sembla s'enrouler sur elle même et se répandre doucement dans tous ses membres, sans que cela ne fut désagréable. Ses muscles semblèrent se délier progressivement de leur attache et s'enfoncer dans le sol. Une sorte de transe légère et grisante. Enfin, pris d'une surprenante lucidité, il se surprit à démêler sans effort les variables qu'il peinait à percevoir auparavant. Tout s'imbriqua naturellement dans un ordre logique, son esprit occupé à trier les informations avec une redoutable efficacité. La boule de froid se disloqua alors lentement, ses sens lui revinrent, et sa torpeur le quitta tandis qu'Itrenog soufflait le contenu de ses poumons pour revenir à une réalité qui lui parut encore plus froide et plus austère si c'était possible.
-C'était bien, pas vrai ? Demanda Athos qui avait repris sa pipe, Imaginez, moi, qui fait ça tout le temps. J'ai trouvé cette plante ici même, à Moerlanev. Je l'ai appelé Aleg'Moerlanev. La «Paresse de Moerlanev» en l'honneur des forestiers trop fainéants pour se pencher et cueillir ce don de la nature. Original je trouve, pour de l'elfique.
Il pouffa à sa propre boutade et soupira d'aise. Itrenog croyait avoir tenu la réponse à sa question il y avait quelques instants et maintenant, plus rien. Un vide qui remplaçait une quasi-certitude. Il avait approché du but, mais s'était aussi senti vulnérable, comme si son esprit avait échappé à son contrôle l'espace de quelques secondes. C'était une expérience particulière qu'il n'était pas prêt de retenter.
-Bien, reprit Athos, maintenant que nous sommes entre hommes, que diriez-vous de parler un peu de vous ?
-Je croyais que vous me connaissiez déjà.
-Vous faites référence à notre conversation chez moi, c'est ça ? Ce que je voulais dire, c'est que je le connaissais lui. Pas vous, vous, mais vous, lui, vous saisissez ? Faire la différence entre vous deux est relativement délicat, je l'avoue.
-Et je suppose que cela n'a rien avoir avec votre connaissance sur les démons.
-Ah, ça. Eh bien mon savoir dans ce domaine se limite malheureusement à ce que les livres peuvent me fournir. Imiter une substance ressemblant à ce que vous ingurgitez en est un exemple et bon sang, c'est surement une des rares choses sur laquelle je peux me targuer de …
Il releva lentement la tête, les yeux pétillants :
-Eh ! Mais vous êtes en train de détourner la conversation ! Vous ne m'aurez pas à ce petit jeu là, mon petit.
Itrenog soupira. Plus la conversation avançait, et plus il regrettait de ne pas être déjà parti. Athos se creusa d'avantage les joues en tirant sur sa pipe et dit avec un sourire :
-En fait, si je suis curieux, c'est votre faute. Vous faites beaucoup trop de mystères et ça m'intrigue.
-Je suis un démon. Quel mystère y a-t-il à cela ?
Le vieil homme observa un temps les environs comme s'il craignait que quelqu'un les eu entendu et baissa le ton :
-Vous devriez le crier encore plus fort. Je crois qu'ils n'ont pas bien compris.
-Ce sont des Elfes. Ils savent déjà.
Athos fourragea dans sa barbe et répondit :
-Soit. Vous êtes un démon. Alors pourquoi diable fuyez-vous les membres de votre propre espèce ?
-Pour survivre, quelle question.
-Bigre ! Vos réponses sont d'un précis.
Itrenog ne poursuivit pas. Il n'avait nulle envie de conter ce qu'il lui était arrivé en Inferës simplement pour satisfaire une curiosité infantile. Au lieu de cela, il se leva avec l'intention de faire un tour pour se changer les idées.
-Où est votre ami ?,demanda-t-il.
-Qui donc ? Dozla ?
-Oui.
-Surement quelque part entre ici …
Il pointa une direction vague sur sa droite et balaya la forêt de son bras avant de s'arrêter en face d'un arbre quelconque :
-... Et là. Sincèrement, je n'en ai aucune fichue idée. Faites un tour vers les quartiers des invités et si vous entendez ronfler, c'est que vous y êtes. Pourquoi ? Il y a un problème ?
Itrenog éluda la question en se dirigeant vers ce qui semblait être là où les non-elfes résidaient. S'il y avait bien une chose qui devait pouvoir l'aiguiller sur ce qu'il devait faire par la suite, c'était bien ce qu'il avait en tête. Athos ne chercha pas à le rattraper. Et d'ailleurs, peu lui importait. A travers les quelques rayons de soleil qui peinaient à traverser le feuillage épais des arbres, il se faufila entre les elfes occupés aux préparatifs et suivit la direction que le géant blond avait prise avant lui. Il ne lui fallut pas longtemps pour le retrouver tant il distinguait clairement le son typique de la respiration bruyante des humains. Dozla était couché à même le sol moussu d'une élégante cabane de bois et ne semblait pas l'avoir entendu. Itrenog lui tapota l'épaule du bout de ses bottes. Pas de réponse. Il s'y reprit une fois, puis deux, avant que l'homme ne décide enfin d'ouvrir les yeux.
-Qu'est-ce que c'est … , parvint-il à grogner en étouffant un bâillement, L'heure de la cérémonie ?
-Suivez-moi, répondit simplement Itrenog.
Il s'apprêta à sortir et ajouta :
-Avec vos armes.
Sans laisser le temps à son interlocuteur de réagir, il quitta la pièce et se plaça à une distance raisonnable de la maison. Il délimita rapidement un cercle du regard et attendit. L'ambiance était calme malgré l'agitation que provoquaient les allés et venues des Elfes. Un vent léger qui s'insinuait entre les branches, un temps agréable et propice à la méditation, complètement à l'opposé de ce qu'il allait advenir d'ici quelques instants. Dozla sortit enfin, les yeux ensommeillés et le pas lourd. Ses deux haches trainaient par terre en laissant un léger sillon derrière elles, mais il parvint à les redresser à une hauteur plus raisonnable.
-Que voulez-vous, mercenaire ?, Demanda-t-il en se plaçant devant Itrenog, Pourrais-je savoir à quoi rime tout ceci ?
-Je veux savoir si vous êtes fiable.
-Fiable ?, Répéta Dozla de plus en plus déboussolé.
-Fiable, oui. Je veux m'assurer que vous méritez bien votre place auprès d'Iberiel. En garde.
-Quoi ? Attendez une minute. J'ai peur ne pas vous suivre. Que voulez-vous dire par là ?
Itrenog soupira mais se résolut à patienter avant de passer à la suite. C'était toujours ainsi avec les autres races. En particulier les humains.
-Vous prétendez être une sorte de gardien pour Iberiel, mais rien ne me prouve que vous en êtes digne.
-Vous … voulez une preuve ? Et qui êtes vous pour demander une telle chose ? Qui vous dit que je n'ai pas déjà mérité ma place auprès de Madame ?
-Rien. Et je ne suis effectivement personne pour vous demander une telle chose. Mais il n'est pas seulement question de moi ou de vous, mais aussi et surtout de sa survie à elle. En garde. Je ne le répéterais pas.
-Vous plaisantez …
Itrenog plia les jambes et bondit sur Dozla. Lorsque le géant leva ses haches pour se défendre, il attrapa le manche de l'une d'elle et posa sa main gauche sur la garde de son épée.
-Est-ce que j'ai l'air de plaisanter ?
La menace était claire, et Dozla dut réagir. Il passa à l'attaque à l'aide de sa seconde arme en visant l'angle mort de son opposant pour le forcer à se dégager. Avec un cri sauvage, il chargea, toute fatigue envolée. Un merle noir lança une trille aigüe avant de s'envoler à tire d'aile, et le combat débuta.
- Spoiler:
- Validation en Concentration + 1 PA pour le premier RP de la semaine Auto-validé pour la pièce
Dernière édition par Itrenog le Jeu 16 Juin 2011 - 14:44, édité 1 fois
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Re: Une vie, un devoir ...
Une garde argentée et un moignon de lame trainaient dans l'herbe, à quelques pas de reste éparses d'une épée de grande qualité, seuls restes de l'arme dont c'était servi Itrenog pour se battre. Il avait été contraint de «l'emprunter» à un elfe qui passait par là afin de parer une attaque particulièrement sauvage de Dozla. La cacophonie avait été à ce point intense que des soldats armés de lances étaient arrivés en moins d'une minute, croyant à une attaque d'une quelconque nature. Et même une fois rassurés, ils ne se privèrent pas de tenter d'intervenir pour séparer les deux opposants. Peine perdue. Le duel s'arrêta lorsque que le colosse blond avait infligé une blessure à son adversaire un peu au dessus de son épaule droite. Elle était peu profonde et sans gravité, mais suffisante pour qu'Itrenog la juge suffisante et arrête le combat, d'autant que certains elfes plus hardis que d'autres étaient en passe de s'interposer physiquement. Il était donc assis au sol, à presser du poing contre sa plaie pour éviter toute échappée de son aura néfaste. Dozla à côté de lui, allongé pour reprendre son souffle, n'avait pas encore dit un mot. Trempé de sueur, il contemplait le ciel à travers les feuilles d'un regard distrait, en essayant d'oublier les courbatures qui se profilaient déjà dans ses membres. Après quelques secondes d'un silence gênant, il se releva lentement et se maintint sur son coude.
-Où avez-vous appris à vous battre comme ça, mercenaire ?
-Chez les nains.
-Vraiment ?
Itrenog approuva d'un bref hochement de tête.
-Eh bien. Je suppose qu'ils seraient fiers de vous avoir vu réduire en bouillie une épée elfique. Ce n'est pas tout le monde qui peut se vanter d'un tel exploit.
-Cela n'a rien d'un exploit. Les armes elfiques ne sont pas des armes de guerre, ce sont des jouets pour enfant. Pour vos enfants, du moins.
-J'en connais qui ne seraient pas tout à fait d'accord, pouffa Dozla en se redressant totalement.
-Leur avis ne changera pas la vérité.
Nouveau silence. Les observateurs du combat restaient aux aguets, prêts à user de la magie si jamais un nouveau déchainement de violence venait à avoir lieu, mais à une distance respectable. Au moins deux de leurs coutumes venaient d'être bafouées, mais ils ne pouvaient se résoudre à intervenir sans l'aval de leurs supérieurs.
-En tout cas c'était une bien belle joute, soupira Dozla en épongeant une goutte sur sa tempe, Voilà bien longtemps que je n'avais pas eu autant mal aux bras. Il faudra remettre ça, un jour. Mais dans un cadre plus … propice, dirons-nous.
Itrenog se leva silencieusement, suivi du regard par les sentinelles.
-Vous êtes un bon combattant, dit-il, Humain certes, mais bon tout de même.
-Je ne sais pas si je dois le prendre comme un compliment, l'ami.
-Tâchez simplement de remplir votre rôle auprès d'Iberiel. Vous verrez par la suite si vous méritez un compliment ou non.
L'humain lui sourit à travers sa barbe hirsute :
-Et vous aviez vraiment besoin de mettre une telle pagaille pour cela ? Une simple question aurait suffi.
-Des paroles vides de sens. Seuls les actes comptent.
Il le salua d'un bref signe de la main et le laissa reprendre ses forces. Seul l'avenir lui dirait s'il avait eu tort ou non de laisser Iberiel entre ses mains. Il revint donc sur ses pas, là où il avait laissé Athos quelques instants auparavant. Les elfes relâchèrent leur vigilance et retournèrent s'occuper des préparatifs. Le vieillard, quant à lui, était toujours assis sur une souche d'arbre, jouant à dessiner des arabesques plus ou moins réussies avec sa pipe, et se balançait lentement d'avant en arrière en rigolant niaisement. Itrenog arriva à son niveau et l'interrompit :
-J'aurais besoin que vous me soigniez.
-Oh, Itrenog ! Quelle bonne surprise ! Je croyais que les Sylvains vous avaient enlevé pour vous transformer en petit lutin des bois. C'est qu'ils sont fourbes, ces elfes.
Le vieil homme semblait dans une sorte d'état second. Ses réponses étaient lentes et à peine compréhensibles, comme s'il mâchait chacun de ses mots avant de les sortir de sa bouche. Difficile toutefois de dire si c'était la conséquence des herbes qu'il fumait ou un simple délire passager qu'il pouvait avoir.
-Alors, reprit-il un tantinet plus sérieux, Qu'est-ce qu'il vous amène par ici ? Une soudaine envie de se purifier les poumons ?
-Nous sommes arrivés ensemble, vieil homme.
-Ah bon, vraiment ? Ah, oui. Je me souviens maintenant. Avec … Iba … Iberiel. Une très jolie dame si vous voulez mon avis. Vous devriez tenter votre chance, elle semble bien vous apprécier.
Irenog soupira. Discuter avec Athos en temps normal était déjà suffisamment ardu pour qu'il dût en plus tenter de le ramener à la réalité.
-Pouvez-vous me soigner ? Répéta-t-il.
-Est-ce qu'un nain peut se noyer dans une flaque d'eau ? Allons, approchez un peu.
Itrenog s'exécuta et osa enlever sa main qui empêchait une perte de sang trop importante.
-On ne voit rien dans cette forêt, grogna Athos, Vous ne voulez pas m'ôter tous ces vêtements que je travaille convenablement ?
-Seulement si vous garantissez que personne ne sentira d'aura.
Le vieillard effectua un geste évasif de la main et bougonna pour signifier que tout était bon. Itrenog ôta donc son manteau et sa chemise. Même si les elfes pouvaient savoir qu'il était démon d'un simple regard, mieux valait pour lui que personne ne le remarque plus que nécessaire. Sa plaie à l'épaule n'était pas ce qu'il vit en premier lieu. Longue d'à peine quatre pouces, c'était une simple égratignure en comparaison avec d'autres blessures qu'on lui avait infligé. En revanche, la peau grisâtre qui lui mangeait le bras et qui s'était étendue jusqu'à la base de son cou n'augurait rien de bon. C'était la première fois qu'elle avait atteint une telle surface en si peu de temps. Qu'est-ce qui avait provoqué une telle réaction ? Athos se leva et posa son index dessus. Une fine pellicule de poussière s'en détacha et se perdit dans les courants d'air balayant la forêt.
-Oh la jolie poudre !
Sans prévenir, il fourra son doigt dans sa bouche et remua exagérément la tête comme un gouteur aurait pu le faire.
-Mmh. Ce n'est pas très goutu. Il faut croire que cette partie est morte.
-Expliquez-vous, exigea calmement Itrenog.
-Eh bien, je crois que ça manque d'épices pour rehausser le tout. Ou peut-être d'une spécialité locale qui s'appelle ... le bra ... le bro ... Ah, la barbe. Un trou de mémoire en pleine élaboration d'une recette !
Il secoua sa tête de dépit et souffla bruyamment sur sa main
-En tout cas, cette partie est bien morte. Détruite, non vivante, partie, disparue, ce que vous voulez. Le tissu est complètement nécrosé. Et apparemment, ça gagne du terrain. Cela fait longtemps que votre bras s'enfuit à toute jambe ?
Et il se prit la tête entre les mains, pris d'un incontrôlable fou rire. Rouge comme une pivoine et les larmes aux yeux, il parvint tout de même à se contrôler malgré que ses épaules fussent toujours prises de spasmes nerveux.
-Je ne sais pas, put enfin répondre Itrenog, Les taches noires sont apparues très récemment.
-Depuis que vous avez rencontré Iberiel, non ?
-C'est … possible. Quel rapport ?
-Aucun pour l'instant, sourit Athos, Je vais y travailler. Ça à l'air bigrement intéressant. Si je trouve du nouveau, vous en serez le premier informé. Mais avant, je dois chasser ces maudits papillons qui me gâchent la vue.
Il se rassit paresseusement sur l'herbe et recommença à rire tout seul. Itrenog resta coi un moment. Il n'avait pas fait le rapprochement, et peut-être n'était-ce qu'une coïncidence, mais cette peau était apparue la nuit de l'attaque contre le convoi dans les Grandes Plaines. Si elle continuait à s'étendre et qu'il s'agissait bien d'une destruction des tissus, alors il devait réagir. Il n'était pas encore prêt à mourir. Pas sans se battre.
-Vous ne pourrez pas me faire parvenir quoique ce soit, informa-t-il abruptement, Je pars.
-Oh … Pourtant ils ont de l'alcool, je crois. Vous croyez que les Elfes boivent ? Et qu'ils deviennent soûl ? Ce pourrait être drôle de résoudre ce mystère ensemble.
-C'est inutile. Iberiel a besoin d'être protégée, et Dozla est capable d'assurer ce rôle. J'ai fait ce que j'avais à faire, je n'ai donc plus aucune raison de m'attarder ici.
-Croyez-moi, elle est tout à fait capable de se défendre seule.
-J'en doute.
Athos paraissait sincèrement déçu mais si ce fut vraiment le cas, il n'en fit pas mention.
-Et pour ma blessure ?
-Disparue comme la barbe des Elfes … Ou comme la courtoisie des Petits Gens de la montagne.
Et en effet, la plaie était refermée. Itrenog n'avait ressenti aucune variation magique, mais le résultat était bien là, sous ses yeux. Sans en faire plus de cas, il se rhabilla prestement, ramassa plusieurs tubes préparés par le vieil ermite et les fourra dans une sacoche prévue à cet effet autour de sa ceinture.
-Je vous souhaite un bon voyage, donc, s'esclaffa Athos en écartant théâtralement les bras, Et puissent les vents pousser vos pieds dans la … euh … les marées vous être … quelque chose comme dans les arbres … Oh laissez tomber. Restez en vie, ce sera déjà bien. Et n'oubliez pas de revenir après votre "mission super secrète", vous le lui avez promis !
Il lui adressa un clin d'œil radieux, convaincu que son interlocuteur avait saisi l'allusion. Encore une bouffée délirante. Itrenog soupira et se tourna vers l'entrée de Moerlanev d'où il était arrivé en laissant le vieil homme à sa transe. Un frisson lui parcouru l'échine. Sa décision était prise et désormais il ne reviendrait pas en arrière. Son épaule le lança un instant, le faisant se crisper. Le temps jouait contre lui, mais si tout allait pour le mieux, le simple fait de s'éloigner d'Iberiel serait le gage de sa survie. Dans le cas contraire, le seul recours qu'il aurait serait de revenir à ses origines. Il n'aurait pas le choix. Un itinéraire se dessinait déjà dans son esprit. Il allait avoir besoin d'un moyen de transport. Un transport sûr et rapide.
-Où avez-vous appris à vous battre comme ça, mercenaire ?
-Chez les nains.
-Vraiment ?
Itrenog approuva d'un bref hochement de tête.
-Eh bien. Je suppose qu'ils seraient fiers de vous avoir vu réduire en bouillie une épée elfique. Ce n'est pas tout le monde qui peut se vanter d'un tel exploit.
-Cela n'a rien d'un exploit. Les armes elfiques ne sont pas des armes de guerre, ce sont des jouets pour enfant. Pour vos enfants, du moins.
-J'en connais qui ne seraient pas tout à fait d'accord, pouffa Dozla en se redressant totalement.
-Leur avis ne changera pas la vérité.
Nouveau silence. Les observateurs du combat restaient aux aguets, prêts à user de la magie si jamais un nouveau déchainement de violence venait à avoir lieu, mais à une distance respectable. Au moins deux de leurs coutumes venaient d'être bafouées, mais ils ne pouvaient se résoudre à intervenir sans l'aval de leurs supérieurs.
-En tout cas c'était une bien belle joute, soupira Dozla en épongeant une goutte sur sa tempe, Voilà bien longtemps que je n'avais pas eu autant mal aux bras. Il faudra remettre ça, un jour. Mais dans un cadre plus … propice, dirons-nous.
Itrenog se leva silencieusement, suivi du regard par les sentinelles.
-Vous êtes un bon combattant, dit-il, Humain certes, mais bon tout de même.
-Je ne sais pas si je dois le prendre comme un compliment, l'ami.
-Tâchez simplement de remplir votre rôle auprès d'Iberiel. Vous verrez par la suite si vous méritez un compliment ou non.
L'humain lui sourit à travers sa barbe hirsute :
-Et vous aviez vraiment besoin de mettre une telle pagaille pour cela ? Une simple question aurait suffi.
-Des paroles vides de sens. Seuls les actes comptent.
Il le salua d'un bref signe de la main et le laissa reprendre ses forces. Seul l'avenir lui dirait s'il avait eu tort ou non de laisser Iberiel entre ses mains. Il revint donc sur ses pas, là où il avait laissé Athos quelques instants auparavant. Les elfes relâchèrent leur vigilance et retournèrent s'occuper des préparatifs. Le vieillard, quant à lui, était toujours assis sur une souche d'arbre, jouant à dessiner des arabesques plus ou moins réussies avec sa pipe, et se balançait lentement d'avant en arrière en rigolant niaisement. Itrenog arriva à son niveau et l'interrompit :
-J'aurais besoin que vous me soigniez.
-Oh, Itrenog ! Quelle bonne surprise ! Je croyais que les Sylvains vous avaient enlevé pour vous transformer en petit lutin des bois. C'est qu'ils sont fourbes, ces elfes.
Le vieil homme semblait dans une sorte d'état second. Ses réponses étaient lentes et à peine compréhensibles, comme s'il mâchait chacun de ses mots avant de les sortir de sa bouche. Difficile toutefois de dire si c'était la conséquence des herbes qu'il fumait ou un simple délire passager qu'il pouvait avoir.
-Alors, reprit-il un tantinet plus sérieux, Qu'est-ce qu'il vous amène par ici ? Une soudaine envie de se purifier les poumons ?
-Nous sommes arrivés ensemble, vieil homme.
-Ah bon, vraiment ? Ah, oui. Je me souviens maintenant. Avec … Iba … Iberiel. Une très jolie dame si vous voulez mon avis. Vous devriez tenter votre chance, elle semble bien vous apprécier.
Irenog soupira. Discuter avec Athos en temps normal était déjà suffisamment ardu pour qu'il dût en plus tenter de le ramener à la réalité.
-Pouvez-vous me soigner ? Répéta-t-il.
-Est-ce qu'un nain peut se noyer dans une flaque d'eau ? Allons, approchez un peu.
Itrenog s'exécuta et osa enlever sa main qui empêchait une perte de sang trop importante.
-On ne voit rien dans cette forêt, grogna Athos, Vous ne voulez pas m'ôter tous ces vêtements que je travaille convenablement ?
-Seulement si vous garantissez que personne ne sentira d'aura.
Le vieillard effectua un geste évasif de la main et bougonna pour signifier que tout était bon. Itrenog ôta donc son manteau et sa chemise. Même si les elfes pouvaient savoir qu'il était démon d'un simple regard, mieux valait pour lui que personne ne le remarque plus que nécessaire. Sa plaie à l'épaule n'était pas ce qu'il vit en premier lieu. Longue d'à peine quatre pouces, c'était une simple égratignure en comparaison avec d'autres blessures qu'on lui avait infligé. En revanche, la peau grisâtre qui lui mangeait le bras et qui s'était étendue jusqu'à la base de son cou n'augurait rien de bon. C'était la première fois qu'elle avait atteint une telle surface en si peu de temps. Qu'est-ce qui avait provoqué une telle réaction ? Athos se leva et posa son index dessus. Une fine pellicule de poussière s'en détacha et se perdit dans les courants d'air balayant la forêt.
-Oh la jolie poudre !
Sans prévenir, il fourra son doigt dans sa bouche et remua exagérément la tête comme un gouteur aurait pu le faire.
-Mmh. Ce n'est pas très goutu. Il faut croire que cette partie est morte.
-Expliquez-vous, exigea calmement Itrenog.
-Eh bien, je crois que ça manque d'épices pour rehausser le tout. Ou peut-être d'une spécialité locale qui s'appelle ... le bra ... le bro ... Ah, la barbe. Un trou de mémoire en pleine élaboration d'une recette !
Il secoua sa tête de dépit et souffla bruyamment sur sa main
-En tout cas, cette partie est bien morte. Détruite, non vivante, partie, disparue, ce que vous voulez. Le tissu est complètement nécrosé. Et apparemment, ça gagne du terrain. Cela fait longtemps que votre bras s'enfuit à toute jambe ?
Et il se prit la tête entre les mains, pris d'un incontrôlable fou rire. Rouge comme une pivoine et les larmes aux yeux, il parvint tout de même à se contrôler malgré que ses épaules fussent toujours prises de spasmes nerveux.
-Je ne sais pas, put enfin répondre Itrenog, Les taches noires sont apparues très récemment.
-Depuis que vous avez rencontré Iberiel, non ?
-C'est … possible. Quel rapport ?
-Aucun pour l'instant, sourit Athos, Je vais y travailler. Ça à l'air bigrement intéressant. Si je trouve du nouveau, vous en serez le premier informé. Mais avant, je dois chasser ces maudits papillons qui me gâchent la vue.
Il se rassit paresseusement sur l'herbe et recommença à rire tout seul. Itrenog resta coi un moment. Il n'avait pas fait le rapprochement, et peut-être n'était-ce qu'une coïncidence, mais cette peau était apparue la nuit de l'attaque contre le convoi dans les Grandes Plaines. Si elle continuait à s'étendre et qu'il s'agissait bien d'une destruction des tissus, alors il devait réagir. Il n'était pas encore prêt à mourir. Pas sans se battre.
-Vous ne pourrez pas me faire parvenir quoique ce soit, informa-t-il abruptement, Je pars.
-Oh … Pourtant ils ont de l'alcool, je crois. Vous croyez que les Elfes boivent ? Et qu'ils deviennent soûl ? Ce pourrait être drôle de résoudre ce mystère ensemble.
-C'est inutile. Iberiel a besoin d'être protégée, et Dozla est capable d'assurer ce rôle. J'ai fait ce que j'avais à faire, je n'ai donc plus aucune raison de m'attarder ici.
-Croyez-moi, elle est tout à fait capable de se défendre seule.
-J'en doute.
Athos paraissait sincèrement déçu mais si ce fut vraiment le cas, il n'en fit pas mention.
-Et pour ma blessure ?
-Disparue comme la barbe des Elfes … Ou comme la courtoisie des Petits Gens de la montagne.
Et en effet, la plaie était refermée. Itrenog n'avait ressenti aucune variation magique, mais le résultat était bien là, sous ses yeux. Sans en faire plus de cas, il se rhabilla prestement, ramassa plusieurs tubes préparés par le vieil ermite et les fourra dans une sacoche prévue à cet effet autour de sa ceinture.
-Je vous souhaite un bon voyage, donc, s'esclaffa Athos en écartant théâtralement les bras, Et puissent les vents pousser vos pieds dans la … euh … les marées vous être … quelque chose comme dans les arbres … Oh laissez tomber. Restez en vie, ce sera déjà bien. Et n'oubliez pas de revenir après votre "mission super secrète", vous le lui avez promis !
Il lui adressa un clin d'œil radieux, convaincu que son interlocuteur avait saisi l'allusion. Encore une bouffée délirante. Itrenog soupira et se tourna vers l'entrée de Moerlanev d'où il était arrivé en laissant le vieil homme à sa transe. Un frisson lui parcouru l'échine. Sa décision était prise et désormais il ne reviendrait pas en arrière. Son épaule le lança un instant, le faisant se crisper. Le temps jouait contre lui, mais si tout allait pour le mieux, le simple fait de s'éloigner d'Iberiel serait le gage de sa survie. Dans le cas contraire, le seul recours qu'il aurait serait de revenir à ses origines. Il n'aurait pas le choix. Un itinéraire se dessinait déjà dans son esprit. Il allait avoir besoin d'un moyen de transport. Un transport sûr et rapide.
- Spoiler:
- Merci à toi muse inspiratrice et adios Itrenog ! Bon voyage ! Heureux de t'avoir connu ! See you, toussa, toussa ! Je me valide la pièce tousseul (Fait) et je demande la valid' en concentration, évidemment.
Itrenog- Age : 31
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Re: Une vie, un devoir ...
Cadon se triturait nerveusement le bouc qu'il arborait fièrement en réfléchissant à toute vitesse. Les choses n'évoluaient pas comme il l'espérait. Le nouveau commandant des Faucons Blancs l'avait envoyé ici pour négocier leur prochaine action avec leur «partenaire» et il avait accepté. Une décision qui, pensait-il, aurait pu l'emmener plus loin que son simple grade de lieutenant. Certains le traitait d'arriviste, mais lui se voyait plutôt comme un homme qui savait saisir les opportunités qu'on lui présentait. Aujourd'hui cependant, il voyait les choses sous un tout autre angle. Plus la conversation avançait, et plus il avait l'impression d'avoir été roulé dans la farine. Il s'était rendu dans une vieille étable à l'abandon, non loin d'un village pittoresque des grandes plaines, avec une garnison de douze hommes. Compte tenu de la relative faible taille de l'organisation, il s'agissait là d'un nombre non négligeable et il convenait d'éviter au possible une réaction armée.
A son arrivée, il avait d'abord pensé qu'on lui enverrait une véritable procession de commerçants bouffis d'orgueil, mais il revit très vite sa position. Il n'y avait dans cette grange qu'un orc et un homme encapuchonné. Enfin, c'est ce que Cadon croyait. Car l'inconnu masqué n'avait pas prononcé un seul mot. Tout juste son compagnon l'avait-il présenté d'un grognement presque indistinct : Shär. Un nom à vous hérisser les poils de la nuque. Ils s'étaient donc retrouvés, autour d'une simple table ronde en chêne, à discuter sur les termes de leur association. Mais les choses n'évoluaient pas convenablement. Elles n'évoluaient pas du tout en fait. Ni l'un ni l'autre des partis n'étaient satisfaits des propositions faites et pourtant, personne ne faisait en sorte d'améliorer la situation. N'étant qu'un simple représentant, Cadon se contentait simplement de faire passer un message, pas de le modifier. Il ne pouvait pas se le permettre. Quant à ses interlocuteurs, ils ne semblaient pas plus disposer à changer la donne.
-Si je récapitule, souffla une énième fois Cadon, vous souhaitez de nouveau que des démons viennent joindre nos rangs et en échange, vous nous offrez une caisse de lyrium. C'est bien ça ?
-Ce n'est pas nous qui le souhaitons, grogna l'orc répondant au nom d'Ûrlz, C'est le souhait du Pshlâm.
Cadon soupira encore. Il ignorait tout du dialecte que cette brute épaisse employait, mais il avait pu déduire succinctement que Pshlâm était une sorte d'appellation pour leur chef ou quelqu'un de plus haut placé dans leur hiérarchie, si hiérarchie il y avait.
-Oui, oui. Donc votre … Pshlâm nous a fait cette proposition. Vous comprendrez aisément que nous ne pouvons pas accepter. Nous avons déjà fait appel aux services des démons et cela a eu des conséquences néfastes. Non content de n'apporter aucun résultats et d'attirer inutilement l'attention sur nous, ils se sont retourné contre nos hommes et les ont massacré par «simple plaisir».
-Nous savons déjà cela, humain.
-Dans ce cas, orc, il coule de source que réitérer une telle erreur irait à l'encontre des intérêts des Faucons Blancs. Je suis sûr que même vous, pouvez saisir ce concept.
Ûrlz releva la lèvre supérieur, révélant ses dents acérés, mais fut interrompu par son compagnon. Celui ci avait à peine tourné la tête vers lui, mais la réaction fut suffisante. Cadon se passa une main sur le visage en espérant y chasser la migraine qui le guettait.
-D'après ce que nous savons, dit l'orc en portant de nouveau son attention sur lui, votre promesse de nous apporter votre soutien tient encore.
-C'était il y a de cela cinquante ans, répliqua Cadon sur la défensive, Et depuis, nous avons changé de commandant. Il ne voit pas du même œil notre association avec votre … Pshlâm, et souhaite simplement que vous récupériez vos démons pour nous laisser plus de latitude.
-Sans le Pshlâm, vous ne seriez qu'une vermine qui ramperait pour se nourrir des restes de la table des Grands. Vous nous devez votre allégeance, pas la négocier. A moins que les Moana n'aient aucun honneur ?
-Il n'est pas question d'honneur !, rugit le lieutenant en perdant son sang-froid, Votre chef, ou je-ne-sais-quoi, exige beaucoup trop de nous ! Il ne se contente pas d'une simple alliance, il nous extorque ! Il nous envoie ses bêtes des profondeurs pour nous «aider» à accomplir une promesse dont personne n'a jamais entendue parler ! Sans compter que nombre de nos hommes ignorent à qui ils ont à faire et pourquoi ils doivent se sacrifier en vain. C'est une chose que nous ne pouvons plus tolérer !
Les soldats qui guettaient la réunion passèrent discrètement une main sur leurs arcs. La tension n'avait pas été aussi forte depuis le début des négociations et les choses pouvaient très rapidement dégénérer. Mieux valait se tenir prêt à intervenir. Ûrlz ne réagit pas violemment. Au contraire, il s'apaisa. Il se massa le bout de son front et répondit avec un calme surprenant.
-Soit, humain. Cinq caisses de lyrium.
Une goutte de sueur perla sur le front de Cadon. Il regarda derrière l'orc. Les caisses étaient là, remplie de fioles contenant une substance bleue, comme si elles attendaient qu'il s'en empare. Il les avait bien vu en arrivant, mais aurait juré qu'il n'y en avait eu qu'une seule. Cela représentait toutefois une somme d'argent colossale sur le marché noir. Suffisante pour engager de nouveaux hommes et s'étendre. Mais les ordres étaient clairs. Il ne pouvait pas accepter. Que faire dans une telle situation ? Le commandant lui avait recommandé le bluff si jamais les choses tournaient mal. Chose que Cadon s'empressa d'essayer avec un grand sourire confiant.
-C'est inutile. Nous avons trouvé un filon il y a peu. Toutes les caisses que vous pourrez nous offrir ne seront jamais suffisantes pour égaler le réseau que nous avons découvert.
-Tu mens. Tout le lyrium de Geadrâs est épuisé depuis plus de dix mille ans. Il est impossible que vous ayez découvert le moindre filon.
-Vous n'avez aucune preuve de cela. Peut-être votre … Pshlâm n'est-il pas aussi fiable que vous le prétendez ?
L'orc perdit soudainement toute retenue et se leva d'un bond, renversant la table et Cadon par la même occasion. Les gardes bandèrent leurs arcs et visèrent dans sa direction. Le lieutenant des Faucons Blancs se releva avec peine, encore sous le choc, mais se reprit rapidement :
-Je ne crois pas que vous êtes en mesure de menacer qui que ce soit, orc. Voyez par vous-même. Vous êtes encerclés. Reconsidérez la chose. Un simple retrait de vos démons et tout le monde repart vivant.
-Si nous mourons ici, le Pshlâm viendra lui-même.
Sur cette simple idée, Cadon frémit. Si tel était le cas, il pouvait dire adieu à sa promotion, voire à sa vie. Les choses ne se présentaient pas bien du tout. Pourquoi ne pouvait-il pas tout simplement accepter ? Les choses seraient tellement plus simples. En y réfléchissant, il pouvait accepter. Ou faire croire que tel était le cas. Son esprit tortueux passa en revue le rapide plan d'action qu'il avait mis en place en cas de coup dur. Il avait juste à donner le signal, et les hommes qu'il avait corrompu attaqueraient. Ensuite, il récupèrerait le lyrium et partirait pour la belle vie. Bien sûr, il éliminerait les soldats l'accompagnant comme il avait éliminé le précédent commandant dont il occupait actuellement la place, mais cela viendrait plus tard. Il se gratta négligemment la tête en faisant mine de réfléchir. Le message était passé. Mais les choses ne se déroulèrent pas comme prévues. L'homme qui était resté simplement assis pivota sur sa chaise et empoigna l'homme qui s'était glissé en douce derrière lui et le projeta à terre avant de l'égorger d'un rapide coup de dague. L'orc à ses côtés réagit au quart de tour en dégainant son épée courte :
-Drhûr !, aboya-t-il, Trahison !
Il n'en dit pas plus. Douze traits fondirent sa direction et le percèrent de tous les côtés. Un sang épais tacha le sol boueux et malgré sa constitution, il tomba à terre.
-Pardon … Shär …
Une nouvelle salve le fit taire pour de bon. Shär de son côté avait bloqué la plupart des tirs avec une sorte d'écran magique. Les négociations étaient terminées. Était-ce le souhait du Pshlâm ? Pas le temps de réfléchir. Warwick attendrait pour ses ordres. D'un geste sûr, il composa une arabesque complexe dans les airs et entonna à une vitesse incroyable une litanie profonde :
-Ljâ'tol glana eth got, ljâ'tol glana eth pyr, ha'aron iets eün mîw, pul'nun paën.
Un feu dévorant jaillit à même le sol et carbonisa absolument tout sur son passage. Les fétus de pailles séchés s'embrasèrent dans un soufflet terrible, ajoutant à la cacophonie générale tandis que les soldats se débattaient en tentant d'étouffer les flammes. Peine perdue. La plupart effondrèrent en quelques instants tandis que d'autres couraient dans tous les sens, allumant de nouveaux foyers un peu partout. Cadon avait réussi à rouler sur lui et à se cacher derrière la table renversée, mais l'incendie se propageait trop vite et le bois usé du meuble craqua sinistrement avant de céder sous l'impulsion d'une chaine de flamme. Il se brûla les mains en tentant de repousser un de ses hommes et sa cape s'enflamma aussi. Il se jeta à terre mais un serpent de feu s'enroula autour de lui. Il voulut hurler de douleur mais le tube de feu entra dans sa bouche, calcinant sa langue et faisant fondre ses dents, et flamba son corps de l'intérieur. Il resta vivant pendant plusieurs secondes le temps que son cœur soit atteint, et mourut dans un râle étouffé. Shär était déjà sorti quand la grange s'effondra sur elle même dans un vacarme assourdissant. Dehors, la lune était haute, voilée par quelques nuages éparses, et la nuit tranquille. Une créature imposante tapie dans l'ombre se releva de toute sa hauteur – qui devait bien avoisiner les six pieds – et le lorgna de ses deux yeux ambrés. Shär lui fit signe d'approcher, ce qu'elle fit. A la lueur des flammes consumant l'étable, on pouvait sans peine s'apercevoir que la bête tenait plus du Houp Geampt que de l'homme. Bien qu'elle tenait sur ses deux jambes et qu'elle portait un plastron doré ainsi que des bracelets en pointes et d'autres pièces d'armures, sa fourrure argentée luisant sur les rayons de l'astre lunaire et sa gueule de loup laissait suggérer qu'il s'agissait là d'un croisement parfait entre animal et être humain. Son torse était développé et large, ses bras puissants, et ses jambes taillées pour la vitesse. Un traqueur né.
-Les choses ne se sont pas passées comme prévues ? Demanda la bête.
Shär fit non de la tête.
-Oh. Alors j'ai mes ordres, pas vrai ? Je peux partir en chasse ? Mes Hurleurs sont prêts à faire leur travail pour le Maître.
Cette fois-ci, Shär acquiesça.
-Très bien. Je me mets en route.
La créature poussa une longue plainte qui fit échos à toutes les Grandes Plaines. Comme réponse, il y eut un cri déchirant de souffrance. Puis un autre. Il y eut un échange bref de lamentations, et un silence final. Un sourire féroce se dessina sur son visage en révélant une rangée de dents meurtrières.
-Le Maître t'attend. Il souhaite s'entretenir avec toi sur les derniers évènements.
Avant de s'élancer, elle se tourna vers Shär :
-Apparemment, tu as adressé la parole au démon qui les suivait. Il faudra que tu me racontes ça. Quand je n'aurais plus ton estime, bien sûr.
Elle se plia finalement sur ses quatre jambes et détala à toute vitesse. En à peine quelques secondes, la bête n'était plus qu'un simple nuage de poussière qui s'élevait dans les étendues sauvages du territoire des humains. Shär observa un instant l'étable qui se consumait. C'était la deuxième fois que cela arrivait. Mais au moins, il n'y avait pas eu de mort ici. Il baissa la tête et, dans un claquement brutal, disparu dans la nuit.
A son arrivée, il avait d'abord pensé qu'on lui enverrait une véritable procession de commerçants bouffis d'orgueil, mais il revit très vite sa position. Il n'y avait dans cette grange qu'un orc et un homme encapuchonné. Enfin, c'est ce que Cadon croyait. Car l'inconnu masqué n'avait pas prononcé un seul mot. Tout juste son compagnon l'avait-il présenté d'un grognement presque indistinct : Shär. Un nom à vous hérisser les poils de la nuque. Ils s'étaient donc retrouvés, autour d'une simple table ronde en chêne, à discuter sur les termes de leur association. Mais les choses n'évoluaient pas convenablement. Elles n'évoluaient pas du tout en fait. Ni l'un ni l'autre des partis n'étaient satisfaits des propositions faites et pourtant, personne ne faisait en sorte d'améliorer la situation. N'étant qu'un simple représentant, Cadon se contentait simplement de faire passer un message, pas de le modifier. Il ne pouvait pas se le permettre. Quant à ses interlocuteurs, ils ne semblaient pas plus disposer à changer la donne.
-Si je récapitule, souffla une énième fois Cadon, vous souhaitez de nouveau que des démons viennent joindre nos rangs et en échange, vous nous offrez une caisse de lyrium. C'est bien ça ?
-Ce n'est pas nous qui le souhaitons, grogna l'orc répondant au nom d'Ûrlz, C'est le souhait du Pshlâm.
Cadon soupira encore. Il ignorait tout du dialecte que cette brute épaisse employait, mais il avait pu déduire succinctement que Pshlâm était une sorte d'appellation pour leur chef ou quelqu'un de plus haut placé dans leur hiérarchie, si hiérarchie il y avait.
-Oui, oui. Donc votre … Pshlâm nous a fait cette proposition. Vous comprendrez aisément que nous ne pouvons pas accepter. Nous avons déjà fait appel aux services des démons et cela a eu des conséquences néfastes. Non content de n'apporter aucun résultats et d'attirer inutilement l'attention sur nous, ils se sont retourné contre nos hommes et les ont massacré par «simple plaisir».
-Nous savons déjà cela, humain.
-Dans ce cas, orc, il coule de source que réitérer une telle erreur irait à l'encontre des intérêts des Faucons Blancs. Je suis sûr que même vous, pouvez saisir ce concept.
Ûrlz releva la lèvre supérieur, révélant ses dents acérés, mais fut interrompu par son compagnon. Celui ci avait à peine tourné la tête vers lui, mais la réaction fut suffisante. Cadon se passa une main sur le visage en espérant y chasser la migraine qui le guettait.
-D'après ce que nous savons, dit l'orc en portant de nouveau son attention sur lui, votre promesse de nous apporter votre soutien tient encore.
-C'était il y a de cela cinquante ans, répliqua Cadon sur la défensive, Et depuis, nous avons changé de commandant. Il ne voit pas du même œil notre association avec votre … Pshlâm, et souhaite simplement que vous récupériez vos démons pour nous laisser plus de latitude.
-Sans le Pshlâm, vous ne seriez qu'une vermine qui ramperait pour se nourrir des restes de la table des Grands. Vous nous devez votre allégeance, pas la négocier. A moins que les Moana n'aient aucun honneur ?
-Il n'est pas question d'honneur !, rugit le lieutenant en perdant son sang-froid, Votre chef, ou je-ne-sais-quoi, exige beaucoup trop de nous ! Il ne se contente pas d'une simple alliance, il nous extorque ! Il nous envoie ses bêtes des profondeurs pour nous «aider» à accomplir une promesse dont personne n'a jamais entendue parler ! Sans compter que nombre de nos hommes ignorent à qui ils ont à faire et pourquoi ils doivent se sacrifier en vain. C'est une chose que nous ne pouvons plus tolérer !
Les soldats qui guettaient la réunion passèrent discrètement une main sur leurs arcs. La tension n'avait pas été aussi forte depuis le début des négociations et les choses pouvaient très rapidement dégénérer. Mieux valait se tenir prêt à intervenir. Ûrlz ne réagit pas violemment. Au contraire, il s'apaisa. Il se massa le bout de son front et répondit avec un calme surprenant.
-Soit, humain. Cinq caisses de lyrium.
Une goutte de sueur perla sur le front de Cadon. Il regarda derrière l'orc. Les caisses étaient là, remplie de fioles contenant une substance bleue, comme si elles attendaient qu'il s'en empare. Il les avait bien vu en arrivant, mais aurait juré qu'il n'y en avait eu qu'une seule. Cela représentait toutefois une somme d'argent colossale sur le marché noir. Suffisante pour engager de nouveaux hommes et s'étendre. Mais les ordres étaient clairs. Il ne pouvait pas accepter. Que faire dans une telle situation ? Le commandant lui avait recommandé le bluff si jamais les choses tournaient mal. Chose que Cadon s'empressa d'essayer avec un grand sourire confiant.
-C'est inutile. Nous avons trouvé un filon il y a peu. Toutes les caisses que vous pourrez nous offrir ne seront jamais suffisantes pour égaler le réseau que nous avons découvert.
-Tu mens. Tout le lyrium de Geadrâs est épuisé depuis plus de dix mille ans. Il est impossible que vous ayez découvert le moindre filon.
-Vous n'avez aucune preuve de cela. Peut-être votre … Pshlâm n'est-il pas aussi fiable que vous le prétendez ?
L'orc perdit soudainement toute retenue et se leva d'un bond, renversant la table et Cadon par la même occasion. Les gardes bandèrent leurs arcs et visèrent dans sa direction. Le lieutenant des Faucons Blancs se releva avec peine, encore sous le choc, mais se reprit rapidement :
-Je ne crois pas que vous êtes en mesure de menacer qui que ce soit, orc. Voyez par vous-même. Vous êtes encerclés. Reconsidérez la chose. Un simple retrait de vos démons et tout le monde repart vivant.
-Si nous mourons ici, le Pshlâm viendra lui-même.
Sur cette simple idée, Cadon frémit. Si tel était le cas, il pouvait dire adieu à sa promotion, voire à sa vie. Les choses ne se présentaient pas bien du tout. Pourquoi ne pouvait-il pas tout simplement accepter ? Les choses seraient tellement plus simples. En y réfléchissant, il pouvait accepter. Ou faire croire que tel était le cas. Son esprit tortueux passa en revue le rapide plan d'action qu'il avait mis en place en cas de coup dur. Il avait juste à donner le signal, et les hommes qu'il avait corrompu attaqueraient. Ensuite, il récupèrerait le lyrium et partirait pour la belle vie. Bien sûr, il éliminerait les soldats l'accompagnant comme il avait éliminé le précédent commandant dont il occupait actuellement la place, mais cela viendrait plus tard. Il se gratta négligemment la tête en faisant mine de réfléchir. Le message était passé. Mais les choses ne se déroulèrent pas comme prévues. L'homme qui était resté simplement assis pivota sur sa chaise et empoigna l'homme qui s'était glissé en douce derrière lui et le projeta à terre avant de l'égorger d'un rapide coup de dague. L'orc à ses côtés réagit au quart de tour en dégainant son épée courte :
-Drhûr !, aboya-t-il, Trahison !
Il n'en dit pas plus. Douze traits fondirent sa direction et le percèrent de tous les côtés. Un sang épais tacha le sol boueux et malgré sa constitution, il tomba à terre.
-Pardon … Shär …
Une nouvelle salve le fit taire pour de bon. Shär de son côté avait bloqué la plupart des tirs avec une sorte d'écran magique. Les négociations étaient terminées. Était-ce le souhait du Pshlâm ? Pas le temps de réfléchir. Warwick attendrait pour ses ordres. D'un geste sûr, il composa une arabesque complexe dans les airs et entonna à une vitesse incroyable une litanie profonde :
-Ljâ'tol glana eth got, ljâ'tol glana eth pyr, ha'aron iets eün mîw, pul'nun paën.
Un feu dévorant jaillit à même le sol et carbonisa absolument tout sur son passage. Les fétus de pailles séchés s'embrasèrent dans un soufflet terrible, ajoutant à la cacophonie générale tandis que les soldats se débattaient en tentant d'étouffer les flammes. Peine perdue. La plupart effondrèrent en quelques instants tandis que d'autres couraient dans tous les sens, allumant de nouveaux foyers un peu partout. Cadon avait réussi à rouler sur lui et à se cacher derrière la table renversée, mais l'incendie se propageait trop vite et le bois usé du meuble craqua sinistrement avant de céder sous l'impulsion d'une chaine de flamme. Il se brûla les mains en tentant de repousser un de ses hommes et sa cape s'enflamma aussi. Il se jeta à terre mais un serpent de feu s'enroula autour de lui. Il voulut hurler de douleur mais le tube de feu entra dans sa bouche, calcinant sa langue et faisant fondre ses dents, et flamba son corps de l'intérieur. Il resta vivant pendant plusieurs secondes le temps que son cœur soit atteint, et mourut dans un râle étouffé. Shär était déjà sorti quand la grange s'effondra sur elle même dans un vacarme assourdissant. Dehors, la lune était haute, voilée par quelques nuages éparses, et la nuit tranquille. Une créature imposante tapie dans l'ombre se releva de toute sa hauteur – qui devait bien avoisiner les six pieds – et le lorgna de ses deux yeux ambrés. Shär lui fit signe d'approcher, ce qu'elle fit. A la lueur des flammes consumant l'étable, on pouvait sans peine s'apercevoir que la bête tenait plus du Houp Geampt que de l'homme. Bien qu'elle tenait sur ses deux jambes et qu'elle portait un plastron doré ainsi que des bracelets en pointes et d'autres pièces d'armures, sa fourrure argentée luisant sur les rayons de l'astre lunaire et sa gueule de loup laissait suggérer qu'il s'agissait là d'un croisement parfait entre animal et être humain. Son torse était développé et large, ses bras puissants, et ses jambes taillées pour la vitesse. Un traqueur né.
-Les choses ne se sont pas passées comme prévues ? Demanda la bête.
Shär fit non de la tête.
-Oh. Alors j'ai mes ordres, pas vrai ? Je peux partir en chasse ? Mes Hurleurs sont prêts à faire leur travail pour le Maître.
Cette fois-ci, Shär acquiesça.
-Très bien. Je me mets en route.
La créature poussa une longue plainte qui fit échos à toutes les Grandes Plaines. Comme réponse, il y eut un cri déchirant de souffrance. Puis un autre. Il y eut un échange bref de lamentations, et un silence final. Un sourire féroce se dessina sur son visage en révélant une rangée de dents meurtrières.
-Le Maître t'attend. Il souhaite s'entretenir avec toi sur les derniers évènements.
Avant de s'élancer, elle se tourna vers Shär :
-Apparemment, tu as adressé la parole au démon qui les suivait. Il faudra que tu me racontes ça. Quand je n'aurais plus ton estime, bien sûr.
Elle se plia finalement sur ses quatre jambes et détala à toute vitesse. En à peine quelques secondes, la bête n'était plus qu'un simple nuage de poussière qui s'élevait dans les étendues sauvages du territoire des humains. Shär observa un instant l'étable qui se consumait. C'était la deuxième fois que cela arrivait. Mais au moins, il n'y avait pas eu de mort ici. Il baissa la tête et, dans un claquement brutal, disparu dans la nuit.
- Spoiler:
- Triple roudhousekick facial kyaaazaaaa ! La pièce, à moua ! (Fais) La concentration, à moua ! Svp bien sûr.
Itrenog- Age : 31
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Points de Progression : 61
Re: Une vie, un devoir ...
-Non !, s'exclama vivement Iberiel en martelant du poing la table qui se trouvait devant elle, Je refuse catégoriquement !
Le jeune elfe devant elle pâli. Visiblement, il ne s'était pas attendu à une réponse négative. Il se gratta la nuque, gêné, et parvint à dire.
-Mais enfin … Réfléchissez. Ils ont besoin de vous. A quoi bon votre retour si vous ne récupérez pas votre place ?
-Je me moque éperdument de vos excuses. Je ne suis pas revenue pour satisfaire vos exigences. Attendez la fin de la cérémonie et je vous ferais regretter vos paroles !
-Je … Je ne suis que le messager.
Iberiel se détourna et inspira à fond pour se calmer. S'il s'agissait d'un coup d'Ilmarë – ce qui était très probablement le cas – alors il était tout à fait possible qu'elle ait prévu un refus de sa part. Mais pourquoi, dans ce cas, tenter une approche aussi directe ? Il y avait forcément une raison qui se cachait dessous, mais cela importait peu. Rien ne la ferait changer d'avis.
-Vous feriez mieux de partir maintenant, dit-elle en refoulant la colère qui la gagnait encore, Le message est reçu, et vous avez votre réponse. Que je ne vous croise plus ou vous risquez de laisser plus que votre voix.
-Mais je …
-Partez !
Penaud, le jeune elfe s'inclina gauchement et quitta la pièce. Iberiel saisit alors une large coupe d'argent remplie d'eau claire et se rinça le visage dans le but de laisser couler ses émotions et surtout, d'éloigner la migraine qui lui martelait la tête. Si elle ne faisait pas plus attention, son retour laisserait autrement plus de séquelles que son départ. Si séquelles il y avait eues.
Quelle que peu calmée, elle quitta la pièce et laissa un courant d'air frais lui sécher la peau. L'agitation qui grignotait de plus en plus les Elfes commençait à la gagner à son tour. Ce n'était plus de la colère qu'elle ressentait, mais de l'appréhension. Après tout ce temps, avait-elle oubliée ce qu'elle était vraiment ? Se souvenait-elle au moins de son visage ? Elle se frotta la base du coup et descendit du pin sur lequel elle était. Au lieu d'emprunter les escaliers, elle sauta de branche en branche jusqu'au sol sous les yeux interloqués de ceux qui préparaient la cérémonie. Elle rendit à chacun un regard qui se passait de commentaire et se dirigea vers là où elle avait laissée ses compagnons de voyage.
Les sensations qui l'assaillirent de nouveau en traversant la forêt la laissèrent perplexe. Une partie d'elle-même se sentait presque heureuse d'être de nouveau parmi les arbres, de sentir la douce odeur des peupliers et des chênes, de fouler les carrés de mousses qui tapissaient chaque recoin de cet endroit idyllique, ou encore de voir, simplement, la nature s'épanouir comme elle ne pourrait jamais le faire ailleurs. Mais sa partie plus rationnelle ne cessait de la tarauder, de lui rabâcher qu'il ne s'agissait que d'une façade, que derrière cette illusion il y avait les complots et les intrigues politiques, comme partout ailleurs, et que cela ne cesserait jamais.
Finalement, elle arriva à l'entrée de Moerlanev, et n'y trouva qu'Athos allongé par terre, les bras largement écarté comme s'il attendait la venue d'une quelconque créature venue du ciel. Les yeux grands ouverts, il ne semblait pas avoir conscience du monde qui l'entourait, et des grognements rauques sortaient parfois de sa bouche entrouverte. Iberiel se plaça à côté de lui et lui tapa sans ménagement les côtes du bout de ses bottes. Le vieillard resta insensible un moment et finit par remuer légèrement les pieds, puis les bras, et enfin la tête. Il se redressa lentement, accompagné par un concert de craquement tous plus surprenants les uns que les autres, et se massa la tête.
-Argh … Mes pauvres lombaires … Ma tête … Où … Qui … ?
Il finit par s'apercevoir qu'il n'était pas seul, et adressa un sourire d'excuse à Iberiel.
-Ah oui. Je crois que j'ai trop … Oooooh ma têêêêêêête …
-Vous pouvez me dire ce qu'il s'est passé exactement ?
-Trois fois rien, répondit Athos, la langue pâteuse, Vraiment. J'ai juste parlé avec … lui, là. Et puis ... pouf, plus rien. Saperlotte.
A court d'idée, et consciente qu'il n'y penserait pas de lui-même, Iberiel plaça deux doigts sur les tempes du vieil homme et apaisa sa douleur d'un brève impulsion magique.
-Ah, oui, soupira-t-il d'aise, Un peu plus par ici … Oui … C'est très bien.
-Athos, vous avez encore … utilisé une de vos herbes, n'est-ce pas ?
-Trois fois rien. Vraiment. Juste de quoi oublier les soucis qui pèsent sur mes épaules bien frêles.
Il se frotta le crâne en ébouriffant ses cheveux blancs et se gratta la barbe pour tenter de la démêler. N'y parvenant pas, il croisa les bras en faisant la moue. Iberiel en profita pour observer les environs. Dozla était probablement en train de dormir quelque part dans la forêt, elle en était certaine. En revanche, elle ignorait tout de la personne qui manquait encore à l'appel.
-Où est Itrenog ? Demanda-t-elle alors.
-Ne criez pas comment ça, par pitié, gémit Athos en se bouchant les oreilles, Il est parti, je crois.
-Parti ? Comment ça parti ? Vous l'avez laissé quitter Moerlanev ?
-Eh bien, oui, il semblerait bien qu'il ne soit plus là. Mystérieusement envolé vers des contrées verdoyantes.
Iberiel fit un effort considérable pour ne pas se laisser emporter. Cela n'arrangerait pas ses affaires dans l'état dans lequel se trouvait le vieil ermite. Au lieu de ça, elle se passa une main rageuse sur le visage et resta silencieuse en étouffant du mieux possible les relents de colère qui s'insinuaient dans son corps.
-Vous avez l'air tendue, très chère, remarqua Athos en la pointant d'un doigt osseux, Vous devriez vous confier si ça peut vous faire du bien. Là. Posez-vous ici, à côté de moi.
-Oui, surement. Du bien. C'est exactement ce dont j'ai besoin. Les Anciens veulent me réintégrer au seins des Ethël'Rill, et voilà que …
-Ah oui, ce groupe de sorcières faussement aimables ? C'est ça qui vous chagrine ?
Iberiel finit par s'assoir par terre. Ses jambes avaient failli céder sous son poids rien qu'à l'évocation de la demande du messager.
-Ilmarë sait pertinemment ce qu'implique mon retour, et elle à le toupet d'imaginer que je vais accepter.
-C'est vrai qu'après ce qu'ils vous ont fait subir, on ne peut imaginer plus noble réaction.
-Vous n'êtes pas mieux loti que moi, souligna-t-elle dans le but d'éloigner ces souvenirs désagréables, Il n'y a que Dozla que cette folie semble épargner. Et maintenant, j'apprends que ce que nous avons subi a été totalement inutile.
-Parce qu'Itrenog est parti ?
Iberiel se massa les chevilles et répondit sans regarder Athos.
-Nous avons été plus souvent en activité ces-derniers temps qu'en mille ans de nos vies. Vous croyez vraiment que lui aussi ne s'est pas remis en activité ?
Un éclair d'entendement illumina le regard du vieil homme.
-C'est donc ça. Vous vous inquiétez de ce qu'il peut lui arriver à cause de lui.
-Évidemment. Je vous rappelle que nous avons été attaqué par des démons dans les Grandes Plaines. Et qu'ils nous voulaient tous les deux. Ce n'est pas une coïncidence.
-Bigre. Vous aviez oublié de mentionner ce détail.
-Vous avez oublié ce détail. Je vous ai tout raconté sur ma traversée des Plaines.
Athos se pinça l'arrête du nez et ferma les yeux. Iberiel pensa alors en cet instant que la situation était bien trop complexe pour son vieux cerveau fatigué, avant qu'il ne s'exclame brutalement.
-Ah, oui ! C'est pour cela que j'avais parlé des catalyseurs à Itrenog !
-Pardon ?
-Rien. Ce n'est rien. Un vieux truc sur lequel j'avais travaillé il y a longtemps. Toujours est-il que s'il a deux sous de jugeotes, il finira par comprendre de lui-même ce qu'il se trame et il n'ira pas se fourrer la tête la première dans les problèmes.
-Dois-je vous rappeler que nous parlons du démon ? Itrenog est mort dès l'instant où il … l'a contrôlé. Il est impossible qu'il puisse comprendre quelque chose.
Le vieil homme pointa un doigt sentencieux vers le nez d'Iberiel.
-Je n'en serais pas si sûre si j'étais vous. La possession démoniaque est un phénomène complexe. Ce n'est pas une simple annihilation suivie d'une apposition d'esprit, mais d'un mélange entre les deux entités. J'ai tenté de stimuler sa mémoire à plusieurs reprises, et je crois que j'ai obtenu quelques résultats prometteurs.
-Vous voulez dire qu'il est possible qu'Itrenog soit en vie ?
-Ne vous méprenez pas. Il est bien mort et son esprit a disparu. Ou plutôt, il a fusionné avec celui du démon. Il n'existe plus en tant qu'un, mais en tant qu'un tout. C'est pour cela qu'il est possible de réveiller des souvenirs qui ne sont pas les siens. En sachant comment s'y prendre, évidemment.
-Et vous le savez, pas vrai ?
Athos bomba le torse, fier comme un coq.
-Je ne porte pas cette vieille barbe pour le simple plaisir, Dame Elfe. Je suis et reste un mage respecté et autrement plus puissant que vos Ethël'Rill. En tant que tel, je possède des connaissances qui dépassent l'entendement des simples immortels.
Iberiel se gratta pensivement le menton. Elle ignorait à quoi faisait référence le vieil homme, mais elle venait à l'instant de trouver un moyen qui pouvait résoudre leurs problèmes, tout en leur permettant de continuer ce pourquoi ils avaient œuvré durant toutes ces années.
-Eh bien dans ce cas, Lord Athos, souffla-t-elle avec un sourire qui en disait long sur ce qu'elle avait en tête, j'aimerais vous faire par de quelques affaires qui devraient vous intéresser au plus haut point.
Le jeune elfe devant elle pâli. Visiblement, il ne s'était pas attendu à une réponse négative. Il se gratta la nuque, gêné, et parvint à dire.
-Mais enfin … Réfléchissez. Ils ont besoin de vous. A quoi bon votre retour si vous ne récupérez pas votre place ?
-Je me moque éperdument de vos excuses. Je ne suis pas revenue pour satisfaire vos exigences. Attendez la fin de la cérémonie et je vous ferais regretter vos paroles !
-Je … Je ne suis que le messager.
Iberiel se détourna et inspira à fond pour se calmer. S'il s'agissait d'un coup d'Ilmarë – ce qui était très probablement le cas – alors il était tout à fait possible qu'elle ait prévu un refus de sa part. Mais pourquoi, dans ce cas, tenter une approche aussi directe ? Il y avait forcément une raison qui se cachait dessous, mais cela importait peu. Rien ne la ferait changer d'avis.
-Vous feriez mieux de partir maintenant, dit-elle en refoulant la colère qui la gagnait encore, Le message est reçu, et vous avez votre réponse. Que je ne vous croise plus ou vous risquez de laisser plus que votre voix.
-Mais je …
-Partez !
Penaud, le jeune elfe s'inclina gauchement et quitta la pièce. Iberiel saisit alors une large coupe d'argent remplie d'eau claire et se rinça le visage dans le but de laisser couler ses émotions et surtout, d'éloigner la migraine qui lui martelait la tête. Si elle ne faisait pas plus attention, son retour laisserait autrement plus de séquelles que son départ. Si séquelles il y avait eues.
Quelle que peu calmée, elle quitta la pièce et laissa un courant d'air frais lui sécher la peau. L'agitation qui grignotait de plus en plus les Elfes commençait à la gagner à son tour. Ce n'était plus de la colère qu'elle ressentait, mais de l'appréhension. Après tout ce temps, avait-elle oubliée ce qu'elle était vraiment ? Se souvenait-elle au moins de son visage ? Elle se frotta la base du coup et descendit du pin sur lequel elle était. Au lieu d'emprunter les escaliers, elle sauta de branche en branche jusqu'au sol sous les yeux interloqués de ceux qui préparaient la cérémonie. Elle rendit à chacun un regard qui se passait de commentaire et se dirigea vers là où elle avait laissée ses compagnons de voyage.
Les sensations qui l'assaillirent de nouveau en traversant la forêt la laissèrent perplexe. Une partie d'elle-même se sentait presque heureuse d'être de nouveau parmi les arbres, de sentir la douce odeur des peupliers et des chênes, de fouler les carrés de mousses qui tapissaient chaque recoin de cet endroit idyllique, ou encore de voir, simplement, la nature s'épanouir comme elle ne pourrait jamais le faire ailleurs. Mais sa partie plus rationnelle ne cessait de la tarauder, de lui rabâcher qu'il ne s'agissait que d'une façade, que derrière cette illusion il y avait les complots et les intrigues politiques, comme partout ailleurs, et que cela ne cesserait jamais.
Finalement, elle arriva à l'entrée de Moerlanev, et n'y trouva qu'Athos allongé par terre, les bras largement écarté comme s'il attendait la venue d'une quelconque créature venue du ciel. Les yeux grands ouverts, il ne semblait pas avoir conscience du monde qui l'entourait, et des grognements rauques sortaient parfois de sa bouche entrouverte. Iberiel se plaça à côté de lui et lui tapa sans ménagement les côtes du bout de ses bottes. Le vieillard resta insensible un moment et finit par remuer légèrement les pieds, puis les bras, et enfin la tête. Il se redressa lentement, accompagné par un concert de craquement tous plus surprenants les uns que les autres, et se massa la tête.
-Argh … Mes pauvres lombaires … Ma tête … Où … Qui … ?
Il finit par s'apercevoir qu'il n'était pas seul, et adressa un sourire d'excuse à Iberiel.
-Ah oui. Je crois que j'ai trop … Oooooh ma têêêêêêête …
-Vous pouvez me dire ce qu'il s'est passé exactement ?
-Trois fois rien, répondit Athos, la langue pâteuse, Vraiment. J'ai juste parlé avec … lui, là. Et puis ... pouf, plus rien. Saperlotte.
A court d'idée, et consciente qu'il n'y penserait pas de lui-même, Iberiel plaça deux doigts sur les tempes du vieil homme et apaisa sa douleur d'un brève impulsion magique.
-Ah, oui, soupira-t-il d'aise, Un peu plus par ici … Oui … C'est très bien.
-Athos, vous avez encore … utilisé une de vos herbes, n'est-ce pas ?
-Trois fois rien. Vraiment. Juste de quoi oublier les soucis qui pèsent sur mes épaules bien frêles.
Il se frotta le crâne en ébouriffant ses cheveux blancs et se gratta la barbe pour tenter de la démêler. N'y parvenant pas, il croisa les bras en faisant la moue. Iberiel en profita pour observer les environs. Dozla était probablement en train de dormir quelque part dans la forêt, elle en était certaine. En revanche, elle ignorait tout de la personne qui manquait encore à l'appel.
-Où est Itrenog ? Demanda-t-elle alors.
-Ne criez pas comment ça, par pitié, gémit Athos en se bouchant les oreilles, Il est parti, je crois.
-Parti ? Comment ça parti ? Vous l'avez laissé quitter Moerlanev ?
-Eh bien, oui, il semblerait bien qu'il ne soit plus là. Mystérieusement envolé vers des contrées verdoyantes.
Iberiel fit un effort considérable pour ne pas se laisser emporter. Cela n'arrangerait pas ses affaires dans l'état dans lequel se trouvait le vieil ermite. Au lieu de ça, elle se passa une main rageuse sur le visage et resta silencieuse en étouffant du mieux possible les relents de colère qui s'insinuaient dans son corps.
-Vous avez l'air tendue, très chère, remarqua Athos en la pointant d'un doigt osseux, Vous devriez vous confier si ça peut vous faire du bien. Là. Posez-vous ici, à côté de moi.
-Oui, surement. Du bien. C'est exactement ce dont j'ai besoin. Les Anciens veulent me réintégrer au seins des Ethël'Rill, et voilà que …
-Ah oui, ce groupe de sorcières faussement aimables ? C'est ça qui vous chagrine ?
Iberiel finit par s'assoir par terre. Ses jambes avaient failli céder sous son poids rien qu'à l'évocation de la demande du messager.
-Ilmarë sait pertinemment ce qu'implique mon retour, et elle à le toupet d'imaginer que je vais accepter.
-C'est vrai qu'après ce qu'ils vous ont fait subir, on ne peut imaginer plus noble réaction.
-Vous n'êtes pas mieux loti que moi, souligna-t-elle dans le but d'éloigner ces souvenirs désagréables, Il n'y a que Dozla que cette folie semble épargner. Et maintenant, j'apprends que ce que nous avons subi a été totalement inutile.
-Parce qu'Itrenog est parti ?
Iberiel se massa les chevilles et répondit sans regarder Athos.
-Nous avons été plus souvent en activité ces-derniers temps qu'en mille ans de nos vies. Vous croyez vraiment que lui aussi ne s'est pas remis en activité ?
Un éclair d'entendement illumina le regard du vieil homme.
-C'est donc ça. Vous vous inquiétez de ce qu'il peut lui arriver à cause de lui.
-Évidemment. Je vous rappelle que nous avons été attaqué par des démons dans les Grandes Plaines. Et qu'ils nous voulaient tous les deux. Ce n'est pas une coïncidence.
-Bigre. Vous aviez oublié de mentionner ce détail.
-Vous avez oublié ce détail. Je vous ai tout raconté sur ma traversée des Plaines.
Athos se pinça l'arrête du nez et ferma les yeux. Iberiel pensa alors en cet instant que la situation était bien trop complexe pour son vieux cerveau fatigué, avant qu'il ne s'exclame brutalement.
-Ah, oui ! C'est pour cela que j'avais parlé des catalyseurs à Itrenog !
-Pardon ?
-Rien. Ce n'est rien. Un vieux truc sur lequel j'avais travaillé il y a longtemps. Toujours est-il que s'il a deux sous de jugeotes, il finira par comprendre de lui-même ce qu'il se trame et il n'ira pas se fourrer la tête la première dans les problèmes.
-Dois-je vous rappeler que nous parlons du démon ? Itrenog est mort dès l'instant où il … l'a contrôlé. Il est impossible qu'il puisse comprendre quelque chose.
Le vieil homme pointa un doigt sentencieux vers le nez d'Iberiel.
-Je n'en serais pas si sûre si j'étais vous. La possession démoniaque est un phénomène complexe. Ce n'est pas une simple annihilation suivie d'une apposition d'esprit, mais d'un mélange entre les deux entités. J'ai tenté de stimuler sa mémoire à plusieurs reprises, et je crois que j'ai obtenu quelques résultats prometteurs.
-Vous voulez dire qu'il est possible qu'Itrenog soit en vie ?
-Ne vous méprenez pas. Il est bien mort et son esprit a disparu. Ou plutôt, il a fusionné avec celui du démon. Il n'existe plus en tant qu'un, mais en tant qu'un tout. C'est pour cela qu'il est possible de réveiller des souvenirs qui ne sont pas les siens. En sachant comment s'y prendre, évidemment.
-Et vous le savez, pas vrai ?
Athos bomba le torse, fier comme un coq.
-Je ne porte pas cette vieille barbe pour le simple plaisir, Dame Elfe. Je suis et reste un mage respecté et autrement plus puissant que vos Ethël'Rill. En tant que tel, je possède des connaissances qui dépassent l'entendement des simples immortels.
Iberiel se gratta pensivement le menton. Elle ignorait à quoi faisait référence le vieil homme, mais elle venait à l'instant de trouver un moyen qui pouvait résoudre leurs problèmes, tout en leur permettant de continuer ce pourquoi ils avaient œuvré durant toutes ces années.
-Eh bien dans ce cas, Lord Athos, souffla-t-elle avec un sourire qui en disait long sur ce qu'elle avait en tête, j'aimerais vous faire par de quelques affaires qui devraient vous intéresser au plus haut point.
- Spoiler:
- Fiou. Ma piécette mensuelle pour moi Fait, et la validation en Concentration, comme toujours.
Itrenog- Age : 31
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Re: Une vie, un devoir ...
[HRP : J'espère que mon intervention ne te compliquera pas la vie et qu'elle te fera plaisir]
C'est à la nuit tombée que la tempête se déchaina et que l'orchestre élémentaire débuta. Aux premiers instants, le vent souffla et ramena sur Geadrâs des nuages noirs en brassant l'air chaud venu du Sud. De l'autre coté, l'air glacial d'une fin d'hiver sifflait son sérieux et sa malice. Les deux courants se contemplèrent de loin pendant un moment en testant les défenses de l'autre. Sifflet dans les arbres, souffle sur le sol, les deux grands s'affrontaient de toute la puissance de leurs bronches. Soudain la période d'intimidation cessa, il était venu le temps de l'affrontement. Le vent du Sud se jeta à la gorge de son adversaire suivit de prêt par des nuages au regard froid et sombre. L'air glacé répliqua de toute sa puissance et percuta le vent. Déchainement du ciel, l'orage retentit. Puissant comme le grondement de mille cors de Rik Kazad, c'était le point de départ de la frénétique balade de ses deux chefs d'orchestre. A l'aune des flashs d'innombrables éclairs les deux vents se mêlèrent, air chaud et air froid fusionnèrent pour ne faire plus qu'un. Ce spectacle de son et de lumière s'acheva dans un déchirement semblable à un cri de souffrance, inconnu, jamais entendu sur Geadrâs. Le ciel se mit en quelque secondes à pleurer. Pleurant la disparition de l'air glacé, le vent du Sud venait de faire sa place sur le continent et avait bien l'intention de générer le maximum d'orage. Ce soir le temps était au chagrin, demain il serait à l'accomplissement de sa mission …
Un petit village du royaume des humains avait vu l'orage précéder la pluie de quelques heures, les éléments s'étaient affrontés dans un combat titanesque, et se trouvait douché par des litres d'eau. Les gouttes claquaient avec résonance sur le sol de gravier et détrempait la terre. Les toits de chôme de quelques habitations moins généreuse que certaines avaient bien du mal à maintenir leurs hôtes au sec. Le village semblait comme abandonné, perdu au milieu de la forêt et de la folie des éléments, même l'église, témoin de la foi des humains à Sigmar, semblait effrayante. Seuls les lueurs des chandelles à l'intérieur des maisons indiquaient qu'il y avait bien des personnes vivant ici. Dans un coin non loin du lieu de foi du village, on s'agitait au sein d'une petite auberge.
A l'intérieur un groupe de gardes riaient aux éclats, tous les quatre avaient laissés leurs armes à porté de main et avaient gardés leurs armures légères. Riant d'une nouvelle boutade d'un de leurs comparses, ils se saisirent de leurs chopines, trinquèrent et descendirent d'une traite la bière chaude qu'on venait de leur servir. Le silence avait regagné la taverne pour laisser le temps aux soldats de terminer leur boissons et de constater s'ils tiendraient encore debout après. L'aubergiste ne comptait plus le nombre de chope qu'il avait du servir à ses seuls clients depuis le début de la semaine. Pourquoi avait il fallut que le temps se dégrade autant ? Il avait horreur de voir son auberge souillée par les autres et ne recevait donc que très rarement de visite. Comment vivait il, s'il n'accueillait personne à sa taverne ? A dire vrai, il survivait plus qu'il ne vivait. Le vieil homme avait les traits étirés par le temps et il se perdait de plus en plus souvent dans les plaisirs de l'alcool. De grosses cernes noir demeuraient figées sous ses yeux couleur de cendre et une barbe de plusieurs mois lui mangeait entièrement le visage. Il se laissait complètement aller et espérait jour après jour que celui qu'il attendait reviendrait le voir.
- Comment a t-il pu me laisser là ? Râla t-il. Il bafouilla de rapides excuses en s'apercevant qu'il venait de parler tout haut et que les gardes s'étaient tournés vers lui. Il leur adressa son plus beau sourire en secouant les mains devant lui pour leur faire signe de pas se préoccuper de lui.
- Un problème grand père ? Toussa un des quatre gardes, une lueur d'amusement dans le regard.
Son visage était barré par une longue mèche de cheveux blonds qu'il laissait volontairement pendouiller devant ses yeux. Il était très fin et ne devait pas encore avoir eu la vingtaine. L'aubergiste grimaça, le jeune âge de ce jeune soldat lui rappelait celui dont il désirait temps recevoir la visite.
- Essai de ne pas nous claquer entre les doigts ça ferait désordre sur notre service, lança un second dont la pense était plus large qu'un tonneau et dont la chaise avait le plus grand mal à supporter son poids. Il éclata d'un rire gras que ses compagnons reprirent en cœur en entamant une chanson paillarde.
- Non tout va bien, je me parlais à moi même, murmura le tavernier. Mais les soldats ne lui prêtèrent plus aucune attention et se concentrèrent sur leur chanson en poussant de grand ho et de gros ha en réponse au refrain. Le tavernier plongea sous son bar et vida une fiole au contenu fortement alcoolique pour se calmer avant de réapparaitre.
La nuit fila en un éclair et les gardes ne semblaient pas décider à partir. A présent ils échangeaient des blagues salasses dont certaines filles du village faisaient l'objet. Les deux derniers braillaient qu'ils aimeraient beaucoup aller les chatouiller pendant la nuit. L'aubergiste refoula un haut-le-cœur et entreprit de laver une nouvelle fois sa taverne afin de se changer les idées. A l'extérieur la pluie ne cessait pas et des gouttes parvenaient à s'infiltrer entre les tuiles et trempaient le sol. A chaque coup de serpillère l'aubergiste jurait dans sa barbe.
- Salop... il fut interrompu dans son juron par un bruit de tonnerre.
Il crut tout d'abord que c'était l'orage qui revenait, puis que c'était un des soldats qui avaient enfin fini par s'effondrer après les litres d'alcool qu'ils avaient bu. Lorsqu'il se retourna il vit que la raison était tout autre, un individu à l'apparence menaçante venait de pousser la porte et se tenait à présent fermement campé sur le seuil. Les soldats prirent peur et se levèrent en renversant leur siège, l'alcool leur monta à la tête d'un coup et le plus gros des gardes faillit s'effondrer de tout son poids sur la table. Celui des quatre qui semblait avoir le moins bu parvint à dégainer son épée dans une douce mélodie. Il ordonna :
- Qui êtes vous ? Il n'eut pour seul raison que le flot de pluie qui tombait à l'extérieur.
- Par Sigmar tu vas répondre ou fiche le camp d'là ! Brailla un second soldat qui avait retrouvé suffisamment de lucidité pour placer dix mots l'un après l'autre et de tirer son arme.
L'aubergiste s'était figé, il n'avait pas esquissé le moindre geste depuis « l'entrée » de l'inconnu. Ce dernier le dévisageait étrangement dans ses vêtements rouge obscure. Enfin, il fit un premier pas pour s'avancer au cœur de la taverne, en saisissant quelque chose de sous sa longue cape. Trois des quatre soldats se mirent en garde et affirmèrent leurs prises sur leurs épées, tandis que le plus gros d'entre eux ne parvenait toujours pas à attraper le pommeau de son arme.
Un petit bruit résonna sur le sol de l'auberge, l'individu s'avança dans la lumière en boitillant, s'aidant d'une canne de bois et respirant avec difficulté. Maintenant que l'éclairage de l'auberge l'illuminait il n'était plus du tout effrayant, c'était juste un vieux monsieur bossu et boiteux qui cherchait un abri. Comme pour rassurer l'ensemble des spectateurs le vieillard retira son capuchon rouge sombre et révéla tout aussi rongé par les âges que celui de l'aubergiste. Ce dernier eu immédiatement de la sympathie pour cet homme qui avait réussi à secouer ces fripouilles de gardes.
Il avait de grands yeux où des tâches de gris venaient colorer une pupille bleu d'océan. Son visage imberbe et ridé inspirait la confiance et la sagesse. La sagesse certainement à cause de ses longs cheveux blancs, parfaitement lissés. S'arrêtant à quelque pas des gardes et de l'aubergiste, il tapota sa cape et se massa le dos avec une grimace douloureuse.
Le garde le plus jeune éclata de rire sous l'effet de la surprise, le second quant à lui n'avait pas du tout l'air de rigoler. Il brailla de tout son courage retrouvé après le vieil inconnu.
- Tu n'as pas répondu à ma question l'ancêtre ! T'es qui et qu'est tu viens fiche là ?
Le bossu secoua une dernière fois sa cape et posa ses deux mains sur le dessus de sa canne.
- Pardonnez moi si je vous ai effrayer preux chevalier. Mais je crois avoir lu sur l'enceinte de ce bâtiment qu'il s'agissait d'une auberge. Il marqua une pause en fixant son interlocuteur, inspira puis reprit. Peut être ais je fais erreur et que j'ai cherché le refuge au mauvais endroit.
- Ouais fous nous l'c …
- Officier il ne me semble pas que vous soyez ici chez vous, l'interrompit le vieux tavernier. Cette auberge est encore à moi que je sache et restera ici toute personne qui sera assez brillante pour vous mettre du plomb dans le crâne.
- Comment oses t …
- Retourne cuver ton vin Bill et laisse mes autres clients en paix. Ha et pendant que vous y êtes, poursuivit il en désignant les épées qu'ils tenaient à la main, rangez moi ça !
Les gardes, comprenant qu'il ne servait à rien de discuter avec ce vieillard sénile abandonnèrent la lutte et quittèrent l'auberge en trombe, humilié et ivre comme jamais. Une fois la porte refermée derrière eux, le calme revint enfin. Le tavernier fixa le nouvel arrivant et l'invita à s'approcher.
- Je ne vous remercierais jamais assez pour votre intervention. Sans vous je crois que j'aurais du écouter encore toute la journée de demain les énormités de ses quatre idiots. Veuillez pardonner mon accueil peu chaleureux, c'est que nous n'attendions personne par ce temps là.
- Ne vous excusez pas. Si j'avais eu les poumons de ma jeunesse j'aurais très certainement pu répondre à ces messieurs et vous éviter un surplus dérangeant d'adrénaline, dit-il en lui souriant.
Le tavernier lui rendit son sourire et l'accompagna jusqu'au comptoir de l'auberge, ou il le débarrassa de ses affaires complètement trempées. Sous sa cape sombre, le vieil inconnu portait des vêtements de grande allure. Un tissu rouge souple lui serrait la taille et tenait un pantalon de la même couleur. Son haut était plus modeste, de couleur grise et troué à quelques endroits. Il souffla sous l'effort que lui demanda de s'assoir sur le haut tabouret du comptoir et s'aperçut que le tavernier le dévisageait.
- Ho au vu de votre air surpris devant mes vêtement, vous ne devez pas avoir vu très souvent d'hommes du sud. J'ai raison ?
Le tavernier détourna le regard légèrement honteux de s'être fait surprendre en pleine analyse du style vestimentaire de son nouveau client.
- Oui vous avez raison. De quel coin avez vous dit que vous veniez ? Questionna t-il.
- Je ne l'ai pas dis, rétorqua sèchement son interlocuteur.
L'aubergiste étonné par ce changement d'attitude de la part du vieillard leva un sourcil.
- Vous aurais je offensé ? Demanda t-il en cherchant à se rassurer.
- Pas encore !
Le trouvant de plus en plus étrange, décolla ses coudes du comptoir et s'éloigna un peu de l'homme aux cheveux si blanc.
- Que voulez vous dire ?
- Je cherche quelqu'un et j'aimerais que vous m'aidiez à le trouver. Si vous n'y parvenez pas je serais extrêmement déçu, répondit il d'une voix dont toute hésitation avait disparu.
L'aubergiste recula d'un pas et fronça les sourcils :
- Qui êtes vous ?
- Aucune importance ! Un homme est venu ici il y a peu de temps, il était accompagné d'une femme. Vous devriez voir de qui je parle. La beauté de cette femme ne passe pas inaperçu et lui encore moins. Vêtu de noir, mystérieux, un col noir lui remontant jusqu'au dessus de la bouche …
- Vous devez faire erreur, je ne vois pas de qui vous voulez parlez, l'interrompit le tavernier. Je n'ai pas eu de visi …
- Ne me mens pas imbécile d'humain ! Le coupa le vieillard d'une vois forte et imposante. Je sais qu'ils sont venu ici, les lieux empestent son aura ! J'attends une réponse à ma question, écoute bien : OU SONT T-ILS ?
- Je l'ignore. Cette fois si le vieil homme n'avait pas essayé de dissimuler le fait qu'il avait reçu la visite de gens répondant exactement à la description faite par ce … cette chose.
Le vieillard aux cheveux blancs se laissa tomber du tabouret saisit sa canne à deux mains et ferma les yeux. Un son strident retentit et l'aubergiste crut un moment qu'il avait cassé son appui deux mais en réalité la canne de bois avait disparut, laissant place à deux sabres courts. Dans un geste fluide, rapide et silencieux il pointa une de ses armes sous la gorge du tavernier. Il plongea son regard dans le sien et menaça :
- Je te donne deux minutes pour me donner la réponse que je suis venu chercher.
- Qui que vous soyez tuez moi je ne parlerais pas, fit l'homme avec courage.
Un sourire froid se dessina sur les lèvres du vieillard aux yeux bleu d'océan tachetés de cendre. Il maintenait le regard de l'aubergiste comme s'il avait la capacité de l'attirer à lui. Une lueur s'illumina au fond de la pupille du vieillard, une lueur qui n'était pas là quelques instants plus tôt, et qui était témoin de sa puissance et de sa nature. Une aura malfaisante éclata et souffla sa volonté autour de lui, l'air frémis et la terre trembla en reconnaissant ce pouvoir.
- Pauvre fou ! Je ne suis pas un pitoyable assassin de ton peuple, si je te tue. Tu ne seras jamais vraiment mort, tu endureras mille tourments au cœur des flammes de l'Inferës, ton âme vieillira, brûlera, souffrira sans que tu puisses mourir. Et seulement quand je l'aurais décidé alors tu pourras mourir. Ne commet pas cette erreur et réponds dans l'instant !
- Je ne sais pa …
La voix de l'aubergiste s'étrangla lorsque la lame du vieillard au cheveux blancs lui perfora la gorge, sentant la vie lui échapper il ferma les yeux. C'est donc ainsi qu'il mourrait ? En se vidant de son sang ? Mais comme pour le contredire le démon le saisit à la gorge en plaquant sa paume contre la blessure. Immédiatement il se sentit aspirer hors de son corps, il voulut hurler mais il ne trouva pas assez d'air dans ses poumons pour appeler à l'aide. L'aubergiste s'effondra avec un sourire aux lèvres dans un murmure étouffé :
- Reaver …
Le vieillard ôta sa main et laissa le corps de l'aubergiste tomber sans vie derrière le comptoir. Il sauta de son tabouret et siffla dans l'air. Instantanément une forme noir se matérialisa devant lui, elle n'avait rien d'humain. Couverte de fourrure de la tête aux pieds, elle avait de petites cornes sur le front et une queue lisse comme un fouet (seule zone de son corps épargné par les poils).
La créature imposante planta un genoux dans le sol et baissa la tête :
- Ga...Garde conseil Siriondil que faites vous ici ? Balbutia t-il.
- Cette affaire n'a que trop traînée entre les mains d'incapable, je prend à mon tour part à la poursuite …
La créature releva la tête et protesta :
- Mais pourquoi abandonner la protection du conseil pour traquer de vulgaires renégats, ce n'est pas digne de vous maître. Il avait prononcer ses derniers mots en s'inclinant et en baissant d'un ton, il ne voulait pas offenser le démon.
- Le conseil me donne plein pouvoir pour cette mission, j'écraserais tout ceux qui me feront obstacle. Ou est Shär ?
- Il devait s'occuper d'une affaire personnelle, répondit la créature en se relevant.
- Une affaire personnelle hein ? J'irais à sa rencontre, ou qu'il soit.
Siriondil dépassa la créature au pelage noir et s'arrêta devant la porte de l'auberge, comme s'il avait oublié quelque chose.
- L'apparence de vieillard ne me plaît pas du tout, signifia le métamorphe.
Il modifia son aura et il se transforma. Le vieillard avait laissé place à un jeune homme au visage parfait, sans la moindre trace de vieillesse, à la peau légèrement mat et aux cheveux d'un blanc de neige. Il tendit la main derrière lui. La créature n'eut pas à demander pourquoi, elle lui remit ses affaires et recula de deux pas. Le garde conseil enfila une longue veste rouge sang, abaissa son capuchon sur son visage et rengaina ses sabres courts dans les fourreaux que son serviteur venait de lui remettre. Siriondil venait de prendre part à la traque, Itrenog ne pourrait plus fuir bien longtemps.
C'est à la nuit tombée que la tempête se déchaina et que l'orchestre élémentaire débuta. Aux premiers instants, le vent souffla et ramena sur Geadrâs des nuages noirs en brassant l'air chaud venu du Sud. De l'autre coté, l'air glacial d'une fin d'hiver sifflait son sérieux et sa malice. Les deux courants se contemplèrent de loin pendant un moment en testant les défenses de l'autre. Sifflet dans les arbres, souffle sur le sol, les deux grands s'affrontaient de toute la puissance de leurs bronches. Soudain la période d'intimidation cessa, il était venu le temps de l'affrontement. Le vent du Sud se jeta à la gorge de son adversaire suivit de prêt par des nuages au regard froid et sombre. L'air glacé répliqua de toute sa puissance et percuta le vent. Déchainement du ciel, l'orage retentit. Puissant comme le grondement de mille cors de Rik Kazad, c'était le point de départ de la frénétique balade de ses deux chefs d'orchestre. A l'aune des flashs d'innombrables éclairs les deux vents se mêlèrent, air chaud et air froid fusionnèrent pour ne faire plus qu'un. Ce spectacle de son et de lumière s'acheva dans un déchirement semblable à un cri de souffrance, inconnu, jamais entendu sur Geadrâs. Le ciel se mit en quelque secondes à pleurer. Pleurant la disparition de l'air glacé, le vent du Sud venait de faire sa place sur le continent et avait bien l'intention de générer le maximum d'orage. Ce soir le temps était au chagrin, demain il serait à l'accomplissement de sa mission …
Un petit village du royaume des humains avait vu l'orage précéder la pluie de quelques heures, les éléments s'étaient affrontés dans un combat titanesque, et se trouvait douché par des litres d'eau. Les gouttes claquaient avec résonance sur le sol de gravier et détrempait la terre. Les toits de chôme de quelques habitations moins généreuse que certaines avaient bien du mal à maintenir leurs hôtes au sec. Le village semblait comme abandonné, perdu au milieu de la forêt et de la folie des éléments, même l'église, témoin de la foi des humains à Sigmar, semblait effrayante. Seuls les lueurs des chandelles à l'intérieur des maisons indiquaient qu'il y avait bien des personnes vivant ici. Dans un coin non loin du lieu de foi du village, on s'agitait au sein d'une petite auberge.
***
A l'intérieur un groupe de gardes riaient aux éclats, tous les quatre avaient laissés leurs armes à porté de main et avaient gardés leurs armures légères. Riant d'une nouvelle boutade d'un de leurs comparses, ils se saisirent de leurs chopines, trinquèrent et descendirent d'une traite la bière chaude qu'on venait de leur servir. Le silence avait regagné la taverne pour laisser le temps aux soldats de terminer leur boissons et de constater s'ils tiendraient encore debout après. L'aubergiste ne comptait plus le nombre de chope qu'il avait du servir à ses seuls clients depuis le début de la semaine. Pourquoi avait il fallut que le temps se dégrade autant ? Il avait horreur de voir son auberge souillée par les autres et ne recevait donc que très rarement de visite. Comment vivait il, s'il n'accueillait personne à sa taverne ? A dire vrai, il survivait plus qu'il ne vivait. Le vieil homme avait les traits étirés par le temps et il se perdait de plus en plus souvent dans les plaisirs de l'alcool. De grosses cernes noir demeuraient figées sous ses yeux couleur de cendre et une barbe de plusieurs mois lui mangeait entièrement le visage. Il se laissait complètement aller et espérait jour après jour que celui qu'il attendait reviendrait le voir.
- Comment a t-il pu me laisser là ? Râla t-il. Il bafouilla de rapides excuses en s'apercevant qu'il venait de parler tout haut et que les gardes s'étaient tournés vers lui. Il leur adressa son plus beau sourire en secouant les mains devant lui pour leur faire signe de pas se préoccuper de lui.
- Un problème grand père ? Toussa un des quatre gardes, une lueur d'amusement dans le regard.
Son visage était barré par une longue mèche de cheveux blonds qu'il laissait volontairement pendouiller devant ses yeux. Il était très fin et ne devait pas encore avoir eu la vingtaine. L'aubergiste grimaça, le jeune âge de ce jeune soldat lui rappelait celui dont il désirait temps recevoir la visite.
- Essai de ne pas nous claquer entre les doigts ça ferait désordre sur notre service, lança un second dont la pense était plus large qu'un tonneau et dont la chaise avait le plus grand mal à supporter son poids. Il éclata d'un rire gras que ses compagnons reprirent en cœur en entamant une chanson paillarde.
Hey !!! Voilà le loup !!
Saute moi au cou
…
Saute moi au cou
…
- Non tout va bien, je me parlais à moi même, murmura le tavernier. Mais les soldats ne lui prêtèrent plus aucune attention et se concentrèrent sur leur chanson en poussant de grand ho et de gros ha en réponse au refrain. Le tavernier plongea sous son bar et vida une fiole au contenu fortement alcoolique pour se calmer avant de réapparaitre.
La nuit fila en un éclair et les gardes ne semblaient pas décider à partir. A présent ils échangeaient des blagues salasses dont certaines filles du village faisaient l'objet. Les deux derniers braillaient qu'ils aimeraient beaucoup aller les chatouiller pendant la nuit. L'aubergiste refoula un haut-le-cœur et entreprit de laver une nouvelle fois sa taverne afin de se changer les idées. A l'extérieur la pluie ne cessait pas et des gouttes parvenaient à s'infiltrer entre les tuiles et trempaient le sol. A chaque coup de serpillère l'aubergiste jurait dans sa barbe.
- Salop... il fut interrompu dans son juron par un bruit de tonnerre.
Il crut tout d'abord que c'était l'orage qui revenait, puis que c'était un des soldats qui avaient enfin fini par s'effondrer après les litres d'alcool qu'ils avaient bu. Lorsqu'il se retourna il vit que la raison était tout autre, un individu à l'apparence menaçante venait de pousser la porte et se tenait à présent fermement campé sur le seuil. Les soldats prirent peur et se levèrent en renversant leur siège, l'alcool leur monta à la tête d'un coup et le plus gros des gardes faillit s'effondrer de tout son poids sur la table. Celui des quatre qui semblait avoir le moins bu parvint à dégainer son épée dans une douce mélodie. Il ordonna :
- Qui êtes vous ? Il n'eut pour seul raison que le flot de pluie qui tombait à l'extérieur.
- Par Sigmar tu vas répondre ou fiche le camp d'là ! Brailla un second soldat qui avait retrouvé suffisamment de lucidité pour placer dix mots l'un après l'autre et de tirer son arme.
L'aubergiste s'était figé, il n'avait pas esquissé le moindre geste depuis « l'entrée » de l'inconnu. Ce dernier le dévisageait étrangement dans ses vêtements rouge obscure. Enfin, il fit un premier pas pour s'avancer au cœur de la taverne, en saisissant quelque chose de sous sa longue cape. Trois des quatre soldats se mirent en garde et affirmèrent leurs prises sur leurs épées, tandis que le plus gros d'entre eux ne parvenait toujours pas à attraper le pommeau de son arme.
Un petit bruit résonna sur le sol de l'auberge, l'individu s'avança dans la lumière en boitillant, s'aidant d'une canne de bois et respirant avec difficulté. Maintenant que l'éclairage de l'auberge l'illuminait il n'était plus du tout effrayant, c'était juste un vieux monsieur bossu et boiteux qui cherchait un abri. Comme pour rassurer l'ensemble des spectateurs le vieillard retira son capuchon rouge sombre et révéla tout aussi rongé par les âges que celui de l'aubergiste. Ce dernier eu immédiatement de la sympathie pour cet homme qui avait réussi à secouer ces fripouilles de gardes.
Il avait de grands yeux où des tâches de gris venaient colorer une pupille bleu d'océan. Son visage imberbe et ridé inspirait la confiance et la sagesse. La sagesse certainement à cause de ses longs cheveux blancs, parfaitement lissés. S'arrêtant à quelque pas des gardes et de l'aubergiste, il tapota sa cape et se massa le dos avec une grimace douloureuse.
Le garde le plus jeune éclata de rire sous l'effet de la surprise, le second quant à lui n'avait pas du tout l'air de rigoler. Il brailla de tout son courage retrouvé après le vieil inconnu.
- Tu n'as pas répondu à ma question l'ancêtre ! T'es qui et qu'est tu viens fiche là ?
Le bossu secoua une dernière fois sa cape et posa ses deux mains sur le dessus de sa canne.
- Pardonnez moi si je vous ai effrayer preux chevalier. Mais je crois avoir lu sur l'enceinte de ce bâtiment qu'il s'agissait d'une auberge. Il marqua une pause en fixant son interlocuteur, inspira puis reprit. Peut être ais je fais erreur et que j'ai cherché le refuge au mauvais endroit.
- Ouais fous nous l'c …
- Officier il ne me semble pas que vous soyez ici chez vous, l'interrompit le vieux tavernier. Cette auberge est encore à moi que je sache et restera ici toute personne qui sera assez brillante pour vous mettre du plomb dans le crâne.
- Comment oses t …
- Retourne cuver ton vin Bill et laisse mes autres clients en paix. Ha et pendant que vous y êtes, poursuivit il en désignant les épées qu'ils tenaient à la main, rangez moi ça !
Les gardes, comprenant qu'il ne servait à rien de discuter avec ce vieillard sénile abandonnèrent la lutte et quittèrent l'auberge en trombe, humilié et ivre comme jamais. Une fois la porte refermée derrière eux, le calme revint enfin. Le tavernier fixa le nouvel arrivant et l'invita à s'approcher.
- Je ne vous remercierais jamais assez pour votre intervention. Sans vous je crois que j'aurais du écouter encore toute la journée de demain les énormités de ses quatre idiots. Veuillez pardonner mon accueil peu chaleureux, c'est que nous n'attendions personne par ce temps là.
- Ne vous excusez pas. Si j'avais eu les poumons de ma jeunesse j'aurais très certainement pu répondre à ces messieurs et vous éviter un surplus dérangeant d'adrénaline, dit-il en lui souriant.
Le tavernier lui rendit son sourire et l'accompagna jusqu'au comptoir de l'auberge, ou il le débarrassa de ses affaires complètement trempées. Sous sa cape sombre, le vieil inconnu portait des vêtements de grande allure. Un tissu rouge souple lui serrait la taille et tenait un pantalon de la même couleur. Son haut était plus modeste, de couleur grise et troué à quelques endroits. Il souffla sous l'effort que lui demanda de s'assoir sur le haut tabouret du comptoir et s'aperçut que le tavernier le dévisageait.
- Ho au vu de votre air surpris devant mes vêtement, vous ne devez pas avoir vu très souvent d'hommes du sud. J'ai raison ?
Le tavernier détourna le regard légèrement honteux de s'être fait surprendre en pleine analyse du style vestimentaire de son nouveau client.
- Oui vous avez raison. De quel coin avez vous dit que vous veniez ? Questionna t-il.
- Je ne l'ai pas dis, rétorqua sèchement son interlocuteur.
L'aubergiste étonné par ce changement d'attitude de la part du vieillard leva un sourcil.
- Vous aurais je offensé ? Demanda t-il en cherchant à se rassurer.
- Pas encore !
Le trouvant de plus en plus étrange, décolla ses coudes du comptoir et s'éloigna un peu de l'homme aux cheveux si blanc.
- Que voulez vous dire ?
- Je cherche quelqu'un et j'aimerais que vous m'aidiez à le trouver. Si vous n'y parvenez pas je serais extrêmement déçu, répondit il d'une voix dont toute hésitation avait disparu.
L'aubergiste recula d'un pas et fronça les sourcils :
- Qui êtes vous ?
- Aucune importance ! Un homme est venu ici il y a peu de temps, il était accompagné d'une femme. Vous devriez voir de qui je parle. La beauté de cette femme ne passe pas inaperçu et lui encore moins. Vêtu de noir, mystérieux, un col noir lui remontant jusqu'au dessus de la bouche …
- Vous devez faire erreur, je ne vois pas de qui vous voulez parlez, l'interrompit le tavernier. Je n'ai pas eu de visi …
- Ne me mens pas imbécile d'humain ! Le coupa le vieillard d'une vois forte et imposante. Je sais qu'ils sont venu ici, les lieux empestent son aura ! J'attends une réponse à ma question, écoute bien : OU SONT T-ILS ?
- Je l'ignore. Cette fois si le vieil homme n'avait pas essayé de dissimuler le fait qu'il avait reçu la visite de gens répondant exactement à la description faite par ce … cette chose.
Le vieillard aux cheveux blancs se laissa tomber du tabouret saisit sa canne à deux mains et ferma les yeux. Un son strident retentit et l'aubergiste crut un moment qu'il avait cassé son appui deux mais en réalité la canne de bois avait disparut, laissant place à deux sabres courts. Dans un geste fluide, rapide et silencieux il pointa une de ses armes sous la gorge du tavernier. Il plongea son regard dans le sien et menaça :
- Je te donne deux minutes pour me donner la réponse que je suis venu chercher.
- Qui que vous soyez tuez moi je ne parlerais pas, fit l'homme avec courage.
Un sourire froid se dessina sur les lèvres du vieillard aux yeux bleu d'océan tachetés de cendre. Il maintenait le regard de l'aubergiste comme s'il avait la capacité de l'attirer à lui. Une lueur s'illumina au fond de la pupille du vieillard, une lueur qui n'était pas là quelques instants plus tôt, et qui était témoin de sa puissance et de sa nature. Une aura malfaisante éclata et souffla sa volonté autour de lui, l'air frémis et la terre trembla en reconnaissant ce pouvoir.
- Pauvre fou ! Je ne suis pas un pitoyable assassin de ton peuple, si je te tue. Tu ne seras jamais vraiment mort, tu endureras mille tourments au cœur des flammes de l'Inferës, ton âme vieillira, brûlera, souffrira sans que tu puisses mourir. Et seulement quand je l'aurais décidé alors tu pourras mourir. Ne commet pas cette erreur et réponds dans l'instant !
- Je ne sais pa …
La voix de l'aubergiste s'étrangla lorsque la lame du vieillard au cheveux blancs lui perfora la gorge, sentant la vie lui échapper il ferma les yeux. C'est donc ainsi qu'il mourrait ? En se vidant de son sang ? Mais comme pour le contredire le démon le saisit à la gorge en plaquant sa paume contre la blessure. Immédiatement il se sentit aspirer hors de son corps, il voulut hurler mais il ne trouva pas assez d'air dans ses poumons pour appeler à l'aide. L'aubergiste s'effondra avec un sourire aux lèvres dans un murmure étouffé :
- Reaver …
Le vieillard ôta sa main et laissa le corps de l'aubergiste tomber sans vie derrière le comptoir. Il sauta de son tabouret et siffla dans l'air. Instantanément une forme noir se matérialisa devant lui, elle n'avait rien d'humain. Couverte de fourrure de la tête aux pieds, elle avait de petites cornes sur le front et une queue lisse comme un fouet (seule zone de son corps épargné par les poils).
La créature imposante planta un genoux dans le sol et baissa la tête :
- Ga...Garde conseil Siriondil que faites vous ici ? Balbutia t-il.
- Cette affaire n'a que trop traînée entre les mains d'incapable, je prend à mon tour part à la poursuite …
La créature releva la tête et protesta :
- Mais pourquoi abandonner la protection du conseil pour traquer de vulgaires renégats, ce n'est pas digne de vous maître. Il avait prononcer ses derniers mots en s'inclinant et en baissant d'un ton, il ne voulait pas offenser le démon.
- Le conseil me donne plein pouvoir pour cette mission, j'écraserais tout ceux qui me feront obstacle. Ou est Shär ?
- Il devait s'occuper d'une affaire personnelle, répondit la créature en se relevant.
- Une affaire personnelle hein ? J'irais à sa rencontre, ou qu'il soit.
Siriondil dépassa la créature au pelage noir et s'arrêta devant la porte de l'auberge, comme s'il avait oublié quelque chose.
- L'apparence de vieillard ne me plaît pas du tout, signifia le métamorphe.
Il modifia son aura et il se transforma. Le vieillard avait laissé place à un jeune homme au visage parfait, sans la moindre trace de vieillesse, à la peau légèrement mat et aux cheveux d'un blanc de neige. Il tendit la main derrière lui. La créature n'eut pas à demander pourquoi, elle lui remit ses affaires et recula de deux pas. Le garde conseil enfila une longue veste rouge sang, abaissa son capuchon sur son visage et rengaina ses sabres courts dans les fourreaux que son serviteur venait de lui remettre. Siriondil venait de prendre part à la traque, Itrenog ne pourrait plus fuir bien longtemps.
- Spoiler:
- 1RP de la semaine : +1PA
Validation en : concentration svp =)
Siriondil- Age : 33
Messages : 103
Date d'inscription : 13/02/2010
Points de Progression : 50
Re: Une vie, un devoir ...
- Spoiler:
- Voilà donc un RP bien gras qui putréfiait sur mon ordi depuis tellement longtemps que je l'avais oublié. Qualitay de m*rde., pour une quantitay de m*rde.
Pour Sirion, je suis désolé mais faute de supprimer ton intervention, je vais me contenter de l'ignorer (c'est cru, n'est-il pas ?). J'ai trop de choses de prévues pour ce RP, et je n'ai ni l'envie ni le besoin de gérer un compagnon RP. Eh oui, j'ai peut-être oublié de le préciser, mais c'est un RP solo.
Iberiel et Athos traversèrent rapidement Moerlanev en direction du centre de la forêt, là où demeuraient la plupart des Anciens et les hauts responsables de la ville. D'énormes tables en bois de séquoias à feuille d'if trônaient un peu partout dans un apparent désordre, mais avec une régularité déconcertante, et de petits tabourets étaient disposés de part et d'autres de ces buffets géants qui se mettaient en place. Des effluves de cuissons se répandaient doucement à travers les branchages et les feuilles, nappant l'atmosphère de senteurs tantôt salées, tantôt sucrées, et les premiers invités commençaient déjà à placer les couverts et les draperies colorées pour égayer le repas qui se profilait. Cette fébrilité n'allait pas pour améliorer l'anxiété qui se nichait dans le ventre d'Iberiel depuis qu'elle avait expliqué à Athos ce qu'elle comptait faire. Alors, elle marchait dans une sorte de rigidité mécanique, laissant ses jambes la porter jusqu'au lieu où elle devait se rendre, pour se concentrer sur ce qu'elle devait dire. Rien ne devait lui échapper, aucun imprévu ne devait venir s'infiltrer dans la machinerie qu'elle allait mettre en place. Elle ne doutait pas que son plan était tout à fait réalisable, il n'était pas si complexe qu'il n'y paraissait, mais elle ne voulait pas tout faire rater à cause de la pression que cela lui infligeait.
Finalement, ils arrivèrent devant un chêne massif où logeait Ilmarë. Des escaliers sortaient du tronc de l'arbre comme autant de racines aériennes, et se déployaient dans toutes les directions au dessus de leurs têtes, tandis qu'au sol, une entrée creusée dans l'écorce semblait attendre qu'on ose franchir son pas.
-Je maintiens que c'est une mauvaise idée, dit Athos en réarrangeant le plis de sa robe, Vous risquez de vous fourrer dans un sacré pétrin.
-Une autre proposition, peut-être ? Autre que rester passif en attendant que les choses s'arrangent ?
Le vieil homme bougonna quelque chose mais ne répondit pas. C'était un coup bas, ils le savaient tous les deux, mais c'était nécessaire pour le faire réagir.
-Bon, eh bien dans ce cas, finit-il par grogner, Je vais vous laisser vous occuper de ça. Je n'ai pas grand chose à faire, alors autant que je parte voir maître Othaën. N'oubliez pas d'en parler à Dozla, il voudra surement se préparer aussi.
Iberil hocha distraitement de la tête et entra d'un pas vif. Elle ne voulait pas laisser sa détermination se tarir. A l'intérieur, elle monta une série de marches formant un escalier en colimaçon, traversa un large couloir tapissé de mousse et entra dans la pièce située la plus au fond du bâtiment. Assise derrière un bureau en tilleul brun, Ilmarë levait juste ses yeux noirs en la voyant arriver. La pièce exigüe et sombre lui donnait un air bien plus renfermé qu'il ne l'était de coutume.
-Iberiel ? Puis-je savoir ce qui t'amène ici ?
-Il fut un temps ou vous n'auriez pas même osé me regarder dans les yeux, Ilmarë, rétorqua Iberiel en relevant le menton, J'espère que vous n'avez pas oublié qui je suis.
Le ton venait d'être donné d'une seule réplique, et indéniablement, la conversation prenait une tournure plus pressante. Iberiel voulait frapper fort et vite, pour se donner l'assurance qui lui était nécessaire, et elle était prête à faire fi des conventions pour cela. Ilmarë se joignit les mains et encaissa en silence. Un demi-sourire se dessina lentement sur son visage tandis qu'elle répondait dans sa langue natale.
-Soit. Qu'est-ce qu'un humble membre du Conseil peut faire pour vous, Ethël'niss ?
-Vous le savez tout aussi bien que moi, aussi sauterai-je directement à la conclusion. Pourquoi m'avoir fait une telle proposition ?
Une brève réflexion précéda la réponse d'Ilmarë, de quoi lui laisser organiser clairement ses idées.
-Les Ethël'Rill sont désordonnées, et sans but, expliqua-t-elle en pesant soigneusement ses mots, et le Conseil a vu en votre retour l'assurance d'un avenir meilleur pour ce groupe si cher à nos yeux. Lorsque j'ai envoyé Firin vous porter le message, j'avais espéré que le temps avait apaisé votre amertume et que vous auriez fini par voir au delà des considérations personnelles qu'impliquait... notre désaccord.
-Un désaccord ? Appelez donc le täfnen par son nom. Ou bien craignez-vous que tous ne soit au courant de vos exactions ?
-Nous avons fait ce qui s'imposait à nous pour le bien des nôtres. Vous ne pouvez nous…
Iberiel n'eut qu'à froncer des sourcils pour obtenir le silence. Elle n'avait que trop de fois souffert cet argument et l'entendre à nouveau risquait de la faire enrager plus qu'autre chose.
-Cette conversation ne nous mènera à rien, semble-t-il, lâcha-t-elle en secouant la tête, Vous ne faites que résumer ce que vous et le Conseil m'avez dit il y a de cela mille ans. J'ai fini par m'y résigner, mais nous savons toutes les deux que l'altruisme n'a pas été la seule motivation à vos actes.
Ilmarë cala au fond de son siège sans répondre et caressa distraitement la natte sombre qui lui tombait sur l'épaule. Iberiel éprouva alors un fort sentiment d'aise en voyant la réaction que provoquait les piques qu'elle lançait sans vergogne à son interlocutrice. C'était quelque chose qu'elle avait presque fini par oublier avec les humains pour seule compagnie.
-Dans ce cas, pourrais-je savoir le motif de votre refus ?, demanda Ilmarë avec toute la politesse qu'elle pouvait offrir, Il est clair que vous tenez les besoins des Elfes en haute estime - plus que nous, semblerait-il - et pourtant, vous vous refusez à reprendre la place que nous vous offrons de bon cœur et qui serait une preuve suffisante de votre bonne foi.
Iberiel ne put réprimer un rictus satisfait.
-Il est une chose qui vous échappe, Ilmarë. Vous avez beau m'avoir séparé de mon Ethël, elle demeure intacte, et j'en reste donc la légitime propriétaire. Le millénaire qui me sépare de la dernière fois où je l'ai tenue dans mes mains n'y changera rien, pas plus que cette apparence humaine que j'ai été contrainte de revêtir. Pourquoi ai-je refusé me demandez-vous ? Parce que vous me demandez de reprendre ma place. Or, il est évident qu'un membre des Ethël'Rill le demeure jusqu'à sa mort, où jusqu'à ce que son Ethël soit brisée. Ni l'un ni l'autre n'étant arrivé, comment pourrais-je donc récupérer ce que je n'ai jamais perdu ?
Ilmarë s'apprêta à objecter mais Iberiel leva la main pour couper court à toute intervention.
-Ce que je pense de tout ceci, enchaina-t-elle, implacablement, c'est que vous avez tenté de donner ma place à quelqu'un, quelqu'un de politiquement plus influençable que je ne l'ai été en mon temps. Ce que vous n'aviez pas prévu, c'est le refus des Ethël'Rill. N'ai-je pas raison ?
La question était purement rhétorique, mais la flamme qui dansait dans les yeux d'Ilmarë valait à elle seule qu'on daigne la poser.
-L'heure de mon retour approchant, il vous fallait réagir. En prenant l'initiative de cette vulgaire... proposition, vous pensiez que je la considérais comme étant une fleur, que vous faisiez le premier geste de paix envers la seule fautive de cette affaire... Que je vous étais redevable en somme.
Iberiel se passa une main dans les cheveux pour éloigner une mèche humide qui dansait devant son nez, et conclut sur un ton condescendant.
-Ne croyez pas que ce temps passé loin des miens m'ait fait oublier les joutes politiques qui se jouent entre les membres du Conseil. Je reste d'Ultwë, que vous le vouliez ou non.
Le silence s'installa finalement entre les deux femmes. L'une dardant un regard d'acier sur tout ce qui passait dans son champ de vision, l'autre reprenant son souffle après avoir exprimé ce qu'elle avait sur le cœur. A l'extérieur, la gaieté baignant les nombreux préparatifs du banquet était en totale contradiction avec l'ambiance électrique instaurée en quelques instants seulement, et se passait dans plan qu'on aurait juré appartenant à un autre monde. C'était à croire que les seules personnes existantes étaient celles présentes dans la pièce sombre. Ce fut Ilmarë qui brisa la glace en s'avançant d'avantage sur son bureau de bois, balayant les faux-semblants qui avaient peint son visage jusqu'alors.
-Votre langue est aussi affutée que le nuage d'arrogance qui vous entoure est épais, Iberiel. Vous croyez donc que tout n'est que conspiration ? Le monde ne gravite pas autour des Ethël'Rill, et encore moins autour d'un chef fantôme qui revient des limbes pour assoir une autorité perdue depuis des lustres.
Iberiel tiqua, mais elle avait désormais ce qu'elle était venue chercher. Au lieu de relever, elle tourna volontairement le dos à Ilmarë, un grave manque de respect à un membre influent du Conseil, et se contenta de répondre.
-Apportez mon Ethël à la cérémonie. C'est tout ce que j'attends de vous désormais.
Et elle sortit en faisant claquer la robe légère qui lui ceignait le bassin. Une grosse goutte de sueur glissa le long de son dos quand elle avala les marches de l'escalier à une vitesse folle, mais le bouillonnement qui faisait rage en elle l'éloigna bien vite de son esprit. Il était grand temps qu'elle redevienne ce qu'elle était pour éviter ce genre d'emportement. Elle venait de rappeler qu'elle n'était pas prête à se laisser marcher sur les pieds, ce qui était le but principal de la manœuvre, mais avec un trop plein de sentiments qui avait manqué plusieurs fois de lui faire perdre toute constance.
Dehors, il faisait lourd. Trop peut-être. La fièvre de la soirée s'annonçant y était pour beaucoup, mais ce temps n'était pas naturel. Surtout pas à l'intérieur d'une ville comme Moerlanev dont la température était quasiment constante toute l'année. Iberiel localisa rapidement Dozla dans une bâtisse réservée aux invités non-Elfes, et s'y rendit d'un pas souple. Quand elle arriva dans la pièce, le colosse blond était simplement couvert d'une serviette autour de la taille et essuyait son épaisse barbe avec une force démesurée, ce qui ne semblait pas le faire souffrir outre mesure. L'humain, notant la présence de quelqu'un d'autre dans la pièce, se retourna, les yeux ronds, et ne sut que bégayer en cherchant désespérément de quoi se couvrir.
-M-Madame... ? Je... Je... Je vais me changer ! Que c'est embarrassant... Où sont mes affaires ?
-Ne t'inquiète pas, Dozla, j'en ai déjà vu d'autre. Mais habille-toi si tu veux, je t'attends dehors.
Ce qu'elle fit. Pour se recentrer, elle fixa un point à l'horizon et le laissa absorber l'ensemble des émotions qui lui martelaient la tête. Dozla la rejoignit à peine quelques secondes plus tard, peinant à resserrer une tunique rouge brodée sur son torse massif. Ses bras trapus étaient à peine couverts jusqu'à l'avant bras et on pouvait voir sans peine que les fibres du tissu étaient à la limite de leur résistance.
-Ils sont un peu petits, ces vêtements, commenta-t-il en parvenant à accrocher l'un des boutons.
Un craquement retentissant suivi l'instant d'après, indiquant que la partie dorsale venait de se déchirer sous l'effort.
-Oups...
Voyant qu'Iberiel ne réagissait pas, il se mura dans un silence gêné et se débattit comme un Houp pour ôter ce qui n'était désormais plus qu'un simple bout de tissu inutile. Après force coups de bras balayant l'espace vide autour de lui, la tunique s'ouvrit complètement, le laissant enfin respirer avec plus d'aise. Puis, il resta immobile et attendit patiemment, les bras croisés dans son dos. Le soleil qui amorçait une descente paresseuse vers l'horizon diaprait les feuilles des immenses arbres de la cité elfique et des mosaïques de lumière se dessinaient lentement sur le sol moussu que foulaient des Elfes de tous âges.
-Tout va bien, Madame ?, ne put s'empêcher de demander Dozla après un temps.
-C'est au plus fort de la tempête que l'on remarque l'arbre le plus robuste, énonça Iberiel d'une voix lointaine.
-Pardon ?
-Les Souvenirs des Galh'däs. Rien de plus qu'une simple allégorie, je le crains.
-Je ne sais pas si je suis censé y comprendre quelque chose…
-Non rien, souffla l'elfe avec un faible sourire, Je crois seulement que je commence à comprendre ce que ressentent les Anciens qui partent pour le Grand Sommeil. Et pour tes vêtements, ne t'en fais pas, je t'en ferai apporter à ta taille. Il doit bien en rester de ta dernière visite.
Penaud, le colosse ne sut que masser les épaules par réflexe.
-Si vous voulez me parler de quoi que ce soit, je suis là, Madame.
-Sentirais-je de l'inquiétude dans ta voix ?
-Pour être tout à fait franc, je n'ai eu de cesse d'éprouver du remord depuis que je vous ai perdue sur la route du Ponan.
-Ce n'était pas ta faute.
-Je ne sais pas trop, Madame, hésita Dozla, baissant les yeux, Ma famille est au service de la vôtre depuis que mon ancêtre fut capable de mettre un pied devant l'autre, et toujours nous avons juré de d'être le bouclier se dressant face à vos ennemis. Pourtant, j'ai misérablement failli en vous abandonnant dans cette embuscade, et il a fallu attendre près de trois mois pour que je ne vous retrouve. C'est... indigne de ma fonction.
Il soupira à pierre fendre sans cesser de regarder le bout de ses bottes. Iberiel lui posa une main sur l'épaule pour le rasséréner.
-Ta fonction ne se résume pas uniquement en ma protection, Dozla. Les Boendr sont avant tout des amis et des conseillers, non de simples serviteurs. Nous savions tous les deux que, tôt ou tard, nous serions de nouveau ensemble. Tu vois de quoi je veux parler, n'est-ce pas ?
-Bien sûr.
-Dans ce cas, ne t'appesantis pas sur tes erreurs passées. Si c'est le pardon que tu recherches, alors trouve-le dans le futur, en restant à mes côtés.
Iberiel laissa peser ses paroles un instant avant de poursuivre.
-Et puis, j'ai aussi ma part de responsabilité. J'aurais dû me manifester plus tôt pour que tu puisses me rejoindre.
Dozla tenta de dissimuler un revers de manche maladroit et se redressa, l'œil brillant.
-Ce que vous dites tient beaucoup pour moi. Vraiment, je vous remercie du fond du cœur, Madame.
Il sourit franchement et apprécia l'absence de réponse d'Iberiel. Cela leur rappelait à tous les deux un temps moins chargé en troubles, et plus propice à de simples moments de calme comme celui-ci.
Plus tard, Iberiel informa Dozla de sa décision de quitter Moerlanev après la cérémonie. Ce dernier ne cacha pas sa surprise, mais ne protesta en rien, réaffirmant avec force sa volonté de la suivre quelles soient ses décisions.
Tous deux marchaient d'un pas tranquille, sans destination précise, en échangeant des banalités, quand ils aperçurent Athos, seul, qui faisait les cents pas entre deux arbres aux troncs massifs et aux branches parées de fils d'argent et de soies délicates. Le vieil homme semblait particulièrement furibond contre une raison inconnue, à ce point qu'il ne remarqua pas les deux arrivants se placer devant lui.
-Un problème, Lord Athos ?, demanda Dozla prudemment.
-Un problème ?, répéta l'ermite en relevant ses yeux blancs, Un problème ? J'ai déjà honte d'avoir plus de douleurs aux articulations que d'articulations dans le corps, de me lever sept fois par nuit pour aller me soulager dans les buissons, et voilà qu'on me demande ce qui ne va pas ? Le monde est fou, mon petit, voilà le problème.
Le dos vouté, il pesta dans sa barbe, et finit par s'arrêter de tourner en rond histoire de lâcher une bordée d'insultes à qui voulait bien les recevoir.
-Vous pourriez peut-être reprendre depuis le début, suggéra Iberiel.
-Oui. Oui, c'est ce que je vais faire. Le début. En voilà une idée brillante. Suis-je bête.
Il soupira et sortit sa pipe des plis de sa robe, mais Iberiel s'en saisit rapidement avant qu'il ait eu le temps d'en faire quoique ce soit. Elle avait déjà du mal à percer à travers les paroles du vieil homme pour qu'en plus une substance douteuse ne vienne lui compliquer la tâche. Athos se pinça l'arrête du nez pour rassembler ses idées et se lança sans conviction.
-Vous vous souvenez de cette lettre qui devait prévenir les Elfes d'une attaque sur le convoi ?
A l'énonciation de ce fait, Dozla se renfrogna mais garda toutefois le silence.
-Celle que le démon avait récupérée, répondit Iberiel pour l'empêcher de ressasser ses erreurs, Je m'en souviens.
-Mmh, oui. Je crois me souvenir de vous avoir dit que c'était moi l'auteur de cette lettre, n'est-ce pas ? Pour prévenir, tout ça. Eh bien, ce n'est pas tout à fait vrai, en fait.
-Vous pouvez développer ?
-Saperlotte. Il faut tout faire soi-même de nos jours.
Athos s'agenouilla et avec son doigt, plaça trois croix alignées. Il pointa la première d'entre-elle, à ses pieds.
-Ici, c'est Munduce. Le symbole du milieu, mon petit bosquet, désormais détruit, mais passons. Le dernier, tout au bout, n'est autre que Moerlanev. Maintenant, réfléchissons deux minutes, voulez-vous ? L'attaque a eu lieu entre Munduce et mon bosquet, nous sommes d'accord ?
Iberiel approuva d'un bref hochement de tête.
-Si j'avais voulu prévenir les Elfes, j'aurais naturellement envoyé un messager en direction de leur territoire. Jusque là, rien d'incohérent. Les choses le deviennent par la suite. Comment expliquer la présence dudit message entre Munduce et mon bosquet, si je devais l'envoyer dans la direction opposée ?
Dozla se gratta pensivement la joue et risqua une proposition.
-Peut-être que les démons se sont déplacés à partir du territoire des Elfes vers Munduce. Ce serait...
-Bougre d'âne, morigéna Athos, de mauvaise humeur, Avec leur capacité à apparaître où bon leur semble, il est vrai que faire un petit détour par chez les Elfes pour le plaisir est l'explication qui saute aux yeux. Pourquoi n'y ai-je pas pensé plus tôt ?
Le géant baissa les yeux en tentant de trouver une autre idée à soumettre. Iberiel, elle, voyait nettement où voulait en venir le vieil homme, mais tenta de poursuivre sur la piste de Dozla.
-Pourtant, des éclaireurs Elfes ont aperçu des démons proche de Carcosa. Il n'est pas impossible que ce fussent les mêmes qui m'aient pris en chasse.
-Tout comme il n'est pas impossible qu'il s'agisse d'un groupe totalement différent qui est apparu après l'attaque, répliqua Athos, Et puis bon sang de bois, si j'avais voulu prévenir quelqu'un, je n'aurais pas envoyé un pigeon, et encore moins aux Elfes. Prenez comme acquis que je n'ai pas envoyé cette lettre, bourrez-vous le crâne avec ce fait si vous n'arrivez pas à comprendre l'évidence, mais par les Rois Perdus, cessez de lancer des idées saugrenues à tout va !
-Bon, très bien, soupira Iberiel qui commençait à son tour à perdre patience, Vous m'avez donc menti.
Elle ne s'offusquait que rarement du manque flagrant de respect d'Athos aux moments les moins propices, elle avait fini par s'y faire, mais l'heure était mal choisie pour le laisser s'emporter pour un rien. Le vieil homme dû s'en rendre compte, car il se calma un temps soit peu et répondit d'une voix plus posée.
-Oui... On peut dire ça. Mais n'y voyez pas une envie de vous faire du tort. Je pensais simplement que vous aviez suffisamment de choses vous préoccupant pour vous encombrer d'avantage l'esprit.
-Et c'est cela qui vous rend aussi nerveux ?
-Non, bien sûr que non. Si je suis de mauvais poil, c'est parce qu'en venant ici, je pensais trouver la réponse à la question qui devrait à tous nous sauter au visage. Qui a écrit cette maudite lettre ? Je pensais que les éclaireurs Elfes de maître Othaën étaient les plus à même de me répondre avec les troupes qu'ils ont disséminées un peu partout, mais il semble que je me sois fourvoyé.
Athos se frotta le visage comme s'il espérait se débarrasser de sa colère de ce simple geste et se mit debout.
-Qui est notre mystérieux bienfaiteur ? Je l'ignore. Pourquoi a-t-il agit ainsi ? Encore un mystère. Et ça ne me plaît pas.
Iberiel s'emmêla une mèche de cheveux pour répondre.
-Quoi qu'ait fait cette personne, ça n'a servi à rien. Et même si le message était arrivé à destination, je doute que des troupes ne soient arrivées à temps pour nous secourir.
-Voilà pourquoi je devrais toujours rester à vos côtés, bougonna Dozla.
-Je sais. Mais nous ne...
Un son clair et puissant l'interrompit dans sa phrase, tandis que des volées d'oiseaux fuyaient à tire d'ailes cette perturbation sonore d'une intensité non négligeable. Presque aussitôt, des échos se firent entendre un peu partout, et des murmures s'élevèrent de la forêt. L'agitation contenue durant les préparatifs sembla éclater à différents endroits et gagner progressivement l'ensemble de la ville, et des clairons plus doux résonnèrent pour accompagner des ballets d'Elfes qui sortaient de nulle part pour se joindre aux festivités.
-Les Cors Blancs, fit Iberiel, Nous devrions aller nous préparer.
Elle se tourna vers Dozla qui observait une table se remplir de mets délicats un peu en contrebas.
-Tu trouveras une tenue chez maître Valaën. C'est lui qui s'occupe du tissage de nos tuniques.
Puis, elle posa son regard vert sur Athos.
-Je ne vous dirais pas quoi faire, vous êtes assez grand pour vous occuper seul. Tachez simplement d'être présentable lorsque tout sera prêt.
-Je ne devrais pas vous accompagner ?, s'enquit Dozla.
-Non. Je dois me préparer seule. Ne t'inquiète pas, nous nous reverrons bientôt.
Elle tendit sa pipe au vieil homme qui s'empressa de la fourrer dans sa robe, avant de partir vers une direction que seule elle devait connaître.
-Vous savez de quoi elle parlait ?, demanda le géant en observant Iberiel s'éloigner progressivement.
-Uniquement les grandes lignes. Iberiel a le chic pour compliquer les choses au possible.
-Cela m'inquiète. Ce départ précipité n'augure rien de bon.
-Tout dépend pour qui, souligna Athos, d'un air moqueur, Allons, du cran que diable ! La soirée qui s'annonce promet de nous faire passer une nuit que nous n'oublierons pas de si tôt, croyez-moi sur parole.
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Re: Une vie, un devoir ...
-Mais ... vous êtes nu !
Ainsi réagit Dozla en voyant Athos, assis nonchalamment à une table, un verre à la main, en train de discuter avec un groupe d'Elfes qui ne semblaient pas choqués outre mesure de la non-tenue qu'avait adoptée leur interlocuteur. Le colosse s'était absenté l'espace d'une dizaine de minutes, le temps d'enfiler une tenue correcte pour la soirée chez l'un des tisseurs de la ville, et était revenu vêtu d'une chemise vert feuille aux coutures blanches et d'un large pantalon de soie d'une couleur moins prononcée. Il avait même refusé des invitations à festoyer pour surveiller le vieil homme, toujours enclin aux excentricités les plus surprenantes. Et force était de reconnaître que son jugement était le bon.
-Et alors ?, répliqua Athos d'un rire gras, La moitié des Elfes ici a décidé de se passer des vêtements pour la soirée ! Regardez autour de vous !
Dozla se retint bien de suivre ce conseil et répéta, éberlué.
-Enfin... Nu, tout de même...
-Bah ! Au diable les codes de bonnes conduites. Je suis venu pour m'amuser et je compte bien le faire. Posez donc votre immense carcasse à côté de la mienne et servez-vous en boisson au lieu de me materner comme cela !
Le géant soupira mais obtempéra. Qu'avait-il à perdre à s'amuser un peu ?
-En tout cas, dit-il en s'asseyant, il semblerait que vous soyez de meilleure humeur que tout à l'heure.
-Laissons les sujets désagréables sur la paillasse, voulez-vous ? Profitons, demain sera fait d'un autre bois.
Athos se rapprocha alors et murmura sur le ton de la confidence.
-Et puis, tout à fait entre nous... Vous avez vu cette Elfe, assise en face de nous... Elle me fait de l'œil. Je crois que j'ai ma chance pour ce soir.
-Eh bien ! L'alcool vous aurait déjà fait perdre vos capacités à réfléchir ? Il n'y a aucune chance pour qu'une Elfe minaude devant vous.
-Et pourquoi je vous prie ? Parce que je suis un vieil homme rachitique ?
-Athos, souffla Dozla, Vous devez pourtant savoir que les Elfes ne font pas l'amour.
-Quoi ? Nom d'un corniaud ! Mais qui vous a mis une telle imbécillité dans la tête ? Vous croyez qu'ils possèdent les mêmes appendices que nous par pure décoration ?
Dozla se passa une main sur le visage.
-En tout cas, si elle ne vous a pas entendu, vous pouvez vous estimer heureux.
-Bah ! Je suis sûr qu'il n'y a pas la moitié d'entre eux qui comprend la langue commune. Donnez-moi le reste de la soirée, et je vous prouve que vous avez tort !
-Tenu !
Le vieil homme se leva avec peine et écarta les bras, beuglant à qui voulait l'entendre dans un elfique approximatif, ses parties exposées à la vue de tous.
-Écoutez ! Ce soir, je retrouve ma jeunesse ! Bois Moerlanev, chante et brille, car demain, les nuages seront bas, et le vent tournoyant !
Il accompagna ses dernières paroles d'un déhanché circulaire exagéré et Dozla de se servir une bonne rasade de la première boisson qui lui tombait sous la main, pour tenter d'effacer ce que ses yeux venaient de voir à l'instant. Les Elfes autour de lui rirent à gorge déployée et complétèrent le tableau par des chansons et des danses aux gestes amplifiés par des relents d'alcool qui s'insinuaient dans leur sang noble.
La soirée se déroula ainsi, voguant d'une euphorie générale à la limite de l'hystérie, en passant par des moments plus calmes voire mélancoliques. Dozla ne conserva que de rares souvenirs du temps qui précéda la cérémonie. Entourés d'une nappe obscure et de flash lumineux sans cohérences, les moments de conscience qu'il tentait vainement de maintenir n'étaient pas les plus reluisants qu'il ait pu garder en mémoire. Il dut convenir, à contrecœur, qu'il ne tenait pas aussi bien l'alcool qu'il avait escompté. Pourtant, il se doutait que ce n'était pas tant la quantité d'alcool descendue qu'une étrange sensation dans l'air ambiant qui sapait sa capacité à réfléchir convenablement. C'était étrange, mais pas pour le moins désagréable.
Son appétit, lui, n'avait pas décru. Il goûtait à tout, sans distinction d'aucune sorte et se surpris même à avaler une généreuse tranche d'une viande épicée dont il ignorait la provenance. A un moment, il ne sut dire quand exactement, Athos et lui étaient en train de discuter avec une femme arborant un bandeau qui cachait son œil gauche. Le vieil homme s'était approché d'elle et lui avait murmuré à l'oreille.
-Vous savez que avec qui vous avez un air de ressemblance ? Avec le Duce. LA Duce. Si, si. Au moins pour un des deux yeux, en tout cas. Puis-je savoir votre nom, très chère ?
La femme avait accueillie la remarque d'un rire clair et avait poliment décliné son identité.
-Vous pouvez m'appeler Iris.
-Très enchantané, Iris. Moi, je suis Athos. Enfin, c'est comme ça que je me fais appeler. Mais ne le dites pas surtout, faudrait pas que ça se sache. Qu'est-ce qui vous amène par ici ?
Le reste de la discussion n'était qu'une suite de mots sans lien dans l'esprit de Dozla et il ne se souvint que d'avoir vu Athos emmener par la main une femme dans un recoin sombre, sans savoir de qui il s'agissait.
Plus tard, tous deux se retrouvèrent isolés sur une énorme souche taillée et le vieil homme lui tendait une fiole à l'aspect peu engageant en soutenant qu'il s'agissait probablement de la meilleure chose qu'il ait inventé ces dernières années.
-Bon, très bien, avait soufflé Dozla, Je vais la siffler votre piquette. Qu'est-ce que ça fait au juste ?
Athos se passa d'explication et plissa le front comme prit d'une intense réflexion. Sa barbe se mit à trembloter, à remuer fébrilement, puis à bouger comme si elle avait sa conscience propre, imitant grossièrement un homme en train de danser sur un quelconque rythme imaginaire. Dozla dut admettre qu'il s'agissait la de la chose la plus hilarante qu'il ait vu, sans trop savoir si c'était pour la tête d'enfant ravi d'Athos ou le spectacle incongru qui se déroulait devant ses yeux et après avoir essuyé un fou rire de plusieurs minutes, il avala d'une traite la décoction.
-Attention, le prévint le vieillard, Des poils qui ne sont pas sur votre visage pourraient avoir envie de se joindre à la fête, si vous voyez ce que je veux dire.
-Et je suis censé la contrôler comment ?
-Comme si c'était votre bras. Vous verrez, c'est très simple.
Le géant commençait à ressentir un étrange picotement au menton quand il s'exclama.
-Je suis sûr que si vous pourriez faire fortune avec ça !
-Eh ! Si j'arrive à la vendre aux nains, ça pourrait peut-être devenir un sport, qui sait. Imaginez ! Je roulerai sur l'or avant même d'avoir dit «barbe» !
La suite, Dozla ne sut jamais avec précision comment elle se déroula. Selon certains, les deux hommes auraient commencé une bataille furieuse entre leurs deux barbes et ces-dernières auraient fini tellement emmêlées que la présence d'un tisseur de sort en état de prononcer une incantation convenable aurait été requise. Toujours est-il qu'en milieu de soirée, ils étaient totalement libres de leurs mouvements et on les conduisit au milieu d'une plaine dégagée, occupée uniquement par une estrade sur laquelle de petites arches de bois étaient disposées en cercle. L'ambiance ici était plus calme, apaisante et Dozla récupéra progressivement ses facultés mentales, ce qui le rassura presque autant de savoir que finalement, il n'avait pas tant bu que cela. Il tenta d'assembler ses souvenirs de façon cohérente, mais sa logique se refusa à lui, glissant entre ses doigts comme par trop huilée. Athos lui, était toujours aussi atteint par on ne sait quoi, probablement à cause des substances qu'il avait fumé plus tôt, et s'amusait de voir l'attitude des personnes l'entourant. Un tel comportement aurait été d'ordinaire mal vu, mais il semblait que ce soir-là, tous furent d'accord pour laisser une certaine latitude au vieil homme.
-Bigre, vous êtes d'un sérieux tout d'un coup, lâcha-t-il entre deux crises de rire, Ce doit être a cause des trucs magiques qui ne s'agitent plus autour de nous. Il fait si... froid ici.
-Un vrai langage de magicien, Lord Athos.
Le vieillard lui tira la langue mais se tint tranquille. A ce moment, Ilmarë apparut au centre de l'estrade, vêtue d'une magnifique robe à plumes irisées et d'une tiare semblable à un fil d'argent ondulant sur un lac tranquille. Derrière elle, il y avait six Elfes, portant des habits de la même facture, à ceci prêt que les deux hommes possédaient une doublure de lin au niveau du torse. Encore un peu plus en retrait, Iberiel, le visage fermé, avec un châle si fin qu'on pouvait presque voir à travers. En la voyant, Dozla ne put s'empêcher de frissonner avec une certaine appréhension.
Une fois que tous furent installés, assis ou perchés sur les branches des arbres avoisinants, Ilmarë prit la parole dans sa langue natale.
-Je ne saurais mieux compléter cette cérémonie qui a lieu que par une annonce qui a fait frémir jusqu'aux fondations de notre Arbre au centre de la forêt. Car aujourd'hui, mes frères et sœurs, Iberiel d'Ultwë ...
-Eh, psst. Vous voulez voir un truc qui en jette ?
Dozla se tourna vers Athos qui tournait et retournait sa pipe dans sa main, comme un enfant sur le point de faire une révélation à même de changer le monde. Il sourit, ravi et saisit sa pipe du bout des doigts. Lentement, il écarta ses deux mains et le bois qu'elles tenaient accompagna le mouvement, s'épaississant au fur et à mesure du processus. Finalement, le vieil homme se retrouva avec un bâton noueux, au bout duquel trônait une pierre azurée brillant comme un petit feu follet.
-La classe, hein ?, fanfaronna-t-il, Pratique, et in-sou-pçon-nable.
-Ça l'est tout de suite moins si vous le dites à qui veut bien l'entendre, non ?
Dozla porta son attention sur Ilmarë, mais sentait que sa concentration n'était pas au meilleur de sa forme, d'autant que le discours d'Ilmarë traînait en longueur, avec de lourdes phrases pompeuses et des non-dits à en perdre la tête. Alors il fixa l'étrange saphir sur le bâton d'Athos dans l'espoir d'éloigner l'ennui qui pointait le bout de son nez dans son esprit.
-Je me demandais... D'où vient cette pierre exactement ?
-Vous ne me croviez pas si je vous le dirais.
-Si vous ne voulez pas en parler, je ne vous forcerai pas.
-Bon, très bien, si vous insistez, je vais tout vous dire. En fait, ce n'est pas vraiment une pierre. C'est plutôt...
Il se rapprocha, tout sourire et lâcha.
-Un testicule de Dragon.
Dozla eut du mal à retenir un rire et se contenta de l'étouffer dans son épaisse barbe blonde.
-Un testicule ? De Dragon ? Vous vous fichez de moi, c'est ça ?
-Je suis sûr que ce n'est pas très dur de m'imaginer, avec quelques siècles de moins, en train de partir à la chasse aux Dragons, les cheveux au vent et tout. Vous en rêviez, avouez-le, mais vous attendiez juste d'en avoir la confirmation.
-J'en rêvais, oui... Ah ! Elle est bien bonne.
-Mais ce n'est pas une blague, enfin ! Vous pensez vraiment que c'est mon genre de plaisanter sur ce genre de choses ?... Oh ! Écoutez ! Là, ça va devenir intéressant.
Poum! Un bruit sec suivit l'instant d'après. Iberiel s'avança dans l'espace formé par les Elfes de l'estrade. Poum! Nouvelle frappe, plus forte. Quelqu'un entonna une chanson. Poum! Poum! Deux claquements consécutifs et la voix s'amplifia. Iberiel commença à remuer les bras, d'abord fébrilement, puis avec plus de vigueur, s'accordant parfaitement avec le rythme imposé par des instruments que nul ne pouvait voir. Son châle se détacha, révélant un immense tatouage représentant des lierres courant sur sa peau nue tels des serpents et ses mouvements se firent encore plus rapides, plus secs, mais non moins harmonieux. De petits nuages de poussières s'élevèrent à chaque pas qu'elle faisait et une goutte de sueur s'échappa de se front, tandis que les Elfes levaient tous leurs bras. Athos suivit le mouvement sans comprendre et un mot fut prononcé. Un mot dont Dozla ne connaissait pas la signification, mais dont il comprit l'importance quand il observa la scène. D'abord sur les jambes, l'encre verdâtre se décolla, laissant de profondes marques qu'un enchantement sembla ressouder l'instant d'après. Puis les hanches, le bassin, les mains et les épaules suivirent, alors qu'Iberiel dansait toujours sans s'arrêter. Les fils d'argents qui l'entouraient trouvaient leur origine sur ses seins, baignant l'air de leurs remous éthérés et quand l'un deux se détacha, ce fut dans une onde de lumière éblouissante. Le second fut plus tardif à se décrocher, comme si une force résistait et le maintenait fermement accroché au corps de la femme qui commençait à s'épuiser. Poum! Ce fut l'ultime claquement. Tous se turent et un torrent argenté se déversa sur l'estrade, sourd aux protestations qui s'élevaient dans l'assemblée. La blancheur demeura, progressivement estompée vers une silhouette qui se découpait lentement. Ilmarë s'approcha, et saisit ce qui s'apparentait à un bras et Iberiel reparut. Dozla en eut le souffle coupé.
-Alors elle... C'est elle..., souffla-t-il, sans y croire.
Il n'y avait plus d'humaine, mais bel et bien une Elfe qui se tenait au centre de l'estrade. Une Elfe aux cheveux d'une nuit sans lune et des yeux d'un bleu azur éclatant de force. Le tatouage avait disparu et les blessures qu'il avait laissé, estompées, pour ne laisser qu'un corps ferme et élancé. Quelques uns, emportés par un moment d'ivresse, applaudirent, mais ils étaient minoritaires. Athos se leva alors et pointa du doigt le ciel. Une boule de feu jaillit du bout de sa main, explosa en une gerbe de globes d'argent et tous applaudirent à tout rompre. On cria, gesticula, tant et si bien que personne ne remarqua la tension qui s'était établi autour d'Iberiel. Les Elfes l'entourant demeurèrent impassible, mais un s'avança, une lance à la main. La hampe parfaitement droite, l'arme d'un blanc nacré possédait une pointe meurtrière en tout point semblable à la lame d'une épée. Les entrelacs sculptés dans le bois brillèrent lorsque la légitime propriétaire s'en saisit, non sans un certain contentement sur le visage, mais rien ne sembla calmer la foule qui semblait avoir oublié la raison de leur présence en ce lieu. On lui tendit aussi un maigre châle beige qu'elle enfila fébrilement.
Iberiel leva une main pour demander le silence. Peu la remarquèrent au début, mais la vague d'emphase se tarit bientôt, pour ne laisser place qu'à une contemplation béate. Il y avait des sourires, des poses ouvertes, des accolades, chose extrêmement rare pour ce peuple aussi peu enclin aux débordements sentimentaux.
-Je n'en ai peut-être pas l'air ainsi présentée devant-vous, scanda-t-elle pour que tous l'entendirent, mais mon cœur est aussi rempli de joie que peut l'être le vôtre. Aujourd'hui sonne la fin de ce temps passé loin de vous tous et c'est avec une immense fierté que je brandis de nouveau mon Ethël.
Elle ponctua son discours d'un large mouvement de la lance, provoquant un tonnerre d'applaudissements.
De nouveau, elle demanda le silence en scrutant l'assemblée, résolue, mais émue.
-Avant de vous laisser retourner à vos festivités toutefois, je me dois d'aborder un sujet sensible. Avec vous, oui, mais surtout avec toi – elle pointa une tâche indistincte perdue dans un arbre – Moerlanev.
Athos, pouffant comme un gosse ravi, tapa l'épaule de Dozla.
-Là, ça va vraiment être intéressant.
-Si l'on évoque un retour, continua Iberiel, l'on évoque aussi un départ. Et un départ appelle nécessairement une raison. Ma question est donc la suivante, Moerlanev... Quelle raison le Conseil t'a-t-il donnée pour justifier mon absence pendant mille ans ?
Une chape de plomb recouvrit les Elfes en l'espace d'une seconde. L'incompréhension avait remplacé l'euphorie, mais personne ne répondit.
Iberiel se tourna alors vers le Conseil et en désigna les membres un par un.
-Mais peut-être devrais-je demander aux concernés ? Eärion et Cemië des Isanwiëil, Narel de l'Arbre Thanaën, Silya de Ciryanatiel, l'amblyope Numial Inmacë, Fanyëen des Trois-Pousses... Et enfin, toi...
L'Elfe désigna la dernière d'entre eux, tendue comme un arc.
-...Ilmarë de Moerlanev. Je vous ai fait l'honneur d'énoncer à voix haute vos noms et vos origines, tuíras padâm at rill Demeth ët Erä, alors peut-être me ferez-vous l'honneur de m'expliquer quelle éclatante vérité vous avez soumise à Moerlanev. Sans détours, sans ambivalences, avancez et parlez.
Ilmarë caressa sa longue natte tressée avant de s'exécuter. Elle n'avait plus devant elle une humaine qu'elle pouvait toiser de haut, dénigrant ce qu'elle était et brisant sa fierté de ses bottes et Iberiel le savait. Elle cacha le plaisir de la voir soumise par un masque de fermeté propre à sa fonction et la garante de Moerlanev parla.
-Je suis aussi heureuse qu'Iberiel pour son retour, frères et sœurs. Jamais l'Arbre n'avait sonné si fort à nos oreilles, jamais la magie n'avait brillé...
Un coup sec de lance contre le bois la fit taire.
-Est-ce donc trop vous demander que de parler franchement ? Moerlanev exige une réponse, et moi-aussi. Ou bien dois-je prendre les devants et prononcer ce mot qui vous fait frémir ?
Ilmarë releva le menton.
-Le temps passé chez les humains vous aurait donc fait oublier l'art de la discussion, Ultwë ed Iberiel ? On ne sert pas un poison acide sans l'enrober d'une nappe de sucre.
Iberiel devait le reconnaître, il y avait toujours cette fierté de paon qui se dégageait de celle qui présidait au Conseil et qui croyait détenir tout pouvoir en ces lieux. Et elle était résolue à y mettre un terme.
-Un poison, dîtes-vous ? C'est le mot le plus approprié, oui. Un secret inutile qui gangrène et pourrit ce qu'il touche, à commencer par l'intégrité des représentants de cette ville. Allons, n'ayons pas peur, et prononçons tous ensemble ce mot si... acide. Le tafnën.
De grands yeux, des bouches pincées, et surtout, un silence glacial accueillirent ce simple mot. Un silence brisé par un éclat de rire grasseyant qui provenait d'un barbu à peine conscience de la gravité de la situation.
-Bravo !, s'exclama-t-il, Bravo ! Allons, allons ! Appréciez la vérité qui vous tombe tout cru dans le bec. Iberiel d'Ultwë a été soumise à un tafnën ! Oui, oui !
Dozla pressa Athos à la retenue et réussit tant bien que mal à le maintenir en place. Comme si cette intervention en avait éveillé la plupart, des murmures se levèrent, amplifiés par ce mutisme ambiant et se muèrent bientôt en brouhaha pressant et en vacarme opprimant. Certains traitèrent Iberiel de menteuse, refusant ce qu'ils avaient entendu et d'autres gardèrent un calme glacial, évaluant une situation du haut de leurs longues années d'existence. Dozla serra du poing, prêt à bondir pour défendre sa protégée au moindre geste hostile et s'approcha sensiblement du gradin.
Iberiel exhorta les siens au calme pour poursuivre.
-Je comprends ce que vous ressentez. J'ai moi-même été prise dans l'étau du doute, mais la vérité est là. Les membres des Ethël'Rill ici présents, et qui restent circonspects, avaient pressentis ce que je viens d'annoncer à tous. Ils savaient que la seule explication au départ soudain, et pourtant si discret, de leur chef ne pouvait être qu'un acte aussi puissant que celui-ci. Il ne pouvait que s'agir d'une décision extérieure, dictée par la si grande sagesse des vénérables membres du Conseil.
Iberiel leva les bras comme si ce qu'elle allait dire la navrait.
-Il y a mille ans, ici même, sous le couvert d'une nuit propice aux complots, c'est tenu le rituel du tafnën. Tout ceci sans ta présence, Moerlanev, car tu étais encore aveugle et sourde à la vérité à cette époque.
Ilmarë fouetta l'air de sa natte et posa un pied en avant, suivis de l'ire de certains dans l'assemblée.
-Comment osez-vous !
-Qu'y a-t-il, Ilmarë ?, s'exclama vivement Iberiel, les yeux flambants d'excitation, Ne laisses-tu donc pas les tiens s'exprimer ? Et toi, Moerlanev ? Veux-tu savoir la vérité ? Veux-tu connaître mon histoire ? Savoir ce qui m'a valu mille ans passés loin de toi ? La voici, mon histoire, celle que tout à chacun devrait connaître.
Ainsi réagit Dozla en voyant Athos, assis nonchalamment à une table, un verre à la main, en train de discuter avec un groupe d'Elfes qui ne semblaient pas choqués outre mesure de la non-tenue qu'avait adoptée leur interlocuteur. Le colosse s'était absenté l'espace d'une dizaine de minutes, le temps d'enfiler une tenue correcte pour la soirée chez l'un des tisseurs de la ville, et était revenu vêtu d'une chemise vert feuille aux coutures blanches et d'un large pantalon de soie d'une couleur moins prononcée. Il avait même refusé des invitations à festoyer pour surveiller le vieil homme, toujours enclin aux excentricités les plus surprenantes. Et force était de reconnaître que son jugement était le bon.
-Et alors ?, répliqua Athos d'un rire gras, La moitié des Elfes ici a décidé de se passer des vêtements pour la soirée ! Regardez autour de vous !
Dozla se retint bien de suivre ce conseil et répéta, éberlué.
-Enfin... Nu, tout de même...
-Bah ! Au diable les codes de bonnes conduites. Je suis venu pour m'amuser et je compte bien le faire. Posez donc votre immense carcasse à côté de la mienne et servez-vous en boisson au lieu de me materner comme cela !
Le géant soupira mais obtempéra. Qu'avait-il à perdre à s'amuser un peu ?
-En tout cas, dit-il en s'asseyant, il semblerait que vous soyez de meilleure humeur que tout à l'heure.
-Laissons les sujets désagréables sur la paillasse, voulez-vous ? Profitons, demain sera fait d'un autre bois.
Athos se rapprocha alors et murmura sur le ton de la confidence.
-Et puis, tout à fait entre nous... Vous avez vu cette Elfe, assise en face de nous... Elle me fait de l'œil. Je crois que j'ai ma chance pour ce soir.
-Eh bien ! L'alcool vous aurait déjà fait perdre vos capacités à réfléchir ? Il n'y a aucune chance pour qu'une Elfe minaude devant vous.
-Et pourquoi je vous prie ? Parce que je suis un vieil homme rachitique ?
-Athos, souffla Dozla, Vous devez pourtant savoir que les Elfes ne font pas l'amour.
-Quoi ? Nom d'un corniaud ! Mais qui vous a mis une telle imbécillité dans la tête ? Vous croyez qu'ils possèdent les mêmes appendices que nous par pure décoration ?
Dozla se passa une main sur le visage.
-En tout cas, si elle ne vous a pas entendu, vous pouvez vous estimer heureux.
-Bah ! Je suis sûr qu'il n'y a pas la moitié d'entre eux qui comprend la langue commune. Donnez-moi le reste de la soirée, et je vous prouve que vous avez tort !
-Tenu !
Le vieil homme se leva avec peine et écarta les bras, beuglant à qui voulait l'entendre dans un elfique approximatif, ses parties exposées à la vue de tous.
-Écoutez ! Ce soir, je retrouve ma jeunesse ! Bois Moerlanev, chante et brille, car demain, les nuages seront bas, et le vent tournoyant !
Il accompagna ses dernières paroles d'un déhanché circulaire exagéré et Dozla de se servir une bonne rasade de la première boisson qui lui tombait sous la main, pour tenter d'effacer ce que ses yeux venaient de voir à l'instant. Les Elfes autour de lui rirent à gorge déployée et complétèrent le tableau par des chansons et des danses aux gestes amplifiés par des relents d'alcool qui s'insinuaient dans leur sang noble.
La soirée se déroula ainsi, voguant d'une euphorie générale à la limite de l'hystérie, en passant par des moments plus calmes voire mélancoliques. Dozla ne conserva que de rares souvenirs du temps qui précéda la cérémonie. Entourés d'une nappe obscure et de flash lumineux sans cohérences, les moments de conscience qu'il tentait vainement de maintenir n'étaient pas les plus reluisants qu'il ait pu garder en mémoire. Il dut convenir, à contrecœur, qu'il ne tenait pas aussi bien l'alcool qu'il avait escompté. Pourtant, il se doutait que ce n'était pas tant la quantité d'alcool descendue qu'une étrange sensation dans l'air ambiant qui sapait sa capacité à réfléchir convenablement. C'était étrange, mais pas pour le moins désagréable.
Son appétit, lui, n'avait pas décru. Il goûtait à tout, sans distinction d'aucune sorte et se surpris même à avaler une généreuse tranche d'une viande épicée dont il ignorait la provenance. A un moment, il ne sut dire quand exactement, Athos et lui étaient en train de discuter avec une femme arborant un bandeau qui cachait son œil gauche. Le vieil homme s'était approché d'elle et lui avait murmuré à l'oreille.
-Vous savez que avec qui vous avez un air de ressemblance ? Avec le Duce. LA Duce. Si, si. Au moins pour un des deux yeux, en tout cas. Puis-je savoir votre nom, très chère ?
La femme avait accueillie la remarque d'un rire clair et avait poliment décliné son identité.
-Vous pouvez m'appeler Iris.
-Très enchantané, Iris. Moi, je suis Athos. Enfin, c'est comme ça que je me fais appeler. Mais ne le dites pas surtout, faudrait pas que ça se sache. Qu'est-ce qui vous amène par ici ?
Le reste de la discussion n'était qu'une suite de mots sans lien dans l'esprit de Dozla et il ne se souvint que d'avoir vu Athos emmener par la main une femme dans un recoin sombre, sans savoir de qui il s'agissait.
Plus tard, tous deux se retrouvèrent isolés sur une énorme souche taillée et le vieil homme lui tendait une fiole à l'aspect peu engageant en soutenant qu'il s'agissait probablement de la meilleure chose qu'il ait inventé ces dernières années.
-Bon, très bien, avait soufflé Dozla, Je vais la siffler votre piquette. Qu'est-ce que ça fait au juste ?
Athos se passa d'explication et plissa le front comme prit d'une intense réflexion. Sa barbe se mit à trembloter, à remuer fébrilement, puis à bouger comme si elle avait sa conscience propre, imitant grossièrement un homme en train de danser sur un quelconque rythme imaginaire. Dozla dut admettre qu'il s'agissait la de la chose la plus hilarante qu'il ait vu, sans trop savoir si c'était pour la tête d'enfant ravi d'Athos ou le spectacle incongru qui se déroulait devant ses yeux et après avoir essuyé un fou rire de plusieurs minutes, il avala d'une traite la décoction.
-Attention, le prévint le vieillard, Des poils qui ne sont pas sur votre visage pourraient avoir envie de se joindre à la fête, si vous voyez ce que je veux dire.
-Et je suis censé la contrôler comment ?
-Comme si c'était votre bras. Vous verrez, c'est très simple.
Le géant commençait à ressentir un étrange picotement au menton quand il s'exclama.
-Je suis sûr que si vous pourriez faire fortune avec ça !
-Eh ! Si j'arrive à la vendre aux nains, ça pourrait peut-être devenir un sport, qui sait. Imaginez ! Je roulerai sur l'or avant même d'avoir dit «barbe» !
La suite, Dozla ne sut jamais avec précision comment elle se déroula. Selon certains, les deux hommes auraient commencé une bataille furieuse entre leurs deux barbes et ces-dernières auraient fini tellement emmêlées que la présence d'un tisseur de sort en état de prononcer une incantation convenable aurait été requise. Toujours est-il qu'en milieu de soirée, ils étaient totalement libres de leurs mouvements et on les conduisit au milieu d'une plaine dégagée, occupée uniquement par une estrade sur laquelle de petites arches de bois étaient disposées en cercle. L'ambiance ici était plus calme, apaisante et Dozla récupéra progressivement ses facultés mentales, ce qui le rassura presque autant de savoir que finalement, il n'avait pas tant bu que cela. Il tenta d'assembler ses souvenirs de façon cohérente, mais sa logique se refusa à lui, glissant entre ses doigts comme par trop huilée. Athos lui, était toujours aussi atteint par on ne sait quoi, probablement à cause des substances qu'il avait fumé plus tôt, et s'amusait de voir l'attitude des personnes l'entourant. Un tel comportement aurait été d'ordinaire mal vu, mais il semblait que ce soir-là, tous furent d'accord pour laisser une certaine latitude au vieil homme.
-Bigre, vous êtes d'un sérieux tout d'un coup, lâcha-t-il entre deux crises de rire, Ce doit être a cause des trucs magiques qui ne s'agitent plus autour de nous. Il fait si... froid ici.
-Un vrai langage de magicien, Lord Athos.
Le vieillard lui tira la langue mais se tint tranquille. A ce moment, Ilmarë apparut au centre de l'estrade, vêtue d'une magnifique robe à plumes irisées et d'une tiare semblable à un fil d'argent ondulant sur un lac tranquille. Derrière elle, il y avait six Elfes, portant des habits de la même facture, à ceci prêt que les deux hommes possédaient une doublure de lin au niveau du torse. Encore un peu plus en retrait, Iberiel, le visage fermé, avec un châle si fin qu'on pouvait presque voir à travers. En la voyant, Dozla ne put s'empêcher de frissonner avec une certaine appréhension.
Une fois que tous furent installés, assis ou perchés sur les branches des arbres avoisinants, Ilmarë prit la parole dans sa langue natale.
-Je ne saurais mieux compléter cette cérémonie qui a lieu que par une annonce qui a fait frémir jusqu'aux fondations de notre Arbre au centre de la forêt. Car aujourd'hui, mes frères et sœurs, Iberiel d'Ultwë ...
-Eh, psst. Vous voulez voir un truc qui en jette ?
Dozla se tourna vers Athos qui tournait et retournait sa pipe dans sa main, comme un enfant sur le point de faire une révélation à même de changer le monde. Il sourit, ravi et saisit sa pipe du bout des doigts. Lentement, il écarta ses deux mains et le bois qu'elles tenaient accompagna le mouvement, s'épaississant au fur et à mesure du processus. Finalement, le vieil homme se retrouva avec un bâton noueux, au bout duquel trônait une pierre azurée brillant comme un petit feu follet.
-La classe, hein ?, fanfaronna-t-il, Pratique, et in-sou-pçon-nable.
-Ça l'est tout de suite moins si vous le dites à qui veut bien l'entendre, non ?
Dozla porta son attention sur Ilmarë, mais sentait que sa concentration n'était pas au meilleur de sa forme, d'autant que le discours d'Ilmarë traînait en longueur, avec de lourdes phrases pompeuses et des non-dits à en perdre la tête. Alors il fixa l'étrange saphir sur le bâton d'Athos dans l'espoir d'éloigner l'ennui qui pointait le bout de son nez dans son esprit.
-Je me demandais... D'où vient cette pierre exactement ?
-Vous ne me croviez pas si je vous le dirais.
-Si vous ne voulez pas en parler, je ne vous forcerai pas.
-Bon, très bien, si vous insistez, je vais tout vous dire. En fait, ce n'est pas vraiment une pierre. C'est plutôt...
Il se rapprocha, tout sourire et lâcha.
-Un testicule de Dragon.
Dozla eut du mal à retenir un rire et se contenta de l'étouffer dans son épaisse barbe blonde.
-Un testicule ? De Dragon ? Vous vous fichez de moi, c'est ça ?
-Je suis sûr que ce n'est pas très dur de m'imaginer, avec quelques siècles de moins, en train de partir à la chasse aux Dragons, les cheveux au vent et tout. Vous en rêviez, avouez-le, mais vous attendiez juste d'en avoir la confirmation.
-J'en rêvais, oui... Ah ! Elle est bien bonne.
-Mais ce n'est pas une blague, enfin ! Vous pensez vraiment que c'est mon genre de plaisanter sur ce genre de choses ?... Oh ! Écoutez ! Là, ça va devenir intéressant.
Poum! Un bruit sec suivit l'instant d'après. Iberiel s'avança dans l'espace formé par les Elfes de l'estrade. Poum! Nouvelle frappe, plus forte. Quelqu'un entonna une chanson. Poum! Poum! Deux claquements consécutifs et la voix s'amplifia. Iberiel commença à remuer les bras, d'abord fébrilement, puis avec plus de vigueur, s'accordant parfaitement avec le rythme imposé par des instruments que nul ne pouvait voir. Son châle se détacha, révélant un immense tatouage représentant des lierres courant sur sa peau nue tels des serpents et ses mouvements se firent encore plus rapides, plus secs, mais non moins harmonieux. De petits nuages de poussières s'élevèrent à chaque pas qu'elle faisait et une goutte de sueur s'échappa de se front, tandis que les Elfes levaient tous leurs bras. Athos suivit le mouvement sans comprendre et un mot fut prononcé. Un mot dont Dozla ne connaissait pas la signification, mais dont il comprit l'importance quand il observa la scène. D'abord sur les jambes, l'encre verdâtre se décolla, laissant de profondes marques qu'un enchantement sembla ressouder l'instant d'après. Puis les hanches, le bassin, les mains et les épaules suivirent, alors qu'Iberiel dansait toujours sans s'arrêter. Les fils d'argents qui l'entouraient trouvaient leur origine sur ses seins, baignant l'air de leurs remous éthérés et quand l'un deux se détacha, ce fut dans une onde de lumière éblouissante. Le second fut plus tardif à se décrocher, comme si une force résistait et le maintenait fermement accroché au corps de la femme qui commençait à s'épuiser. Poum! Ce fut l'ultime claquement. Tous se turent et un torrent argenté se déversa sur l'estrade, sourd aux protestations qui s'élevaient dans l'assemblée. La blancheur demeura, progressivement estompée vers une silhouette qui se découpait lentement. Ilmarë s'approcha, et saisit ce qui s'apparentait à un bras et Iberiel reparut. Dozla en eut le souffle coupé.
-Alors elle... C'est elle..., souffla-t-il, sans y croire.
Il n'y avait plus d'humaine, mais bel et bien une Elfe qui se tenait au centre de l'estrade. Une Elfe aux cheveux d'une nuit sans lune et des yeux d'un bleu azur éclatant de force. Le tatouage avait disparu et les blessures qu'il avait laissé, estompées, pour ne laisser qu'un corps ferme et élancé. Quelques uns, emportés par un moment d'ivresse, applaudirent, mais ils étaient minoritaires. Athos se leva alors et pointa du doigt le ciel. Une boule de feu jaillit du bout de sa main, explosa en une gerbe de globes d'argent et tous applaudirent à tout rompre. On cria, gesticula, tant et si bien que personne ne remarqua la tension qui s'était établi autour d'Iberiel. Les Elfes l'entourant demeurèrent impassible, mais un s'avança, une lance à la main. La hampe parfaitement droite, l'arme d'un blanc nacré possédait une pointe meurtrière en tout point semblable à la lame d'une épée. Les entrelacs sculptés dans le bois brillèrent lorsque la légitime propriétaire s'en saisit, non sans un certain contentement sur le visage, mais rien ne sembla calmer la foule qui semblait avoir oublié la raison de leur présence en ce lieu. On lui tendit aussi un maigre châle beige qu'elle enfila fébrilement.
Iberiel leva une main pour demander le silence. Peu la remarquèrent au début, mais la vague d'emphase se tarit bientôt, pour ne laisser place qu'à une contemplation béate. Il y avait des sourires, des poses ouvertes, des accolades, chose extrêmement rare pour ce peuple aussi peu enclin aux débordements sentimentaux.
-Je n'en ai peut-être pas l'air ainsi présentée devant-vous, scanda-t-elle pour que tous l'entendirent, mais mon cœur est aussi rempli de joie que peut l'être le vôtre. Aujourd'hui sonne la fin de ce temps passé loin de vous tous et c'est avec une immense fierté que je brandis de nouveau mon Ethël.
Elle ponctua son discours d'un large mouvement de la lance, provoquant un tonnerre d'applaudissements.
De nouveau, elle demanda le silence en scrutant l'assemblée, résolue, mais émue.
-Avant de vous laisser retourner à vos festivités toutefois, je me dois d'aborder un sujet sensible. Avec vous, oui, mais surtout avec toi – elle pointa une tâche indistincte perdue dans un arbre – Moerlanev.
Athos, pouffant comme un gosse ravi, tapa l'épaule de Dozla.
-Là, ça va vraiment être intéressant.
-Si l'on évoque un retour, continua Iberiel, l'on évoque aussi un départ. Et un départ appelle nécessairement une raison. Ma question est donc la suivante, Moerlanev... Quelle raison le Conseil t'a-t-il donnée pour justifier mon absence pendant mille ans ?
Une chape de plomb recouvrit les Elfes en l'espace d'une seconde. L'incompréhension avait remplacé l'euphorie, mais personne ne répondit.
Iberiel se tourna alors vers le Conseil et en désigna les membres un par un.
-Mais peut-être devrais-je demander aux concernés ? Eärion et Cemië des Isanwiëil, Narel de l'Arbre Thanaën, Silya de Ciryanatiel, l'amblyope Numial Inmacë, Fanyëen des Trois-Pousses... Et enfin, toi...
L'Elfe désigna la dernière d'entre eux, tendue comme un arc.
-...Ilmarë de Moerlanev. Je vous ai fait l'honneur d'énoncer à voix haute vos noms et vos origines, tuíras padâm at rill Demeth ët Erä, alors peut-être me ferez-vous l'honneur de m'expliquer quelle éclatante vérité vous avez soumise à Moerlanev. Sans détours, sans ambivalences, avancez et parlez.
Ilmarë caressa sa longue natte tressée avant de s'exécuter. Elle n'avait plus devant elle une humaine qu'elle pouvait toiser de haut, dénigrant ce qu'elle était et brisant sa fierté de ses bottes et Iberiel le savait. Elle cacha le plaisir de la voir soumise par un masque de fermeté propre à sa fonction et la garante de Moerlanev parla.
-Je suis aussi heureuse qu'Iberiel pour son retour, frères et sœurs. Jamais l'Arbre n'avait sonné si fort à nos oreilles, jamais la magie n'avait brillé...
Un coup sec de lance contre le bois la fit taire.
-Est-ce donc trop vous demander que de parler franchement ? Moerlanev exige une réponse, et moi-aussi. Ou bien dois-je prendre les devants et prononcer ce mot qui vous fait frémir ?
Ilmarë releva le menton.
-Le temps passé chez les humains vous aurait donc fait oublier l'art de la discussion, Ultwë ed Iberiel ? On ne sert pas un poison acide sans l'enrober d'une nappe de sucre.
Iberiel devait le reconnaître, il y avait toujours cette fierté de paon qui se dégageait de celle qui présidait au Conseil et qui croyait détenir tout pouvoir en ces lieux. Et elle était résolue à y mettre un terme.
-Un poison, dîtes-vous ? C'est le mot le plus approprié, oui. Un secret inutile qui gangrène et pourrit ce qu'il touche, à commencer par l'intégrité des représentants de cette ville. Allons, n'ayons pas peur, et prononçons tous ensemble ce mot si... acide. Le tafnën.
De grands yeux, des bouches pincées, et surtout, un silence glacial accueillirent ce simple mot. Un silence brisé par un éclat de rire grasseyant qui provenait d'un barbu à peine conscience de la gravité de la situation.
-Bravo !, s'exclama-t-il, Bravo ! Allons, allons ! Appréciez la vérité qui vous tombe tout cru dans le bec. Iberiel d'Ultwë a été soumise à un tafnën ! Oui, oui !
Dozla pressa Athos à la retenue et réussit tant bien que mal à le maintenir en place. Comme si cette intervention en avait éveillé la plupart, des murmures se levèrent, amplifiés par ce mutisme ambiant et se muèrent bientôt en brouhaha pressant et en vacarme opprimant. Certains traitèrent Iberiel de menteuse, refusant ce qu'ils avaient entendu et d'autres gardèrent un calme glacial, évaluant une situation du haut de leurs longues années d'existence. Dozla serra du poing, prêt à bondir pour défendre sa protégée au moindre geste hostile et s'approcha sensiblement du gradin.
Iberiel exhorta les siens au calme pour poursuivre.
-Je comprends ce que vous ressentez. J'ai moi-même été prise dans l'étau du doute, mais la vérité est là. Les membres des Ethël'Rill ici présents, et qui restent circonspects, avaient pressentis ce que je viens d'annoncer à tous. Ils savaient que la seule explication au départ soudain, et pourtant si discret, de leur chef ne pouvait être qu'un acte aussi puissant que celui-ci. Il ne pouvait que s'agir d'une décision extérieure, dictée par la si grande sagesse des vénérables membres du Conseil.
Iberiel leva les bras comme si ce qu'elle allait dire la navrait.
-Il y a mille ans, ici même, sous le couvert d'une nuit propice aux complots, c'est tenu le rituel du tafnën. Tout ceci sans ta présence, Moerlanev, car tu étais encore aveugle et sourde à la vérité à cette époque.
Ilmarë fouetta l'air de sa natte et posa un pied en avant, suivis de l'ire de certains dans l'assemblée.
-Comment osez-vous !
-Qu'y a-t-il, Ilmarë ?, s'exclama vivement Iberiel, les yeux flambants d'excitation, Ne laisses-tu donc pas les tiens s'exprimer ? Et toi, Moerlanev ? Veux-tu savoir la vérité ? Veux-tu connaître mon histoire ? Savoir ce qui m'a valu mille ans passés loin de toi ? La voici, mon histoire, celle que tout à chacun devrait connaître.
- Spoiler:
- J+7 après incident.
Cela fait une semaine désormais. Il n'y eut nul détonation, aucune lumière aveuglante, rien qu'un mot. Court et précis, qui ne fut finalement que l'officialisation d'une situation déjà par trop avancée pour être réversible. L'intégrité structurelle de l'organisme tient bon pour l'instant, mais je pressens déjà l'arrivée du fossoyeur. Tant que je maintiens à flot mon post, il m'épargnera, mais jusqu'à quand pourrais-je tenir ? Je dispose d'une réserve confortable de post, mais ma récente blessure me force à tirer dessus sans la faire grandir.
Quelques ombres fugaces sont encore là, laissant le fantôme de leur présence en contemplant ce cadavre déjà rongé par les corbeaux. Je laisse moi-même une trace, mais je ne m'attarde pas. Trop dangereux. J'espère tenir jusqu'à la prochaine graine.
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